Des installations proprioceptives de Dan Graham aux promenades « post-cinématographiques » de Jesper Just

  • From Dan Graham’s Proprioceptive Installations to Jesper Just’s “Post-Cinema” Walks

DOI : 10.35562/iris.1174

Abstracts

L’émergence de l’installation au milieu du xxe siècle se fait de manière concomitante avec l’art de la performance et de la vidéo. Les artistes de l’installation se sont donc emparés de l’image en mouvement et ont développé des dispositifs au caractère performatif vis-à-vis du visiteur. Dans les années 1970, Dan Graham révèle la visibilité et la perception d’un « invu », à savoir le temps comme matière et l’espace comme vecteur proprioceptif dans ses installations vidéographiques reposant sur l’effet de time delay. Face à l’enregistrement et à la retransmission en décalé de sa propre image, le visiteur prend conscience de son existence et de son rapport aux autres. Plus récemment, les installations « post-cinématographiques » ont permis de renouveler ces questionnements. L’exposition Servitudes de Jesper Just témoigne de ce dialogue entre installation audiovisuelle, espace architectural et perception du visiteur. Projeté sur des écrans, disséminé dans les sous-sols du Palais de Tokyo, le film de Just n’est visible que par fragments, le visiteur devenant le « monteur » d’une narration ambiguë et hétérodoxe, et devant pour cela se déplacer à travers les enchevêtrements de rampes métalliques, créant une « architecture spectatorielle de l’installation ».

The emergence of installation art in the middle of the twentieth century is concomitant with the art of performance and video. The artists therefore took possession of the moving image and developed devices with a performative character vis-à-vis the visitor. In the 1970s, Dan Graham manifests the visibility and the perception of an “invu” which is time as matter and space as a proprioceptive vector in his video installations based on the effect of time delay. Faced with the recording and retransmission of his/her own image, the visitor becomes aware of his/her existence and its relationship to others. More recently, the “post-cinematographic” installations made it possible to investigate anew these questions. The exhibition Servitudes by Jesper Just testify of this dialogue between an audiovisual installation, an architectural space and the visitor’s perception. Shown on screens, scattered in the basements of the Palais de Tokyo, the film of Just was visible only in fragments. Hence the visitor became the “editor” of an ambiguous and heterodox narration. To do so he/she had to move through the entanglements of metal ramps, creating a “spectatorial architecture of the installation”.

Outline

Text

« Nous sommes accoutumés de voir le temps sous la forme du lieu. […] Le temps est l’une des conditions du physiques du monde : il est incorporel et ne peut donc ni nous toucher, ni être touché par quelque condition corporelle […]. »
Anne Cauquelin
(Fréquenter les incorporels, 2006, p. 101-102)

Le temps que créent les installations est un temps vécu, expérimenté. En effet, il est moins question de matérialiser des objets que de définir des lieux, des espaces à expérimenter, à habiter, comme le rappelle Éric Troncy :

Créer une installation, c’est mettre le spectateur dans la situation de devoir inventer un certain nombre de rapports : à son corps, aux éléments d’informations qui (sur)chargent, à un espace, à une fonctionnalité. C’est la possibilité d’intervenir directement sur ses sensations, de la « délocaliser » instantanément. L’installation est une forme intermédiaire, hybride, entre le théâtre et le cinéma : des formes d’expressions scénographiques. (1993, p. 12)

Les installations qui font intervenir les images en mouvement permettent de faire surgir les aspects temporels et spatiaux de l’œuvre. Ce type d’installations permet d’écrire et d’affirmer une histoire de l’expérience physique et phénoménologique. Une histoire des puissances de l’image par les effets qu’elle produit sur le visiteur qui reconstitue un imaginaire, à la fois fictif et théorique. À travers l’expérience, c’est aussi une histoire de ce qui relève de la subjectivité, de la transmission au spectateur, et de la relation entre l’image et le spectateur, un champ de force et une source d’affect. Cette histoire de l’expérience fait de l’œuvre un outil pour penser, et une œuvre pensée comme une expérience. Les « images-mouvement », d’après les théories deleuziennes1, représentent la manière de faire participer le spectateur au temps du film en excitant ses fonctions sensori-motrices, mais une participation et une perception à la fois subjectives et amoindries en fonction de la sélection effectuée par le regardeur.

