Attention, un monument historique peut cacher une bibliothèque ouverte à tous. Raconter l’histoire de la bibliothèque Forney

DOI : 10.35562/balisages.864

Résumés

La bibliothèque Forney, spécialisée dans les arts décoratifs, a été créée en 1886 grâce au legs fait par un industriel, Samuel-Aimé Forney. Elle fut d’abord installée dans une école, rue Titon près du Faubourg Saint-Antoine. Archives administratives et articles de presse soulignent alors sa modernité et son utilité pour le public d’artisans qui peut consulter sur place avec des horaires adaptés mais aussi emprunter des livres et estampes comme modèles. Les locaux devenant trop exigus, il est décidé en 1929 d’attribuer à la bibliothèque un monument médiéval, l’Hôtel de Sens, acquis par la Ville de Paris. Ce monument historique est présenté par les administrateurs et les journalistes comme un cadre digne de la bibliothèque. Le conservateur Gabriel Henriot conçoit alors un projet de centre des métiers d’art réunissant bibliothèque, salle de conférence et musée, et le promeut dans la presse. En raison de la lenteur des travaux, la bibliothèque ne s’installe dans ses nouveaux locaux qu’en 1961. L’inauguration attire l’attention sur la bibliothèque. Tout en racontant l’histoire du bâtiment et de ses habitants, le personnel communique largement sur la richesse des collections. À partir de 1963 sont régulièrement organisées des expositions qui présentent les collections de Forney et l’œuvre de créateurs. Une nouvelle phase s’ouvre en 2016 ; des travaux sont menés pour améliorer l’accueil et un parcours de visite libre est créé. C’est aussi l’occasion de repenser le récit de la bibliothèque et d’y intégrer les femmes et les hommes qui ont fait l’histoire de Forney.

Bibliothèque Forney is a library specialized in decorative arts, which was created in 1886 thanks to the legacy left by the manufacturer Samuel-Aimé Forney. It was first established in a school close to the Faubourg Saint-Antoine. At the time, administrative archives and newspapers highlighted the library’s modernity and value for its public composed of craftspeople, who could browse onsite during extended opening hours and borrow books and images to use them as models. In 1929, as the premises had become too small, the City of Paris decided to move the library to a recently bought medieval building, the Hotel de Sens. This historical monument was presented by librarians and journalists as a worthy setting for the library. Chief librarian Gabriel Henriot devised a Center for arts and crafts combining the library, conference room, and a museum gallery, promoting his project in newspapers. The renovation work was not finished until 1961, when the library could finally open, drawing a lot of attention. Today, the library’s staff promotes its vast and remarkable collections, while telling the story of the building and its residents. Since 1963, exhibitions presenting the collections and the works of artists have been organized on a regular basis. In 2016, the library entered a new phase and was renovated to better welcome its public. A new path now allows visitors to explore the building on their own. This new phase was also an opportunity to rethink how the library’s story is told and to include the women and men that participated in this story.

Index

Mots-clés

bibliothèques d’art, collections spécialisées, patrimoine, monument historique, médiation

Keywords

art libraries, rare and special collections, heritage, historic monument, cultural mediation

Plan

Texte

Pour le bibliothécaire comme pour nombre de ses fidèles lecteurs, la bibliothèque Forney est aujourd’hui indissociable de l’Hôtel de Sens et de sa silhouette emblématique du quartier parisien du Marais.

Figure 1. La bibliothèque Forney à l’Hôtel de Sens

Figure 1. La bibliothèque Forney à l’Hôtel de Sens

Source : Ville de Paris – bibliothèque Forney, Yves Lesven.

Pourtant, la bibliothèque Forney, bibliothèque populaire dédiée à l’artisanat et à l’industrie fondée en 1886, se trouvait jusqu’en 1961 dans une école proche du Faubourg Saint-Antoine. Aujourd’hui, le Parisien pressé ou le touriste de passage verra dans ce monument historique un musée ou un décor propice au selfie, plutôt qu’une bibliothèque patrimoniale spécialisée dans les arts. Le contraste entre les deux temporalités est saisissant. Pour saisir comment l’une a nourri l’autre, on se propose ici d’identifier les fils de l’histoire de la bibliothèque Forney telle qu’elle est racontée dans les archives de la presse, dans les rapports d’activité de l’institution, dans les publications de ses conservateurs1, enfin dans les livres qui lui sont consacrés (Chevrel, 1983). Or, ces sources croisées ne sont pas comparables car elles ne sont pas de même nature. Les journalistes recyclent des éléments de langage de la bibliothèque mais aussi de la culture documentaire en général, faisant ainsi entrer la bibliothèque Forney dans un système de représentations qu’il faut ici restituer ; les rapports d’activité attirent l’attention sur les missions, les collections, les services et circulent dans un cercle professionnel et politique restreint. Enfin, les publications, lorsqu’elles émanent de la bibliothèque ou de ses agents, font connaître les récits dans lesquels la bibliothèque s’imagine (Bryant et al., 2016), de même que les publications des cercles proches, comme la Société des Amis de la bibliothèque Forney (SABF). Les enjeux de l’entremêlement de la grande histoire – « La bibliothèque Forney chez la reine Margot ! » – et de celle d’une bibliothèque publique affichant sa modernité dans un bâtiment « moyenâgeux » restent à définir, alors que le paysage documentaire parisien se structure entre lecture publique et établissements spécialisés. En quoi les narrations fabriquées par ces différents acteurs favorisent-elles la singularisation de l’établissement dans la capitale (Barnett, 1987) ?

Un récit conquérant

Dès la fondation de la bibliothèque Forney et pendant toute la première moitié du XXe siècle, les récits qui traversent les circulaires administratives et les articles des journaux conservés dans les archives de l’établissement sous la forme de revue de presse soulignent la modernité de l’établissement, son utilité industrielle et sociale, sa légitimité au sein du mouvement de développement des bibliothèques populaires (Sandras, 2020) et de l’essor des industries qui réclament de la main-d’œuvre qualifiée et une circulation accrue des modèles. Cette affirmation de l’utilité des services de la bibliothèque par rapport à l’offre des bibliothèques parisiennes sans cesse renouvelée prend un relief particulier dans les années 1920 et 1930 quand le directeur de la bibliothèque, Gabriel Henriot, lui-même né dans une famille modeste du Faubourg Saint-Antoine et étant, grâce à de brillantes études, devenu conservateur et chercheur, milite pour transformer la bibliothèque en un lieu hybride, alliant centre de documentation et d’orientation, établissement pédagogique et musée, dans un bâtiment spécifiquement dédié.

Une bibliothèque d’un « type absolument nouveau »

Lorsque l’homme d’affaires et philanthrope parisien Samuel-Aimé Forney lègue 200 000 francs à la Ville de Paris pour créer un établissement d’enseignement, le Conseil municipal décide de fonder une bibliothèque où l’ouvrier puisse être admis à toute heure, pour consulter, étudier ou copier librement les ouvrages et estampes ayant trait à sa profession. Bibliothèque d’un « type absolument nouveau »2, elle a pour but de compléter l’instruction technique et de développer le goût artistique des artistes et artisans qui travaillent dans le Faubourg Saint-Antoine tout proche afin de renforcer l’excellence d’un secteur fortement concurrencé par les autres pays. Implantée rue Titon, dans une annexe de l’école communale, elle n’est pas seulement une bibliothèque d’arrondissement. « Une publicité aussi large que possible ayant été donnée à cette création par des notes insérées dans différents journaux de Paris, il est, en effet, permis d’espérer que la bibliothèque de la rue Titon n’attirera pas seulement les ouvriers occupés dans son voisinage par les quelques industries spéciales au quartier dans lequel elle doit être établie »3. Cette campagne de publicité s’adresse à toute la communauté des professionnels parisiens et de la région. La bibliothèque Forney a les faveurs de la presse qui mentionne sa spécialisation innovante, ses collections et ses services à la pointe de la modernité bibliothéconomique.

