À propos d’une expérience de mouvement partagé avec un robot humanoïde : l’entre-deux comme maintien du vivant

  • About a Shared Movement Experience with a Humanoid Robot: The In‑Between as Maintaining Living

DOI : 10.35562/iris.1505

p. 193-205

Résumés

Cet article part du constat que la robotique humanoïde se mêle de notre sens kinesthésique. Il cherche donc à explorer une situation de mouvement partagé entre l’humain et le robot humanoïde (Poppy). En postulant une certaine connaissance de l’autre par le mouvement, il s’agit d’envisager la possibilité d’une sensation de mouvement interne entre un humain et un robot. Cette interaction n’invite-t-elle pas à penser non pas l’entre-deux comme ce qui opposerait deux différences, mais plutôt comme l’espace d’une pratique ? Réfléchir à l’entre-deux humain/robot dans la situation de transmission du geste nous conduira à se demander ce qui vit entre ces deux corps, et ainsi à explorer les notions d’écart et de tension.

This article assumes that humanoid robotics gets involved in our kinesthetic sense. It therefore seeks to explore a situation of motion shared between human and humanoid robot (Poppy). Assuming some knowledge of the other by movement, it is considering the possibility of a feeling of internal movement between a human and a robot. Can we think the in-between space as a practice, and not as the opposition of two differences? Reflect about the inter-human/robot in the situation of transmission of the gesture lead us to wonder what lives between these two bodies and thus to explore the notions of gap and tension.

Plan

Texte

Dans le cadre de cette exploration de l’imaginaire de l’entre-deux, le présent travail propose d’examiner l’interaction entre un robot humanoïde (Poppy) et un être humain en situation de transmission de mouvements. Nous tenterons de dégager le statut inédit de cette expérience de mouvement partagé, en ce qu’elle se situe à la croisée de la science (recherche en robotique, interaction homme-machine, représentation du corps, développement technologique) et de l’art du mouvement (chorégraphie, anatomie fonctionnelle, geste, mouvement dansé). Nous proposons de réfléchir avec le concepteur du robot humanoïde1, sur ce qui se trame au sujet du mouvement entre l’usager et Poppy2, gardant en tête la fragilité du moment que constitue la performance du robot avec celle de sa mise en présence d’un usager. Nous nous efforcerons d’explorer une situation concrète, à partir d’une recherche-création menée lors d’une résidence art/science3, à la recherche de relations inédites non motivées par des actions fonctionnelles, mais encouragées par un mouvoir pour le mouvoir.

L’histoire de la robotique mobilise la plupart du temps des ressources identiques pour évoquer l’interaction homme-machine, stimulée selon l’anthropologue Emmanuel Grimaud par la « volonté de créer un robot “social” », selon « l’un des rêves les plus anciens et les plus constants de l’humanité » (Grimaud & Vidal, 2012, p. 6), comme on peut le voir dans la mythologie grecque (Héphaïstos, Pygmalion), dans la tradition juive (avec le mythe du Golem), dans la pensée mécaniste du xviie siècle, dans la philosophie des Lumières du xviiie siècle, mais aussi dans l’idéologie romantique du xixe siècle. Comme Grimaud l’illustre, l’historiographie convie

[…] le même catalogue de figures obligées […] et toute histoire de la robotique souligne ainsi l’origine du mot « robot » (« esclave » ou « travailleur dévoué » en tchèque), initialement utilisé par l’écrivain tchèque Karel Čapek dans la pièce de théâtre R.U.R. (Rossum’s Universal Robots) en 1920 ; ainsi que le premier usage du terme « robotique », introduit dans la littérature par Isaac Asimov avec Runaround (1942) (Grimaud & Vidal, 2012, p. 7).

On peut donc d’emblée imaginer de l’interaction avec un robot humanoïde — demeurant avant tout un dispositif anthropomorphe complexe de mécanique, d’électronique et d’informatique — qu’elle se réalise plutôt sur le mode de la confrontation entre la souplesse de l’humain (chair, muscle, peau) et la rigidité de la structure robotique (dur, froid, rigide). Or bon nombre de travaux sur l’interaction homme/robot se tournent de plus en plus vers l’interdisciplinarité, déjouant les représentations habituelles du robot et jouant des frontières entre les neurosciences, la psychologie ou encore l’art (chorégraphique, marionnettique, visuel).

