Désexualisation du plaisir et transformation de soi chez Michel Foucault

DOI : 10.35562/textures.222

p. 279-293

Résumé

Le présent article s’interroge sur le « plaisir » comme lieu critique de compréhension du sujet éthique moderne. L’auteur analyse, en s’inspirant des travaux de Michel Foucault, la manière dont l’agencement des différentes configurations historiques du « dispositif de sexualité » a abouti à l’instauration d’une austère monarchie de l’instance du « sexe-désir » au détriment d’une « autre économie des corps et des plaisirs ». Arguant, contre une morale chrétienne, de l’esthétisation de soi à l’œuvre dans le régime gréco-romain des aphrodisia à l’époque antique, l’auteur propose de démanteler, à travers des performances discursives de vérité, le discours normatif de l’identité sexuelle, ceci, non pas sur la base d’une logique dialectique répression/libération d’un « désir » anthropogène, mais sur celle d’un transfert stratégique des relations de pouvoir, d’une « pratique de liberté » s’articulant autour de « techniques de soi ». Tel est le cas de la « désexualisation du plaisir » qu’illustrent parfaitement, selon Foucault, les pratiques de la « sous-culture » sadomasochiste.

Plan

Texte

La sexualisation des corps et leurs plaisirs apparaît, dans les travaux de Michel Foucault, comme le lieu d’une conflictualité politique. Le principe d’intelligibilité de cette conflictualité propre au domaine de la sexualité n’est pas celui de la répression d’un désir anthropogène1 et de sa libération, mais le produit de rapports stratégiques de pouvoir entre un « dispositif » et ceux qu’il assujettit. Fidèle à sa conception généalogique du sujet moderne, Foucault s’est livré à une analyse de la manière dont l’instance normative du « sexe-désir » s’est constituée historiquement comme signifiant unique et universel du « dispositif de sexualité », cela au prix d’une réduction juridique et d’une localisation sexuelle du plaisir érotique. L’idée que le plaisir physique a sa source dans le plaisir sexuel, et que ce dernier est au principe de tous les autres plaisirs, est, pour Foucault, un effet du discours produit par le dispositif : « Depuis des millénaires, on tend à nous faire croire que la loi de tout plaisir, c’est, secrètement au moins, le sexe : et que c’est cela qui justifie la nécessité de sa modération, et donne la possibilité de son contrôle2 ».

Avec Foucault, il devient urgent de s’interroger sur les stratégies sociales et les pratiques discursives de cette sexualité disciplinaire, sur la « monarchie du sexe » qui la caractérise, mais aussi sur des mécanismes de résistance à cet ordre disciplinaire, cela au profit d’« autres économies des corps et des plaisirs ». C’est à ce niveau des possibilités infinies d’agencéité du sujet qu’intervient chez Foucault l’idée d’une « désexualisation du plaisir » c’est-à-dire d’une autonomisation du plaisir, au plan normatif, vis-à-vis du sexe, au profit de l’émergence de nouvelles cultures qu’incarne d’une manière singulière le sadomasochisme. En tant qu’érotisation de la domination et de la soumission, le S/M correspond à la recherche d’un gain de plaisir dans une dimension de jeu. Cette pratique érotique s’inscrit dans le cadre d’une lutte contre les forces prohibitives et restrictives du plaisir.

La présente réflexion sur la désexualisation du plaisir et la transformation de soi chez Michel Foucault fait des corps et leurs plaisirs le lieu effectif de l’investissement d’un pouvoir disciplinaire tout en leur assignant une fonction critique de contestation de l’ordre grâce à des « techniques de soi ». La première partie s’intéresse à la formation historique de la sexualisation des corps et des plaisirs, et envisage, avec Foucault, la création de nouveaux plaisirs à partir d’une esthétique de l’existence. La deuxième partie porte sur la compréhension de la « désexualisation du plaisir » dans son rapport subversif au dispositif de sexualité et dans son articulation avec le jeu stratégique du S/M.

1. Généalogie de la sexualisation des corps et des plaisirs

La publication des trois tomes de L’Histoire de la sexualité marque, dans le cheminement intellectuel de Foucault, un changement de paradigme. Foucault délaisse le terrain des descriptions du système panoptique et de l’espace carcéral du corps des individus dans Surveiller et punir (1975), pour développer de nouvelles réflexions sur le dispositif disciplinaire de la sexualité et les mécanismes de domination de l’instance du « sexe-désir ». Fidèle au projet d’établir une généalogie du sujet moderne « non originaire3 », sous la forme spécifique d’une « (an)archéologie du savoir », Foucault s’intéresse à la formation historique de la sexualité tenant pour l’essentiel à des procédures et à des stratégies sociales lui donnant sens. Il opte pour une analyse historique des pratiques, en l’occurrence discursives, associées au « dispositif de sexualité4 » afin de comprendre « comment des dispositifs de pouvoir s’articulent directement sur les corps – sur des corps des fonctions, des processus physiologiques, des sensations, des plaisirs5 ».