La localisation rue Titon est considérée comme un avantage : entre le Faubourg Saint-Antoine et Nation, la bibliothèque est facilement accessible depuis les quartiers artisans, dans une optique d’éducation populaire alors au cœur des politiques publiques (Christen, 2017 ; Mignon, 2007). Un premier récit historique inspiré par sa localisation se lit dans les articles des journaux à destination d’un large public comme des professionnels, sans doute à l’instigation du personnel de la bibliothèque qui est parfois nommément cité, l’histoire du quartier confortant la pertinence du lieu : la bibliothèque a en effet été créée sur l’ancienne « Folie » du commissaire des guerres Titon du Tillet, au lieu où Réveillon installa une fabrique de papier peint et où Montgolfier construisit en 1783 le premier aérostat.

Les différents articles de presse insistent sur la légitimité de l’institution en mettant en avant son public, supposé éloigné d’une bibliothèque plus classique. Les artistes, artisans, ouvriers mais aussi élèves des écoles d’art ou des écoles techniques sont comparés à des abeilles s’activant dans une ruche. Sont convoqués les figures des artisans du bois du Faubourg Saint-Antoine, les dessinateurs en tissus du Sentier, les bijoutiers et les orfèvres du Marais, les élèves des écoles et des établissements professionnels « faisant bon ménage avec l’aimable essaim des dentellières et des brodeuses »4. L’ambiance est décrite comme studieuse et fraternelle, entre artistes, artisans et ouvriers, hommes et femmes, adolescents et adultes. « Une organisation si souple, si judicieuse, suscite la joie […] tous puisent dans ce lieu de travail un surcroît de valeur professionnelle »5. L’utopie prêtée à des lieux qui ont connu les prémices de la Révolution française infuse dans la réalisation du programme démocratique. Le rayonnement national qu’acquiert la bibliothèque dans la première moitié du XXe siècle est souligné par le conservateur Gabriel Henriot6 qui fait état de lettres d’ouvriers en quête de documentation par courrier venues « des quatre coins de la France »7.

Rendre le savoir technique et artistique accessible à tous

Le bibliothécaire travaille à faciliter l’accès aux collections par des horaires adaptés à la journée de travail, par la rédaction d’un catalogue et par une médiation adaptée à « des lecteurs parfois ignorants, presque toujours inexpérimentés et peu habitués aux livres »8. Le bibliothécaire est incité à accompagner les recherches des « travailleurs à la poursuite de leur pain quotidien et que, dès lors, ménager leurs instants, c’est épargner leurs deniers » et à entamer un dialogue de coopération avec son lecteur : « Son expérience professionnelle sera plus d’une fois précieuse au bibliothécaire pour le choix des acquisitions ou l’exacte appréciation de celle qu’on lui propose. »9

Les collections sont constituées par une sélection d’ouvrages et de revues concernant les différents domaines des arts décoratifs et industriels. La collection de tissus imprimés qu’a créée le conservateur Henri Clouzot est prise en exemple de l’originalité des documents que peut y consulter le public industrieux, qui peut étudier concrètement les techniques et s’en inspirer : elle « constitue une très utile et très enviable rareté. »10 La publication d’un premier catalogue par Henri Clouzot avec la collaboration de Louis Engerand11 est saluée comme la mise à disposition d’un outil pour accéder aux collections de façon simple grâce au classement thématique, et efficace grâce aux résumés. La presse se fait l’écho des 500 pages de l’ouvrage qui montrent toute l’importance de collections déjà à l’étroit rue Titon. La poursuite de la publication d’outils bibliographiques s’effectue dans une relative discrétion tandis que la presse insiste sur le nombre d’ouvrages et de modèles acquis et prêtés. Gabriel Henriot crée un système de fiches « unique non seulement par sa documentation, mais aussi par sa maniabilité »12. Les services que rendent les bibliothécaires pour garantir la facilité d’accès sont soulignés par les différents articles de presse. Pensez qu’on peut commander par téléphone la recherche d’un modèle : « on le cherche dans les collections, on le prépare et vous envoyez quelqu’un le prendre si vous n’y allez pas vous-même. »13 C’est une véritable figure du bibliothécaire au service d’une cause sociale qui apparaît, au moment justement où les valeurs associées à cette profession connaissent une mue importante (Pallier, 1994).

Figure 2. Carte postale représentant la salle de lecture de la bibliothèque Forney rue Titon

Figure 2. Carte postale représentant la salle de lecture de la bibliothèque Forney rue Titon

Source : Ville de Paris – bibliothèque Forney, Yves Lesven.

« Venez, on vous prêtera »14

Dans un article sur les bibliothèques d’art de Paris15, Paul Cornu, bibliothécaire à l’Union centrale des arts décoratifs (UCAD), distingue la bibliothèque Forney des autres établissements par une politique « libérale » de prêt à domicile de livres et d’images. Si le prêt est exclu pour les livres illustrés en raison de leur valeur dans le rapport présenté au Conseil municipal en 1884, son impérieuse nécessité, défendue par le premier conservateur Julien Sée16, aboutit à la création d’une collection de défets d’ouvrages, d’estampes et de photographies conçue pour démocratiser l’accès aux collections mais aussi rentabiliser le temps de loisir des ouvriers. Des recueils thématiques d’images sont consultables dans la salle de lecture. Le prêt de planches est possible, avec fourniture gracieuse d’un carton pour emporter les estampes chez soi. La facilité de l’inscription au prêt est soulignée : « Là quiconque désire travailler n’a pas à exhiber préalablement un abrégé de l’histoire de sa famille, un permis de chasse ou toute autre pièce d’identité. Une quittance de loyer suffit. »17 Cette facilité de consultation en accès libre et d’emprunt après inscription dans un simple registre est soulignée par les articles de revues professionnelles et de presse : « une des singularités de ce curieux établissement, c’est qu’on s’y sert soi-même. […] On fait quasiment comme chez soi ! »18 La valeur de ce service se mesure d’ailleurs chez plusieurs auteurs, érudits, bibliothécaires ou journalistes, à la comparaison avec la Bibliothèque nationale : à Forney, les artistes ou artisans peuvent utiliser le calque pour étudier ou reproduire les schémas et motifs.

Dès les années 1910, sensibilisés par les bibliothécaires au manque de moyens de la bibliothèque au regard de son succès, les journalistes se font l’écho du succès du service de prêt en alignant les chiffres d’ouvrages et de documents prêtés par mois. Ils soulignent la probité des emprunteurs comme l’état usagé des documents : « Certains modèles – ceux de fleurs entre autres – témoignent seulement par leur ton “culotté” qu’ils ont beaucoup servi : preuve d’ailleurs que ce n’est pas par pure curiosité ou pour s’offrir une simple distraction que les lecteurs les ont demandés. »19 En 1913, un journaliste du Temps ayant consulté le registre des « fuites » y compte treize disparitions. « Encore l’une d’elles est due à l’aviateur Tchirkof qui, brusquement rappelé en Turquie, sa patrie, par la déclaration de guerre, négligea de restituer à la bibliothèque le traité de mécanique emprunté »20. Dans les années 1920, la bibliothèque Forney et son service de prêt populaire apparaissent aux yeux des bibliothécaires et de la presse comme rendant un service unique en France : « Il n’en existait nulle part au monde de semblable quand elle fut créée et Chicago ayant étudié son fonctionnement, a voulu avoir sur le même modèle sa bibliothèque des métiers. »21

Cependant, le décalage entre les moyens et les locaux de la rue Titon, le succès de la bibliothèque et les ambitions de Gabriel Henriot d’en faire un centre des métiers d’art inversent cette tendance. La comparaison avec la bibliothèque de Carlsruhe qui, ayant diffusé son catalogue dans les centres industriels, envoie gratuitement les ouvrages aux lecteurs qui les retournent sans payer le port, ou avec les bibliothèques américaines qui sont installées dans des bâtiments fonctionnels dans lesquelles on entre de plain-pied, milite pour un déménagement dans un quartier plus central – le Marais – et dans un bâtiment entièrement dédié, ce que défend Gabriel Henriot au Congrès international des bibliothécaires et des bibliophiles en 1923. La bibliothèque Forney s’inscrit dans ce mouvement des free libraries américaines (Breisch, 2007) où les bibliothécaires développent les collections en dialogue avec des spécialistes et proposent à leur public des conférences pédagogiques. Gabriel Henriot est d’ailleurs qualifié de « bibliothécaire le plus américain – au bon sens du mot – qui puisse présider aux destinées d’une bibliothèque française »22.