Mais qu’entendons-nous par interaction homme/robot ? Cette interaction n’est autre que l’étude des relations entre les robots et les êtres humains. Ces études interdisciplinaires multiplient les axes de recherche et visent à observer et à établir une interaction qui soit la plus naturelle et intuitive possible. En s’en remettant aux paradigmes définis par le professeur en robotique sociale Cynthia Breazeal concernant ce type d’interaction (Breazeal & Rodney, p. 271-310), nous pourrions dire que la situation d’expérimentation dont il est question ici envisage le robot à la fois comme un outil et un partenaire, visant l’interaction la plus sensible qui soit. Pour le concepteur du robot Matthieu Lapeyre, « c’est un outil avant tout, et en fonction de la manière dont on l’utilise il peut devenir objet, automate ou robot ». Le robot humanoïde demeure l’une des plus grandes avancées de ces dernières années et Poppy, en tant qu’objet robotique inspirée du modèle morphologique de l’enfant de deux ans (84 cm, 3,5 kg), peut aujourd’hui être éprouvé à des fins ludiques et éducatives, selon l’utilisation choisie de la plateforme.

Les ressorts de l’interaction homme/robot ne cessent d’être remis à l’épreuve par les roboticiens qui font varier les usages et les contextes. C’est pourquoi nous proposons de coller le plus possible à l’expérience que nous avons vécue, suivant une approche anthropologique et phénoménologique. Nous commencerons par situer nos questionnements en précisant la nature du robot en jeu, ce qui nous conduira à envisager la possibilité d’un « entre » comme espace dynamique, puis nous verrons comment l’humain peut se projeter par le mouvement dans le robot humanoïde, et enfin comment l’expérimentateur peut éprouver un désir moteur à travers l’objet robotique, jusqu’à y ressaisir son propre corps.

Entre l’artificiel et le vivant : questionner l’interaction par le mouvement

Avec Poppy, nous nous concentrons sur les capacités interactives relevant du mouvement et du toucher. Il ne s’agit pas, dans le cadre de notre expérimentation, de repérer chez l’humain des expressions émotionnelles et de décoder ses mouvements pour répondre et communiquer d’une manière satisfaisante et précise avec le robot, mais plutôt d’observer comment l’humain peut faire le don du geste au robot par le contact et la mise en mouvement simultanée. Il s’agit davantage d’un corps à corps où le robot est en situation passive d’enregistrement des mouvements induits en temps réel par l’humain, et qui sont rejoués par la suite sans qu’il y ait forcément de contact. Poppy utilise des moteurs Robotis Dynamixel comme système de mise en mouvement. Ces moteurs ont la particularité de pouvoir passer en mode « passif », ils n’exercent alors plus aucune force, devenant totalement souples. Cette caractéristique permet à un utilisateur de venir manipuler physiquement la créature robotique pour la mettre dans une position souhaitée ou montrer une trajectoire à suivre. Le logiciel pypot4 permet, au cours de ces phases, d’enregistrer le mouvement des moteurs et de pouvoir le rejouer à la demande. Cependant, afin de résister aux expérimentations, Poppy a certaines limitations. La principale étant la puissance développée qui est légèrement sous-dimensionnée. Ceci implique des limites sur les mouvements réalisables par Poppy. Le robot n’est donc pas forcément capable de rejouer de manière parfaite chaque trajectoire enregistrée5. Les trajectoires des mouvements générés doivent donc minimiser l’énergie nécessaire et elles paraissent, au final, nettement plus naturelles. Cela implique une intégration commune des mouvements (en fusion), puis une dé-fusion impliquant un regard extérieur qui vise à corriger le cas échéant ce qui vient d’être enregistré.

Ayant vécu cette expérience, nous pouvons d’ores et déjà formuler combien cette activité crée une tension sur le plan technique, mais aussi sur le plan dramatique (elle instaure un trouble étonnant dans le corps), et combien elle nous semble comporter un enjeu humaniste, en plaçant les usagers « sur ce chemin de crête entre l’artificiel et le vivant, [où] la robotique ne cesse de rencontrer des résistances, de se heurter à des impossibilités, à des tabous », la rendant ainsi « passionnante à suivre dans la durée » (Grimaud & Vidal, 2012, p. 17). L’apparente inutilité6 du don du geste rien que pour le mouvement lui-même, prenant effet dans une gratuité, n’est pas pour autant sans résistance. Nous explorons ensemble, « la danseuse et le roboticien », des questions très concrètes, dont on ne soupçonne pas la complexité : comment bouge-t-il ? D’où le mouvement est-il initié ? Comment le poids est-il réparti ? Comment faire en sorte que le robot se porte lui-même et qu’il donne l’impression d’une autonomie naturelle, selon des mouvements en synergie ? Comment aller de ce point A à ce point B sans faire chauffer le moteur de cette articulation et sans que le robot ne chute ? D’une apparente simplicité, il est nécessaire de déconstruire la source du mouvement faisant apparaître son incroyable complexité.

En définitive, nous parvenons à interroger l’épaisseur relationnelle qui pourrait exister dans l’échange par le mouvement entre un robot humanoïde et un être humain spécialiste ou non du mouvement. Le monde de la robotique livre aujourd’hui des robots qui sont faits pour être programmés et reprogrammés à l’infini en dehors des centres de recherche, c’est le cas du robot humanoïde Poppy, robot open source7. Avec ce type de robot, la relation d’apprentissage devient inédite et permet toutes sortes de collaborations, notamment avec les arts ou les non-spécialistes.

