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Mots-clés

histoire de l’environnement, environnement montagnard, environnement urbains

Keywords

history of the environment, mountain environment, urban environment

Texte

Vue de Grenoble depuis les pentes de la Bastille

Vue de Grenoble depuis les pentes de la Bastille

Photographie Stéphane Frioux, 2016.

L’environnement est à la mode, écrivait-on vers 1970-1971. Cette vogue lexicale marquée par une appropriation rapide du mot, la création d’institutions dédiées, à commencer par un ministère « de la protection de la nature et de l’environnement », n’a pas été suivie immédiatement par les historiennes et les historiens. Ces derniers se méfient des modes, il est vrai. L’historien moderniste Emmanuel Le Roy Ladurie fit, à l’époque, figure de franc-tireur isolé, étudiant les fluctuations du climat en se confrontant à la météorologie historique et dirigeant un numéro des Annales. Économies Sociétés Civilisations, en 1974, où l’histoire sociale était encore absente. Cependant, par leur formation classiquement bidisciplinaire associant histoire et géographie, les universitaires français avaient conscience de l’enchâssement des sociétés dans un « milieu » qu’il s’agissait généralement de décrire, avant de se concentrer sur les grands phénomènes démographiques, économiques, sociaux, voire politiques et culturels. C’est donc de façon extrêmement rare, ou même avec des guillemets1, que le mot apparaît au XXe siècle dans des productions d’histoire moderne et contemporaine.

Lorsque le LARHRA est créé, un tournant est pris au niveau international, avec l’activité croissance d’une association internationale, l’European Society for Environmental History (ESEH) créée en 1999. L’historienne française Geneviève Massard-Guilbaud, qui soutient à l’Université Lyon 2 un mémoire d’habilitation à diriger des recherches sur l’histoire de la pollution industrielle en France au XIXe siècle, joue un rôle important pour structurer une communauté française d’histoire contemporaine de l’environnement, qui dialogue également avec des médiévistes, géographes, écologues, etc., au sein du Réseau universitaire de chercheurs en histoire environnementale (RUCHE) fondé en 2008. Auparavant, à Grenoble, l’équipe HESOP, qui rejoint le LARHRA en 2003, menait différents chantiers sur l’histoire des risques dits naturels, sous la coordination de René Favier et Anne-Marie Granet-Abisset, dans une approche interdisciplinaire avec les sciences de la terre et de l’environnement2.

À Lyon, au sein de l’équipe Pouvoirs Villes Sociétés, Stéphane Frioux s’intéresse alors aux innovations pour améliorer l’environnement urbain, et aux configurations d’acteurs en compétition (inventeurs, élus, riverains) derrière l’installation d’une usine de traitement des ordures ménagères ou d’un procédé d’épuration de l’eau de rivière. Par la suite, pendant la première moitié de la décennie 2010, les environnements montagnards et urbains sont traités sous le signe de la pluralité scientifique, dans les Labex respectifs ITEM (Innovation et territoires de montagne) à Grenoble et IMU (Intelligence des mondes urbains) à Lyon.

En 2015, l’école d’été internationale de l’ESEH est organisée par le LARHRA et témoigne des rencontres entre l’histoire urbaine et celle des milieux de montagne, sous le prisme de questionnements transversaux, comme la question du risque qui avait, on l’a vu, été déjà abordée à Grenoble. C’est par l’entrée « territoire » que les liens s’opèrent ainsi qu’avec une recherche collective financée par l’ANR – le programme TRANSENVIR –, conduisant à la proposition de l’axe « Territoire environnement santé » du contrat 2021-2025. De nouvelles recherches sont menées, par Gwenaëlle Legoullon sur l’impact environnemental du logement social, et, grâce à de nouvelles recrues, par Antonin Plarier sur l’histoire minière dans l’Algérie coloniale et Violette Pouillard sur la faune dans l’Afrique équatoriale, développant les animal studies explorées par Eric Baratay (Université Lyon 3). À Grenoble, différentes thèses sont préparées, sur l’histoire de l’aménagement routier du Vercors (Emma-Sophie Mouret) ou sur les socioécosystèmes forestiers de Savoie (Raphaël Lachello).

