Initié par le Cern, Organisation européenne pour la recherche nucléaire, SCOAP3 est la plus vaste entreprise collaborative en matière de libre accès à l’échelle planétaire1.
Il s’agit d’un consortium formé d’agences de financement, d’organismes de recherche, de bibliothèques et de consortia de bibliothèques, créé en novembre 20062. Le principe repose sur la conversion du modèle classique de l’abonnement à un modèle de type libre accès, en évitant le modèle auteur-payeur, pour les principales revues du domaine de la physique des particules (aussi appelée physique des hautes énergies – PHE).
Dans un premier temps, un appel d’offres de 15 millions d’euros pour 3 ans (coût annuel de 5 millions d’euros) a été lancé vers les revues PHE souhaitant participer à ce projet. Il a permis de sélectionner des revues en tenant compte de leur qualité et des prix et services proposés par les éditeurs. SCOAP3 est opérationnel depuis janvier 2014. Le contrat initial avec les éditeurs a été signé pour une période de 3 ans, arrivant à terme fin 2016.
Une collaboration internationale a ainsi été mise en place, dans laquelle le Cern est l’entité légale opérant au nom de SCOAP3. Onze éditeurs ont été sélectionnés pour dix titres de revues3. La quote-part de chaque pays, basée sur le nombre d’articles publiés ou co-publiés par leurs chercheurs, est fixée pour 3 ans. Aujourd’hui, 44 pays sont partenaires, avec plus de 3 000 bibliothèques et institutions impliquées et trois organisations inter-gouvernementales (Cern, International Atomic Energy Agency - IAEA et Joint Institute of Nuclear Research - JINR). Les États-Unis sont les plus gros contributeurs (24,9 %), suivis par l’Allemagne (9,1 %), le Japon (7,2 %) et l’Italie (6,9 %) ; la France arrive en septième position (3,8 %) pour la période de 2014 à 2016. En 2014-2015, 8 700 articles ont été publiés par plus de 18 000 auteurs appartenant à 90 pays4.
Ce système est bénéficiaire pour le lecteur et l’auteur qui ne paient pas de frais. Par ailleurs, le chercheur reste libre de choisir la revue dans laquelle il désire publier et garde ses droits d’auteur. Une licence CC-BY est attachée à chaque article autorisant une large utilisation et diffusion.
L’ensemble des articles est déposé dans une archive ouverte dédiée5. Différents formats sont disponibles (PDF, PDF/A et XML).
Les frais de publication par article6 sont en moyenne, en 2014-2015, de 1104 euros7, avec un maximum de 2000 dollars (1820 euros) et un minimum de 500 euros. Cette moyenne est nettement en dessous du niveau des frais habituels payés aux grands éditeurs dans le cadre de l’Open Access Gold, que ce soit le niveau global ou celui de la physique en général.8
Une question souvent posée est celle de l’extension potentielle du modèle SCOAP3 à d’autres disciplines. SCOAP3 concerne un domaine particulier, la physique des hautes énergies : il y a peu d’éditeurs, et auteurs et lecteurs sont les mêmes personnes, ce qui n’est pas le cas en médecine par exemple. Cependant, le modèle peut sans doute être adapté pour des domaines proches comme l’astrophysique ou la physique nucléaire, car c’est davantage le nombre d’éditeurs qui est un facteur limitant que le nombre de revues.
SCOAP3 est en tout cas souvent cité comme modèle précurseur pour une transition vers le libre accès, y compris à grande échelle9, basé sur une conversion du modèle économique reposant aujourd’hui essentiellement sur les abonnements aux revues.