La relation homme/robot devient, comme le soulignent Grimaud et Vidal, « à la fois l’objet, le cadre, la finalité et le moyen de l’expérimentation robotique » (2012, p. 10). Elle devient un tout à la fois, dans lequel le mouvement dansé, en tant que mouvement dégagé d’une tâche à accomplir, d’un faire comme c’est la plupart du temps le cas en robotique, prend légitimement sa place comme exploration de cette relation qui s’étirera entre le mécanique et le poétique. La robotique humanoïde se mêle de nos sens et, dans le cas qui nous intéresse, de notre sens kinesthésique, mobilisant ainsi tout un questionnement sur nos interactions par le geste et le toucher. Notre objectif est de souligner le paradoxe qui existe à constater la possibilité d’une sensation de mouvement interne entre un humain et un robot, postulant une certaine connaissance par le mouvement, nous entraînant sur le terrain de l’empathie kinesthésique. Qu’est-ce qui est à l’épreuve dans le partage du mouvement avec un robot humanoïde tel que Poppy ? Ne faut-il pas qu’il nous touche pour que nous ayons le désir de le mettre en mouvement et pour que la mise en mouvement soit effective ? Et pour qu’il nous touche, n’a t-on pas besoin qu’il y ait entre nous justement un écart ?

L’écart propre au robot et la possibilité de l’entre

La relation avec le robot humanoïde Poppy offre une interaction concrète puisque le robot peut être touché et manipulé. Comment l’être humain met-il en mouvement le robot humanoïde ? Quels effets ses agencements produisent-ils en retour ? D’ores et déjà une première découverte mérite d’être formulée, car elle nous désillusionne sur la toute-puissance supposée d’un robot, et elle permet d’envisager la possibilité de l’échange puisqu’elle met en lumière un premier écart dans le robot lui-même. Notre découverte dans ce travail entre le technique et le relationnel fut celle de l’écart propre au robot entre le programme et l’interaction enregistrée. À notre grande surprise en tant que non-spécialiste, nous avons perçu qu’au cours du processus de conception des gestes, quelque chose échappe au programme, alors même que nous le croyions infaillible. Pour réaliser une seule séquence de mouvements longue, on lie ensemble grâce au logiciel plusieurs mouvements qui ont été pensés pour se suivre et il se peut que le comportement résultant ne soit pas forcément identique à celui qu’on a enregistré.

La relecture du mouvement enregistré n’est donc pas parfaite et le moteur est contraint par la physique du monde, ici la gravité et les contacts. Il y a alors une différence entre la commande demandée et la position réelle. Dans l’entre-deux du mouvement, c’est le style du robot qui existe : il tisse, il lie les deux gestes entre eux et, de façon microscopique parfois, dans la boucle du geste, se glisse l’imprévisible (un mouvement parasite, une crispation, un réajustement mécanique8).

Dans le monde de la robotique traditionnelle, en particulier industrielle, cette différence est une erreur qu’il faut à tout prix minimiser. Pour cela on utilise des moteurs puissants et rigides, dimensionnés de telle sorte que les contraintes physiques environnementales n’aient qu’un impact négligeable sur les performances du robot. On peut alors voir des robots se mouvoir avec des dynamiques anatomiquement incompatibles avec celles que l’on peut observer chez l’être humain. Dans le cas du travail de recherche autour de Poppy, la conception robotique avec de tels moteurs n’est pas compatible avec la réalisation de robots interagissant dans le monde réel en contact avec des humains non experts. Le monde physique fait partie du corps du robot, son comportement réel naît alors d’une interaction particulière entre le contrôle, les propriétés morphologiques et l’environnement (Steels, 1990, p. 451-461). Le robot, du fait de ses propriétés morphologiques, a donc la capacité de réveiller les combinaisons qu’il a produites et d’en tirer, entre elles, de nouvelles, par accident. Qu’est-ce qui se joue dans cette échappée ? Nous ne pouvons nous empêcher de penser à une puissance d’agir du robot lui-même, mais cela ne serait pas sérieux. Son sous-dimensionnement nous apparaît en définitive comme une des conditions de possibilité de la relation. C’est parce qu’il ne peut forcer ses moteurs à réaliser des mouvements antinaturels qu’il peut nous toucher. Ses trajectoires de mouvements peuvent demeurer dans le domaine de nos possibles moteurs et il est alors envisageable de cheminer à travers un milieu sensori-moteur commun.

