Les « eutopies » à l’Âge classique

  • Utopias in the Classical Age

DOI : 10.35562/iris.1538

p. 43-55

Résumés

Avec l’essor et le succès croissant de la littérature de voyages, nourrie par les grandes explorations et découvertes, les utopistes de l’Âge classique ont commencé à s’intéresser plus au sujet épique qu’à l’encadrement rhétorique de la relation utopique. Avec comme résultat des utopies réalistes dans lesquelles les narrateurs, en imitant le schéma de la littérature de voyages et d’exploration, prétendent avoir découvert des civilisations exotiques idéales, crédibles et applicables, qu’ils offrent en modèle à leurs contemporains. Les principaux procédés de construction des « utopies réalistes » sont la sélection et l’extrapolation utopique. Travaillant sur l’image de son monde historique, l’utopiste fait un choix des traits négatifs et positifs et les regroupe dans deux espaces complémentaires. Les caractéristiques jugées mauvaises sont rassemblées et isolées dans la description de « notre » civilisation (d’habitude l’Europe), celles bénéfiques sont regroupées et extrapolées dans la configuration de la civilisation exotique. L’exclusion des éléments désagréables, nuisibles et funestes soumet la fiction utopique à une « réduction au positif », ce qui fait d’elle un univers fictionnel eudémonique, capable de susciter l’adhésion rationnelle, morale et affective des personnages, ainsi que des lecteurs.

Nurtured by the great explorations of the period, the emergence of voyage literature in early modern Europe led classical utopian writers to shift from the dialogical form of Renaissance utopias to voyage narratives. A great many of the classical utopias worked in a realistic code, mimicking the voyage epic, in which fictional voyagers discovered exotic ideal civilizations that were offered as a contrastive example to the European countries. The main construction procedures of these “realistic utopias” were utopian selection and extrapolation. The utopian writer started from the “neutral” image of his contemporary world and operated a separation between its positive and negative features. He regrouped the negative features into the image of “our” civilization (Europe) and the positive features into the image of the antipodal civilization. By excluding the bad and harmful elements, the utopian writer submitted his ideal society to a “reduction to the positive” and transformed it into a eudemonic fictional world, meant to prompt a rational, moral and emotional adhesion response in the characters, as well as in the readers.

Texte

À partir de la deuxième moitié du xviie siècle, les utopies changent de « porteur » narratif. Thomas More et les utopistes italiens, s’inspirant des Antiques, avaient utilisé et imposé la forme du dialogue, dans lequel un voyageur raconte à un petit auditoire, ou tout simplement à un interlocuteur, sa visite au pays idéal. La plupart des textes utopiques de la Renaissance sont organisés sous cette forme dialogique, qui permet une meilleure mise en vedette, par des questions et des interrogations maïeutiques, des détails et des nuances de la société décrite. Cependant, avec l’essor et le succès croissant de la littérature de voyages, nourrie par les grandes explorations et découvertes, les utopistes ont commencé à s’intéresser plus au sujet épique qu’à l’encadrement rhétorique de la relation. Le discours du voyageur utopien devient dorénavant dominant, donnant la priorité aux péripéties de la narration et faisant l’impasse sur le cadre de la prestation du narrateur.

Les voyages extraordinaires de l’Âge classique reprennent les voyages merveilleux de l’Antiquité et du Moyen Âge. Plusieurs récits utopiques adoptent un profil classicisant, néo-anacréontique, arcadien, jetant un regard nostalgique sur les civilisations antiques. Homère et Platon, Tacite et Thucydide, les Grecs et les Atlantes, les Égyptiens et les Romains ont inspiré différents utopistes et leur ont offert le cadre pour les propositions de cités idéales. On peut mentionner dans ce sens Les Aventures de Télémaque de Fénelon (1699), Sethos, histoire, ou vie tirée des monumens. Anecdotes de l’ancienne Égypte de Jean Terrasson (1731), le Voyage d’Alcimédon, ou Naufrage qui conduit au port du Comte de Martigny (1751), Les Isles Fortunées, ou les Aventures de Bathylle et de Cléobule possiblement de Julien-Jacques Moutonnet-Clairfons (1778), ou encore l’anonyme Éducation d’Admète (1791).