Foucault rattache la « sexualité » au « dispositif6 », c’est-à-dire à l’ensemble des relations concrètes de pouvoir qui normalisent et donnent sens aux corps et aux plaisirs. Ce « dispositif » renvoie tout autant à l’idée d’une construction culturelle de la sexualité, mobilisant des discours, des scénarisations, des exhibitions, et aussi de nombreux interdits, qu’à l’ensemble des mécanismes de contrôle permettant des prises de pouvoir sur les corps des sujets. Le dispositif revêt par ailleurs une forme proprement moderne liée au corrélatif biopolitique d’une « technologie du corps social7 ». En effet, le « contrôle de la société sur les individus ne s’effectue pas seulement par la conscience ou par l’idéologie, mais aussi dans le corps et avec le corps8 ». Construire les identités, discipliner les corps et les plaisirs, naturaliser leur mode de fonctionnement, tels sont les effets du dispositif lorsqu’il s’applique à « l’être social9 ».

Dans un article intitulé « Le sujet et le pouvoir », Foucault décrit cette emprise du pouvoir disciplinaire sur les corps des sujets et leurs plaisirs. Un tel pouvoir, principe premier et originel, peut être perçu comme une « action sur les actions », « une conduite des conduites ». Il a la propriété d’inciter, de détourner, de faciliter ou de complexifier, de limiter ou de restreindre, de rendre improbable. S’exprimant au travers de lois, il place au principe de son fonctionnement le recours à l’interdit10.

C’est sous l’angle de ces rapports stratégiques de pouvoir que Foucault situe la constitution historique de la sexualisation des corps et des plaisirs. Les corps et les plaisirs ne désignent pas un ordre sexuel d’avant le pouvoir mais, sont historiquement le lieu de son investissement. C’est ainsi que les mécanismes de la sexualité et le pouvoir qui en sous-tend le « dispositif » ont instauré, au fil de l’histoire, une « austère monarchie du sexe11 » rendant impossible « une autre économie des corps et des plaisirs12 ».

Dans un cours donné au Collège de France en 1981 et intitulé, « Subjectivité et vérité13 », Foucault livre une généalogie des transformations significatives du régime des aphrodisia (plaisirs sexuels) depuis l’antiquité gréco-romaine jusqu’à l’avènement de la « morale chrétienne14 ».

La généalogie foucaldienne des « modes de subjectivation15 » s’abstient de faire correspondre la sexualisation des corps et des plaisirs à l’essence même du christianisme : « Ces deux thèmes qu’au fond de tout plaisir il y a le sexe, et que la nature du sexe veut qu’il s’adonne et se limite à la procréation, ce ne sont pas des thèmes initialement chrétiens, mais stoïciens […]16 ». En effet, l’éthique des relations sexuelles dans la Grèce antique valorisait la pénétration dans l’acte conjugal comme « noyau central et naturel de tous les actes sexuels (de tous les aphrodisia)17 ». Toutefois, cette valorisation de l’activité phallique s’accompagnait de la nécessité d’une maîtrise souveraine et d’une autolimitation de soi afin de ne pas céder au vertige du plaisir sexuel18. L’injonction à la maitrise virile des plaisirs par la pratique de l’austérité relevait alors d’une stylisation de l’existence. La maîtrise de soi était la condition de l’exercice d’un gouvernement de la cité.

Cette discipline des plaisirs n’était cependant pas exclusive ! La mise en œuvre d’autres régimes de plaisirs était possible sur la base d’un certain isomorphisme, c’est-à-dire du respect de la nature des relations sociales auxquelles ils se rapportaient19.

Dans L’usage des plaisirs, Foucault démontre que les mesures de restriction dans la Grèce antique relatives aussi bien à l’homosexualité qu’à l’hétérosexualité correspondaient à des formes d’expériences historiques. Le principe de l’« isomorphisme socio-sexuel20 » des relations entre individus conférait à la pratique des plaisirs une modalité spécifique, celle d’une production sociohistorique de la subjectivité. Il était moins question d’une codification scrupuleuse des « codes de comportements » ou de leur interdiction que de leur « stylisation ». « Styliser » son existence revenait à « dominer, limiter et répartir le plus violent de tous les plaisirs, le plaisir sexuel21 ».

Ce régime grec des plaisirs sexuels connaît cependant une première transformation à l’époque de la Rome impériale. Seuls les plaisirs liés aux conduites sexuelles à l’intérieur du couple étaient reconnus comme légitimes. En l’occurrence, la « survalorisation du mariage » survenue dans l’empire romain instaurait le principe d’une « localisation exclusive du rapport sexuel dans la conjugalité22 ». Cette « conjugalisation » du plaisir fut surtout la résultante d’une intégration du christianisme « aux structures étatiques de l’Empire romain23 » dont le « stoïcisme » était « la philosophie » quasi officielle. Le sexe devenait ainsi « le code du plaisir24 ».