En effet, Poppy doté de capacités interactives élémentaires (structure articulée élaborée à partir du corps humain, sous-dimensionnée en termes de puissance) agence un entre-deux qui permet avant tout la possibilité d’un mouvement d’aller-retour entre l’objet robot et le sujet. « L’immense problématique de l’entre », écrit le professeur Takaaki Morinaka spécialiste en théorie de l’art, « ne se réduit pas à un simple rapport substantiel dans la société humaine, mais nous renvoie à un lieu ontologique dans lequel il y aurait une oscillation ou une alternance entre l’existence et la non-existence » (2006, p. 86). Parfois il y aurait du robot, parfois de l’humain, parfois rien, parfois de l’humain-robot, du robot-humain. La problématique de l’entre, avant tout, met en mouvement ; il ne peut y avoir d’entre sans mouvement, sans quoi l’un des deux pôles en jeu scléroserait l’échange. Dans le cas de notre expérimentation, c’est la question du vivant concomitante avec celle de la génération d’un espace potentiel d’animation qui demeure centrale.

Si l’on s’en remet à la théorie du roboticien japonais Masahiro Mori9 et à la notion d’entre-deux, telle qu’elle a pu être développée par le philosophe et psychanalyste Daniel Sibony, nous pouvons comprendre que l’impression d’étrangeté et le rejet de certains robots et créatures artificielles proviennent du principe qu’il n’y a justement pas d’entre-deux possible. Pour Sibony, « l’entre-deux apparaît comme espace dynamique et non comme trait d’une différence entre bon et mauvais côté. C’est l’espace d’une pratique, d’un passage. Et c’est comme tel un moyen de penser la situation. Lorsque dans une pratique on échoue à le faire apparaître ; l’entre-deux, c’est que l’origine prend toute sa place » (1998, p. 26).

Ainsi, l’entre-deux n’est autre qu’un espace qui permet le mouvement (c’est en fait un espace-mouvement) et, dans le cas d’un rejet de la créature artificielle, l’humain demeure « collé » à la figure du robot en question — comme copie originelle de l’homme — qui ne lui accorde pas ce mouvement d’entre-deux. L’humain demeure alors captif de l’image de l’homme par la créature trop ressemblante et le mouvement se fige.

Car, comme le formule le sinologue François Jullien :

C’est seulement en rouvrant de l’écart et de la distance que l’on peut faire surgir de l’autre, qui ne soit pas collé à soi, annexé ou même « aliéné » par soi, parce qu’indexé sur soi, mais qui en soit détaché : qui ne soit pas seulement la projection ou la modification de soi, mais qui puisse effectivement se constituer en « autre » et, par suite, s’établir vis-à-vis. (2012, p. 72)

L’humain ne pourra en effet établir une relation que si de « l’entre » est dégagé, condition sine qua non « pour faire émerger de l’autre » et ainsi déployer l’écart « qui permet d’échanger avec l’autre, le promouvant en partenaire de relation résultée. L’entre qu’engendre l’écart est à la fois la condition faisant lever de l’autre et la médiation qui nous relie à lui » (Jullien, 2012, p. 72). Les différentes qualités du robot humanoïde Poppy, qui prennent leur essor dans un sous-dimensionnement, pourraient être perçues comme une déficience — une faiblesse en quelque sorte ; mais c’est justement ce qui permet l’écart, admettant par là la perte de l’image originelle de l’humain pour le retrouver autrement. L’écart produit de l’entre nécessaire à la mise en relation de l’humain et du robot humanoïde, et ce par une « mise en tension qu’il organise » et qui « maintient en activité, l’un vis-à-vis de l’autre, ce qu’il a séparé », il « en fait des pôles d’intensité, mais encore il ouvre, libère, produit, de l’entre entre eux » (Jullien, 2012, p. 50).

Nous pouvons percevoir, dans cette activité, l’idée taoïste de la possibilité avec les notions d’ouverture, de libération et de production, formulée suivant un registre de l’énergétique par l’artiste plasticien chinois Chen Zhen. Elle nous semble appropriée pour mieux comprendre cet entre, producteur d’écart :

Cette fois-ci ce que nous allons faire est de se dégager de notre énergie et de la donner aux autres, « de fusionner » avec l’énergie de l’autre. Une sorte de champ d’énergie et « caisse de résonance » pour créer ensemble une « possibilité ». […] La possibilité est une notion taoïste très importante, il s’agit de notion comme la vie, le devenir, le processus de croissance ou le vivant. […] Donc, garder vivant est une question de garder « la possibilité ». Garder l’espace de la liberté. (Cité par Adicéam, 2012, p. 11.)