Ce sont cependant les « merveilles de l’Orient » qui constituent la source d’inspiration la plus riche. Comme nous l’avons démontré ailleurs, les utopies classiques héritent du bassin sémantique du merveilleux médiéval et revisitent pratiquement toutes les localisations que les théologiens et les docteurs de l’Église avaient attribuées au Paradis terrestre (voir le chapitre « L’utopie — héritière des mirabilia médiévales » dans Braga, 2010). Sur le schéma de ces voyages initiatiques vers des points privilégiés de la mappemonde, les utopistes classiques ont emprunté à l’imaginaire médiéval toutes les figures fantastiques de « l’horizon onirique » des Indes fabuleuses (Le Goff, 1978), flore et faune surnaturelles, races humaines monstrueuses, objets et artefacts magiques, etc. Avec cette infusion de miraculeux, beaucoup d’utopies ont basculé du registre réaliste au registre fantastique, elles sont devenues des ou-topies, des non-lieux, impossibles en regard des lois courantes de la nature et de la société.

Cependant, en parallèle à ces voyages imaginaires, d’autres auteurs de voyages utopiques ont adopté dans leurs textes un pacte de lecture réaliste. En synergie avec la philosophie empirique et pragmatique classique, cette littérature s’ingénie à créer l’impression de vraisemblance, brouillant la distance entre la réalité et l’invention, et abusant souvent de la crédulité des lecteurs (voir le chapitre « Le pacte de vraisemblance » dans Braga, 2012). Parmi les « procédés d’authentification » des textes, Jean-Michel Racault énumère le recours aux lexiques techniques, la multiplication des détails descriptifs, inventaires et énumérations, description minutieuse du monde concret, insertion du récit dans une trame spatiotemporelle précise, narration à la première personne, etc. (Racault, 1991, p. 310-311).

En conséquence on a affaire à des utopies réalistes dans lesquelles les narrateurs, en imitant le schéma de la littérature de voyages et d’exploration, prétendent avoir découvert des civilisations exotiques idéales, crédibles et applicables, qu’ils offrent en modèle à leurs contemporains. Parfois ces relations imitent si bien le code réaliste que le public a pu croire à l’existence réelle de la société utopique, comme dans le célèbre cas de George Psalmanazar, français prétendu natif de l’île Formosa (le Taiwan), reçu dans les milieux lettrés de Londres comme émissaire formosan. Le pacte de vraisemblance proposé au lecteur fait basculer le sens général de ces récits du côté des ou-topies (« non-lieux » imaginaires, chimériques, inexistants) vers le côté des eu-topies (« bons-lieux » véridiques, probables, faisables).

Les textes qui s’inscrivent dans cette classe d’« utopies réalistes » sont : Denis Veiras, Histoire des Sévarambes (1677) ; Claude Gilbert, Histoire de Calejava ou de l’isle des hommes raisonnables (1700) ; Pierre de Lesconvel, Idée d’un règne doux et heureux, ou relation du voyage du Prince de Montbéraud dans l’isle de Naudely (1703) ; George Psalmanazar, Description de l’Île Formosa en Asie (1705) ; Hervé Pezron de Lesconvel, Nouvelle relation du Voyage du prince de Montbéraud dans l’isle de Naudely (1706) ; Edward Ward, The Island of Content: or, A New Paradise Discovered (1709) ; Simon Tyssot de Patot, Voyages et aventures de Jaques Massé (1710) ; François Lefebvre, Relation de voyage de l’isle d’Eutopie (1711) ; anonyme (Ambrose Philips ?), A Description of New Athens in Terra Australis Incognita (1720) ; le Marquis de Lassay, Relation du Royaume des Féliciens (1727) ; Edouard Dorrington, Le solitaire anglais ou aventures merveilleuses de Philippe Quarll (1729) ; Varennes de Mondasse, La découverte de l’Empire de Cantahar (1730) ; Stanislas Leszczynski, Entretien d’un Européen avec un insulaire du Royaume de Dumocala (1752) ; anonyme, Voyage curieux d’un philadelphe dans les pays nouvellement découverts (1755) ; James Burgh, Relation du premier établissement, des lois, de la forme de gouvernement et de l’État politique des Césars (1764) ; l’anonyme Voyage de Robertson aux Terres australes (1766) ; Guillaume Grivel, L’isle inconnue, ou Mémoires du Chevalier de Gastines (1783-1787) ; Moutonnet de Clairfons, Le véritable philantrope ou l’Île de la philantropie (1790) ; et le texte anonyme, que les commentateurs hésitent à situer entre la fin du xviie siècle et le xviiie siècle, Descripción de la Sinapia, Peninsula en la Tierra Austral.