Face à la saturation prévisible des espaces de la rue Titon, se fait jour dans la presse des années 1910 une possibilité d’implantation dans le Marais, associée à une extension de ses missions. Cette hypothèse naît alors que le Marais fait l’objet de politiques urbaines nouvelles (Backouche, 2006). Lorsqu’en 1919, le conseiller municipal Georges Lemarchand propose la création d’un Office central du travail et de l’hygiène regroupant une bibliothèque, un musée et un cinéma appliqué à l’industrie pour occuper les ouvriers qui font désormais la journée de huit heures, « sa conviction s’étaie sur les résultats obtenus par la bibliothèque Forney »23 comme le souligne le bibliothécaire Georges J. Rémon. Le succès de la bibliothèque contraste avec le manque de moyens et d’espace. La misère des locaux est régulièrement soulignée par les bibliothécaires comme par les journalistes : « N’est-il pas aussi dérisoire que paradoxal de traiter en Cendrillon une institution vouée par destination à la recherche et à la création de la beauté ? »24 « Qui hospitalisera la bibliothèque Forney ? » titre le journaliste Pierre Heuzé dans Comoedia25. En 1929 est prise la décision d’attribuer à la bibliothèque Forney l’Hôtel de Sens acquis par la Ville de Paris en 1911.

Cette opportunité constitue une source de prestige pour la bibliothèque et offre des espaces qui ouvrent de nouvelles perspectives de services. Dans la Résolution relative au transfert de la bibliothèque Forney en 1929, elle doit devenir « la grande bibliothèque des métiers d’art et d’industrie » afin de soutenir les secteurs économiques qui font la réputation et la richesse de Paris grâce à ses collections de modèles, de manuels mais aussi par « les conseils pour guider leurs recherches, même les suggestions pour innover ».

Gabriel Henriot peut ainsi y réaliser son projet de grande bibliothèque comportant des salles de lecture, des collections à consulter sur place ou à emprunter, une salle de conférence, un musée pour présenter les modèles en exposition, un centre de documentation et d’orientation professionnelle, des conférences, des projections de films. Des établis pour des essais pourront même être aménagés dans l’Hôtel de Sens. Des plans sont dessinés dès 1930. Le dynamique conservateur promeut son projet dans la presse généraliste dont le lectorat est sensible au patrimoine et dans la presse professionnelle. En 1932, Le monde illustré rencontre Gabriel Henriot et consacre un long article à « L’hôtel de Sens, Sorbonne de l’artisanat ». L’action de Gabriel Henriot en faveur de la légitimité de l’extension des missions de la bibliothèque se traduit en slogans à la mesure de l’ambition du projet qui va s’incarner dans l’Hôtel de Sens ; il s’agit de créer la « Sorbonne des travailleurs », le « Collège de France des artisans, l’Institut des métiers », des appellations dont on ne sait si elles ont été trouvées par des bibliothécaires ou des journalistes mais qui sont présentées en gros titres26. Ces rapprochements inattendus insèrent la bibliothèque Forney dans le récit plus général des lieux de culture, et de transmission des savoirs les plus prestigieux. Enthousiaste, le journaliste conclut : « À la fois historien et homme de réalisation, [Gabriel Henriot] unira dans le vieil hôtel du XVIe siècle le passé riche de trésors et l’avenir lourd de belles promesses. En industrie comme en art, pas de belles choses sans tradition ! » Mais Gabriel Henriot n’aura pas le temps de réaliser ses projets. Les travaux prennent du retard, puis sont interrompus pendant la guerre. La presse se fait l’écho, sur un mode humoristique ou polémique, de ces retards. Ce matin le pays évoque en 1950 « la comédie très parisienne, et non moins acide du point de vue budgétaire et urbanistique » des travaux de l’hôtel de Sens27.

Sans dégager à proprement parler de « récit », ces coupures de presse permettent de mettre en valeur la singularité de l’établissement dès ses premières décennies d’existence dans l’espace public. Sur cette trame première des représentations dont elle fait l’objet, viennent se greffer des récits pour le moins inattendus.

La modernité au cœur d’un monument médiéval

Avec le déménagement à l’Hôtel de Sens en 1961, la bibliothèque va intégrer les éléments du récit historique lié à l’Hôtel de Sens pour gagner en visibilité et en prestige. La bibliothèque Forney est « chez la reine Margot ». Dans les visites de la nouvelle bibliothèque que racontent les journalistes, la modernité des services de la bibliothèque fait contraste avec l’architecture des salles. Les bibliothécaires multiplient visites et outils de communication sous les formes les plus diverses, pour vanter la modernité et l’efficacité des services.

Le poids des fantômes : figures historiques de l’Hôtel de Sens

L’Hôtel de Sens a été édifié entre 1475 et 1519 pour l’archevêque de Sens, Tristan de Salazar (Thomson, 1984). Il a ensuite été occupé épisodiquement par ses successeurs, puis loué, et vendu comme bien national à la Révolution. Au XIXe siècle, il est occupé par différentes entreprises. Son état se dégrade rapidement, et des défenseurs du patrimoine alertent sur cette situation et demandent l’acquisition par la Ville de Paris. Ce projet n’aboutit alors pas, mais l’intérêt pour ce bâtiment médiéval conduit à la publication de nombreux textes28. L’hôtel est classé monument historique en 1862.

Figure 3. Coupure de presse, L’Intransigeant, 1929

Figure 3. Coupure de presse, L’Intransigeant, 1929

Source : Ville de Paris – bibliothèque Forney.

Malgré les aléas des travaux, la bibliothèque communique sur son futur transfert dès la fin des années 1930. Dans un guide destiné aux lecteurs29, illustré de photographies et gravures des locaux de la rue Titon et de l’hôtel de Sens, l’historique du bâtiment, « ce magnifique hôtel qui peut rivaliser avec l’hôtel de Cluny, à Paris, et l’hôtel Jacques Cœur, à Bourges », est brièvement décrit. La formule appelle clairement à l’imaginaire des grands monuments médiévaux parisiens et français. Sont mentionnés ses occupants successifs, de la reine Margot aux diverses entreprises du XIXe siècle. Les différents guides publiés par la bibliothèque depuis le transfert en 1961 accordent toujours une place, parfois aussi importante que la description des fonds, à l’historique de l’hôtel de Sens. Certains contiennent des anecdotes : un dépliant des années 1980 mentionne l’assassinat d’un « mignon » de la reine Margot par un rival jaloux qui eut la tête tranchée sous les yeux de la reine… Les entreprises et artisans qui ont occupé les lieux sont souvent cités : roulage, fabrique de conserves, coupeur de poils de lièvre, opticien, confiturerie, verrerie… Bibliothèque de l’image, Forney conserve des documents publicitaires et des étiquettes de la confiturerie Saint James, qui utilisait d’ailleurs des représentations de l’hôtel de Sens pour sa communication.

Figure 4. Étiquette de la Confiturerie St James installée à l’Hôtel de Sens de 1864 à 1886

Figure 4. Étiquette de la Confiturerie St James installée à l’Hôtel de Sens de 1864 à 1886

Source : Ville de Paris – bibliothèque Forney, Yves Lesven.

La bibliothèque utilise désormais certaines de ces publicités pour sa propre communication. Ces recours croisés au même capital iconographique montrent comment s’enrichit au fil des décennies un récit conçu comme une généalogie des usages « populaires » d’un édifice prévu initialement pour un tout autre usage. Si Tristan de Salazar et la reine Margot figurent dans toutes les présentations de la bibliothèque, au fil des années, la place accordée aux archevêques a diminué, et l’histoire de la restauration du bâtiment au XXe siècle a été introduite dans le récit.

