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À l’opposé géographiquement, la bibliothèque
numérique patrimoniale des anciennes écoles normales de l’Université
d’Artois et Ana’ite, la
bibliothèque numérique du patrimoine écrit polynésien, ont en commun
le recours à des solutions innovantes qui ont permis la structuration
de ces gisements documentaires remarquables et atypiques.
Que peuvent bien avoir en commun la bibliothèque
numérique patrimoniale des anciennes écoles normales de l’Université
d’Artois et Ana’ite, la
bibliothèque numérique dédiée au patrimoine écrit polynésien, créée par l’Université de
Polynésie française ? Dans chacun des cas, il aura fallu imaginer des
problématiques innovantes capables à la fois d’aboutir à la création
d’une bibliothèque numérique et à la structuration de gisements
documentaires remarquables.
Peu avant leur intégration au Service Commun
de la Documentation (SCD) de l’Université d’Artois, en 2008, les
bibliothèques de l’IUFM de la région Nord-Pas-de-Calais ont
entrepris un important travail de catalogage rétrospectif des fonds
possédés par les écoles normales et répartis principalement sur les
sites d’Arras, Douai et Lille. Après plusieurs déménagements et des
opérations importantes de dédoublonnage, une bibliothèque
patrimoniale regroupant l’ensemble des documents a été créée à
Arras. Parmi les raretés, quelques dizaines de livres anciens et un
important fonds de cartes scolaires. Dans le même temps, les trois
journées d’étude relatives au patrimoine scolaire organisées entre
2009 et 2010 à Arras et à Douai ont permis d’une part de
s’intéresser à la façon dont les écoles normales avaient constitué
les collections de leurs bibliothèques en vue de former les
instituteurs, d’autre part de valoriser des documents inédits sous
forme numérique. En 2011, grâce à une subvention du Pôle de
Recherche de l’Enseignement Supérieur de la région Lille-Nord de
France et à une aide du SCD de l’Université d’Artois, le projet de
bibliothèque numérique peut débuter. Dans un premier temps, il est
décidé de mettre en avant les livres figurant dans
Ministère de l’instruction publique, des cultes et des beaux-arts,
“Catalogue des bibliothèques des écoles normales”, Le Catalogue des bibliothèques des écoles
normalesBibliothèque Numérique de l’Université
d’Artois.
Le second projet a consisté à numériser plus
de 400 planches scolaires dans différents domaines : sciences et
techniques, histoire-géographie, etc. Toute la difficulté a résidé
dans le fait que la plupart de ces planches, bien que fort anciennes
et n’étant plus commercialisées, n’étaient pas libres de droit. Le
bibliothécaire s’est transformé en détective et négociateur afin
d’entrer en contact avec les services juridiques des éditions
Deyrolle et Auzoux ou avec le liquidateur judiciaire de MDI afin de
disposer des autorisations pour numériser et mettre en ligne les
planches qu’ils avaient éditées. Le hasard faisant bien les choses,
au moment de la numérisation, l’éducation d’antan avait le vent en
poupe auprès du grand public et les éditions Michel Lafon étaient en
train de publier plusieurs volumes de planches scolaires sous le
titre Les présentations
faites lors de cette journée sont consultables en ligne : Deyrolle : leçons de
choses. La bibliothèque numérique patrimoniale venait donc en
complément des livres édités puisque le curieux ou le passionné
pouvait retrouver les planches originelles. En 2012, la directrice
des bibliothèques de l’IUFM de Paris redonne vie aux journées
annuelles des responsables des bibliothèques des IUFM. À cette
occasion, des échanges se créent et plusieurs IUFM (Limoges,
Créteil, Bordeaux, Nantes) font part de leur projet de valorisation
des fonds des écoles normales et plus largement du patrimoine
scolaire. En 2013, une journée d’étudehttps://journeepatrimonialeiufm.blogspot.com consacrée à ce sujet permettra
notamment de présenter les bibliothèques numériques de Lille et
Bordeaux.
La Polynésie française est dotée d’une
université (UPF) depuis 1987. Sa bibliothèque universitaire
constitue à partir du milieu des années 2000 ce que l’on nomme le
fonds polynésien : toutes les nouvelles parutions en langues
française et tahitienne, des ouvrages relatifs au triangle
polynésien (Hawaii, île de Pâques, Nouvelle Zélande), des dons plus
ou moins anciens et des acquisitions faites auprès de particuliers
dont certaines sont uniques. La plupart des documents constituant ce
fonds ne sont pas libres de droits. Par ailleurs, les
enseignants-chercheurs font part de leur volonté de pouvoir
consulter de façon plus pratique les premiers périodiques ou textes
administratifs en langue tahitienne, des documents iconographiques
ou encore le Bulletin
de la seule société savante de l’île, la Société des études
océaniennes (SEO). Tous ces documents sont disponibles auprès du
Service du Patrimoine Archivistique et Audiovisuel (SPAA), qui se
veut l’équivalent de la Bibliothèque nationale de France en
Polynésie française.