Deux artistes et leurs œuvres permettent de questionner et d’analyser l’aspect phénoménologique des installations d’images en mouvement. Dans un premier temps, les installations vidéographiques « proprioceptives » de Dan Graham (né en 1942) dévoilent les systèmes de perception individuels et collectifs et placent le visiteur au cœur d’un dispositif complexe. Utilisant des principes techniques vidéo tels que le feedback, les effets de décalage temporel, de mise en abîme de l’image ou de la vidéo-surveillance, Graham s’approprie les outils de la création de l’image télévisuelle (caméra, écran…) pour mieux en détourner et en questionner les fondements. Le visiteur devient une composante à part entière d’un système qui interroge son image, sa représentation et son comportement devant une perception manipulée par l’artiste, mettant en avant le processus de perception visuelle et physique, révélant la possibilité de faire appréhender le temps au visiteur à travers la retransmission de l’image. Procédés également présents dans les dispositifs de caméra-surveillance.

Dans un second temps, les installations « post-cinématographiques » de Jesper Just (né en 1974), artiste actuel, réactivent les codes de l’installation audiovisuelle. Les plus récentes ont permis de renouveler les questionnements liés au rapport au lieu et à l’espace du visiteur. Comme l’explique Catherine Elwes : « Quand l’installation a émergé comme une pratique définie de ses antécédents disparates, le cadre architectural est devenu un facteur majeur dans la conception et l’exécution du travail. » (2015, p. 12) Ainsi, l’exposition Servitudes2 de Just témoignait de ce dialogue entre installation audiovisuelle, espace architectural et perception du visiteur. Projeté sur plusieurs écrans disséminés dans le lieu d’exposition, le film de Just fait du visiteur le « monteur » d’une narration ambiguë et hétérodoxe, créant une « architecture spectatorielle de l’installation : le rôle déterminant de l’appareillage de l’écran dans la gestion des interactions entre les sujets voyants et les objets médiatiques » (Mondloch, 2010, p. 23). Le visiteur/spectateur prend ainsi conscience de son propre corps, de son acte de vision et des autres visiteurs partageant l’espace de l’œuvre au sein de cette promenade « post-cinématographique » (Bruno, 2012, p. 52).

Les installations proprioceptives de Dan Graham

« La nouvelle situation des visibilités vient de ce que, depuis l’invention du cinéma et de la télévision, un flux considérable et toujours croissant de visibilités sert simultanément le monde de l’art et celui de la consommation. »
Marie-José Mondzain
(L’Image peut-elle tuer ?, 2015, p. 57)

Ce sont précisément ces visibilités, issues du cinéma et de la télévision, que Graham tente de faire émerger. Suite à son expérience en tant que co-galeriste de la John Daniels Gallery3, entre 1964 et 1965 à New York4, il explique avoir « voulu personnellement critiquer non seulement “l’art de la galerie” mais aussi le statut économique de la galerie » (Pagé, 1987, p. 33). Témoin du comportement à la fois des visiteurs, collectionneurs et artistes, il réalise la nécessité pour l’œuvre d’être envisagée comme une expérience en lien avec le lieu, il explore « les connexions entre l’art et l’information, et se concentre en particulier sur le rôle du dispositif médiatique dans la formation de la conscience5 », à travers un travail de la continuité et des « processus perceptifs, subjectifs, basés sur la temporalité ». Dans les années 1970, ce principe aboutit à la révélation à travers l’installation d’une visibilité et d’une perception de « l’invu » (Mondzain, 2015, p. 45), à savoir le temps comme matière et l’espace comme vecteur proprioceptif dans ses installations vidéographiques reposant sur l’effet de time delay. Face à l’enregistrement et à la retransmission en quasi-instantané de sa propre image, le visiteur prend conscience de sa propre existence perçue par autrui : « Il est vrai que ce n’est pas sans réticence que l’on entre dans un processus interactif en terrain muséal […]. L’image du corps […] est tout de même ressentie comme l’expérience présente du corps », écrit Monique Maza (1998, p. 105). Graham explique la sensation de mouvement dans le corps comme faisant partie du processus de perception en s’appuyant sur les théories de James Gibson :

Un psychologue qui s’intéressait au fait que nous puissions découvrir les choses visuellement en bougeant notre corps à un endroit spécifique. L’expérience visuelle se produit au cours d’une période très étendue lorsque nous nous déplaçons dans l’espace6. (Moure, 2009, p. 214)