Le transfert de 1961 donne lieu à la publication de nombreux articles, dans la presse française et internationale30. La renommée de l’Hôtel de Sens a sans doute un rôle dans ce succès médiatique, et la bibliothèque Forney s’efface parfois derrière le monument. Le journaliste Jean Vidal, dans Libération, s’amuse ainsi de la variété des habitants des lieux, cardinaux, reine, blanchisseuses31

Le Monde note que paradoxalement l’Hôtel de Sens, une des deux seules résidences médiévales qui subsistent à Paris, abritera la « très moderne bibliothèque populaire d’art et d’industrie transférée de la rue Titon »32. Même thème dans Le Figaro, qui titre « Pour les 300 000 documents de la bibliothèque Forney : une vaste et moderne installation dans le vieil hôtel de Sens. » La conservatrice Jacqueline Viaux explique que les salles de lecture sont plus grandes que rue Titon, que l’une d’elles est ornée d’une belle cheminée datant de l’époque de Tristan de Salazar et que les lecteurs « peuvent y jouir d’un calme exceptionnel dans le bruyant Paris »33. Seul Combat exprime des doutes sur la pertinence du choix de l’Hôtel de Sens, qui pourrait se révéler prochainement trop exigu pour le nombre croissant de documents de la bibliothèque : « il aurait sans doute mieux valu construire un bâtiment neuf plus fonctionnel et moins coûteux en définitive ! »

Rares sont ceux qui s’attardent sur le fonctionnement de la bibliothèque et les problèmes rencontrés. Les Nouvelles littéraires expliquent qu’en raison de la cohabitation provisoire avec un autre service de la Ville, la bibliothèque est « reléguée » au quatrième étage. Le journal rend hommage au personnel : « grâce à l’esprit d’initiative et à la ténacité de la conservatrice, Mme Viaux, grâce aussi à l’activité intelligente et au dévouement de ses adjointes, la prise de possession s’est faite en un temps record sans que jamais le fonctionnement de la bibliothèque n’ait été interrompu. » L’auteur rappelle aussi que les travaux ne sont pas terminés : « Souhaitons aussi que son occupation un peu précipitée des locaux apparaisse aux responsables de leur réfection comme une raison suffisante d’accélérer les travaux et d’en hâter la fin. » La persistance de collections externalisées (en particulier de périodiques rue Titon puis sur d’autres sites extérieurs, faute d’espaces de stockage complètement adaptés à la masse des collections) est passée sous silence. En somme, l’information qui circule idéalise la bibliothèque, ce qui rend légitimes les récits qui établissent un lien artificiel entre le monument médiéval et la bibliothèque.

Un cadre digne de la bibliothèque

L’hôtel de Sens constitue un cadre digne de la bibliothèque et de ses collections : on trouve ce thème sous la plume des administrateurs, puis dans les colonnes des journaux, et plus tard dans le bulletin des Amis de la bibliothèque. En 1952, le journal Ce matin le pays, qui consacre son second article à la bibliothèque, visite les installations de la rue Titon et interroge une des « sympathiques bibliothécaires de Forney » : la bibliothèque, « organisme complexe et délicat, aura-t-elle bientôt un local digne d’elle ? » Son interlocutrice lui répond en évoquant les budgets nécessaires pour le transfert à l’hôtel de Sens. « La bibliothèque Forney pourra [alors], dans cette vaste maison historique, installer décemment ses collections, inaugurer un enseignement pratique portant sur les industries parisiennes, compléter sa documentation, à portée de main, par un musée technologique et par des expositions temporaires ».

Jacqueline Viaux, nommée à Forney en 1942, puis directrice de 1951 à 1980, pilote l’emménagement à l’hôtel de Sens. Si ses recherches portent principalement sur les arts décoratifs, elle s’intéresse également à l’histoire du bâtiment et publie des articles à ce sujet34. En 1972, la bibliothèque Forney publie une plaquette qui fait le bilan de ses dix premières années d’installation. Elle se conclut ainsi :

La longue histoire de l’hôtel de Sens trouve son aboutissement au XXe siècle, avec l’installation de la bibliothèque Forney, qui ayant quitté les locaux de ses débuts rue Titon, jouit enfin du cadre digne de la richesse de ses collections. Depuis 1972, date à laquelle les travaux et les déménagements ont pratiquement cessé, Forney montre son vrai visage : les lecteurs deviennent chaque jour plus nombreux, et ses publications lui assurent un rayonnement international, auquel concourt avec éclat le cadre prestigieux qui l’abrite.

Si le guide du lecteur des années 1970 développe les collections et les services, reléguant l’historique de l’Hôtel de Sens à quelques dates en fin de dépliant, le guide publié dans les années 1990 développe une histoire qui commence avec Tristan de Salazar et se termine par l’ouverture de la bibliothèque en 1961, en n’omettant aucune des figures imposées : archevêques, Reine Margot, entreprises, rachat et travaux de restauration. En 1972, est tourné un film par des élèves de l’École de télévision, destiné aux lecteurs nouvellement inscrits, qui débute par une introduction historique sur le monument puis présente le parcours d’une lectrice et le fonctionnement des services, on apprend ainsi qu’à l’entrée un compteur électronique dénombrait les lecteurs, que les bulletins de demande étaient transmis par lecteur optique… Retrouvé en 2019, ce film a été numérisé et mis en ligne35 ; diffusé dans le hall d’accueil ou sur les réseaux sociaux de la bibliothèque, il fait maintenant partie l’histoire de la bibliothèque.

Des collections diversifiées et mieux valorisées

À partir des années 1950, une campagne de publicité, faite dans différents journaux ou revues professionnelles, attire l’attention des lecteurs potentiels sur les collections et les horaires d’ouverture étendus de la bibliothèque Forney. Depuis lors, la bibliothèque Forney n’aura de cesse de faire connaître ses services et collections qui s’adressent aussi bien aux artistes ou aux artisans mais aussi, plus que jamais avec le développement des pratiques amateurs, à tout un chacun.

Aux collections de livres et de revues, s’est ajoutée une catégorie de documents moins attendue en bibliothèque : cette collection de modèles qui illustre la simplicité pragmatique de la mise à disposition des collections en fonction du public s’est d’abord incarnée dans la collection de toiles de Jouy créée par Henri Clouzot36. « Le moindre échantillon en dit ici plus long qu’un croquis, et a fortiori qu’un rapport »37. Ces collections forment alors une richesse unique en France : toiles imprimées de la fin du XVIIIe siècle et du début du XIXe siècle, échantillons de dentelle, broderies, soieries, cotonnades provenant de la collection Victor Poterlet, séries panoramiques de papier peint de l’époque restauration, comme la série Psyché édité par Dufour et Leroy, liasses de papier peint de la fin du XIXe siècle, et de nombreux dessins originaux donnés le plus souvent par les fabricants eux-mêmes forment le cœur précieux de ses collections. Les bibliothécaires soulignent également l’ensemble exceptionnel de collections sur l’histoire du mobilier, en insistant sur la série de livres de commande de la maison Henri Fourdinois, et autres modèles dessinés par des entreprises renommées de la fin du XIXe ou du début du XXe siècle formant ainsi une documentation unique en matière de mobilier. Un fonds important de livres sur le costume a également été rassemblé, et plus généralement sur les industries du textile, du cuir, de la joaillerie et de la broderie ainsi que de la céramique. Aux traités techniques sur toutes les professions, modèles sous forme d’images de toute époque, des revues de périodiques, des catalogues de vente et d’exposition, des affiches forment la partie la plus fréquemment mise en valeur dans le récit des collections. Il s’agit de trésors cachés à mettre en valeur dans le cadre prestigieux de l’Hôtel de Sens. Progressivement, l’importante collection d’affiches est également signalée parmi les richesses et fera l’objet d’une série d’expositions monographiques, faisant de l’art de l’affiche publicitaire un des points forts de la bibliothèque Forney. Dans le souci d’ouvrir au plus grand nombre les collections, Jacqueline Viaux va même jusqu’à faire la promotion des modèles de costumes régionaux utiles au professeur de français qui veut faire jouer à sa classe une pièce de théâtre, des illustrations naturalistes pour identifier les fleurs, les oiseaux et les champignons et le fonds de livres de tourisme pour préparer ses vacances38. C’est probablement le symptôme d’un changement de lectorat, ou tout au moins d’un élargissement par rapport au vivier ouvrier primitif. Dans les différentes descriptions publiées par la bibliothèque, la diversification des collections (livres, périodiques, catalogues, affiches, cartes postales, images en tout genre [originales ou reproductions]) s’accompagne d’une liste qui reflète aussi bien l’accroissement des collections et fonds que la variété des formes d’ephemera collectés (Casiot, 2006). Ainsi, sur un dépliant présentant la bibliothèque publié dans les années 1990, l’énumération de la typologie des collections se termine par les étiquettes publicitaires (produits de beauté, boissons, cigarettes, etc.). Au cours des visites, étiquettes de camembert et couronnes des rois incarnent une vision pittoresque de la diversité des collections où le patrimoine assure la conservation à long terme de la trivialité du quotidien.