Avec l’avènement du christianisme s’opère une rupture significative avec l’expérience gréco-romaine de l’usage des corps et des plaisirs. Non seulement la morale chrétienne réélaborait scrupuleusement le rapport entre subjectivité et vérité autour de la « conjugalisation » des aphrodisia, mais elle conditionnait l’accès à la « vérité » par la nécessité de s’affranchir du lien au plaisir sexuel25. Le régime chrétien de la chair faisait ainsi reposer la « manifestation de la vérité » sur un devoir de purification de tout ce qui touche au plaisir sexuel : « […] c’est cette codification du plaisir par les lois du sexe qui a donné lieu finalement à tout le dispositif de la sexualité26 ».

Avec le christianisme émerge aussi la catégorie autonome et normative du « désir » ayant pour seule finalité « la neutralisation de l’acte et du plaisir, du corps et du plaisir27 ». En instituant le « désir » comme « transcendantal historique28 », la morale chrétienne faisait du « sujet » de ce désir un « objet de connaissance29 ».

Et pourtant, le régime gréco-romain des plaisirs n’était défini ni par une adéquation du sujet avec une quelconque nature, ni par une composante spirituelle et psychologique. La constitution des subjectivités antiques relevait avant tout d’un « art de vivre », d’une « stylisation » de l’existence au travers de « techniques de soi30 ».

Avec l’idée chrétienne d’une vérité du désir individuel naît l’instance du « sexe-désir »31 sollicitant le corps dans ce qu’il a à la fois « de plus matériel et de plus vivant32 », c’est-à-dire des « éléments anatomiques, des fonctions biologiques, des conduites, des sensations, des plaisirs33 ». La vérité d’un désir sexuel associé à une donnée biologique définissant l’identité profonde de l’individu est établie. L’instance du « sexe-désir » devient un « signifiant » à la fois « unique » et « universel34 » sous la dépendance historique de la sexualité. C’est pourquoi, selon Foucault, la sexualité n’a rien d’illusoire ou d’irréel. Elle est une « figure historique » bien réelle sollicitant sans cesse, pour son propre fonctionnement, l’instance du « sexe-désir » comme élément spéculatif35. La sexualité comme pratique historique recourt au « sexe-désir » comme sa possibilité la plus propre, à la fois élément caché et principe producteur de sens. Pulsion singulière d’une histoire de la sexualité, le « sexe-désir » comme « point imaginaire36 » du dispositif définit les identités, créant l’illusion d’une condition originelle précédant les rapports de pouvoir.

Si l’austérité et la maîtrise de soi à l’époque antique s’accompagnaient d’une « intensification des plaisirs37 » et d’une redéfinition permanente de l’identité personnelle, l’imposition de l’instance du « sexe-désir » contribua, pour le sujet moderne, à la constitution d’une identité psychologique et normalisatrice. La problématisation chrétienne du « désir » comme « objet de connaissance » permit l’inscription des plaisirs du corps dans l’ordre de la surveillance et du discours.

Cette volonté de définir, dans le sujet, un « désir » ou une identité singulière fut aussi, selon Foucault, le fait de la psychanalyse. Les notions psychanalytiques de « relation génitale38 » chez Lacan ou d’« arrêt » de l’évolution affective39 chez Freud aboutirent à un découpage des zones érogènes du corps, à une stratification des plaisirs et des relations sociales ou sexuelles. En subordonnant la hiérarchie des plaisirs à une sexualité reproductrice, la psychanalyse valorisait, par le fait même, l’hétérosexualité, rendant taboue la sexualité homosexuelle. À travers des discours sur les déviances et les pathologiques sexuelles, la psychanalyse ajusta « la dimension sexuelle à la dimension psychique, produisant toute une histoire psychologique40 » sur la manière dont la sexualité devait être vécue individuellement. Cette normativité psychanalytique organisatrice des discours et pratiques rendait difficile l’idée qu’un plaisir physique ne puisse pas être sexuel.

En relayant l’idée chrétienne d’un « désir », la psychanalyse l’opposait au plaisir, expliquant que « ce qui est important c’est le désir et que le plaisir n’est rien41 ». Dans bon nombre de ses écrits, Foucault revient sur cette opposition entre plaisir et désir : « […] depuis des siècles, les gens en général – mais aussi les médecins, les psychiatres et même les mouvements de libération – ont toujours parlé de désir, et jamais de plaisir. « “Nous devons libérer notre désir”, disent-ils42 ». Or, le procès d’historicisation auquel Foucault soumet le dispositif de sexualité vise à se défaire de la dialectique hégélienne de la répression d’un désir anthropogène et de sa libération43. Comme le souligne Judith Butler, avec Foucault, l’analyse du spécifique qui en produit le phénomène44 ».