Prenons pour exemple le texte de Denis Veiras, L’Histoire des Sévarambes, « peuples qui habitent une partie du troisième Continent, communément appelé la Terre Australe ». Selon la convention géographique utilisée par beaucoup d’utopies classiques, le royaume des Sévarambes est situé dans un soi-disant continent austral inconnu, qui fascinait les explorateurs et les géographes de l’époque. Cette terre fantasmée accumulait les rêves du paradis perdu des Européens. Dans la relation du capitaine Siden, le narrateur, elle aurait fait figure de terre promise pour un groupe de Parsis, partis de la Perse, conduits par Sévaris, à la recherche de la bonne fortune. Après avoir vaincu des peuples aborigènes et s’être allié à d’autres, Sévaris aurait instauré dans le nouveau monde une monarchie héliocratique.

Les procédés de l’ingénierie utopique sont patents : sélection des traits positifs de notre monde et leur extrapolation dans le monde des antipodes. Pour établir le gouvernement idéal, Sévaris et son conseiller Giovanni méditent « le choix de divers modèles » (Veiras, 1994, p. 130). Ainsi Giovanni avance-t-il le projet d’une société à sept classes (laboureurs, métiers mécaniques, métiers artisanaux, marchands, bourgeois et artistes, gentilshommes, seigneurs), inspirée des castes indiennes. Néanmoins le projet qui l’emporte est celui de Sévaris. Pour produire un système « incomparablement plus juste et plus excellent que tous ceux qu’on a pratiqués jusqu’ici », le nouveau Utopus part de la constatation que « les malheurs des sociétés dérivent principalement de trois grandes sources, qui sont l’orgueil, l’avarice et l’oisiveté » (Veiras, 1994, p. 131). Ce sont ces vices qu’il faut exclure de la société et de la nature humaine.

Pour mettre en place une telle réforme morale, Sévaris s’attaque à la base des différences entre les individus, à savoir la propriété privée. Il abolit le droit de posséder des biens personnels et nationalise toutes les terres et les richesses. Ensuite, il peut procéder à un nivellement des classes, matérialisant le principe que « la nature nous a faits tous égaux ». L’unique différence de rang qui reste en place est celle qui reflète l’inégalité d’âge. Pour le reste, les Sévarambes sont tous égaux devant l’État et leur Dieu souverain. Faisant écho à l’idéologie politique du Roi Soleil, Veiras déclare que le gouvernement utopique est « monarchique, despotique et héliocratique au premier chef, c’est-à-dire que la puissance et l’autorité suprême réside en un seul monarque ; que ce monarque est seul maître et propriétaire de tous les biens de la nation, et que c’est le Soleil qu’on y reconnaît pour roi souverain et pour maître absolu » (Veiras, 1994, p. 145). Toutefois, pour faire marcher cette théocratie solaire au niveau social, Sévaris et ses successeurs assument le rôle de vice-rois, c’est-à-dire de vicaires du dieu Soleil.

Le code de lois promulgué par Sévaris imite la simplicité des tables de Moïse, puisqu’il est supposé refléter le droit naturel et les « maximes fondamentales de l’État ». Cette législation met à nu le procédé de séparation ou d’électrolyse utopique, à savoir l’exclusion du mal et le choix du bien, en imposant :

De n’admettre à la vice-royauté que celui que le Soleil aura choisi d’entre les principaux ministres de l’État […]. De ne pas souffrir que la propriété des biens tombe en aucune manière entre les mains de personnes particulières ; mais d’en conserver l’entière possession à l’État, pour en disposer absolument. De ne pas permettre qu’il y ait de rang ni de dignité héréditaire ; mais de conserver avec soin l’égalité de la naissance, afin que le seul mérite puisse élever les particuliers aux charges publiques. De faire respecter la vieillesse et d’accoutumer de bonne heure les jeunes gens à honorer ceux qui sont leurs supérieurs en âge et en expérience. De bannir l’oisiveté de toute la nation, parce que c’est la nourrice des vices et la source des querelles et des rebellions, et d’accoutumer les enfants au travail et à l’industrie. De ne point les occuper à des arts inutiles et vains, qui ne servent qu’au luxe et à la vanité, qui ne font que nourrir l’orgueil et qui, engendrant l’envie et la discorde, détournent les esprits de l’amour de la vertu. De punir l’intempérance en toutes choses parce qu’elle corrompt le corps et l’âme et fait tout le contraire de la vertu opposée, qui les conserve l’un et l’autre dans un État tranquille et modéré. De faire valoir les lois du mariage et les faire observer aux personnes adultes, tant pour la propagation de l’espèce et l’accroissement de la nation, que pour éviter la fornication, l’adultère, l’inceste et d’autres crimes abominables qui détruisent la justice et troublent la tranquillité publique. (Veiras, 1994, p. 133)