En 2004, les collections de la Bibliothèque des arts graphiques (BAG), créée en 1929 à la suite du don fait à la Ville de Paris par le typographe Edmond Morin, rejoignent Forney (Bouju, 2018), renforçant le domaine des arts graphiques et du design. L’histoire de cette bibliothèque s’intègre lentement dans le récit de la bibliothèque Forney. Si les panneaux pédagogiques présents sur les grilles de la bibliothèque et à l’intérieur ne mentionnent pas la BAG, ses fonds et son créateur ont été mis à l’honneur en 2020 à l’occasion d’une rencontre39. La personnalité d’Edmond Morin (1859-1937), qui fut typographe, bouquiniste, journaliste, syndicaliste…, présente un potentiel narratif important, qui suscitera peut-être de nouveaux récits.

S’adresser à un large public

Des expositions sont organisées très régulièrement à la bibliothèque à partir de 1963. Elles sont le signe que la fabrique des récits qui entourent la bibliothèque est volontaire et consciente, et plus encore, contrôlée par ceux qui les énoncent. En effet, certaines sont consacrées à l’histoire de la bibliothèque et du bâtiment : Centenaire des bibliothèques municipales parisiennes en 1965, Histoire de l’hôtel de Sens et de la bibliothèque Forney en 1973 à l’occasion de nouvelles installations, Documents précieux de la bibliothèque Forney en 1980, La France de 1886, centenaire de la bibliothèque Forney en 1986. Pour Jacqueline Viaux, l’exposition de 1973 était l’occasion de retracer à la fois l’histoire du monument et la création de la bibliothèque, son transfert à l’hôtel de Sens, et « son développement spectaculaire, son rayonnement »40. Le visiteur pouvait découvrir des portraits des archevêques de Sens et des premiers conservateurs de la bibliothèque, des plans, archives et photographies, et une sélection de pièces des collections, livres et revues, cartes postales des inondations de Paris, estampes japonaises, affiches… D’autres expositions présentent les collections de la bibliothèque et l’œuvre de créateurs. Les expositions d’artisanat « correspondent à la vocation de la bibliothèque » rappelle Jacqueline Viaux41. Les tendances contemporaines ont toute leur place à Forney : en 1975, la bibliothèque accueille Jean’s expo, où étaient présentés des jeans décorés de paillettes, capsules, fourrure…, primés lors d’un concours organisé par la société Levi’s42. Une attention particulière est toujours portée aux techniques, expliquées au public grâce à des films et des visites ou lors de rencontres avec des artistes et de démonstrations de création de broderie (1980), patchwork (1988) mais aussi raku (technique d’émaillage japonaise) dans la cour de l’hôtel de Sens en 1978… Les expositions ont toujours été jugées importantes par les bibliothécaires et les amis de la bibliothèque pour l’image de l’établissement. En 1963, 15 000 personnes viennent voir l’exposition Artisans de Paris. Les Amis de la bibliothèque commentent dans leur bulletin : « Les exposants ont compris que Forney était un organisme vivant et non un amas de documents poussiéreux. Ils ont été amenés à apprécier l’aide efficace que peuvent leur apporter la bibliothèque et son personnel. »43 Au-delà du cas des artisans, les expositions font connaître la bibliothèque, sont l’occasion d’articles de presse et de reportages à la radio et la télévision. Elles permettent de déployer les récits dans l’espace public, de les partager et de les enseigner. En 1965, la bibliothèque décide de constituer des archives photographiques des manifestations de la bibliothèque, en photographiant l’inauguration des expositions et les objets présentés44. En 1986, les bibliothécaires constatent que l’entrée devenue payante cette année-là, même à un tarif très modique, « contribue à séparer visiteurs d’exposition et lecteurs de la bibliothèque : ceux-ci descendaient souvent dans les salles du rez-de-chaussée, en attendant que les livres leur soient distribués dans la salle de lecture, et découvraient ainsi des techniques ou des artisans auxquels à l’origine ils ne s’intéressaient pas spécialement. »45

Pour la Société des amis de la bibliothèque Forney (SABF), créée en 1914, l’installation à l’hôtel de Sens est une renaissance. Grâce aux nouveaux espaces disponibles, elle développe alors ses activités, organisant des conférences, des expositions, des projections. Elle lance en 1962 un bulletin pour tenir ses adhérents informés de ses activités, mais aussi faire connaître la vie de la bibliothèque et ses richesses46. Au fil des années, on a pu ainsi y lire des articles, écrits par ses membres de l’association et du personnel de Forney, sur les nouvelles acquisitions, sur l’hôtel de Sens47, les anciens conservateurs de la bibliothèque… La société fait des dons à la bibliothèque, contribuant au développement d’une collection de gravures et dessins représentant l’Hôtel de Sens. Elle participe également au récit par la publication de catalogues d’exposition et de cartes postales choisies parmi les centaines de milliers d’images conservées par la bibliothèque.

Construire un récit complet

Des travaux pour repenser le récit

En 2016, de grands travaux ont été menés pour mieux accueillir lecteurs et visiteurs et faciliter leur circulation au sein du bâtiment. Le rez-de-chaussée est alors consacré à la médiation vers un large public avec des équipements conçus en complémentarité avec la galerie d’exposition (Trunel, 2018). La situation de la bibliothèque, dans un quartier touristique de la capitale, au sein d’un monument historique, en fait un lieu très visité. L’objectif est qu’il y ait toujours quelque chose à voir à Forney, pour tous, au-delà de son patrimoine architectural. Des vitrines destinées à présenter, par roulement, les collections ont été installées dans l’espace de détente au pied de l’escalier d’honneur, et à l’accueil de la galerie d’exposition, en plus de celles déjà présentes dans la salle de lecture consacrée à l’iconographie. Des panneaux pédagogiques, sur les grilles extérieures de la bibliothèque et à l’accueil de la galerie, présentent l’hôtel de Sens et ses occupants, l’histoire de la bibliothèque, ses collections et ses services, dont l’atelier de conservation, le réaménagement de 2016 (« Forney se réinvente pour le public »), et la politique d’action culturelle.

La SABF a financé un feuilletoir qui présente la bibliothèque et ses collections par un historique mais aussi des parcours orientés usagers, qui permettent de présenter les collections au-delà de la partition par collections qui caractérisent les présentations au public : « J’aime » (les fleurs, les couleurs, le kitsch), « Je m’intéresse à » (disciplines représentées dans les collections, regroupées par grandes familles d’ouvrages en libre accès dans les salles : arts graphiques, design et architecture, histoire des arts, modes et textiles, pratiques et métiers), « Si j’étais (Cendrillon, Zola, Eiffel) », « J’ai une question » qui met à l’honneur les questions posées par les lecteurs, des plus pragmatiques (où sont les toilettes ?) aux plus farfelues (Est-ce qu’il y a une châtelaine à Forney ?), et une rubrique « Surprenez-moi » où les bibliothécaires ont fait un choix parmi d’étonnants documents.