Pour « éviter toute l’armature45 » psycho-médicale attachée à la notion de « désir », Foucault privilégie la notion de « plaisir », encore « vierge de contenu et d’utilisation possible46 ». Ne faisant fond sur rien de ce qui appartient au corps ou à l’âme, le plaisir désigne « l’événement qui se produit hors sujet, à la limite du sujet, ou entre deux sujets47 ». Foucault identifie explicitement ce plaisir à la « jouissance » ou à la « volupté ». Dans un commentaire sur la conversion à soi chez Sénèque, Plutarque et Epictète, il parle d’une jouissance individuelle : « […] jouissance possessive : jouir de soi, prendre son plaisir avec soi-même, trouver en soi toute sa volupté48 ». Le plaisir comme jouissance inclut aussi l’altérité : « Ce que je veux poser comme question c’est : sommes-nous aujourd’hui capables d’avoir une morale des actes et des plaisirs qui pourrait tenir compte du plaisir de l’autre ? Le plaisir de l’autre est-il quelque chose qui peut être inclus dans notre plaisir […]49 ? »

L’instance du « sexe-désir » étant constitutivement historique et politique, c’est de celle-ci, pense Foucault, qu’il faudrait s’affranchir pour créer de « nouvelles possibilités de plaisir, que l’on n’a pas imaginées auparavant50 ». La lutte de libération se situe ainsi dans le démantèlement du discours sur l’identité sexuelle propre au dispositif de sexualité. Un retournement stratégique des mécanismes de ce dispositif prendrait comme « point d’appui », selon Foucault, non pas le « sexe désir, mais les corps et les plaisirs51 ».

2. Corps, plaisirs et esthétique de l’existence

Face au dispositif de sexualité et son pouvoir de normalisation, Foucault décrète la nécessité d’une tâche pratique qu’il qualifie d’« éthique de soi52 » ou d’« esthétique de l’existence53 ». En effet, la généalogie de la sexualisation des corps et des plaisirs dit le caractère historique et réversible de la subjectivité. La contingence des « régimes de vérité » au sein desquels cette subjectivité a été façonnée ouvre la voie à une prise de conscience et à une modification du rapport à soi, aux autres et au monde. Face à la codification homogène de l’usage des corps et des plaisirs, Foucault défend la possibilité d’accéder à une vie créatrice, d’inventer un nouveau style de vie.

Cette articulation entre esthétique et sexualité est capitale pour comprendre les configurations des conduites sexuelles. Dans un article sur la « généalogie de l’éthique », Foucault décrit le processus historique par lequel l’érotisation du corps et des plaisirs est passée du domaine de l’esthétique (ars erotica) à celui de la science (scienca sexualis). Ramenant la compréhension de la « conduite sexuelle » à trois composantes (acte-plaisir-désir), il distingue plusieurs « formules » de l’agencement de celles-ci : l’art érotique chinois, l’économie des plaisirs grecs, et la « science du sexe » typique de l’Occident romain et du monde chrétien.

La formule grecque acte-plaisir-(désir) met l’accent sur les actes, le plaisir et le désir étant « subsidiaires ». La formule chinoise plaisir-désir-(acte) délaisse l’acte au profit d’un « maximum de durée » et d’une « intensité du plaisir ». La formule chrétienne (désir)-acte-(plaisir) adopte une attitude suspicieuse à l’égard du désir « en essayant de le supprimer ». Si, pour la morale chrétienne, le désir est important en théorie, il ne peut s’exprimer en pratique. L’acte, quant à lui, n’a pour « seule fin » que la « procréation » ou « l’accomplissement du devoir conjugal ». Le plaisir se trouve ici condamné en théorie comme en pratique54. Foucault distingue enfin une « formule » proprement moderne mettant l’accent sur la libération du désir, les actes n’étant « pas très importants » et le plaisir inconnu de tous55.

Ces configurations spécifiques et variées des conduites sexuelles invitent, selon Foucault, à une réinscription des normes de la sexualité dans un régime de production non plus scientifique, mais esthétique. C’est parce que l’identité sexuelle est une création perpétuelle que l’exercice de la liberté est possible. En effet, l’identité sexuelle n’est pas le dévoilement d’une réalité cachée dans le sujet. Il n’existe pas une « vérité de son sexe56 ». L’identité devient un problème existentiel lorsqu’il est question d’une règle éthique universelle, de « dévoiler » une « identité propre » et d’en faire, du même coup, « la loi », « le principe », « le code de l’existence57 ».

L’identité ne désigne pas non plus une assignation du sujet au travail fastidieux « d’être toujours le même58 ». Elle exprime le fait d’être un unique soi et non d’être identique à soi. Être unique, c’est jouir de la possibilité de s’inventer soi-même. De ce point de vue, les rapports de soi à soi ne sont plus, pour Foucault, des rapports d’identité au sens d’un retour à soi, mais plutôt de « différenciation, de création, d’innovation59 ».