La création d’une bibliothèque numérique a été
imaginée en 2014 lors de l’appel à projets « Bibliothèque scientifique numérique »
dont un des axes visait à numériser des corpus. La candidature de
l’UPF n’ayant pas été retenue, il a été décidé de créer une
bibliothèque scientifique numérique constituée des raretés libres de
droits du fonds polynésien afin de constituer une vitrine auprès des
partenaires avec qui l’Université souhaitait travailler. Cet embryon
a permis de présenter à un public peu familier de fonctionnalités
comme l’océrisation ou l’interopérabiblité le potentiel de l’outil
et du projet. Cela a fonctionné puisque l’UPF a conventionné avec la
SEO et le SPAA, ce qui lui a permis de disposer de leurs documents
afin de gérer leur numérisation et leur signalement. L’UPF et
l’unité de recherche Équipe d’Accueil Sociétés traditionnelles et
contemporaines en Océanie (EASTCO) ont financé différents projets
qui ont permis de disposer sous format numérique des documents
nécessaires pour la recherche et l’enseignement, et de recruter une
spécialiste de l’histoire locale pour la création de métadonnées de
qualité. Le Bulletin de
la SEO a rapidement été traité et mis en ligne avec un embargo de
dix ans. Une barrière qui paraît très longue de nos jours mais qui
permet de rendre accessible presque cent ans d’articles sur
l’Océanie et qui est un premier pas en faveur de l’open access. En parallèle, le SPAA s’est
lancé à son tour dans une numérisation quantitative mais qui a pu
être orientée qualitativement en fonction des demandes formulées par
les enseignants. Une fois les documents numérisés et mis à
disposition, la bibliothèque s’est chargée de la mise en forme et de
la saisie des métadonnées qui sont encore récupérables par le SPAA.
Aujourd’hui, Ana’ite,
la bibliothèque scientifique numérique polynésienne, est riche
de plus de 600 documents dont la plupart rares et précieux. Les
cartes postales sont un témoignage exceptionnel et apportent de
nombreux éléments sur le mode de vie des Polynésiens depuis le
XIXe siècle. On découvrira
aussi des collections de périodiques en langue tahitienne comme Le Vea no Tahiti, premier
journal hebdomadaire en langue tahitienne sous l’administration
française. Ana’ite a
permis de réunir les différents acteurs qui possèdent des
collections rares et patrimoniales et d’établir des problématiques
pour constituer une bibliothèque numérique de référence utile à
tous, du curieux au chercheur.
La valorisation des collections rares
patrimoniales au travers de la numérisation, et surtout de
l’océrisation, contribue à lancer un nouveau projet soutenu et
financé par le GIS CollEx-Persée. Intitulé Concordance, il doit permettre aux
utilisateurs du Dictionnaire
tahitien-français en ligne de l’Académie tahitienne, en partant
d’un mot, de visualiser un répertoire d’occurrences de ce mot issu
d’un vaste corpus de textes en tahitien authentiques, diversifiés et
libres de droit, déposé sur Ana’ite. Alors que les écrits de
référence pour l’exemplification du vocabulaire tahitien sont
souvent des recueils de tradition orale antérieure à la colonisation
française ou des textes religieux, le corpus proposé pour le projet
Concordance est
remarquable par son caractère laïque et par son ancrage dans un
quotidien marqué par les profondes mutations politiques, économiques
et sociales des îles de la Société au contact de l’Occident. La
connaissance et l’expertise acquises dans le traitement préalable
des documents tahitiens et l’implémentation de la fonction de Concordance permettront de
poursuivre l’élargissement du corpus à de nouvelles sources
identifiées dans le fonds archivistique polynésien et d’appliquer un
protocole équivalent à d’autres langues polynésiennes ou
océaniennes.
La bibliothèque patrimoniale des écoles
normales de l’Université d’Artois donne accès à plus de 400
planches scolaires ainsi qu’à 74 livres issus du Catalogue des
bibliothèques des écoles normales datant de 1887.http://bibnum-bu.univ-artois.fr
L’Université de Bordeaux a numérisé une
quarantaine d’ouvrages donnant un aperçu de la grande
diversité des fonds anciens de l’ESPE d’Aquitaine. https://www.msha.fr/patrival/
Ana’ite propose plus de 600
documents, cartes postales, périodiques en langues
tahitiennes, des lexiques et méthodes d’apprentissage des
langues tahitiennes.http://anaite.upf.pf
Le site de l’académie tahitienne : http://www.farevanaa.pf/