Page du Registre des naissances, Lyon 6e arrondissement, 2 janvier 1896 – 10 juillet 1896, Archives municipales, cote 2E1758
Domaine public, Ville de Lyon, Archives municipales
Faire de la démographie historique, c’est pratiquer une forme d’histoire sociale centrée sur les populations. Telle que la discipline s’est structurée dans les années 1950-1960, la démarche était quantitative et centrée sur des paramètres restreints : nuptialité, fécondité, mortalité, dans le cadre de l’étude monographique d’une commune1. Louis Henry, Jacques Dupâquier ou Jean-Pierre Bardet ont été, en France, les principaux « pères fondateurs » de la démographie historique. Au fil du temps, la discipline s’est tournée vers un questionnement plus sociologique, intégrant des sujets liés à l’histoire de la famille, avec une démarche alliant quantitatif et qualitatif. Il en est découlé une large diversification des sujets abordés : structure des ménages, relations à l’intérieur du couple, divorce, parentalité, adoption, enfants abandonnés, fin de vie...2 Les approches biographiques et intergénérationnelles, incluant la généalogie, se sont multipliées à partir des années 1990.
La démographie historique à L’Université Lyon 2, avant le LARHRA
Ainsi, à la charnière des années 1960 et 1970, de nombreuses thèses d’histoire sociale ont intégré une composante démographique. On peut penser, entre autres, à celle de Pierre Goubert sur le Beauvaisis3 ou d’Emmanuel Leroy-Ladurie sur le Languedoc4. À Lyon, c’est la thèse de Maurice Garden, Lyon et les Lyonnais au XVIIIe siècle, qui a marqué un tournant5.
C’est Maurice Garden, encore, qui a mis en place un enseignement de démographie historique en troisième année (Licence), ouvert aux étudiant.e.s en Histoire et aux étudiant.e.s en Sociologie. Il a formé de nombreux doctorantes et doctorants dont les travaux relevaient de cette discipline, parmi lesquels Dominique Dessertine6, Guy Brunet7, Alain Bideau8, ou Olivier Zeller9.
Ces recherches ont été menées dans le cadre du Centre Pierre Léon d’histoire économique et sociale, au sein duquel les travaux d’Yves Lequin ou de Gilbert Garrier intégraient également une approche quantitative des populations.
La démographie historique au LARHRA
Lors de la création du LARHRA, Alain Bideau (directeur de recherche au CNRS), Olivier Zeller (Professeur à l’Université Lyon 2) et Dominique Dessertine (Ingénieure CNRS) ont poursuivi leurs activités dans ce nouveau cadre. Le premier, qui a été président de la Société de Démographie Historique de 1996 à 2005, a poursuivi la recherche sur la vallée de la Valserine qui alliait démographie historique et génétique des populations10. Possédant un vaste réseau scientifique, en France, au Québec et dans de nombreux pays européens, il a permis, en apportant le financement via le Centre Jacques Cartier qu’il dirigeait, l’organisation, à Lyon et à Montréal, d’une quinzaine de colloques internationaux consacrés à la démographie historique. La plupart ont été organisés par Guy Brunet (Professeur, Lyon 2), Michel Oris (Professeur, Université de Genève) et Bertrand Desjardins (chercheur, Université de Montréal). Pour sa part, Olivier Zeller a réorienté ses travaux vers l’histoire urbaine de la période moderne, sans abandonner le versant démographique de ses recherches11. Dominique Dessertine, quant à elle, a mené ses recherches sur les systèmes d’assistance sociale et en particulier sur l’enfance12. Ainsi, le LARHRA a été reconnu comme un des principaux pôles français de recherche en démographie historique.
Après avoir dirigé le Centre d’Études Démographiques de l’Université Lyon 2 de 1995 à 2007, Guy Brunet a rejoint le LARHRA en 2008. Secrétaire Général de la Société de Démographie Historique de 1995 à 2006, puis vice-président de cette société de 2010 à 2017, il a mené de nombreuses recherches, tout en dirigeant une cinquantaine de maîtrises, D.E.A. puis masters d’histoire sociale et de démographie historique, ainsi que quelques doctorats. Outre sa participation à l’étude sur la vallée de la Valserine, ses travaux ont porté notamment sur les enfants assistés de la région lyonnaise13, la fréquence et la distribution géographique des patronymes14, puis sur l’Algérie coloniale15.
Après le départ en retraite de Guy Brunet, Sandra Brée – responsable de la lettre d’information et des médias sociaux de la Société de Démographie Historique depuis 2012 - a été recrutée au LARHRA en tant que chargée de recherche au CNRS16. Depuis son arrivée, en 2017, ses recherches sont principalement orientées vers la démographie historique urbaine et suburbaine entre le début du XIXe siècle et l’entre-deux-guerres. Elle a également lancé de nouveaux chantiers visant à construire de grandes bases de données – indispensables en démographie historique – grâce aux nouvelles techniques de l’Intelligence Artificielle et du Deep Learning permettant l’océrisation (lecture optique des caractères) des documents anciens.