Le chemin de l’Agence. Pointillés de synchronisations

DOI : 10.35562/arabesques.877

p. 10-11

Plan

Texte

Lorsque l’Inria, établissement public de recherche dédié aux sciences du numérique, croise la route de l’Abes… Enjeux et décryptage.

Les cinq bibliothèques qu’abrite notre institut des sciences du numérique ont longtemps proliféré en jachères inventives, croisant leurs catalogues hétérogènes jusqu’à la perfection formelle d’une Babel – de référence dans ses domaines, mais dont l’intelligibilité multipliait approximations et silences bibliographiques. Il y a un peu plus de dix ans, les documentalistes d’Inria ont ainsi réécrit l’histoire de leur système intégré de gestion de bibliothèque (SIGB), un cahier de spécifications techniques et fonctionnelles, la partition d’une migration des données des catalogues locaux en un seul catalogue national, avec saut de format Unimarc et adoption de Rameau à l’avenant.

Les fins du désordre documentaire

Cette préhistoire devait donner aux 80 000 documents du fonds Inria une visibilité que ses collaborations scientifiques ne cessaient d’appeler, ses équipes de recherche accueillant trois fois plus de doctorants qu’elles ne comportent de chercheurs titulaires, s’ouvrant tant aux enseignants-chercheurs qu’aux scientifiques des autres organismes, voire de l’industrie. Une étude d’opportunité parallèle confirmait déjà l’intérêt d’une adhésion au Sudoc – cinq millions de notices à l’époque et 200 bibliothèques de recherche déployées. Sans compter la séduction qu’opérait l’appel d’une mutualisation des travaux documentaires portée par le réseau professionnel Sudoc – le catalogage partagé bien sûr, mais également la dynamisation des échanges professionnels, formations et émulations.

Le déploiement des ressources documentaire d’Inria fut pour l’Agence une partie de plaisir douloureux, le mapping de ses collections nécessitant plusieurs passages avant que l’ILN 149 ne naisse avec armes, bagages et consignes – l’indexation du Sudoc par Google Scholar dès 2007 – jusqu’à l’embarquement pour le World Catalog, en 2009. L’importation des catalogues Inria aura accouché de 35 %de notices nouvelles pour le Sudoc, 65 % ayant fusionné – le chiffre d’un ordre de bataille enfin normé.

Mais la prise en mains du SIGB Millennium, la maîtrise des transferts réguliers, l’appropriation des grandes fonctions documentaires dans le nouveau périmètre du réseau animé par l’Abes n’ont cessé d’enrichir le métier des documentalistes d’Inria depuis lors, dans une démarche d’anticipation et d’échanges professionnels qui animent toujours les enjeux de l’information scientifique – qu’il s’agisse de l’affinement des ressources décrites, de leur expression dans le web de données ou de leur transparence d’appropriation par l’utilisateur final, ce chercheur qui n’a cure des Opac et autres balisages à chignons.

Nous touchons bien là aux limites de l’appropriation documentaire, à savoir la gestion fine des objets de la recherche scientifique, bien au-delà du seul document quadrillé par un siècle de pratiques bibliothéconomiques modernes, et qui visent les données qui le portent, le code qui l’illustre ou encore les grains pédagogiques qui l’étayent dans le temps. L’éclatement de la ressource documentaire appelle de nouveaux services personnalisés, qui affinent toujours plus cet introuvable tableau de bord de la recherche, dans son élaboration même. Tout en refondant la relation du professionnel de la documentation à l’utilisateur cible, y redéfinissant encore son profil métier.

Révélations scientifiques de l’Abes

L’univers des pratiques, méthodes et langages partagés sous l’expertise de l’Abes, permettra encore aux établissements de redéfinir les voies de l’accès et de la diffusion des nouveaux objets de la recherche scientifique, quand serait-ce à servir leur désengagement des ressources documentaires que l’on dit désormais classiques, en favorisant l’établissement de leur cartographie fine, comme de leur accès contrôlé, autant que partagé.

D’ores et déjà les instances de gouvernance de l’Abes y concourent résolument – et c’est également un motif heuristique fort d’Inria de contribuer, depuis 2010, aux travaux de son conseil scientifique. C’est pour nous, qui définissons les priorités des actions de l’Institut dans le domaine de la diffusion des productions scientifiques, l’occasion de comprendre comment articuler des exigences toujours plus complexes de nos chercheurs avec une offre de service qui ne se conçoit maintenant plus qu’en inter-établissements.

L’Abes a parfaitement ouvert la voie de nouveaux services qui ne se cantonne plus à cataloguer des objets présents dans des silos documentaires, mais assure un continuum entre toute une palette de services, allant de la gestion nationale d’acquisition de ressources documentaires jusqu’à l’accompagnement de campagnes massives de numérisation. Ainsi, la mise en place du hub de métadonnées, la participation à Istex ou tout « simplement » la gestion d’un référentiel tel qu’IdRef contribuent à modeler un paysage où l’Abes, en collaboration avec les autres centres d’expertise que sont l’Inist-CNRS, OpenEdition ou le Centre pour la communication scientifique directe (dont Inria est partenaire), offre le meilleur de ses services en les mettant en cohérence avec le reste du paysage national.

Maintenant qu’Inria a encore fait un pas supplémentaire en définissant une politique ambitieuse d’open access qui comporte à la fois une obligation de dépôt sans réserve dans le serveur de publication Hal et l’engagement dans la définition de nouveaux modèles d’édition scientifique avec l’initiative Episciences, nous voyons encore des occasions supplémentaires de travailler ensemble pour faire évoluer un peu plus le paysage de l’information scientifique et technique. Nous souhaitons profiter ainsi de toutes les opportunités offertes par les nouveaux chantiers de l’Abes, tant dans la perspective fédératrice offerte par le travail sur les normes documentaires et les outils intégrés pour les bibliothèques, que dans son implication au niveau d’actions nationales (BSN) ou européennes (Liber, Dariah).

Étude de systèmes collectifs bio-inspirés

Étude de systèmes collectifs bio-inspirés

Essaim de robots mobiles en interaction avec une table tactile de grande taille, pour l'étude de phénomènes collectifs bio-inspirés et leur mise en œuvre sur des dispositifs physiques. Les robots khepera sont utilisés par l'équipe Maia (Machine intelligente et autonome) de l’Inria.

© Inria / Photo Kaksonen

Illustrations

Étude de systèmes collectifs bio-inspirés

Étude de systèmes collectifs bio-inspirés

Essaim de robots mobiles en interaction avec une table tactile de grande taille, pour l'étude de phénomènes collectifs bio-inspirés et leur mise en œuvre sur des dispositifs physiques. Les robots khepera sont utilisés par l'équipe Maia (Machine intelligente et autonome) de l’Inria.

© Inria / Photo Kaksonen

Citer cet article

Référence papier

Jacques Millet et Laurent Romary, « Le chemin de l’Agence. Pointillés de synchronisations », Arabesques, 75 | 2014, 10-11.

Référence électronique

Jacques Millet et Laurent Romary, « Le chemin de l’Agence. Pointillés de synchronisations », Arabesques [En ligne], 75 | 2014, mis en ligne le 07 janvier 2020, consulté le 29 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=877

Auteurs

Jacques Millet

Délégué à l’information et à l’édition scientifique, Inria

jacques.millet@inria.fr

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Laurent Romary

Directeur de recherche, Inria, Président du Conseil scientifique de l’Abes

laurent.romary@inria.fr

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CC BY-ND 2.0