Ainsi, Graham parvient à rendre perceptible le temps du déplacement par le visiteur, d’un point de vue mental et physique. En s’intéressant notamment au « passé immédiat » et à la possibilité de le faire appréhender au visiteur, il développe une pratique de time-based art : « Il peut ainsi mettre en œuvre ses expérimentations sur le temps, matériau invisible et impalpable que le spectateur sera en mesure de visualiser grâce au décalage entre l’enregistrement et sa diffusion. » (Roussel, 2011, p. 16) Graham s’inspire ici de Gregory Bateson, qui aborde à la fois l’aspect socio-anthropologique, mais également cybernétique de l’art. La prise de conscience et la perception du soi passent par soi-même et par autrui. Le corps est investi d’un rôle dans le contact et la communication à l’autre, il est le lien vers le monde extérieur à travers son comportement, permettant l’exploration des limites de la présence de l’être et de sa connexion aux autres. En effet, « Bateson s’intéressait à l’art dans la mesure où il est un moyen d’autoréflexivité agissant sur le mouvement de l’information entre différents niveaux de systèmes mentaux étendus7 » poursuit De Bruyn. Ainsi, les théories de Gregory Bateson abordent l’autoréflexivité de l’œuvre, qui renvoie à son propre système de fonctionnement, d’information, permettant de révéler le contexte au sein duquel s’inscrit le visiteur. L’individu est incorporé par l’artiste dans un système cybernétique élaboré selon une représentation topologique des systèmes mentaux. Graham compare ce système physico-psychique au motif de la boucle de Möbius, un cercle continu qui permet la rencontre de deux chemins interconnectés. Ce cercle homéomorphe — en topologie ce sont deux espaces identiques mais perçus selon des points de vue différents —, ne possède en réalité qu’une seule et même face. L’individu au cœur de la vidéo est à la fois interne et externe au système, telle une construction mentale individuelle reflétant le monde.

Ce travail construit sur le principe de décalage temporel est rendu possible principalement grâce aux progrès techniques du matériel vidéo, qui connaît alors une véritable avancée technologique mais aussi artistique. En effet, dans les années 1960, les artistes (comme Bruce Nauman ou Vivo Acconci) découvraient le matériel vidéographique et l’utilisaient principalement pour ses qualités intrinsèques (enregistrement et diffusion en direct). Graham décide de dépasser ces propriétés immédiates et d’en dévoiler les possibles manipulations et détournements. C’est notamment le cas pour les mécanismes de time delay et de feedback (ou effet de retour sur l’image). La série d’installations vidéos intitulée Time Delay Room fonctionne d’après ces mécanismes. Comme leur dénomination l’indique, ces œuvres sont composées de pièces abritant un dispositif vidéographique qui enregistre puis rediffuse l’image, du visiteur en l’occurrence, avec quelques secondes de décalage, établissant un premier principe : le jeu perceptif mis en place avec l’image du visiteur/performeur.

Ces techniques sont employées par Graham pour la première fois en 1974 dans l’œuvre Present Continuous Past(s)8, qui génère une spatialisation du temps en créant un espace à l’intérieur de l’espace. Cet aspect est souligné par le titre de l’œuvre qui, selon Jacinto Lageira,

laisse entendre différentes interprétations quant aux imbrications temporelles présentes et passées : il peut s’agir d’un présent continuellement passé, d’un passé ou de passés continuellement présent(s), ou encore d’un présent continuellement présent dans le passé, ou d’un passé ou de passé(s) continuellement passés dans le présent9.

Le résultat visuel de ces effets techniques est notamment la répétition du motif du corps, retransmis à quelques secondes d’intervalle de son enregistrement, ce qui génère une simultanéité décalée, créant un temps inhérent à l’action étendu à un présent continu dans la retransmission différée. Ainsi, le processus de perception vécu par le spectateur est modifié à travers la présence vidéographique du corps et sa transformation à l’image. Les œuvres créées grâce à ces procédés sont liées aux préoccupations pour l’espace social. Cet espace est ici associé à celui de l’exposition qui place le visiteur au sein des structures de l’œuvre et suscite chez lui certaines réactions. Present Continuous Past(s)10 pose les principes de cette « série », qui comporte l’utilisation du processus à la fois d’enregistrement et de projection associé à un jeu de réflexion créé par des miroirs. Ceux-ci recouvrent deux murs d’une salle, tandis que le troisième mur est composé d’un moniteur télévisuel permettant de diffuser les images enregistrées par une caméra dissimulée. Selon Philippe Dubois, l’artiste détourne un procédé utilisé dans la vidéo-surveillance :