Nous comprenons alors que sans cet écart, l’humain n’a pas la place de se voir dans l’autre (ici le robot humanoïde), car il l’est presque déjà à la fois originellement et paradoxalement, de façon artificielle. Aussi, on perçoit combien l’écart peut être une possibilité de maintien du vivant par la mise en tension de deux pôles d’intensité. Suivant l’expérience que nous avons vécue avec Poppy, nous pouvons affirmer qu’être avec le robot c’est faire l’épreuve d’une tension qui nous meut vers l’autre robot. Ne faut-il pas rappeler ici l’étymologie indo-européenne de la danse ? Le mot danse provient de l’indo-européen ten qui a donné le mot tension en français. On ne peut pas éviter de se demander si de cette mise en tension, il ne pourrait pas y avoir danse ? Il est vrai que le corps du robot désaffecté ne connaît pas l’émotion (émovere : mise en mouvement). Cependant, la mise en relation de l’humain et du robot humanoïde permet la possibilité de « garder vivant » par le contact et la manipulation. Qu’est-ce qui est précisément mis en mouvement dans cette mise en tension ?

« C’est l’humain qui partage avec son humain projeté10 » ou comment l’humain se figure à travers l’autre par le mouvement

Tout d’abord, il est impossible de ne pas évoquer deux choses qui apparaissent chaque fois que l’humain est en interaction avec le robot humanoïde Poppy. Selon Matthieu Lapeyre, la projection d’un genre ou d’une douleur ressentie à la place du robot sont deux réactions systématiques, et chaque fois ces mécanismes de projection renvoient au fait que l’humain entretient avec les objets (humanoïde ou non) un rapport anthropomorphique. Cette disposition à prêter des intentions, des pensées ou des sentiments, aux objets inanimés, aux animaux ou même aux plantes relève de la projection et provient, selon le psychiatre et chercheur Serge Tisseron, « d’une composante essentielle de l’esprit humain : nous ne nous sentons “au monde” qu’à la mesure de notre possibilité de prêter au monde certaines caractéristiques de notre vie psychique. Autrement dit, nous apprivoisons les objets en projetant notre fonctionnement physique et psychologique en eux » (cité par Baddoura-Gaugler, 2013, p. 29).

Dans notre cas, nous avons fait l’expérience de la projection de la douleur qui nous a permis de déterminer l’alignement des segments corporels le plus juste suivant le modèle anatomique de l’humain. Une tête ou une rotule qui réaliserait une rotation trop importante, dans le cas d’une transmission de mouvements qui cherche le naturel et non l’artificiel, rebute immédiatement, d’abord pour son effet visuel d’étrangeté, et ensuite simplement parce que dans le travail d’apprivoisement par le mouvement « ça nous fait mal » simultanément (la même sensation peut exister dans le cadre de l’observation d’une contorsionniste). Cette projection de la douleur par rapport au mouvement sert alors d’indice et révèle un état corporel limite imaginaire que nous imposons au robot. On lui prête un corps humain, en projetant nos propres schèmes de mouvement, dès ce moment de partage de la douleur. Ce que nous appelons le partage du mouvement commence alors avec cette sensation imaginaire de douleur, qui nous permet de « nous sentir au monde » avec le robot humanoïde selon le partage de nos articulations et segments corporels.

La mise en mouvement concerne à la fois le robot dans les déplacements des segments et des masses de son corps dans l’espace, mais aussi l’usager qui se mobilise dans sa totalité pour le robot. Durant notre expérience, nous avons pu constater que nous faisions en fait l’épreuve d’une motion interne. Nous parvenions à nous mettre à la place du robot humanoïde — en nous plaçant de l’intérieur, comme le ferait le marionnettiste avec les marionnettes à fils11, sauf que dans notre cas c’est notre corps entier qui se place. Nous devons déterminer les lignes de circulation claires à travers la structure du robot, en résonnance avec les nôtres qui sont notre référentiel. Comment répartir efficacement les lignes de tension de manière égale dans toute la structure du robot, pour procurer amplitude et liberté d’action ?

Nous nous plaçons dans le centre de gravité de chaque membre pour que le robot puisse gérer son propre poids. Pour transmettre une organisation gravitaire qui fasse tenir le corps du robot par lui-même, bénéficiant d’appuis au sol, de mouvement de poussé, voire même de glissé, on opère une conversion kinesthésique : on n’opère qu’avec des modifications des segments proximaux et non distaux. Très vite, on se rend compte qu’on ne peut initier le mouvement par la périphérie, par « l’os » distal (l’os le plus éloigné du centre du corps), car le robot n’enregistre pas, ne peut reproduire, il ne peut se porter lui-même. On agit alors différemment, on se projette autrement, et on se décale, on bouge le robot selon « l’os » proximal (l’os le plus proche du corps). Ce qui revient à bouger le robot au plus près des moteurs.