Et l’abrégé des principales lois de Sévaris finit sur trois autres articles, concernant l’éducation des jeunes et la religion.

Comme il est facile de le voir, la législation proposée par Veiras est moins celle d’un homme politique et plus celle d’un moraliste. L’auteur procède par l’identification des vices de la société contemporaine — oisiveté, orgueil, envie, discorde, fornication, adultère, inceste, etc. — et par leur bannissement de la société souhaitée. Il en résulte un État idéal généré par ce que nous appelons une « réduction au positif » : par décret, le comportement de tout un chacun rejette le mal et la corruption de tout bord, et s’adonne à la pratique du bien, de la vertu, de l’amour, de la tempérance et de la modération, etc. Bien que probablement irréalisable, une telle réforme éthique de la nature humaine reste une « utopie réaliste », puisqu’elle n’introduit pas d’éléments fantastiques, hors les lois de la nature, de la société et de l’âme humaine.

Comme dans tout dispositif utopique, la création d’un pôle positif pose automatiquement l’existence d’un pôle négatif aussi. Si les « anions » moraux reviennent au monde des antipodes, les « cations » restent les caractéristiques du monde européen. Entre les deux sociétés situées des deux côtés du miroir, s’institue une symétrie comme entre le négatif et le positif d’un film. « Les choses sont les mêmes dans le fond mais la manière de les distribuer est différente », commente l’auteur. À l’encontre des Sévarambes,

Nous avons parmi nous des gens qui regorgent de biens et de richesses et d’autres qui manquent de tout. Nous en avons qui passent leur vie dans la fainéantise et dans la volupté et d’autres qui suent incessamment pour gagner leur misérable vie. Nous en avons qui sont élevés en dignité et qui ne sont nullement dignes ni capables d’exercer les charges qu’ils possèdent ; et nous en avons enfin qui ont beaucoup de mérite mais qui, manquant des biens de la fortune, croupissent misérablement dans la boue et sont condamnés à une éternelle bassesse. (Veiras, 1994, p. 149)

Pour que l’image du monde utopique monte au zénith de l’excellence, il faut que l’image de notre monde descende au nadir de l’imperfection.

Un cas des plus intéressants est celui de George Psalmanazar, le nom sous lequel se cache l’auteur de An Historical and Geographical Description of Formosa (1704), traduit en français l’an suivant comme Description de l’île Formosa en Asie (1705). Né probablement dans le midi de la France, l’auteur a beaucoup circulé en Europe, posant en Italie comme Irlandais, en Allemagne comme Japonais, et finalement en Angleterre comme Formosan (natif de l’île de Taiwan). Il est difficile de pénétrer les « masques » de cet individu que beaucoup ont fini par traiter d’« exemple avéré de simulateur » (Keevak, 2004, p. 4 ; voir aussi Ruthven, 2001, p. 20 et suiv.) ; il est instructif toutefois de voir comment, pour se construire des identités fausses, il a su mettre à profit les conventions des discours scientifiques de l’époque. Sa description de Formosa a été soumise à la Société Royale en tant que traité ethnographique, car elle imite le style des relations de voyages et des descriptions de populations nouvellement découvertes.

De ce fait, la Description de l’Île Formosa en Asie adopte un pacte de lecture réaliste. Il est vrai qu’un carroyage mythologique sous-tend la narration : l’île est située dans la mer de Chine, où plusieurs cartographes du Moyen Âge plaçaient le jardin d’Éden ; elle s’appelle Gad Avia, la Belle Île, ayant une connotation paradisiaque transparente ; enfin, elle fait figure de « terre promise » pour un « peuple choisi », dont Psalmanazar lui-même serait le prophète. Cependant, la description de la société formosane, quoique inventée, impose un effet de vraisemblance et de plausibilité, qui a pu valoir à son auteur, dans les milieux cultes de Londres, un certain crédit d’ethnographe et même d’aborigène. Nous avons ici un beau sujet d’imagologie, démontrant que les caractéristiques du discours sur l’autre, surtout en l’absence des informations directes, peuvent imposer une réalité mentale dont la validation ou l’invalidation s’avèrent difficiles à partir des seuls critères internes du discours.