L’identité sexuelle, les corps et les plaisirs se trouvent ainsi pris dans les rouages d’un « jeu », d’un « procédé » permettant la fluidification des rapports entre sujets : « […] si l’identité n’est qu’un jeu, si elle n’est qu’un procédé pour favoriser des rapports, des rapports sociaux et des rapports de plaisir sexuel qui créeront de nouvelles amitiés, alors elle est utile60 ». Le jeu foucaldien ouvre la voie à une transformation esthétique de soi grâce au travail intellectuel. Lors d’une interview portant sur le lien entre la philosophie et le monde des arts, Foucault déclarait : « Pour moi, le travail intellectuel est lié à ce que vous définiriez comme une forme d’esthétisme – par cela, j’entends la transformation de soi61 ». Cette « transformation de soi » implique le recours à la discipline de l’ascèse comme travail sur « soi-même » faisant « apparaître ce soi qu’heureusement on n’atteint jamais62 ». L’esthétisation de soi exige aussi du sujet foucaldien la vertu du « courage », celui de « se transformer lentement63 », de se maintenir durablement dans un style de vie nouveau. Ce courage est plus précisément celui de la « provocation » consistant à « faire éclater, par son action, des vérités que tout le monde sait mais que personne ne dit, ou que tout le monde répète mais que personne ne se met en peine de vivre, le courage de la rupture, du refus, de la dénonciation64 ».

L’esthétique foucaldienne problématise toute l’organisation sociale autour du sexe, des corps et des plaisirs en les réinscrivant au sein de nouveaux rapports stratégiques. Elle fait de la stylisation de l’existence une manière d’être toujours improbable et de l’exercice des libertés la condition même de l’éthique. C’est au niveau des possibilités infinies d’autoconstitution, de création esthétique qu’intervient, chez Foucault, l’idée d’une « désexualisation du plaisir » comme résistance au dispositif de sexualité.

3. Désexualisation et rapports stratégiques de pouvoir

3. 1. Désexualiser le plaisir

Pour Foucault, l’économie des plaisirs en Occident a longtemps reposé sur le sexe comme « principe d’intelligibilité et de mesure65 ». À cette norme qui fait du sexe le « code » des plaisirs, Foucault oppose une « performativité discursive » de vérité, celle de la « désexualisation du plaisir66 ». Au plan normatif de la sexualité, la désexualisation du plaisir rend celui-ci indépendant de la relation sexuelle, faisant de lui « le point de cristallisation d’une nouvelle culture67 ». Désexualiser le plaisir, c’est s’arracher au réseau discursif et substantialiste d’une codification exclusive du plaisir par les lois du sexe. Ce procédé discursif signe la possibilité d’un hors-sexe, d’une sortie du sexe, d’une jouissance non-sexuelle. En délocalisant la symbolique qui associe étroitement sexe et plaisir, il permet de jouir de son caractère illusoire.

La désexualisation du plaisir consacre le rôle actif du plaisir en tant que force stratégique permettant de transformer les normes du dispositif de sexualité. Elle marque la limite ou l’illusion d’un apaisement du sexe remplissant une fonction supplétive face à la déperdition de la jouissance sexuelle. Elle renvoie à « une intensification du plaisir68 », à un surcroît de jouissance qui montre que le plaisir n’est jamais absolument sexuel. « L’idée que le plaisir sexuel est la base de tous les plaisirs possibles69 » est, d’après Foucault, « vraiment quelque chose de faux70 ». L’intensification du plaisir resignifie les énoncés performatifs par lesquels la norme du sexe agit. Elle se réapproprie les pratiques sexuelles et brise les identités définies selon le sexe : « Les intensités de plaisirs sont bien liées au fait qu’on se réassujettit, que l’on cesse d’être un sujet, une identité. Comme une affirmation de la nonidentité71 ».

En tant que contestation des savoirs et pratiques du dispositif de sexualité, la délocalisation du plaisir s’inscrit dans le champ stratégique des relations de pouvoir. En tant que rapport stratégique, elle implique en son sein des énoncés et des gestes performatifs que l’ordre disciplinaire moderne de la sexualité a voués à l’invisibilité sociale ou relégués dans ses marges.

L’intensification du plaisir entretient ainsi avec le dispositif de sexualité une relation de pouvoir où sont actifs « des rapports de la force avec la force72 ». Cette relation de pouvoir constitue cependant un type de rapport stratégique, mais non dialectique. En effet, l’action qui consiste à désexualiser le plaisir n’est pas quelque chose qui, de l’extérieur, s’opposerait au dispositif de sexualité, de manière à entrer en collision avec lui. C’est de l’intérieur même de ce dispositif, c’est-à-dire au plus intime de ses effets de pouvoir qu’elle prend forme.

Relevant du domaine des « techniques de soi », l’intensification du plaisir n’est pas une libération des effets du pouvoir, de la monarchie du sexe, mais une manière d’y « résister ». Elle ne représente pas l’envers du dispositif de sexualité, au risque de dessiner en creux une autre forme de domination. Elle est un moyen d’échapper à l’alternative hégémonique de la domination de l’instance du sexe. Dans la mesure où, selon Foucault, « le pouvoir n’a aucune extériorité » sur laquelle fonder un renversement général du pouvoir, la désexualisation des corps et des plaisirs, comme résistance au dispositif, prend appui sur la situation qu’elle conteste, à savoir la localisation sexuelle du plaisir. Elle désigne l’autre terme de la sexualisation des corps et des plaisirs. Elle oblige, sous son effet, les rapports au plaisir à changer.