Déjà modifiés par les approches territoriales, les travaux en histoire économique et en histoire d’entreprise ont été réorientés par l’intégration des thématiques environnementales, que ce soit en réinterrogeant le rapport aux ressources ou en abordant la question des pollutions, du point de vue des entreprises et des riverains. Les industries de l’aluminium ont notamment fait l’objet de programmes de recherche conduits par Anne Dalmasso, l’un centré sur la notion d’impacts socio-environnementaux de l’industrie organisé autour d’une base de données comparatives des sites français et l’autre sur une comparaison France/Québec, financé par l’ANR (programme Fralubec)3. Deux thèses ont permis de croiser histoire sociale et environnementale des territoires de l’aluminium, sur les trajectoires de désindustrialisation (Cécile Combal) et sur l’histoire des pollutions au fluor dans la vallée de la Maurienne (Olivier Chatterji). Ces approches se poursuivent sur des branches particulièrement polluantes, comme la chimie du sud grenoblois (Clyde Bouyi). Plus généralement, les travaux sur l’histoire de l’aménagement des territoires de montagne ont été relus à l’aune des approches environnementales, dans le domaine de l’énergie, notamment celui des barrages hydroélectriques. Le tourisme, analysé par Anne-Marie Granet comme un système sociotechnique aux impacts environnementaux majeurs par ses formes spécifiques d’aménagement4, des espaces protégés étudiés par Karine Basset aux stations touristiques et au sport (Isabelle Gaillard), apparait comme un champ de recherche particulièrement fécond pour contribuer à l’étude des mutations et des remises en cause du modèle industriel dans le contexte actuel de changement climatique.

Notes

1 Olivier Faure, « L’industrie et "l’environnement" à Lyon au XIXe siècle », Cahier des Annales de Normandie n° 24, 1992, « Recueil d’études offert à Gabriel Désert », p. 299-311. Retour au texte

2 René Favier, Anne-Marie Granet-Abisset (dir.), Histoire et mémoire des risques naturels, Grenoble, Publications de la MSH-Alpes, 2000. René Favier (dir.), Les pouvoirs publics face aux risques naturels dans l'histoire, Grenoble, Publications de la MSH-Alpes, 2002. René Favier et Anne-Marie Granet-Abisset (dir.), Récits et représentations des catastrophes depuis l'Antiquité, Grenoble, Publications de la MSH-Alpes, 2005. Plus récemment, Anne-Marie Granet-Abisset, Stéphane Gal (dir), Les territoires du risque, Grenoble, PUG, 2015. Retour au texte

3 Anne Dalmasso, Lucie K. Morisset, « Une histoire croisée des territoires de l’aluminium est-elle possible ? Enjeux épistémologiques et mémoriels », Revue Française d'Histoire Économique, vol 2015/2-1/2016, n° 4-5, p. 186-198. Retour au texte

4 Anne-Marie Granet-Abisset, « La construction du "terrain de jeu alpin". L’aménagement des territoires d’altitude par et pour le tourisme depuis le XIXe siècle », dans Patrick Fournier et Geneviève Massard-Guilbaud (dir.) Aménagement et environnement. Perspectives historiques, Rennes, PUR, 2016, p. 91-108. Retour au texte

Illustrations

Citer cet article

Référence électronique

Anne Dalmasso et Stéphane Frioux, « Environnement », Les Carnets du LARHRA [En ligne], 1 | 2023, mis en ligne le 08 décembre 2023, consulté le 19 juillet 2025. URL : https://publications-prairial.fr/larhra/index.php?id=723

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Anne Dalmasso

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