La politique d’expositions temporaires, dans les trois salles de la galerie, va se poursuivre au rythme d’une par an. Ces expositions où sont présentées des œuvres des collections de la bibliothèque, d’autres institutions publiques et de collectionneurs privés, attirent un large public et sont importantes pour Forney. Le projet d’établissement prévoit également l’organisation, entre deux expositions, d’un parcours autour d’un thème (la mode…), basé uniquement sur les collections de Forney, destiné à les faire connaître aux visiteurs.

Si l’accès aux salles de lecture est réservé aux lecteurs inscrits, le parcours de visite libre permet de voir, grâce à une porte vitrée, la salle de lecture principale ornée, lors des restaurations du XXe siècle, d’un décor inspiré du Moyen Âge. En plus des visites guidées des expositions et des visites de la bibliothèque destinées aux professionnels et aux lecteurs, est également prévue la reprise de visites découverte destinées à un large public, composées d’une présentation de l’histoire de la bibliothèque, du monument et de ses collections. Un guide destiné au personnel qui assure des visites est en cours d’élaboration. Le récit autour de la bibliothèque, qui comprend plusieurs lieux, différents personnages et des collections très variées, est en effet complexe. Il profite, par ces moyens, d’une médiation accrue qui favorise l’imprégnation du public.

Dans le cadre de cartes blanches données à des artistes par les bibliothécaires, l’histoire de l’Hôtel de Sens est aussi une source d’inspiration pour la création d’œuvres destinées à rejoindre les collections de la bibliothèque. Après une exposition de ses œuvres à la bibliothèque en 2015, Marianne Montchougny a créé un livre d’artiste inspiré par le monument et les archevêques qui y ont résidé et composé de dessins, de textes et de photographies de détails de l’architecture48. En 2019, le street artist Codex urbanus, invité à Forney, crée la bibliothèque fantasmée de l’archevêque, centrée sur les créatures fantastiques du Marais, en les faisant dialoguer avec les collections de la bibliothèque, graphzines, étiquettes, affiches… En 2021, dans le cadre d’une carte blanche, Sophie Théodose, enlumineuse, a créé une œuvre sur le thème du figuier représenté au fil des saisons. Le figuier nous ramène au nom de la rue où est située la bibliothèque, mais aussi à l’histoire du monument puisque la rue aurait été baptisée ainsi car la reine Margot aurait fait couper un figuier qui gênait le passage de son carrosse… Ces créations font l’objet de rencontres entre les artistes et le public. Ces événements confirment le lien entre l’institution et la création artistique tout en puisant dans les ressources narratives du récit initial – un lieu innovant et dédié au progrès social – et de l’insertion dans la longue histoire du quartier du Marais. Ils valident en quelque sorte cette double origine.

La bibliothèque Forney inscrit également son récit au sein du portail des bibliothèques spécialisées de la Ville de Paris49. Ce portail donne accès au catalogue du réseau de bibliothèques, aux documents numérisés, et met en avant sur son écran d’accueil des contenus éditorialisés. Chaque bibliothèque du réseau présente à tour de rôle un « Original de la semaine » et peut faire des présentations plus détaillées sous forme de focus. Forney a ainsi présenté une affiche de Jules Chéret, Le petit écho de la mode, un papier peint d’Hector Guimard, des catalogues de parfumerie et cosmétique, des plaques de verre représentant la bibliothèque Forney dans l’entre-deux-guerres… La bibliothèque communique également sur les réseaux sociaux (Twitter, Instagram, Facebook), sur son actualité (expositions, conférences…), sur les collections et l’histoire de la bibliothèque, sous un angle esthétique, documentaire et historique. Enfin, la bibliothèque travaille à un blog permettant de lui assurer une visibilité plus immédiate sur les moteurs de recherche. Ce blog offrira des contenus éditorialisés plus complets et plus pérennes sur l’histoire de la bibliothèque et de ses collections, ses services, mais aussi des guides chronologiques et thématiques.

Mettre en valeur les hommes et les femmes de la bibliothèque

Si Samuel Forney a donné son nom à la bibliothèque, ce que rappelle une plaque sous le porche de l’Hôtel de Sens, il apparaît peu dans les différents récits. Il est simplement cité pour justifier le nom de la bibliothèque comme un industriel parisien d’origine suisse qui avait le souci de « compléter l’instruction technique des artisans et d’épurer le goût des artistes industriels ». Le montant de son legs – 200 000 francs – est régulièrement associé à son nom. Un article de Jean Frollo déplorant l’état des bibliothèques parisiennes ne rappelle sa générosité que pour souligner l’absence de grands mécènes français. « Comparez les millions offerts par MM. Carnegie et Rockefeller aux libéralités de nos mécènes français : Mme Tridon donna 90 000 francs, M. Forney 200 000 francs employés à une bibliothèque d’art et d’industrie, puis il y eut des dons en volumes et c’est tout. »50 Samuel Forney restera présenté comme un petit mécène, a fortiori lorsque Gabriel Henriot cherche des financements pour développer la bibliothèque. Cependant, lorsque le projet d’y donner des conférences mûrit, la vocation pédagogique du legs est rappelée ; dès sa création, la bibliothèque est destinée à accueillir des conférences : « Pour compléter la pensée de M. Forney qui désirait que son legs fût employé pour l’enseignement professionnel, on organisera au siège de la bibliothèque une série de conférences techniques sur les industries les plus répandues dans le XIe et le XIIe arrondissement ». Cette relative discrétion du personnage fondateur est étonnante car la figure du donateur et philanthrope constitue ailleurs un élément narratif essentiel51.

Le premier conservateur Julien Sée apparaît peu. Par contre, Henri Clouzot, Gabriel Henriot ou Georges J. Rémon signent des articles ou font visiter la bibliothèque pour dénoncer la saturation des espaces et l’insalubrité des locaux. Gabriel Henriot signe des articles développant son idée de faire de la bibliothèque un centre de documentation puis un centre joignant activités d’information, de documentation et d’enseignement. Le portrait de Gabriel Henriot, l’air sérieux et décidé, apparaît en médaillon aux côtés de photographies de la bibliothèque lorsque ses projets d’extension des missions et des locaux de la bibliothèque et ses activités au service des bibliothèques sont médiatisés dans la presse52. Présenté comme modeste – « il n’aime pas la publicité » – il est « las de voir les bibliothèques se transformer en “cimetières à bouquins” ». Lorsque le déménagement vers l’Hôtel de Sens est acté, il est même qualifié d’« archevêque des livres »53, formule qui présente le raccourci saisissant entre les deux pans de l’histoire de l’institution et du lieu qui l’accueille.

Après-guerre, les femmes bibliothécaires de Forney continuent à sensibiliser les journalistes à la nécessité de réaliser effectivement le déménagement de la bibliothèque dans l’ancien hôtel de Sens. Jacqueline Viaux et Solange Pons mettent l’accent sur les collections et les services qu’elles peuvent rendre à ce public spécialisé mais aussi plus largement aux amateurs. Les différents responsables de la bibliothèque continueront à œuvrer à la promotion des collections. Lorsque Claudine Chevrel publie une histoire de la bibliothèque Forney (1983), où l’Hôtel de Sens figure dans le titre à égalité avec la bibliothèque, il s’agit de faire connaître l’histoire du bâtiment au-delà de son emblématique silhouette, pour faire saisir au lecteur comment la bibliothèque de quartier est devenue un « grand centre de conservation et de diffusion sur l’art et l’art décoratif, célèbre dans le monde pour ses expositions et ses publications ». À travers différents chapitres, dans l’ordre chronologique, y sont décrits les « pittoresques habitants », des archevêques de Sens à la « galante reine Margot », « des entreprises de diligence aux fabriques de confiture » mais aussi, pour la première fois les différents acteurs de l’histoire de la bibliothèque, de Samuel Forney à Jacqueline Viaux et Guy Baudin. Replacer dans un récit faisant la part belle aux légendes historiques les hommes et les femmes qui ont compté dans l’histoire de la bibliothèque et, même parfois dans l’histoire de la bibliothéconomie, c’est également l’objectif poursuivi par les bibliothécaires aujourd’hui. Il permet d’incarner l’histoire à travers des êtres et de favoriser l’attachement au lieu et à sa patrimonialité.