Décrite comme une des caractéristiques de l’esthétisation de l’existence, la désexualisation du plaisir revêt enfin chez Foucault des formes très concrètes parmi lesquelles la « sous-culture » S/M, parfaite illustration de la « création de nouveaux plaisirs73 ».

3. 2. Le jeu sadomasochiste ou le plaisir « en action »

La pratique du S/M conduit, selon Foucault, à la création de plaisirs qui se trouvent au fondement de nouvelles identités. Il en parle comme d’une « sous-culture74 », c’est-à-dire un ensemble de pratiques collectives culturellement situées visant à inventer de nouvelles formes de plaisirs sans « états de domination ». Si certaines pratiques S/M peuvent paraître d’une violence extrême, cette violence n’en constitue pas la composante fondamentale : « L’idée que le S/M est lié à une violence latente, que la pratique S/M est une façon de libérer cette violence et cette agression est une idée stupide75 ». C’est bien à l’aune de l’intensité que Foucault mesure le plaisir comme « quelque chose d’incroyablement intense76 ». Le véritable plaisir est intensité totale confinant à des expériences-limites, parfois à la mort même77.

Ce que montrent les pratiques S/M, c’est la possibilité de « produire du plaisir à partir d’objets très étranges, en utilisant certaines parties bizarres de notre corps, dans des situations très inhabituelles78 ». Le but est d’utiliser, dans une relation de pouvoir, différentes parties non érogènes du corps comme instrument sexuel. Cette dégénitalisation sadomasochiste de la production du plaisir permet de désexualiser les pratiques sexuelles.

Une conception très originale du pouvoir associé au « jeu » se dégage d’une telle dégénitalisation du plaisir. Le « jeu » S/M désigne des « rapports stratégiques » caractérisés par la non-fixité, impliquant résistance, renversement des rôles, transgression ou redéfinition des règles. Cette théâtralisation du pouvoir trouve son contre-modèle dans des sociétés où les codes de conduite sexuelle sont définis d’avance, de telle sorte que « tous les jeux en quelque sorte sont faits79 ». Dans ces sociétés, les rapports stratégiques préexistent au sexe, tandis que, dans le jeu S/M, ils sont produits à l’intérieur d’une convention de plaisirs englobant le sexe80.

Foucault distingue ainsi deux types de rapports stratégiques : D’un côté, il y a ceux qui configurent le « pouvoir social81 » « stabilisé dans les institutions » ; difficilement modifiables, ils rigidifient les rapports entre les individus. De l’autre côté, il y a ceux qui visent, non plus « l’être social », mais le corps des acteurs sociaux, source d’une certaine créativité, d’une théâtralisation des rapports de pouvoirs. C’est au sein de ce deuxième type de rapports stratégiques que Foucault inscrit le jeu S/M.

Par analogie avec le « pouvoir social », le S/M scénarise, sans la reproduire, la structure même du pouvoir à l’intérieur de la relation érotique. Il est une manière de rejouer la dialectique du maître et de l’esclave82 sans exercice d’une maîtrise accrue. Le jeu érotique S/M problématise les relations de pouvoir à partir d’une « parodie », d’une « mise en scène » de ses structures. Cependant, à la différence du « pouvoir social », le S/M se caractérise par une certaine fluidité des rôles et des règles. Les rôles « peuvent être inversés83 » et les règles « transgressées » ou renégociées. Dans le jeu S/M, chacun des partenaires expérimente un rôle double et par là une multiplicité de plaisirs. C’est parce que le soi se vit d’abord comme double que l’érotisation S/M des relations de pouvoir se démarque des « états de domination ». Le S/M remplit ainsi une fonction de subversion du quadrillage disciplinaire du dispositif de sexualité. En se substituant à l’uniformisation et à la singularisation des pratiques, les plaisirs S/M opèrent comme de véritables « contre-disciplines84 ».

Conclusion

Cette étude porte sur un aspect peu connu du travail de Michel Foucault : la « désexualisation du plaisir » comme mécanisme de transformation de soi. Un tel sujet de recherche reste cependant étroitement corrélé à l’analytique foucaldienne du pouvoir et du dispositif de sexualité. Deux objectifs principaux jalonnent la présente analyse : (1) montrer que, dans la problématisation foucaldienne de la sexualité, le plaisir est un lieu critique de la compréhension du sujet éthique moderne (2) considérer qu’une pensée du plaisir à la limite ou en dehors du sujet contraint ce dernier à une construction en décalage avec soi et à une perpétuelle transformation.