En bougeant le robot par l’os proximal, comme le formule Bonnie Bainbridge Cohen (fondatrice de l’école de Body-Mind Centering12), on agit « comme un levier pour projeter le corps dans l’espace et le poids du corps déplacé dans l’espace devient la force de résistivité qui augmente la force et le support des masses » (2002, p. 51). Nous parvenons à échanger de ce fait sa structure par un processus de simplification de notre corps de chair. On ne garderait alors que l’essentiel dans le partage du mouvement, l’os, le squelette, le segment qui donnent une direction, une intention spatiale. Lorsqu’on manipule l’objet humanoïde, nous cherchons finalement à donner l’illusion qu’il se porte lui-même, c’est-à-dire qu’il gère son propre poids et ses transferts, rendant ainsi le mouvement plus naturel. Par un processus imaginaire, nous mettons en mouvement le squelette et imaginons le muscle. Ainsi ce processus est digne d’une opération d’abstraction où le corps de l’expérimentateur se schématise, se simplifie pour transmettre l’essence du mouvement au robot humanoïde.

Le corps ressaisi par l’objet désir de mouvement

La tendance actuelle ne voit dans l’empathie qu’« une communauté affective avec la personne d’autrui », alors qu’à l’origine il s’agissait plutôt d’un « transfert du moi en celui d’autrui ou même en objet » (Elie, 2009, p. 18). Travailler avec le robot entraîne de notre point de vue une sensation de mouvement, comme un toucher interne de l’ordre de l’empathie dans son sens d’origine, mais il faudrait pouvoir mettre au point diverses expériences scientifiques pour observer ce processus, qui permettraient aussi de mettre en perspective le rôle des neurones miroirs.

Toutefois, il existe une forme d’empathie pertinente pour notre propos : l’empathie kinesthésique. Elle s’introduit efficacement dans le monde du mouvement et de la danse, puisqu’elle est à la fois une expérience du mouvement et du regard. L’analyste du mouvement, Hubert Godard, la définit comme « la sensibilité particulière qui est éveillée lorsque quelqu’un bouge en face de soi » (Borillo, 2005, p. 31). Le regardant est donc « bougé dans son corps » par les mouvements qu’il voit. Nous avançons l’idée que l’humain parvient à se figurer à travers le robot humanoïde Poppy grâce à toutes ses spécificités. On parvient alors à le faire bouger de l’intérieur, car on y intègre sa propre structure muscolo-squelettique, on échange avec l’essentiel, la base corporelle, celle qui soutient, celle qui reste. On appréhende la différence de mouvement avec l’objet, et on se place en fonction de cette connaissance kinesthésique qui s’affine très rapidement et bénéficie d’un retour immédiat.

L’interaction par le toucher pour enregistrer de nouveaux mouvements (comme le précise Matthieu Lapeyre, « normalement on ne touche pas les robots ») et le mode passif de Poppy qui instaure une dynamique manipulé/manipulateur entraîne une nouvelle technique du corps dans le sens où Marcel Mauss (2004 [1950], p. 365-386) a pu en développer le sens et la portée — et ce à l’inverse des nouvelles technologies (jeux vidéo ou internet) où le corps, la plupart du temps immobilisé, peut être considéré comme gênant ou superflu. L’intégration du geste par la manipulation demeure totalement différente d’une intégration par un logiciel, branché, séparé.

Dans le cadre de notre expérience, l’expérimentateur se met en mouvement et ce n’est qu’au travers de son action corporelle qu’il peut comprendre comment mettre en mouvement le robot. Le corps est alors ressaisi via le rapport à l’objet, et l’on peut dire que, dans une certaine mesure, on danse avec l’objet, on peut « jouir de donner corps » (Sibony, 1995, p. 175) et ainsi de le garder vivant.

Lors d’un atelier donné pour une classe de lycée pendant la résidence, nous avons pu observer à quel point les élèves s’étaient détachés de la logique de la représentation du mouvement pour se concentrer sur la dynamique propre, signalée par la logique du corps du robot lui-même. Ils ont fait l’expérience momentanée de l’oubli d’une extériorité. Quand on leur demandait de réaliser le mouvement entre une posture A et une posture B, ils se mettaient malgré eux en mouvement, se mettaient à la place du robot, essayaient sur le sol. Juste avant nous avions fait une expérience de captation de son simultanée avec les mouvements dans l’espace, et leur avions demandé de bouger — donc de danser. Inhibés, très peu ont essayé ; ceux qui ont tenté l’expérience montraient une belle extériorité, (dé)montraient des mouvements déjà appris dans un style très marqué. L’expérience du don du mouvement avec les lycéens nous conduit à affirmer que Poppy possède des vertus désinhibitrices à exploiter dans l’interaction et que la danse peut y contribuer.