*

Dans le mouvement de développement des bibliothèques populaires, le récit initial de la bibliothèque Forney vise à informer et promouvoir des collections et des services innovants envers les professionnels : les éléments discriminants qui singularisent cet établissement dans l’ensemble du paysage des bibliothèques de la ville de Paris. Face à des moyens insuffisants au regard du succès de la bibliothèque, le discours militant des bibliothécaires, relayé en particulier par la presse générale et spécialisée, souligne la légitimité de l’établissement pour en élargir les missions. Ce récit est consacré par l’installation de la bibliothèque à l’Hôtel de Sens et enrichi de nouvelles trames narratives grâce à une histoire pluriséculaire qui constitue dès lors une formidable opportunité d’élargir son audience. En même temps, l’attention portée aux aspects pittoresques de la vie antérieure du monument masque parfois l’identité de la bibliothèque. Il s’agit donc aujourd’hui de continuer à tisser entre la bibliothèque et son bâtiment un récit adapté aux différentes attentes de ses publics tout en facilitant la découverte de ses missions actuelles. En travaillant sur l’histoire de l’établissement et de ses sources, en particulier grâce à un fonds d’archives (archives administratives, fonds de photographies, dessins, gravures, etc.) en cours d’inventaire, les bibliothécaires travaillent à mieux connaître des périodes ou des aspects de l’histoire de l’institution qui ont déjà fait l’objet de publications, mais aussi à sortir de l’oubli des évolutions ou des difficultés qui ont ensuite été passées sous silence. Le récit de la bibliothèque Forney va donc continuer à s’écrire dans la perspective de le partager sous différentes formes avec le plus grand nombre.

1 Tous ces documents sont conservés au sein des archives de la bibliothèque Forney.

2 Anonyme (1911). Note pour la commission de surveillance de la bibliothèque professionnelle d’art et d’industrie Forney. Paris : Impr. de la

3 Ibid.

4 Rémon, G. J. (1913). L’Humanité, 26 août.

5 Rosenthal, G. (1922). Un excellent instrument de travail pour tous ceux qui veulent s’instruire : la bibliothèque Forney. Le Journal de l’

6 À la tête de la bibliothèque entre 1920 et 1940.

7 Henriot, G. (1929). L’avenir de la bibliothèque Forney. La revue de l’ameublement. 1er octobre.

8 Anonyme (1911). Note pour la commission de surveillance de la bibliothèque professionnelle d’art et d’industrie Forney. Paris : Impr. de la

9 Ibid.

10 Ferrier, C. (1913). La Bibliothèque Forney : pour les travailleurs des métiers d’art. La Liberté, 12 août.

11 Remon, G. J., Clouzot, H., Engerand, L. (1912-1925). Ville de Paris. Catalogue général de la Bibliothèque Forney… Prêt à domicile et lecture sur

12 Dany, P. (1929). Une riche bibliothèque trop pauvrement logée : va-t-on procurer un nouveau local à la bibliothèque Forney ? L’Ami du peuple, 23 

13 Paillard, L. (1929). Les précieux services rendus par la bibliothèque des artisans. Le Petit Journal, 30 juillet.

14 Paillard, L. (1929). Les précieux services rendus par la bibliothèque des artisans, ibid.

15 Cornu, P. (1913), Les bibliothèques d’art de Paris. Bibliothèques, livres et librairies : conférences faites à l’École des Hautes Études Sociales.

16 Conservateur de Forney de 1884 à 1908.

17 J. G. (1913). Une bibliothèque pratique d’art décoratif. Le Temps, 8 octobre.

18 Anonyme. (1913). Revue chronométrique : journal de l’horlogerie française, n° 682, p. 7.

19 Ferrier, C. (1913). La Bibliothèque Forney : pour les travailleurs des métiers d’art. La Liberté.

20 J. G. (1913), Une bibliothèque pratique d’art décoratif. Le Temps, 8 octobre.

21 Nys, R. de. (1921). L’éducation ouvrière : la Bibliothèque Forney ou la misère de 25 000 volumes. L’Information sociale, 13 novembre.

22 Dany, P. (1929). Une riche bibliothèque trop pauvrement logée : va-t-on procurer un nouveau local à la Bibliothèque Forney ? Op. cit.

23 Anonyme (1919). L’Intransigeant, 17 octobre.

24 Rémon, G. J. (1922). Paris possède sa bibliothèque du travail et des arts industriels mais elle est mal située et peu connue. La Commune de Paris

25 Heuzé, P. (1927), Comoedia, 7 mars.

26 Bever, J. (1932). L’hôtel de Sens, la Sorbonne de l’artisanat. Le monde illustré, 5 mars.

27 Sanvoisin, G. (1950). Les travaux de restauration de l’hôtel de Sens reprendraient bientôt, selon le préfet de la Seine. Ce matin le pays, 2 

28 Troche. (1847). Notice historique sur l’hôtel de Sens, ancienne résidence à Paris des archevêques de Sens. Revue archéologique, p. 146-164.

29 Anonyme. (1936). La bibliothèque Forney : Institut des arts et métiers de Paris. 8 p.

30 Le New York Times publie : Bracker, M. (1961). Paris to reopen Forney library. New York Times, 6 avril.

31 Vidal, J. (1961). L’hôtel de Sens résidence moyenâgeuse et cardinalesque abrite depuis hier la bibliothèque municipale d’art et d’industrie.

32 L. L. D. (1961). L’hôtel de Sens abrite une importante documentation technique et artistique. Le Monde, 14 au 15 mai.

33 Viaux, J. (1961). Forney à l’hôtel de Sens, II. Le fonctionnement de la bibliothèque dans les nouveaux locaux. Revue de l’ameublement, 9 décembre

34 Viaux, J. (1961). Forney à l’hôtel de Sens, I. Histoire de l’hôtel de Sens. Revue de l’ameublement, septembre-octobre, p. 161-163 ; Viaux, J. (

35https://www.youtube.com/watch?v=l17JvgPQRdQ > (consulté le 31 mars 2022).

36 Conservateur de la bibliothèque Forney de 1908 à 1920.

37 Dany, P. (1929). Une riche bibliothèque trop pauvrement logée : va-t-on procurer un nouveau local à la bibliothèque Forney ? Op. cit.

38 Viaux, J. (1959). Une source de documentation inconnue : la bibliothèque Forney. Parents d’élèves, juillet.

39 « Edmond Morin ou la typographie au service de tous », rencontre avec Marie-Cécile Bouju dans le cadre du cycle des Surprenants samedis de la

40 Rapport annuel de la bibliothèque, 1973, p. 28.

41 Rapport annuel de la bibliothèque, 1979, p. 58.

42 Rapport annuel de la bibliothèque, 1975, p. 55.

43 Bulletin des amis de la bibliothèque Forney, janvier 1964, n° 5, p. 1.

44 Rapport annuel de la bibliothèque, 1965, p. 27.

45 Rapport annuel de la bibliothèque, 1986, p. 96.

46 Anonyme. (1965). À nos amis. Bulletin des amis de la bibliothèque Forney, mai 1965, n° 9, p. 1.

47 Guindollet, F. (1989). Nostradamus et l’hôtel de Sens. Bulletin de la SABF, n° 102, p. 21-23.

48 Montchougny, M. (2016). Les archevêques. Collages, photographies, articles de journaux, encres sur papier de riz, rehaussé de peinture.

49https://bibliotheques-specialisees.paris.fr/accueil > (consulté le 31 mars 2022).

50 Frollo, J. (1911). Les bibliothèques populaires. Le Petit Parisien, 11 mars.

51 Voir les autres articles de ce dossier.

52 Paillard, L. (1929). Les précieux services rendus par la bibliothèque des artisans. Le Petit Journal, 30 juillet.

53 Bever, J. (1932). L’hôtel de Sens, Sorbonne de l’artisanat. Le monde illustré, 5 mars.

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Notes

1 Tous ces documents sont conservés au sein des archives de la bibliothèque Forney.

2 Anonyme (1911). Note pour la commission de surveillance de la bibliothèque professionnelle d’art et d’industrie Forney. Paris : Impr. de la coopération typographique.