La généalogie foucaldienne de la sexualisation des corps et des plaisirs en tant que diagnostic du présent aboutit à une dissipation de l’identité sexuelle. Le sujet éthique moderne s’emploie, grâce à une imagination créatrice, à acquérir une identité fictive non moins réelle, à développer un art du plaisir affranchi du piège d’un sexe biologiquement assignable. La « désexualisation du plaisir » mise en œuvre par la « contre-culture » S/M exprime, de ce point de vue, la volonté du sujet moderne de tisser des liens en dehors de la sexualité et d’inventer de nouveaux modes d’érotisation à l’intérieur même d’un ordre disciplinaire. Désexualiser le plaisir avec Foucault aujourd’hui, c’est établir des formes de sociabilité en termes d’esthétisation, de création renouvelée. C’est œuvrer à l’avènement d’une société où l’identité individuelle n’est plus soumise à des rites de passage, au diagnostic médical, à des mécanismes de fossilisation, mais est considérée plutôt comme une manière d’être toujours improbable, imprévisible.

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Notes

1 Dans son analyse du pouvoir, Michel Foucault s’oppose à toute ontologie naturaliste du désir telle qu’elle a pu prendre forme dans le freudo-marxisme ou dans la psychanalyse de J. Lacan. Pour le philosophe français, la promesse de l’accomplissement d’un désir anthropogène dans l’histoire est une chimère. À la notion métaphysique de « désir » Foucault préfère celle de « plaisir ». Retour au texte

2 Michel Foucault, « Les rapports de pouvoir passent à l’intérieur des corps », Dits et écrits, t. 3, Paris, Gallimard, 1994, p. 234. Retour au texte

3 Michel Foucault, « La scène de la philosophie », Dits et écrits, t. 3, Paris, Gallimard, 1994, p. 590. Retour au texte

4 Voir Michel Foucault, Histoire de la sexualité I. La volonté de savoir, Paris, Gallimard, 1976, p. 99-173. Retour au texte

5 Ibid., p. 200. Retour au texte

6 Foucault attribue au « dispositif » une fonction d’assignation spatiale opérant sur un mode symbolique. Le dispositif permet de fonder des « emplacements », de gérer et de surveiller les corps des sujets. C’est « […] un ensemble résolument hétérogène, comportant des discours, des institutions, des aménagements architecturaux, des décisions réglementaires, des lois, des mesures administratives, des énoncés scientifiques, des propositions philosophiques, morales, philanthropiques, bref : du dit, aussi bien que du non-dit, voilà les éléments du dispositif. Le dispositif lui-même, c’est le réseau qu’on peut établir entre ces éléments. », Michel Foucault, « Le jeu de Michel Foucault », Dits et écrits, t. 3, Paris, Gallimard, 1994, p. 299. Retour au texte

7 Michel Foucault, « La naissance de la médecine sociale », Dits et écrits, t. 3, Paris, Gallimard, 1994, p. 209. Retour au texte

8 Ibid., p. 210. Retour au texte

9 Michel Foucault, « Michel Foucault, une interview : sexe, pouvoir et la politique de l’identité », Dits et écrits, t. 4, Paris, Gallimard, 1994, p. 743. Retour au texte

10 Voir Michel Foucault, La volonté de savoir, op. cit., p. 112-113. Retour au texte

11 Ibid., p. 211. Retour au texte

12 Ibid. Retour au texte

13 Michel Foucault, Subjectivité et vérité. Cours au collège de France. 1980-1981, Paris, EHESS/Gallimard/Seuil, « Hautes Études », 2014. Retour au texte

14 Michel Foucault, Histoire de la sexualité II. L’usage des plaisirs, Paris, Gallimard, 1984, p. 42. Retour au texte

15 Ibid., p. 40. Retour au texte

16 Michel Foucault, « Les rapports de pouvoir passent à l’intérieur des corps », Dits et écrits, op. cit., p. 234. Retour au texte

17 Michel Foucault, Subjectivité et vérité. Cours au collège de France, 1980-1981, op. cit., p. 86-87. Retour au texte

18 18 Ibid., p. 99. Retour au texte

19 Ibid., p. 93-95. Retour au texte

20 Michel Foucault, Subjectivité et vérité, ibid., p. 70. Retour au texte

21 David Halperin, Saint Foucault, Paris, EPEL, 2000, p. 183. Retour au texte

22 Michel Foucault, Subjectivité et vérité, op. cit., p. 104-106. Retour au texte

23 Michel Foucault, « Les rapports de pouvoir passent à l’intérieur des corps », Dits et écrits, op. cit., p. 234. Retour au texte

24 Ibid. Retour au texte

25 Michel Foucault, Subjectivité et vérité, op. cit., p. 159-160. Retour au texte

26 Ibid. Retour au texte

27 Ibid., p. 292-293. Retour au texte

28 Ibid., p. 293. Retour au texte

29 Ibid., p. 292. Retour au texte

30 Ibid., p. 37. Retour au texte

31 Michel Foucault, La volonté de savoir, op. cit., p. 208. Retour au texte

32 Ibid., p. 200. Retour au texte

33 Ibid., p. 204. Retour au texte

34 Ibid. Retour au texte

35 Ibid., p. 205. Retour au texte

36 Ibid. Retour au texte

37 Michel Foucault, « Les rapports de pouvoir passent à l’intérieur des corps », Dits et écrits, op. cit., p. 234. Retour au texte

