Signaler les ressources électroniques

Une priorité du projet d’établissement

DOI : 10.35562/arabesques.1362

p. 12-13

Plan

Texte

Dès les premières années du développement des offres de périodiques en ligne – et particulièrement des big deals – s’est posée la question du signalement de ces corpus nouveaux, mouvants, aux contours flous et introduisant dans le monde des bibliothèques une notion jusqu’alors inconnue : la gestion d’un flux que l’on subit plutôt que l’on maîtrise. Le constat que les outils traditionnels de catalogage ne satisfaisaient pas les besoins inhérents à cette gestion ne tarda pas.

Le contexte actuel

La nature ayant horreur du vide, plusieurs fournisseurs développèrent, au début des années 2000, des solutions de gestion de ces flux, associant pour certains à une base de connaissance mise à jour de façon centralisée un ensemble de services (résolveur de lien, ERMS...) dont l’intérêt a été démontré. Petit à petit, certaines bibliothèques se sont équipées de telles solutions qui sont venues tantôt se juxtaposer aux outils classiques de gestion de stock que sont les SIGB, tantôt s’intégrer à ces derniers suivant des processus d’automatisation plus ou moins poussés. Très rares ont été les établissements qui ont fait le pari de signaler leurs ressources en ligne dans le SUDOC, quand bien même les services pour aider les établissements dans ce processus, comme l’exemplarisation automatique, existent et sont gratuits. Toutefois, la gratuité d’un service n’engendre pas son succès s’il n’est pas complètement adapté aux besoins ou si sa valeur ajoutée n’est pas évidente.

Dans le premier cas, on peut s’interroger sur les différences fortes d’ergonomie entre les outils proposés par l’ABES et ceux proposés par les fournisseurs de bases de connaissance. Par ailleurs, la fraîcheur de l’information proposée par les produits du commerce (changement d’URL, d’état de collection, d’éditeur, sortie d’un bouquet...) fait cruellement défaut au SUDOC. Enfin, les spécificités et les contraintes du SUDOC (exigence d’un format MARC répondant à des spécifications précises, utilisation d’outils propres à OCLC PICA nécessitant des compétences pointues et peu répandues) font que les dialogues avec les éditeurs, qui sont loin de tous disposer de compétences bibliothéconomiques, peuvent traîner en longueur lors de l’intégration d’un nouveau corpus.

La valeur ajoutée apportée par le catalogage dans le SUDOC n’est quant à elle pas perçue de la même manière par les membres du réseau. Là où certains voient l’intérêt de la mutualisation du signalement, d’autres posent la question de la pertinence du PEB de documentation électronique et des conditions drastiques fi par les éditeurs et, partant, du bien-fondé d’une cartographie nationale de la documentation en ligne.

Cela signifie qu’il n’y a pas de place ni de besoin pour un service de signalement voire de catalogage des ressources en ligne au niveau national ? Probablement pas. La question du signalement des ressources électroniques a connu un regain d’intérêt en raison du développement récent de l’offre d’ebooks. L’acquisition de produits en licence nationale aura – a déjà – les mêmes conséquences. De façon sans doute moins centrale se pose aussi la question de l’inexactitude des bases de connaissance quant à la description des produits français et des offres des grands éditeurs scientifiques destinées spécifiquement à la France.

Les orientations de l’ABES

Pour répondre à ces besoins, soit directement – via la fourniture de notices aux bibliothèques –, soit indirectement – en participant à l’amélioration de la qualité des bases de connaissance commerciales –, l’ABES va proposer un nouveau service dans le cadre du prochain contrat quadriennal, prenant place au sein d’un dispositif actuellement connu sous le nom de « hub de métadonnées de la recherche ». Sa fi peut se résumer ainsi : « redistribuer dans n’importe quel format des métadonnées enrichies importées dans n’importe quel format ».

L’objectif pour l’ABES est de pouvoir contourner le goulot d’étranglement actuel qui entraîne une faible fréquence d’ajout de nouveaux corpus. Les métadonnées des ressources numériques existent déjà mais posent deux problèmes : l’hétérogénéité des formats (MARC, MODS, ONIX...) et le cloisonnement (absence de liens) entre chaque source.

Ce nouveau service doit donc être en mesure d’effectuer de nombreuses conversions, ce qui implique un gros travail, en amont, pour créer ou adapter des tables de correspondances d’un format à l’autre. Parallèlement, il ne peut se contenter de n’être qu’une moulinette de conversion de formats. L’ABES doit apporter une plus-value aux métadonnées en termes de structuration, richesse et interconnexion de l’information, sans quoi le projet perdrait une grande part de sa pertinence. Cet aspect s’inscrit dans le prolongement des travaux entrepris dans le cadre d’IdRef ou de SudocAd.

Quelles implications pour les établissements ?

Pour les corpus que l’on connaît et que l’on maîtrise (archives de périodiques, ebooks en achat pérenne, acquis ou non en licence nationale), le bénéfice est clair. Une interface à destination des professionnels pourrait permettre à une bibliothèque de récupérer un lot de métadonnées d’éléments qu’elle choisirait (un package, un lot obtenu à partir d’une recherche…). Une fois son choix fait, les métadonnées d’accès (URL originale ou via un reverse-proxy) seront générées à la volée. Libre ensuite à l’établissement de choisir d’importer dans son système local les notices reçues ou de passer par le SUDOC. Parallèlement, un tel système permettrait à l’ABES de communiquer aux fournisseurs de bases de connaissance des informations plus précises sur les produits négociés en licence nationale, par exemple en scindant une archive de périodiques pluridisciplinaire en collections thématiques, si tant est que les métadonnées disponibles le permettent.