3 Ibid.

4 Rémon, G. J. (1913). L’Humanité, 26 août.

5 Rosenthal, G. (1922). Un excellent instrument de travail pour tous ceux qui veulent s’instruire : la bibliothèque Forney. Le Journal de l’ameublement, 20 décembre.

6 À la tête de la bibliothèque entre 1920 et 1940.

7 Henriot, G. (1929). L’avenir de la bibliothèque Forney. La revue de l’ameublement. 1er octobre.

8 Anonyme (1911). Note pour la commission de surveillance de la bibliothèque professionnelle d’art et d’industrie Forney. Paris : Impr. de la coopération typographique.

9 Ibid.

10 Ferrier, C. (1913). La Bibliothèque Forney : pour les travailleurs des métiers d’art. La Liberté, 12 août.

11 Remon, G. J., Clouzot, H., Engerand, L. (1912-1925). Ville de Paris. Catalogue général de la Bibliothèque Forney… Prêt à domicile et lecture sur place… Paris : E. Champion.

12 Dany, P. (1929). Une riche bibliothèque trop pauvrement logée : va-t-on procurer un nouveau local à la bibliothèque Forney ? L’Ami du peuple, 23 janvier.

13 Paillard, L. (1929). Les précieux services rendus par la bibliothèque des artisans. Le Petit Journal, 30 juillet.

14 Paillard, L. (1929). Les précieux services rendus par la bibliothèque des artisans, ibid.

15 Cornu, P. (1913), Les bibliothèques d’art de Paris. Bibliothèques, livres et librairies : conférences faites à l’École des Hautes Études Sociales. Paris : M. Rivière, p. 97-126.

16 Conservateur de Forney de 1884 à 1908.

17 J. G. (1913). Une bibliothèque pratique d’art décoratif. Le Temps, 8 octobre.

18 Anonyme. (1913). Revue chronométrique : journal de l’horlogerie française, n° 682, p. 7.

19 Ferrier, C. (1913). La Bibliothèque Forney : pour les travailleurs des métiers d’art. La Liberté.

20 J. G. (1913), Une bibliothèque pratique d’art décoratif. Le Temps, 8 octobre.

21 Nys, R. de. (1921). L’éducation ouvrière : la Bibliothèque Forney ou la misère de 25 000 volumes. L’Information sociale, 13 novembre.

22 Dany, P. (1929). Une riche bibliothèque trop pauvrement logée : va-t-on procurer un nouveau local à la Bibliothèque Forney ? Op. cit.

23 Anonyme (1919). L’Intransigeant, 17 octobre.

24 Rémon, G. J. (1922). Paris possède sa bibliothèque du travail et des arts industriels mais elle est mal située et peu connue. La Commune de Paris, novembre.

25 Heuzé, P. (1927), Comoedia, 7 mars.

26 Bever, J. (1932). L’hôtel de Sens, la Sorbonne de l’artisanat. Le monde illustré, 5 mars.

27 Sanvoisin, G. (1950). Les travaux de restauration de l’hôtel de Sens reprendraient bientôt, selon le préfet de la Seine. Ce matin le pays, 2 janvier.

28 Troche. (1847). Notice historique sur l’hôtel de Sens, ancienne résidence à Paris des archevêques de Sens. Revue archéologique, p. 146-164.

29 Anonyme. (1936). La bibliothèque Forney : Institut des arts et métiers de Paris. 8 p.

30 Le New York Times publie : Bracker, M. (1961). Paris to reopen Forney library. New York Times, 6 avril.

31 Vidal, J. (1961). L’hôtel de Sens résidence moyenâgeuse et cardinalesque abrite depuis hier la bibliothèque municipale d’art et d’industrie. Libération, 8 au 9 avril.

32 L. L. D. (1961). L’hôtel de Sens abrite une importante documentation technique et artistique. Le Monde, 14 au 15 mai.

33 Viaux, J. (1961). Forney à l’hôtel de Sens, II. Le fonctionnement de la bibliothèque dans les nouveaux locaux. Revue de l’ameublement, 9 décembre, p. 73-74.

34 Viaux, J. (1961). Forney à l’hôtel de Sens, I. Histoire de l’hôtel de Sens. Revue de l’ameublement, septembre-octobre, p. 161-163 ; Viaux, J. (1965). Paris, l’hôtel de Sens. Revue du Touring club de France, juillet-août.

35https://www.youtube.com/watch?v=l17JvgPQRdQ > (consulté le 31 mars 2022).

36 Conservateur de la bibliothèque Forney de 1908 à 1920.

37 Dany, P. (1929). Une riche bibliothèque trop pauvrement logée : va-t-on procurer un nouveau local à la bibliothèque Forney ? Op. cit.

38 Viaux, J. (1959). Une source de documentation inconnue : la bibliothèque Forney. Parents d’élèves, juillet.

39 « Edmond Morin ou la typographie au service de tous », rencontre avec Marie-Cécile Bouju dans le cadre du cycle des Surprenants samedis de la bibliothèque Forney, 24 octobre 2020.

40 Rapport annuel de la bibliothèque, 1973, p. 28.

41 Rapport annuel de la bibliothèque, 1979, p. 58.

42 Rapport annuel de la bibliothèque, 1975, p. 55.

43 Bulletin des amis de la bibliothèque Forney, janvier 1964, n° 5, p. 1.

44 Rapport annuel de la bibliothèque, 1965, p. 27.

45 Rapport annuel de la bibliothèque, 1986, p. 96.

46 Anonyme. (1965). À nos amis. Bulletin des amis de la bibliothèque Forney, mai 1965, n° 9, p. 1.

47 Guindollet, F. (1989). Nostradamus et l’hôtel de Sens. Bulletin de la SABF, n° 102, p. 21-23.

48 Montchougny, M. (2016). Les archevêques. Collages, photographies, articles de journaux, encres sur papier de riz, rehaussé de peinture.

49https://bibliotheques-specialisees.paris.fr/accueil > (consulté le 31 mars 2022).

50 Frollo, J. (1911). Les bibliothèques populaires. Le Petit Parisien, 11 mars.

51 Voir les autres articles de ce dossier.

52 Paillard, L. (1929). Les précieux services rendus par la bibliothèque des artisans. Le Petit Journal, 30 juillet.

53 Bever, J. (1932). L’hôtel de Sens, Sorbonne de l’artisanat. Le monde illustré, 5 mars.

Illustrations

Figure 1. La bibliothèque Forney à l’Hôtel de Sens

Figure 1. La bibliothèque Forney à l’Hôtel de Sens

Source : Ville de Paris – bibliothèque Forney, Yves Lesven.

Figure 2. Carte postale représentant la salle de lecture de la bibliothèque Forney rue Titon

Figure 2. Carte postale représentant la salle de lecture de la bibliothèque Forney rue Titon

Source : Ville de Paris – bibliothèque Forney, Yves Lesven.

Figure 3. Coupure de presse, L’Intransigeant, 1929

Figure 3. Coupure de presse, L’Intransigeant, 1929

Source : Ville de Paris – bibliothèque Forney.

Figure 4. Étiquette de la Confiturerie St James installée à l’Hôtel de Sens de 1864 à 1886

Figure 4. Étiquette de la Confiturerie St James installée à l’Hôtel de Sens de 1864 à 1886

Source : Ville de Paris – bibliothèque Forney, Yves Lesven.

Citer cet article

Référence électronique

Joëlle Garcia et Catherine Granger, « Attention, un monument historique peut cacher une bibliothèque ouverte à tous. Raconter l’histoire de la bibliothèque Forney », Balisages [En ligne], 4 | 2022, mis en ligne le 09 mai 2022, consulté le 28 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/balisages/index.php?id=864

Auteurs

Joëlle Garcia

Conservatrice en chef des bibliothèques, cheffe du pôle des collections spécialisées à la bibliothèque Forney

Catherine Granger

Conservatrice en chef des bibliothèques, directrice adjointe de la bibliothèque Forney

Droits d'auteur

CC BY SA 4.0