Un ami m’a fait découvrir Antoine Choplin, le même ami m’a invité à lire Partiellement nuageux, sans m’en dire beaucoup plus, nous nous faisons confiance. C’est important, l’amitié, pour la lecture. Chacun peut s’y faire passeur pour l’autre. Partager avec lui, sans plus en dire, quelque chose de soi, de l’autre.
C’est ce que je voudrais faire avec ce coup de cœur pour toi, lecteur, manière de tisser un lien d’amitié invisible avec les mots d’un autre, et quels mots, ténus.
Pour rester au diapason de Partiellement nuageux, il s’agira d’un coup de cœur sans emballement, d’un coup de cœur dans la retenue.
Comme l’écrivait E. Rohmer, au début d’un de ses films : « Qui trop parole, il se mesfait. »
Partiellement nuageux se passe au Chili, de nos jours. Ernesto et Emma se croisent dans le musée de la mémoire, celle de la dictature. Ernesto retrouve Emma. Leurs parcours se tissent de silence, de paroles amorcées, de récits parfois, qui les laissent tous les deux dans le silence. Ils retournent chacun à leur vie, l’un, l’une, vient vers l’autre, il y a un ballet de la rencontre, de la rencontre de deux vies blessées. Comment aimer après la dictature, après les pertes dues à la dictature ? Vivre, déjà, coûte, chacun trouve sa voie. Ernesto observe les étoiles, aide son ami indien à planter des arbres. Emma fait son métier d’éditrice, se tait puis parle : son père.
Il ne faut pas dévoiler, Emma et Ernesto se dévoilent eux-mêmes si peu, un dans une déflagration silencieuse. Fuite, absence, retour.
Merci, l’ami, merci, Antoine Choplin pour ce récit, pour cette écriture singulière, en suspend par moment. On reste un long moment, le livre refermé, à ne pas pouvoir le quitter. Et un sourire flotte sur les lèvres à se redire la dernière phrase : « Sûr qu’on verra bien, j’ai dit, la nuit sera belle. » Cela s’appelle l’espoir.
Jean-Marc Talpin