Ce principe (tant exploité) est utilisé par Graham, mais avec une perversion fondamentale qui lui permet finalement de s’approprier le temps. La perversion, techniquement parlant, c’est le dispositif du retardement (time delay). C’est-à-dire que Dan Graham, au lieu d’user de cette « classique » possibilité qu’offre le circuit fermé vidéo de simultanéité, la captation et la diffusion, va en fait (ré)introduire un retard entre les deux phases (comme en photographie ou au cinéma), un retard certes léger, mais dont les conséquences, couplées au paradoxe de la mise en abîme, sont vertigineuses. (Dubois, 2011, p. 49)

En effet, alors que les artistes ont exploité les capacités de la vidéo à travailler avec l’enregistrement et la retransmission en direct, Graham détourne ces avantages en introduisant un effet de retard venant perturber la perception temporelle.

L’œuvre permet au visiteur d’expérimenter son corps et ainsi de prendre conscience de son existence à travers la retransmission de son image enregistrée, certes décalée de quelques secondes, mais aussi de son image reflétée en direct par le miroir. Ces deux systèmes lui renvoient une appréhension de lui-même tant d’un point de vue spatial que temporel, qui a pour but de susciter chez ce dernier une réaction, une réflexion à la fois physique, psychologique et proprioceptive. Les propriocepteurs sont des senseurs qui permettent de se localiser dans l’espace, de prendre conscience de son corps et de sa position dans l’espace et d’établir les limites entre son corps et l’extérieur.

Thierry de Duve cite les propos de l’artiste qui décrit le principe de ses œuvres :

Les miroirs reflètent le temps présent. La caméra vidéo enregistre ce qui se passe immédiatement devant elle et tout ce qui est reflété dans le mur-miroir opposé. L’image vue par la caméra apparaît huit secondes plus tard dans le moniteur vidéo. Si le corps d’un spectateur n’obstrue pas directement la vision que l’objectif a du miroir d’en face, la caméra enregistre le reflet de la chambre et l’image reflétée du moniteur (qui montre l’instant enregistré huit secondes auparavant). Une personne regardant le moniteur voit sa propre image il y a huit secondes, et le reflet du moniteur dans le miroir il y a huit secondes de là, ce qui fait seize secondes dans le passé. Il se crée une régression infinie d’un continuum temporel dans un continuum temporel dans un continuum temporel (toujours séparés par un intervalle de huit secondes). (Duve, 2001, p. 54)

D’après les expériences sur la mémoire à court terme menées par Richard L. Gregory (Stemmrich, 2008, p. 106) en 1966, huit secondes est la durée neurophysiologique maximale de celle-ci. Ainsi, avec ses œuvres « à retard », Graham souligne l’importance de la mémoire, à la fois individuelle et collective, et par extension de l’histoire, et la nécessité du souvenir, dont l’effacement à court terme est une métaphore de son effacement dans la mémoire collective. Il remet en cause l’existence du présent qui, au moment même de sa réalisation, appartient déjà au passé et que le visiteur, dans son expérience de l’œuvre, perçoit comme un futur immédiat, un présent qui est sur le point d’advenir.

Cette interrogation de la perception est, dans certaines installations, poussée à son paroxysme comme dans Two Viewing Rooms11 (1975), composée de deux salles communiquant par un miroir sans tain, dont l’un des deux côtés est transparent. Dans la salle A, une caméra enregistre ce qui se déroule de l’autre côté du miroir, tandis que dans la salle B, un moniteur diffuse l’image enregistrée et le miroir renvoie cette même image en temps réel. Le visiteur situé dans la salle A est placé dans une position quasi-voyeuriste face au visiteur de la salle B confronté à sa double image, et dont les perceptions se voient perturbées par le dispositif réflexif ainsi que par les modifications d’échelle et d’angles de vue engendrées par le moniteur et le miroir. Selon Thierry de Duve, le miroir fait référence en psychologie au fameux « stade du miroir », théorie développée par Jacques Lacan (1949, p. 449-45512), qui peut être appliquée aux œuvres de Graham. Confronté à sa propre image, parfois modifiée, le visiteur se voit et existe parce qu’il est vu et prend conscience de sa propre altérité. L’œuvre développe chez lui un système de pensée réflexive d’un sujet qui se regarde à travers son image. L’œuvre révèle ainsi la conscience de soi. Les « miroirs […] deviennent des vecteurs privilégiés d’une mise en abîme de la vision et d’une quête immatérielle de pure visualité » (Poirier, 2013, p. 48).