Il semblerait que le robot humanoïde permette à l’humain de faire diversion en prenant momentanément la place du sujet ou celle de l’objet. Le robot humanoïde permet au sujet expérimentateur de s’alléger d’un poids, celui de l’image de la danse bien faite, car il est sollicité par un registre ludique et lié à l’imaginaire où il s’agit surtout de garder vivant un objet. L’objet crée par conséquent un désir de mouvement, c’est-à-dire que cet autre robot réfléchit la tension d’un désir moteur. Le sujet s’abstrait en jouissant de l’écart qui le libère de la volonté de représenter, « de faire une danse ». Nous y voyons la possibilité de s’abstraire au sens premier du terme, c’est-à-dire étymologiquement « d’enlever en tirant », et ainsi de ne composer qu’avec les fondamentaux du mouvement (poids, espace, temps, flux).

Comme nous avons pu le constater, l’objet robot, par sa morphologie et sa sous-dimension, accepte de se mouvoir avec l’autre. Ensemble, l’expérimentateur et le robot peuvent créer une « possibilité » qui revient à « garder vivant », c’est-à-dire à « garder l’espace de la liberté » (Zhen, 2012, p. 11). En gardant vivant, c’est en fait la relation que l’on cherche à maintenir, cette fameuse étincelle de Maurice Merleau-Ponty (1964, p. 21). Nous jouons sans cesse de cet aller-retour entre l’animation et la réification du corps en mouvement de celui qui donne le mouvement. Nous sommes parfois robot-humain, humain-robot, et cela dans un mouvement permanent de réadaptation et de réajustement.

On peut concevoir que dans cet entre une corporéité imaginaire s’élabore selon le mode d’une zone d’échanges et de transformation. Ce qui lui donne sa forme n’est autre que la conjonction provisoire des mouvements qui l’animent et que cette corporéité reçoit simultanément. Elle est en fait le morphing même du corps, de la spatialité, de la temporalité, de l’altérité et de l’imaginaire. Par morphing, nous entendons la simultanéité du mouvoir et de l’é-mouvoir, qui entraîne une collaboration dynamique entre tout ce qui est vu, touché et ressenti. L’entre, dans ce cas, pourrait n’être que notre désir d’établir une relation.

Conclusion

Notre expérience pouvait avoir un enjeu humaniste, nous le pensons toujours et entrevoyons désormais pourquoi. Tout d’abord, il nous semble que l’expérience du mouvement partagé nous apprend ce qu’être humain peut vouloir dire par le paradigme du mouvement, et que nous ne cherchons pas, dans ces expérimentations, à dresser les corps ou à en réguler le fonctionnement pour affaiblir la place de l’émotion, mais plutôt à laisser la mise en mouvement opérer d’elle-même. Aussi, en plus d’être une expérience kinesthésique, c’est une expérience du regard qui est en jeu : on ne voit plus le robot, on le regarde : « un sentiment de gratuité ludique » envahit « notre conscience spectatrice » (Billeter, 2012, p. 46) quand nous suivons du regard chaque modification qui vient d’être enregistrée par le corps à corps chez le robot. Au sein de notre conscience spectatrice, nous nous distancions du geste et nous sommes amenés à nous demander qui agit, entraînant alors une jouissance esthétique (aesthesis : sensibilité, sensation). Dans le don du geste et dans le regard porté sur le robot, l’expérimentateur jouit de l’espace dynamique de l’entre comme maintien du vivant.

Par conséquent, l’entre produit, dans le cadre de notre expérimentation, le désir de maintenir la relation vivante. Le lieu de l’entre devient alors le lieu d’un partage du kinesthésique, un lieu de croisement intense qui comporterait toutes les strates du geste (de ses lois physiques à son invisibilité). Ce qui nous fait penser, comme l’auteur de la thèse sur les processus de subjectivation chez le robot humanoïde, que :

Ce qui se joue dans le projet et les usages du robot, bien plus que pour tout autre objet technique, concerne intimement l’homme, en son être, et ce qui est investi ou exploré dans le robot concerne ce qui est investi dans l’humain même. Le robot ne serait qu’un subterfuge, un détour et un intermédiaire, que prend l’homme pour aboutir à l’homme ; c’est davantage l’être profond de l’humain plutôt que l’avoir qui est en jeu. (Baddoura-Gaugler, 2013, p. 51)

Le robot humanoïde comporte de multiples potentialités, et Poppy, par ses spécificités, peut devenir un outil d’exploration kinesthésique, de dé-sidération (pour sortir de la sidération spectaculaire et de la représentation), en définitive de mise en mouvement.

Bibliographie

Adicéam Ashok, 2012, « Shanghai ! La tentation de l’Occident », exposition Institut culturel Bernard Magrez – Château Labottière, Bordeaux.

Baddoura-Gaugler Ritta, 2013, L’homme et le robot humanoïde : Transmission, Résistance et Subjectivation, thèse de doctorat en études psychanalytiques, université de Montpellier.

