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Résiliation du bail commercial aux torts du preneur qui a mis en location-gérance son fonds de commerce en violation d’une clause prévoyant l’occupation personnelle des locaux

Charline Noël


1Aucune disposition légale ne subordonne la location-gérance à l’accord du bailleur, mais il est possible de prévoir une clause en ce sens. La violation de l’interdiction pour le preneur de mettre le fonds de commerce en location-gérance permet au bailleur de solliciter la résiliation du bail. Cependant, les rédactions sont variées et certaines clauses sont ambiguës ou implicites. Il en ressort une jurisprudence casuistique.

2En l’espèce, les parties sont liées par un bail commercial qui contient une clause prévoyant que le preneur devra : « Occuper personnellement. Il ne pourra céder son droit au bail, ni sous-louer même gratuitement (…). Il ne pourra faire exploiter ce commerce par un gérant sous peine de résiliation du bail. ». C’est principalement sur cette clause que la cour se prononce, puisque le bailleur reproche au preneur d’avoir mis son fonds de commerce en location-gérance sans autorisation, ce qui serait de nature à entraîner une demande de résiliation judiciaire du contrat de bail.

3La cour procède à une analyse de la clause pour déterminer si un manquement est caractérisé. Elle considère que la clause qui oblige le locataire à occuper personnellement les locaux et lui interdit de faire exploiter le commerce par un gérant doit être considérée comme interdisant expressément la possibilité de donner le fonds en location-gérance, même si elle ne vise pas expressément ce terme. La solution s’appuie sur le principe-même de la location-gérance, qui implique nécessairement que le preneur n’occupe pas personnellement les locaux. Il faut noter cependant que la cour ne s’appuie pas uniquement sur l’idée « d’occupation personnelle » pour en déduire l’interdiction de la location-gérance, mais aussi sur la dernière partie de la clause, plus explicite, qui interdit l’exploitation par un gérant.

4La cour cherche ensuite à déterminer si le manquement est d’une gravité suffisante pour justifier la résiliation. Elle relève en l’espèce un second manquement du preneur, qui avait procédé à la peinture des façades sans autorisation alors qu’une clause l’interdisait. C’est sur la base du cumul des deux manquements que la cour se prononce en faveur de la résiliation judiciaire. Le manquement relatif à la peinture des façades n’était certainement pas la motivation déterminante pour la cour puisque les travaux n’ayant pas un caractère irréversible ne sont généralement pas jugés suffisamment graves pour entraîner la résiliation du bail (CA Riom, ch. com., 14 févr. 2007, n° 05/02884). La mise du fonds de commerce en location-gérance en violation de la clause obligeant à une occupation personnelle des locaux est donc bien un motif de résiliation du bail commercial.

5En revanche, en ce qui concerne les dommages-intérêts réclamés par le bailleur, le fait que le montant de la redevance de location-gérance soit très supérieur au prix de location ne caractérise pas, pour la cour, un préjudice moral indemnisable pour le bailleur.

Arrêt commenté :
CA de Lyon, 3e Chambre A, 24 octobre 2019, n° 17/08241



Citer ce document


Charline Noël, «Résiliation du bail commercial aux torts du preneur qui a mis en location-gérance son fonds de commerce en violation d’une clause prévoyant l’occupation personnelle des locaux», BACALy [En ligne], n°15, Publié le : 01/10/2020,URL : http://publications-prairial.fr/bacaly/index.php?id=2501.

Auteur


À propos de l'auteur Charline Noël

Étudiante, M2 droit et pratique des contrats, université Lumière Lyon II


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