Si les œuvres de Graham sont aujourd’hui assez bien connues et ont été exposées à plusieurs reprises, on oublie bien souvent l’aspect novateur qu’elles pouvaient revêtir dans les années 1970 : à la fois la manipulation et non la simple application des possibilités techniques, l’effet produit sur les visiteurs par le dispositif d’enregistrement et de retransmission, l’attraction nouvelle suscitée par la vision de sa propre image sur l’écran télévisuel et, de plus, dans l’espace de l’exposition. C’est pourquoi ce type d’installation historique permet de mieux appréhender les installations audiovisuelles actuelles comme celles de Just qui en réactive certains aspects.

Les promenades « post-cinématographiques » de Jesper Just

« Suspendre le sens pour esquiver la transparence : au-delà des conditionnements et des clichés se dégage un lieu paradoxal où la volupté peut être insupportable et où le mensonge connaît une étrange beauté » écrit l’historien d’art Fabien Danesi (2015, p. 39), pour décrire les œuvres de l’artiste danois Jesper Just dans le catalogue de l’exposition intitulée Servitudes qui s’est tenue au Palais de Tokyo en 2015. La servitude est la nécessité, l’obligation ressentie comme une limitation, une atteinte à sa propre liberté, mais c’est également l’état de dépendance complète dans lequel se trouve une personne par rapport à une autre. Et ce sont ces états dans lesquels vont se trouver à la fois les personnages des films qui composent l’installation et les visiteurs de l’exposition.

Plus que des espaces, ce sont des lieux qu’imagine et conçoit « l’artiste-cinéaste » (Michaud, 2012, p. 17) Jesper Just dans ses installations audiovisuelles. Des lieux complexes, ambigus sur les écrans, entre les écrans et en dehors des écrans. Le « lieu » est le point de départ de la création et de la mise en espace. Nous allons examiner ici de quelle manière Just s’intéresse à l’histoire et au tissu social de l’espace d’exposition pour concevoir ses projets, comme ce fut notamment le cas de Servitudes. L’ampleur du dispositif permet de mettre le visiteur en situation et de lui faire prendre conscience de son propre corps dans un lieu qu’il partage avec l’œuvre, et ainsi d’aborder les notions de « capacitisme » (Jaffrès, 2015, p. 64) et d’autonomisation. L’artiste tente d’élargir l’espace d’exposition et le transforme en différents lieux de passage vers un monde imaginaire, à partir de constructions réelles.

Ces lieux participent ainsi à une certaine forme de déréalisation des corps : une altération de la perception ou de l’expérience du monde extérieur qui paraît étrange, irréelle, une expérimentation du doute à la fois physique et mentale. Ce sont des lieux d’un art de l’expérientiel, du corps vivant et du corps comme agent de la création permettant d’envisager de nouveaux lieux, qui peuvent être qualifiés dans le cas de l’exposition de Just de « post-cinématographiques », terme défini par Andrew Uroskie :

Plutôt que simplement proposer une étude des conditions matérielles de projection au sein de l’espace littéral (le paradigme anti-illusionniste), ou une attention totalisante de l’espace narratif de l’image cinématographique considérée comme un monde en soi, une analyse post-cinématographique explore la conjonction et l’imbrication de ces deux modèles à travers la forme hybride de l’installation de l’image en mouvement13.

Le visiteur se trouve piégé comme dans un lieu d’exposition fictionnel. Il est invité à pénétrer dans les sous-sols et à arpenter l’armature métallique menant au fur et à mesure aux écrans diffusant chacun un film autonome de neuf minutes, mais faisant partie d’un ensemble cohérent et interconnecté, telles les scènes d’un seul et même film. Chaque film participe à la création du lieu architectural de l’exposition mais met également en scène l’architecture urbaine new-yorkaise, et plus précisément le One World Trade Center, créant un lieu immanent à l’espace filmique, dans et autour du bâtiment choisi pour son potentiel émotionnel et son existence architecturale. Telle une « prothèse » urbaine, un membre fantôme, symbole d’absence et de perte, de douleur, un rappel des absents, le bâtiment est aussi le symbole d’une certaine résilience, permettant de considérer la ville comme un corps, blessé, meurtri et en quelque sorte « réparé ».