Robinson’s Difference Engine 1

Robinson’s Difference Engine 1

Phot. Michael Baxter. Source : www.meccano.us

Pour autant, ce service ne viendra pas comme par magie régler la question de la mise à jour du contenu des bouquets de produits sur abonnements (retrait d’un titre, changement de la couverture...). Ces informations d’ordre commercial n’apparaissent pas dans les métadonnées fournies par les éditeurs, que cela soit du MARC ou tout autre format propriétaire. Les mises à jour devront encore beaucoup s’appuyer sur des interventions humaines. Pouvons-nous, voulons-nous mutualiser du temps – en créant et mettant à jour une base de connaissance – ou de l’argent – en souscrivant à une base de connaissance commerciale au niveau national –, tout en restant extrêmement vigilants sur les questions de droits liés aux métadonnées obtenues ? Y a- t-il des solutions intermédiaires ? Ne faut-il pas simplement travailler à améliorer les outils existants, à savoir les bases de connaissance commerciales, et faciliter l’accès à ces outils pour les établissements qui n’en disposeraient pas par le biais, par exemple, d’un groupement de commandes ?

Les priorités et les choix retenus seront établis dans les mois à venir.

Ce qu’en dit le projet d’établissement

5.5.1 Ressources électroniques
[…]
Les besoins
Dans l’idéal, tout étudiant ou enseignant-chercheur doit pouvoir accéder à un document, physique ou numérique, ou a minima à son signalement pour trouver le lieu où le consulter.
Vus sous cet angle, les besoins se situent à deux niveaux :
Niveau local
Les établissements ont besoin de signaler au niveau de l’article – seul niveau pertinent pour l’utilisateur final – les ressources électroniques dont ils ont acquis la licence. Certains ont choisi d’acquérir un outil de « découverte », hébergé par un prestataire, qui leur permet de recenser et donner accès à toutes leurs ressources, qu’elles soient physiquement présentes dans la bibliothèque ou dont ils ont acquis la licence. Ils s’appuient sur une base de connaissance pour mettre à jour la liste de ressources sous licence concernées (bouquets).
Niveau national
Le signalement national conserve une pertinence pour disposer d’une cartographie de l’offre documentaire française :
quelles sont les ressources disponibles sur le territoire (signalées au niveau du titre et de l’article), quelles en sont les localisations et les droits ouverts ?
Le signalement au niveau national de toutes les ressources quel que soit leur support portera à la fois sur :
celles acquises en licence nationale : les éditeurs en livreront directement les métadonnées à l’ABES qui en assurera le signalement national. Ce signalement pointera pendant une étape transitoire sur les sites des éditeurs puis sur la plateforme d’agrégation du texte intégral (confiée à l’INIST-CNRS) prévue dans le projet ISTEX,
les ressources courantes acquises directement par les établissements.
L’ABES en récupérera les données auprès des éditeurs, de la BNF et d’autres fournisseurs, par chargement ou « dans les nuages ». L’ABES assurera un signalement national de ces métadonnées au sein de ses outils de signalement. Comme pour les métadonnées qu’elle gère actuellement, elle ira au-delà de ce signalement : elle liera ces données, les enrichira, les rendra ouvertes et accessibles aux établissements directement ou indirectement via les fournisseurs de bases de connaissance ou tout autre dispositif (moteur de recherche généraliste ou spécialisé), en les proposant depuis un système pouvant dialoguer avec les bases de connaissance et résolveurs de liens (dispositif s’inspirant de KBART - Knowledge Bases and Related Tools).
La notion de hub de métadonnées prendra alors tout son sens. L’ABES livrera à ses partenaires les métadonnées des documents numériques acquis, qu’elles soient exploitées directement (versement dans un système local, par exemple) ou indirectement (via une base de connaissance). Les services à offrir peuvent se résumer ainsi : redistribuer dans n’importe quel format des métadonnées enrichies importées dans n’importe quel format. Outre la conversion de format, l’ABES apportera aussi une plus-value aux métadonnées en termes de structuration, richesse et interconnexion de l’information avec d’autres bases.
Ce projet se situe dans la continuité du projet 2008-2011 : des services prêts à l’emploi ou bien des services bruts réutilisables par les outils des établissements.
La question des outils n’est pas tranchée mais découlera de ces besoins : le SUDOC (qui garde toute sa pertinence pour les ressources acquises une fois pour toutes : collections papier, livres électroniques acquis définitivement), autre base, outil de découverte articulé à une base de connaissance, comme dans certains pays (portail « e-lib.ch ») faisant abstraction des formats.

Illustrations

Robinson’s Difference Engine 1

Robinson’s Difference Engine 1

Phot. Michael Baxter. Source : www.meccano.us

Citer cet article

Référence papier

Benjamin Bober, « Signaler les ressources électroniques », Arabesques, 65 | 2012, 12-13.

Référence électronique

Benjamin Bober, « Signaler les ressources électroniques », Arabesques [En ligne], 65 | 2012, mis en ligne le 20 décembre 2019, consulté le 19 avril 2024. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=1362

Auteur

Benjamin Bober

Chargé de mission « Signalement des ressources électroniques », ABES

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