L’île Formosa n’est pas une utopie, mais plutôt une hétérotopie, puisque Psalmanazar est plus intéressé par l’invention ethnographique que par l’exemple moral et social qu’il pourrait en tirer. Combinant librement les traits de plusieurs civilisations exotiques, avec un plaisir ingénu de construction imaginaire et d’« ars ludi », l’auteur ne se propose pas de faire du monde formosan une topie posée comme modèle contrastif, ou une satire visant les pays européens. Communisme et idolâtrie, justice et sacrifices humains, polygamie et punition de la stérilité, foi dans la métempsychose, la divination et la démonologie, art de l’architecture, informations sur la langue (avec un petit dictionnaire en annexe), éducation, technique militaire, transports et commerce, ces éléments composites et parfois contradictoires finissent par produire l’image d’une civilisation autre, étalée comme point de référence afin de servir au débat sur les différents aspects de la civilisation européenne.

Apparemment, le point qui touche au vif l’auteur et qu’il veut examiner par l’intermédiaire de cette parabole hétérotopique est la foi. Psalmanazar se donne une identité formosane pour pouvoir commenter, du point de vue neutre d’un « païen », pratiquant un monothéisme naturiste et idolâtre, les diverses confessions chrétiennes. Dans une sorte de compétition, comme celle à laquelle aurait participé Odoric de Pordenone devant le grand Khan des Mongols, Psalmanazar compare catholicisme, luthéranisme, calvinisme, anglicanisme et leurs dogmes et pratiques. Le catholicisme et les Jésuites surtout (avec leur politique active et intrusive en Orient) reçoivent les critiques les plus sévères. Mais l’arbitre « formosan » rejette en égale mesure la doctrine catholique de la transsubstantion, celle luthérienne de la consubstantialité et celle calviniste de la prédestination absolue. La religion qui reçoit finalement son adhésion est l’anglicane, Psalmanazar le « Formosan païen » motivant ainsi sa conversion à la foi de son nouveau pays d’adoption.

Si le « conflit des religions » imaginé par Psalmanazar n’opère pas une polarisation entre l’Europe et le royaume utopique, le mécanisme de sélection et d’extrapolation des traits positifs et négatifs du mundus est en revanche au travail dans le code de lois des Formosans. Celui-ci a un aspect principalement prohibitif, ses mesures visent l’exclusion des maux incarnés par les chrétiens (européens), des voleurs et des meurtriers, des adultères, des faux témoins, des blasphémateurs, ceux qui frappent leurs père et mère, des médisants et calomniateurs, ceux qui refusent d’obéir à leurs supérieurs, des séditieux et des conspirateurs, etc. (Psalmanazar, 1705, p. 27-31). Rappelant les tables de Moïse, mais inversant les rôles des chrétiens et des idolâtres, cette organisation législative élève finalement le royaume formosan au statut d’eutopie et renvoie les traits négatifs à la civilisation européenne.

La disposition du bien et du mal reçoit une dimension presque graphique, à savoir géographique, dans The Fortunate Shipwreck, or A Description of New Athens in Terra Australis Incognita (1720). Le narrateur, porte-parole d’un auteur anonyme pour lequel les commentateurs ont proposé plusieurs identités possibles, Ambrose Philips, Charles Gildon, ou Thomas Killegrew the Younger, raconte son naufrage sur le continent austral inconnu et sa visite de la Nouvelle Athènes. Cette colonie utopique aurait été fondée par la migration de quelque cent mille Grecs conduits par Demophilos, fuyant la destruction d’Athènes par des barbares (des Turcs ?). Après une traversée difficile, qui renvoie à l’exode des Juifs vers la Terre promise, ces Troyens à l’inverse bâtissent sur le continent austral une Rome inverse, une Nouvelle Athènes, dans laquelle ils cohabitent harmonieusement avec une population aborigène de la même dimension démographique. Somme toute, il s’agit d’une parabole de la constitution d’une colonie protestante dans une terre exotique habitée par de « bons sauvages ».