Ainsi, à mesure que le visiteur s’enfonce dans les dédales du Palais de Tokyo, les écrans révèlent les parties les plus élevées de la tour. Dans le premier film, une jeune fille14 atteinte de la maladie de Charcot-Marie-Tooth — maladie neurologique qui affecte les systèmes nerveux et moteurs — essaie de jouer une étude pour piano dans un espace simulant une grotte, alors que le second propose un gros plan sur les cordes du piano en vibration. Le troisième film fait apparaître le second personnage, une jeune femme15 contrainte dans ses mouvements, dans un espace clos et oppressant, dont elle ne semble pas pouvoir s’extirper, situé quelque part dans les espaces inférieurs de l’immeuble. En plan fixe, le quatrième film se concentre sur les ascenseurs du hall d’entrée de la tour, s’ouvrant et se fermant inlassablement. Dans le cinquième film, le spectateur retrouve la jeune fille qui cette fois-ci tente d’inscrire une marque à l’aide d’un caillou sur la façade vitrée du rez-de-chaussée. Puis le sixième film revient sur la jeune femme qui tente de manger un épi de maïs, limitée dans son action par un appareil de rééducation imposé à ses mains. Un jeu de regard fuyant s’installe avec le spectateur au cours de cette scène. Puis cette dernière, dans le septième extrait, se situe à l’intérieur de l’un des appartements construits dans les étages supérieurs, et regarde l’horizon dessiné par l’architecture new-yorkaise. Enfin, le dernier film offre un travelling sur l’un des derniers étages, proposant une vue panoramique de la ville derrière les vitres. Cette élévation inversée est imposée au visiteur par le biais du sous-sol, espace atypique dans sa construction, du fait des différences de hauteur sous plafond, de un à dix mètres, un espace difficile, presque dysfonctionnel. « J’ai choisi de recréer la sensation de la spéléologie dans l’espace d’exposition. L’idée du lieu de tournage m’est aussi venue du parcours de l’espace d’exposition », explique l’artiste (Jaffrès, 2015, p. 62). La localisation du film et donc sa narration vont ainsi découler du lieu de l’exposition prévu.

Mais ce dernier est aussi un lieu chargé d’histoire : en effet, 2000 pianos ayant appartenu à des familles juives auraient été volés et stockés dans les sous-sols du Palais de Tokyo pendant la seconde guerre mondiale, ce qui a également participé à la création d’une œuvre sonore et musicale jouée au piano16, œuvre reliant les lieux de l’exposition comme les personnages et l’architecture des films, et dont on peut dire qu’elle sculptait l’espace. Le dispositif est construit par 120 mètres de rampes métalliques et les 230 mètres de tissu utilisés comme écran et comme rideau de séparation des espaces. Dans ce cas précis, Just fait appel à l’accrochage atypique des écrans et à leur taille imposante dans le lieu d’exposition : « l’écran fonctionne comme une entité sculpturale à part entière et fait précisément prendre conscience au spectateur des volumes » explique Giuliana Bruno (2012, p. 51). Les écrans ne sont pas simplement disposés les uns à côté des autres et ne reprennent pas non plus le dispositif cinématographique. Ils sont dispersés dans tous les espaces du Palais de Tokyo, suspendus à des hauteurs différentes et la projection se fait parfois même en recto/verso.

Cette structure permet à l’artiste d’aborder le thème de la place du handicap dans la société et la notion de « capacitisme » (Jaffrès, 2015, p. 64), discrimination envers les handicapés, incarnée par les deux personnages féminins et mise en rapport avec la « prothèse urbaine » (Jaffrès, 2015, p. 63) représentée par le bâtiment. Ainsi le parcours met en difficulté le visiteur non handicapé dans sa circulation et ses déplacements. Le corps bien portant est ainsi gêné dans son parcours au sein de l’exposition par l’appareillage métallique, mais peut également reconquérir son indépendance, redevenir autonome, notamment s’il accepte de se laisser guider par le parcours et les différents écrans, ainsi que par la musique. Il n’est pas nécessaire de chercher un parcours défini ou un mode de circulation « conventionnel », mais il faut plutôt se laisser aller à la déambulation.