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Notes

1 Matthieu Lapeyre a conçu le robot humanoïde au sein de l’équipe Flowers de l’Inria Bordeaux. L’article présent traite d’une expérience vécue avec Poppy, Matthieu Lapeyre, moi-même et des élèves d’une classe de lycée conviée à un atelier. La progression de la réflexion s’appuie sur des remarques du concepteur du robot, retenues lors des expériences elles-mêmes ou lors des entretiens menés pour la réalisation de cet article. Retour au texte

2 La robotique — et particulièrement le cas du robot humanoïde — est l’un des défis scientifiques qui a le plus mis en difficulté la communauté scientifique au cours de ces dernières années. Sa pluridisciplinarité intrinsèque rend difficile son appréhension dans toute sa complexité. Dans ce contexte, Poppy a été conçu comme un outil polyvalent et accessible permettant, par l’expérimentation pluridisciplinaire, d’aborder les problématiques scientifiques et technologiques qui empêchent aujourd’hui d’envisager des robots sociaux d’intervenir de manière autonome dans nos quotidiens. Retour au texte

3 La résidence art/science a eu lieu au lycée Saintonge de Bordeaux en mars 2014. Elle s’inscrit dans une démarche de recherche visant à s’étendre vers des publics initiés ou non pour engager des interrogations sur notre rapport au numérique. Se sont rencontrées pendant cette résidence, l’équipe de Comacina Capsule créative (Ama Braci, plasticienne et Marie-Aline Villard, danseuse-chercheuse) et l’équipe Flowers de l’Inria Bordeaux (Matthieu Lapeyre et Pierre-Yves Oudeyer). Retour au texte

4 Pypot est une bibliothèque écrite en Python par l’ingénieur Pierre Rouanet, et permettant de programmer assez facilement des créatures robotiques telles que Poppy. Retour au texte

5 Cette différence entre la position réelle et la position désirée caractérise la « souplesse », appelée « compliance ». Retour au texte

6 La problématique de l’utile/inutile ne doit-elle pas être repensée au profit d’une inutilité utile ou d’une utile inutilité, comme une activité qui provoque des effets plus qu’elle ne produit des résultats ? Retour au texte

7 Toutes les sources associées au développement technologique du projet Poppy sont disponibles sur <https://github.com/poppy-project/> et sont totalement libres d’utilisation, de modifications et d’exploitation. Ainsi n’importe qui peut utiliser tout ou une partie de Poppy pour explorer ou développer les applications robotiques qui l’intéressent. Retour au texte

8 On peut noter les différents termes utilisés pour qualifier ces mouvements imprévisibles, qui varient en fonction du degré de relation instauré avec le robot. Les termes peuvent être de l’ordre du mécanique, du physique, du psycho-physique, etc. Ces différents registres se retrouveront chaque fois que l’on parle du mouvement du robot, chacun adoptant un point de vue en fonction de la relation établie. Retour au texte

9 Masahiro Mori est un roboticien japonais qui a publié en 1970, dans la revue Energy, l’article « The Uncanny Valley » qui propose d’interroger le bon équilibre au sujet de la ressemblance du robot avec l’humain, afin que celui-ci ne lui paraisse pas monstrueux. Le bon modèle de familiarité proviendrait des marionnettes du théâtre traditionnel japonais (le bunraku), qui ne ressemblent pas à de véritables êtres humains mais qui, perçues en mouvement sur scène, donnent l’illusion de l’être humain sans effet de décalage monstrueux. (Pour le texte original allié d’un commentaire récent de l’auteur, voir Mori, 2012.) Retour au texte

10 Citation tirée d’un entretien avec Matthieu Lapeyre, janvier 2015. Retour au texte

11 Nous renvoyons notre lecteur au petit ouvrage de von Kleist (1993). Retour au texte

12 Le Body-Mind Centering est une approche holistique du mouvement. Bonnie Bainbridge Cohen est l’auteur de l’ouvrage de référence Sentir, ressentir et agir aux éditions Contredanse, où sont abordés les fondements de cette pratique du corps en mouvement passant par l’expérience, qui se concentre sur le toucher, la réorganisation somatique, l’anatomie expérientielle, les processus de perception et le développement moteur et psychophysique. Retour au texte

Citer cet article

Référence papier

Marie-Aline Villard et Matthieu Lapeyre, « À propos d’une expérience de mouvement partagé avec un robot humanoïde : l’entre-deux comme maintien du vivant », IRIS, 37 | 2016, 193-205.

Référence électronique

Marie-Aline Villard et Matthieu Lapeyre, « À propos d’une expérience de mouvement partagé avec un robot humanoïde : l’entre-deux comme maintien du vivant », IRIS [En ligne], 37 | 2016, mis en ligne le 15 décembre 2020, consulté le 28 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/iris/index.php?id=1505

Auteurs

Marie-Aline Villard

Université Bordeaux-Montaigne

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Institut national de recherche en informatique robotique et automatique, Aquitaine

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