La situation géographique de la Nouvelle Athènes met à nu le mécanisme même de construction des utopies, par la sélection et l’extrapolation des meilleurs traits de notre monde. La source en est offerte par les civilisations antiques des Grecs et des Romains qui, après leur destruction en Europe, retrouvent une nouvelle vie sur le continent austral. Pour protéger leur excellence, les Nouveaux Athéniens se sont isolés du reste du monde derrière une barrière montagneuse protectrice. Une série de petites collines a été transformée, par des travaux assidus, en une sorte de mur chinois pour rendre la presqu’île colonisée imprenable et inaccessible. On y reconnaît le pattern sous-jacent de More : de même que l’Utopie est séparée du continent par un bras de mer creusé par les Utopiens, la Nouvelle Athènes est isolée du continent par une cime artificielle. En fait, les deux utopies, ensemble avec beaucoup d’autres textes de l’Âge classique, réinventent l’imaginaire médiéval du Paradis terrestre, que les docteurs de l’Église situaient dans une île ou presqu’île, au bout de notre monde, protégée par des bras de mer, des montagnes, des déserts ou des marais infranchissables.

La disjonction territoriale pose deux espaces distincts qui permettent une électrolyse des valeurs morales. La chaîne montagneuse est la césure qui sépare le mal du bien, le vice de la vertu, notre monde déchu de l’utopie australe. Même la nature participe à cette polarisation : désertique et invivable de notre côté, paradisiaque de l’autre : « […] a most delicious country, diversify’d with easy hills, pleasant vallies, winding rivers, small seas, islands, towns, cities and villages. » ([Ambrose], 1994, p. 30) Tous les maux que les colonisateurs ont pu apporter d’Europe ont été laissés derrière le mur, qui fonctionne comme un treillis moral ; et si dans la population mêlée d’aborigènes et de nouveaux venus apparaissent des déviants, ils sont expulsés hors de leur monde dans le nôtre. La montagne est une

[…] barrier betwixt these wretched people, and those happy men who inhabit the other side of it. You must observe, that all those on this side of the mountain were originally exiles banish’d from from the other side for crimes which would not be suffer’d among them; such as avarice, ingratitude, unchristian Dealing, lust, and the like. (p. 19-20)

La Nouvelle Athènes est une utopie antiquisante (classicisante) qui pousse la régression vers un illud tempus prelapsaire.

Une Nouvelle Rome (et une France meilleure en même temps) est le Royaume des Féliciens imaginé par le Marquis de Lassay (1727). Son fondateur légendaire, Lelius, est un Romain ami de Scipion, qui a fui les guerres civiles de Rome, « déterminé à la quitter pour aller achever sa vie tranquillement avec les Gymnosophistes, Philosophes qui habitoient dans les Indes » (Marquis de Lassay, 1756, p. 384). L’auteur assume donc explicitement qu’à l’héritage classique il ajoute des éléments de la « pensée enchantée » médiévale. Les Gymnosophistes, une sorte de sages stoïciens des Indes, qui apparaissent dans tout « l’arbre » des manuscrits de la saga d’Alexandre, avaient été adoptés et adaptés au nouveau genre renaissant de l’utopie par Antonio de Guevara, dans son Relox de príncipes (1532). Une autre tradition médiévale exploitée par le Marquis de Lassay est celle du Royaume du Prêtre Jean, avec ses rivières de sable, d’or et de pierres précieuses, ses palais remplis d’artefacts admirables, ses fontaines de jouvence et autres « merveilles de l’Orient ».

Les royaumes de France et de Félicie se retrouvent dans une position de symétrie spéculaire. Géographiquement, Félicie se trouve aux antipodes de l’Europe, en dessous de l’Équateur : « […] entre le quarante & le cinquantième degré de latitude méridionale de l’autre côté de la Ligne ; c’est-à-dire, à peu près comme la France. » (Marquis de Lassay, 1756, p. 357) Tout ce qui sur notre continent constitue un défaut, et marque donc des « creux » au tableau, a pour correspondant sur le continent austral les traits complémentaires, qui produisent une sorte de fresque en « repoussé ». Tous les éléments de Félicie jouissent d’une excellence joyeuse :

Les terres sont cultivées avec autant de soin que les jardins : les campagnes produisent les meilleurs bleds du monde ; les coteaux, des vins excellents ; & les montagnes sont remplies de minéraux de toutes espèces, & de carrières de jaspe, d’agate, de cristal, de porphyre, d’albâtre, de toute sorte de marbres & de pierres propres pour bâtir. (p. 368)