Cette « promenade post-cinématographique », comme la qualifie Giuliana Bruno (2012, p. 52), permet à travers les écrans d’« interroger une forme plus vaste d’expérience spatiale » (Bruno, 2012, p. 65). Selon Giuliana Bruno, elle inscrit l’œuvre de Just dans l’histoire de l’exposition et de la projection, et notamment de celle des panoramas du xixe siècle17, véritables lieux de révélation et d’expérience perceptive et cognitive. L’artiste utilise la capacité du film à rendre le mouvement tout en questionnant la place du spectateur vis-à-vis de l’écran, dans sa mobilité ou dans son statisme. Ce travail de déploiement d’écrans multiples avait déjà été expérimenté par l’artiste lors de l’exposition du film This Nameless Spectacle en 2011 au MAC/VAL. Deux projections panoramiques étaient disposées en vis-à-vis, obligeant à choisir où le regard devait se porter. Ne permettant pas d’embrasser la projection totale, le dispositif fragmentait le récit porté par les images. Le spectateur y est « non plus face à l’écran, mais bien entre les écrans » (Martin, 2015, p. 39), ce qui « amène le public à se regarder voir » (Martin, 2015, p. 40). La multiplication des écrans implique donc l’impossible simultanéité de la perception visuelle, rappelant toujours un peu plus les limites de nos propres capacités visuelles, physiques et mentales. Malgré cette complexité structurelle, narrative et d’appréhension imposée aux visiteurs, paradoxalement, Just offre une liberté et une possibilité que le cinéma contemporain n’avait jamais permises. Cette dialectique incapacité/possibilité fait écho aux deux personnages du film, l’une qui tente de surmonter son handicap, la seconde qui apparaît comme l’incarnation d’une idée de la beauté et de la perfection, mise dans des situations de difficultés physiques. Remise en question dans sa « capabilité », elle renvoie à l’obsession sociale de beauté et de jeunesse.

Pour conclure, l’installation tripartite de Just, à la fois visuelle, sonore et architecturale, dans son pouvoir d’engendrer des lieux et de révéler des corps, résonne étrangement avec certaines des théories de Michel Foucault. Selon l’auteur, notamment dans Surveiller et Punir (1993), les conventions spatio-temporelles induites par les lieux transforment le comportement humain, témoignant de sa détermination sociale par la fonction du lieu, ce dont l’auteur donne un exemple historique : le système panoptique créé par Jeremy Bentham, en 1780 (Voorhies, 2009, p. 10-11). Ce système rend possible l’influence du regard porté par un surveillant sur un individu lorsqu’il évolue dans un lieu, un espace qui va de fait participer à la construction de cet individu et contribuer à la mise en place d’une société disciplinaire et d’un contrôle social. C’est plus encore le cas des œuvres de Graham qui mettent en avant les relations interpersonnelles et sociales des individus (Mari, 1993, p. 31-36). Comme Just, Graham ne s’intéresse pas seulement au rapport du visiteur avec l’œuvre, mais également à la capacité de l’œuvre à créer une dynamique entre les différents visiteurs. Graham s’appuie à la fois sur les théories phénoménologiques et sur celles du comportementalisme. Détournant les outils des systèmes de surveillance — le miroir sans tain et l’enregistrement vidéographique — au profit d’une réflexion artistique interrogeant les rapports entre intérieur/extérieur, public/privé, par le biais d’actions privées prenant place dans l’espace public et suscitant parfois des renversements de comportement.

Les deux artistes cherchent sans cesse à dévoiler « l’invu », à rendre perceptible les interstices du temps et de l’espace dont le visiteur n’a pas toujours une pleine conscience, ou qu’il estime comme acquis. Au sein du groupe ou en tant qu’individu, le visiteur voit certaines de ses certitudes remises en cause par les expériences phénoménologiques et proprioceptives. Dans la mise en espace, à travers les pièces qu’ils mettent en place, les artistes font appel à la capacité imaginative du spectateur. Cependant, il convient de noter que cet espace existe quelque part entre le spectateur et l’écran, à l’intérieur même de l’écran, à sa surface imageante, mettant à mal la perception, le ressenti de « la présence invisible dans l’espace de l’installation » écrit Hans Belting (2004, p. 148). En créant des lieux à partir d’espace réels, architecturaux, mais qui produisent une fiction imageante, en proposant une nouvelle forme de cinéma, Just positionne son œuvre dans une zone intermédiaire, à la fois isolée et pénétrable et qui s’est adaptée à une nouvelle forme d’art et à un nouveau régime de contemporanéité. Son œuvre fait de l’artiste un activateur d’imagination et de lieux à réinventer. Capable de révéler à travers la perception le temps comme essence de l’être, puisque nous existons dans le temps, il fait de l’installation une machine de vision et « une machine du ressenti » physique. L’installation revêt un pouvoir sensoriel et expérientiel, connectant notre regard dans différents espaces, telle une surface de transition, de création d’atmosphère et d’affect.