Ils ont des légumes & des fruits excellents ; leurs vins sont délicieux, & on trouve par-tout des fontaines d’une eau pure : enfin il ne manque rien de tout ce qui peut contribuer au plaisir des sens & à la bonne vie : un beau ciel, un air sain, un climat doux, un peu plus chaud, & moins sujet au changement que le nôtre, achève le bonheur de ces peuples fortunés. (p. 369-370)

Bien qu’un paradis sur terre, Félicie ne se transforme pourtant pas en un Âge d’Or mythologique, ou en un Pays de Cocagne où la nature pourvoit à toutes les nécessités et plaisirs des hommes. La caractéristique utopienne en est donnée par l’implication des individus dans une construction sociale, donc par l’effort collectif de bâtir dans ce jardin naturel une cité de l’homme, un royaume heureux. C’est ici que Félicie présente « en repoussé » ce qui, pour le Marquis de Lassay, se manifeste « en creux » dans la France de son temps. Par rapport à Paris, la capitale de Félicie, Leliopolis, est

[…] bâtie beaucoup plus régulièrement, d’une pierre jaspée, aussi belle que le marbre, & pavée d’un pavé blanc et rouge, fort dur ; les maisons n’y sont pas si hautes qu’à Paris, mais plus égales, les rues sont tirées au cordeau, avec des grandes places d’espace en espace ; des fontaines, & des édifices publics magnifiques, & surtout les temples où ils s’assemblent pour faire leurs prières. (p. 359)

Le palais du Roy « est la plus magnifique, & la plus surprenante chose qu’il y ait dans le monde » (p. 363). En général, dans tout le pays, il y a « un nombre infini de belles maisons, & les seigneurs ont des châteaux superbes dans les provinces » (p. 365).

Comme on le voit, le Marquis n’a guère de réformes économiques, sociales ou administratives à proposer, il se contente de rêver d’un monde d’où les maux et les carences de la nature et de la société ont été exclus : « les hommes sont grands, bien faits & vigoureux ; ils ont presque tous de belles dents & de beaux cheveux, & on n’y voit quasi point de bossus ni de boiteux » (p. 362) ; « ils sont sujets à peu de maladies ; ils passent souvent leur vie sans en avoir aucune, & ce n’est pas une chose rare d’y voir des personnes âgées de cent ans » (p. 380) ; « il y a quantité de gens sçavans parmi eux : ils ont poussé leurs connoissances fort loin, & ils ont des livres admirables dans presque tous les genres d’écrire ; ils nous surpassent dans la plupart des arts ; ils excellent dans la poésie, dans la musique, dans l’architecture, dans la sculpture, & dans la peinture » (p. 377) ; « les loix des Féliciens m’ont paru plus sages que celles d’aucuns peuples du monde ; ils sont gouvernés par ces loix plutôt que par les hommes » (p. 441).

Ce rêve de félicité, qui n’a point d’ambitions réformistes et transformistes, expose le mieux le mécanisme psychologique de la sélection utopique. En Félicie, on dirait que c’est le principe du plaisir qui est à l’œuvre, alors qu’en Europe ce qui domine c’est le principe de réalité dure. En Félicie, les citoyens peuvent satisfaire tous leurs souhaits et leurs désirs visant la nature et la société, en Europe la nature humaine dévoile ses plus mauvais penchants. L’utopie du Marquis de Lassay est un refuge mental et affectif, dans lequel l’auteur se trouve une patrie alternative. Sa relation devrait faire connaître aux lecteurs

[…] si j’ai tort de demeurer dans un lieu où l’on est gouverné par les Loix plutôt que par les hommes, & où l’on n’a qu’à être sûr de soi, pour n’avoir rien à craindre. Chez les autres peuples on ne trouve que de la fausseté & de la malice, & on est quasi forcé à être méchant pour se défendre de leurs injustices, & pour ne pas combattre avec des armes trop inégales contre des gens qui ne songent qu’à vous tromper : ici on peut être vertueux sans courir aucun risque, & on en coureroit beaucoup à ne pas être. (p. 248-249)

Et pour donner un arrière-plan historique à cette rêverie d’évasion, faut-il encore préciser que le départ du narrateur en Félicie est dû aux « raisons que vous savez », c’est-à-dire à la révocation de l’Édit de Nantes ?