Bibliography

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Bruno Giuliana, 2012, « Panoramas en mouvement : le magnascope numérique de Jesper Just », dans cat. d’expo. Jesper Just: This Nameless Spectacle, MAC/VAL, Vitry -sur-Seine, 22 octobre 2011-5 février 2012, Vitry-sur-Seine, MAC/VAL, p. 51-65.

Cauquelin Anne, 2006, Fréquenter les incorporels. Contribution à une théorie de l’art contemporain, Paris, PUF.

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Notes

1 Il faut noter que Gilles Deleuze écrit au sujet de réalisations filmiques et non des vidéos et « post-films ». Return to text

2 Exposition Jesper Just. Servitudes, Palais de Tokyo, Paris, 24 juin-13 septembre 2015. Return to text

3 Nom créé à partir de celui de Graham et de David Herbert. Return to text

4 Située au 17 East 64th Street. Return to text

5 Matthias Michalka, 2010, p. 12 : « conceptual artists looked at the relationship between the art space and the public media space, explored the connections between art and information, and concentrated in particular on the role of the media apparatus in forming consciousness » (traduction de l’auteur). Return to text

6 Dan Graham cité par Eric De Bruyn, « Interview with Dan Graham », dans Gloria Moure, 2009, p. 214 : « He was a psychologist who was interested in the fact that we discover things visually by moving our body in a particular location. The visual experience is something that happens in a real extended time period as we move around in space. » (Traduction de l’auteur) Return to text

7 William Kaizen, « Steps to an Ecology of Communication », dans Alex Kitnick (éd.), Dan Graham (October Files), 2011 p. 99 : « Bateson is interested in art inasmuch as it is a means of self-reflexively acting on the movement of information between various levels of expanded mental systems » (traduction de l’auteur). Return to text

8 Mark Francis, « Dan Graham: at the Edges », dans Dan Graham, Dan Graham: Public/Private, 1993, p. 18-23. Les trois dernières performances des années 1970 : Performer/Audience Séquence (1975), Identification Projection et Performance/Audience/Mirror (1977). Elles possèdent une structure similaire qui inclut le public : performeur face au public engagé dans un discours, puis insertion du miroir. Return to text

9 Jacinto Lageira, <http://www.newmedia-art.org/cgi-bin/show-oeu.asp?ID=150000000020624&lg=FRA>. Return to text

10 Présentée en 1974 aux expositions « Art Vidéo Confrontation » et « Project’74 », à Cologne. Première installation acquise par le Centre Pompidou en 1976. Installation vidéo en circuit fermé, une caméra noir et blanc, un moniteur noir et blanc, deux miroirs, un microprocesseur. Return to text

11 Two Viewing Rooms, 1975, exposée au Musée d’art moderne de la ville de Paris en 1988. Return to text

12 Communication présentée au 16e Congrès International de Psychanalyse à Zürich le 17 août 1949. Return to text

13 Andrew V. Uroskie, Windows in the white cube, dans Tamara Trodd, 2011, p. 145-161, ici p. 146 : « Rather than simply propose an investigation of the material conditions of projection within literal space (the anti-illusionist paradigm), or a totalising attention to the narrative space of the cinematic image considered as a world in itself, a post-cinematic analytic explores the conjunction and imbrication of these two models through the hybrid form of moving-image installation. » (Traduction de l’auteur) Return to text

14 Personnage interprété par Rylee Sweeney. Return to text

15 L’actrice est Dree Hemingway, mannequin et arrière-petite-fille de l’écrivain. Jesper Just l’a également choisie pour ces caractéristiques. Return to text

16 La composition est basée sur Opus 17 de Éliane Radigue (1970). Return to text

17 Giuliana Bruno donne notamment l’exemple du Maréorama de l’Exposition Universelle à Paris. Return to text

References

Electronic reference

Marie-Laure Delaporte, « Des installations proprioceptives de Dan Graham aux promenades « post-cinématographiques » de Jesper Just », IRIS [Online], 40 | 2020, Online since 15 décembre 2020, connection on 19 avril 2024. URL : https://publications-prairial.fr/iris/index.php?id=1174

Author

Marie-Laure Delaporte

Docteure en histoire de l’art contemporain, chercheuse associée (Histoire des arts et des représentations EA 4414, université Paris Ouest Nanterre La Défense)

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