Quant à l’Espagne, elle a produit sa propre eutopie en Sinapia, un texte anonyme dont la datation — fin du xviie siècle ou siècle des Lumières — est encore incertaine. Le mécanisme de positionnement dans le miroir y est encore plus manifeste, puisque l’auteur invoque non seulement une symétrie géographique (« es esta península perfectísimo antípode de nuestra Hispaña », Avilés Fernández, 1976, p. 134) et cartographique (la même forme de presqu’île au bout d’un continent), mais aussi une symétrie toponymique. L’antique nom du pays, Bireia, est l’anagramme pour Iberia, de même que Sinapia est l’anagramme de Ispania. Les autres noms sont « à clé » : Rio Pau est le Tage, Ni — Madrid, Bender Pa — Lisbonne, les « Chinois » — les Gréco-Romains, les « Perses » — les chrétiens, les Lagos — les Français, les Merganos — les Allemands, etc.

Si la presqu’île de Sinapia a la forme renversée de l’Espagne (prenant pour axe d’inversion l’Équateur), en revanche elle est mieux systématisée dans son territoire. Un géométrisme mathématique dicte son organisation en 9 provinces carrées avec 8 métropoles plus la capitale Ni, conduites par des « padres de metrópolis ». Chaque province a 49 « partidos », à savoir villes (donc 341 au total), dirigées par des « padres de ciudad », chaque ville coordonne 49 « cuadrados », ou villages (donc 6 709 au total), dirigés par des « padres de villa », et chaque village a 8 quartiers, chacun étant composé de 10 maisons familiales plus une pour le « padre de barrio » (Avilés Fernández, 1976, p. 80-91). Le pays est gouverné par un prince et le Sénat, dans une forme de « république monarchique, mêlée de traits aristocratiques et démocratiques » (p. 86).

La construction spéculaire des deux pays, l’Espagne et la Sinapia, est poussée si loin que l’éditeur moderne du texte, Miguel Avilés Fernández, propose de traiter Sinapia non pas comme une utopie, un non-lieu, mais comme une antitopie, comme un lieu contraire à ce qui existe dans un autre lieu (p. 24). La disposition polaire des deux topies permet la distribution en antithèse des traits caractéristiques de chaque société :

En Sinapia se vit dans une parfaite communauté ; en Espagne, « nos habemos criado con lo mío y lo tuyo ». En Sinapia, « se pratica la perfecta igualdad » ; en Espagne, « estamos hechos a la suma desigualdad de nobles y plebeyos », « estamos corrompidos con el abuso de la superfluidad ». En Sinapia, tout est orienté pour « vivir templada, devota y justamenente en este mundo, aguardando la dicha prometida con la venida gloriosa de nuestro gran Dios, para lo cual ningunos medios son más a propósito que la vida común, la igualdad, la moderación y el trabajo ». En revanche, dans nos pays, où ces moyens sont dépréciés, les gouvernements se concentrent uniquement à satisfaire « nuestra pasión o redimir nuestra vejación ». (p. 24-25, notre traduction)

Sinapia met en pratique l’idéal d’État chrétien de la Contre-Réforme, avec une morale « prudente » et une foi dévote.

Pour conclure, les principaux procédés de construction des « utopies réalistes » sont la sélection et l’extrapolation utopique. Travaillant sur l’image de son monde historique, l’utopiste fait un choix des traits négatifs et positifs et les regroupe dans deux espaces complémentaires. Les caractéristiques jugées mauvaises sont rassemblées et isolées dans la description de « notre » civilisation (d’habitude l’Europe), celles bénéfiques sont regroupées et extrapolées dans la configuration de la civilisation exotique. L’exclusion des éléments désagréables, nuisibles et funestes soumet la fiction utopique à une « réduction au positif », ce qui fait d’elle un univers fictionnel eudémonique, capable de susciter l’adhésion rationnelle, morale et affective des personnages, ainsi que des lecteurs.

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Référence papier

Corin Braga, « Les « eutopies » à l’Âge classique », IRIS, 36 | 2015, 43-55.

Référence électronique

Corin Braga, « Les « eutopies » à l’Âge classique », IRIS [En ligne], 36 | 2015, mis en ligne le 15 décembre 2020, consulté le 29 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/iris/index.php?id=1538

Auteur

Corin Braga

Université Babeş-Bolyai de Cluj-Napoca, Roumanie

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