38 Jacques Lacan, Le séminaire, Livre II (1956-1957), La relation d’objet, Paris, Le Seuil, 1994. Retour au texte

39 Sigmund Freud, Trois essais sur la théorie sexuelle, Paris, Gallimard, 1987. Retour au texte

40 Guillaume Le Blanc, La pensée Foucault, Paris, Ellipses, 2006, p. 139. Retour au texte

41 Michel Foucault, « À propos de la généalogie de l’éthique : un aperçu du travail en cours », Dits et écrits, t. 4, Paris, Gallimard, 1994, p. 390. Retour au texte

42 Michel Foucault, « Michel Foucault, une interview : sexe, pouvoir et la politique de l’identité », Dits et écrits, op. cit., p. 738. Retour au texte

43 L’une des finalités de la critique philosophique de Michel Foucault fut celle de s’émanciper du spectre hégélien, mais aussi marxiste, d’un renversement général du pouvoir. En effet, tout mouvement d’émancipation, pense Foucault, n’a pas nécessairement pour visée finale, ainsi que le suggère la dialectique du maître et de l’esclave, une radicale inversion des positions de pouvoir dans le sens où les serviteurs d’hier deviendraient les maîtres d’aujourd’hui. Si, pour Hegel, le pouvoir est avant tout puissance de contrainte exercée à l’endroit d’un désir anthropogène faisant appel à une lutte pour sa libération, pour Foucault, il n’existe pas de pouvoir sans sujet. Il est dès lors simpliste de parler des figures du maître et de l’esclave comme de deux extériorités, l’une étant passive et l’autre active. C’est dans cette réévaluation du rapport entre le pouvoir et le sujet qu’intervient, chez Foucault, l’idée de « résistance ». Retour au texte

44 Judith Butler, Subjects of Desire. Hegelian Reflections in Twentieth-Century France, New York, Columbia University Press, 1987, p. 231. Retour au texte

45 Michel Foucault, « Le Gai Savoir », La Revue H, n° 2, 2000, p. 44. Retour au texte

46 Ibid. Retour au texte

47 Ibid. Retour au texte

48 Michel Foucault, « À propos de la généalogie de l’éthique : un aperçu du travail en cours », Dits et écrits, op. cit., p. 356. Retour au texte

49 Ibid., p. 388. Retour au texte

50 Michel Foucault, « Michel Foucault, une interview : sexe, pouvoir et la politique de l’identité », Dits et écrits, op. cit., p. 737. Retour au texte

51 Michel Foucault, La volonté de savoir, op. cit., p. 208. Retour au texte

52 Voir Michel Foucault, « À propos de la généalogie de l’éthique : un aperçu du travail en cours », Dits et écrits, op. cit., p. 356. Retour au texte

53 Michel Foucault, « Une esthétique de l’existence », Dits et écrits, t. 4, Paris, Gallimard, 1994, p. 730-745. Retour au texte

54 Michel Foucault, « A propos de la généalogie de l’éthique : un aperçu du travail en cours », Dits et écrits, op. cit., p. 390. Retour au texte

55 Ibid., p. 400. Retour au texte

56 Michel Foucault, La volonté de savoir, op. cit., p. 76. Retour au texte

57 Michel Foucault, « Michel Foucault, une interview : sexe, pouvoir et la politique de l’identité », Dits et écrits, op. cit., p. 739. Retour au texte

58 Ibid. Retour au texte

59 Ibid. Retour au texte

60 Ibid. Retour au texte

61 Michel Foucault, « Une interview de Michel Foucault par Stephen Riggins. », Dits et écrits, t. 4, Paris, Gallimard, 1994, p. 535. Retour au texte

62 « Nous avons donc à nous acharner à devenir homosexuels et non pas à nous obstiner à reconnaître que nous le sommes. », Michel Foucault, « De l’amitié comme mode de vie », Le Gai Pied, n° 25, 1981, p. 165. Retour au texte

63 Frédéric Gros, « La parrhêsia chez Foucault (1982-1984) », dans Michel Foucault, Le courage de la vérité. Le gouvernement de soi et des autres II, Cours au collège de France, 1984, Paris, Gallimard, 2009, p. 166. Retour au texte

64 Ibid. Retour au texte

65 Michel Foucault, « Les rapports de pouvoir passent à l’intérieur des corps », Dits et écrits, op. cit., p. 234. Retour au texte

66 Michel Foucault, « Michel Foucault, une interview : sexe, pouvoir et la politique de l’identité », Dits et écrits, op. cit., p. 738. Retour au texte

67 Michel Foucault, « Le triomphe social du plaisir sexuel », Dits et écrits, t. 4, Paris, Gallimard, 1994, p. 312. Retour au texte

68 Michel Foucault, « Les rapports de pouvoir passent à l’intérieur des corps », Dits et écrits, op. cit., p. 234. Retour au texte

69 Michel Foucault, « Michel Foucault, une interview : sexe, pouvoir et la politique de l’identité », Dits et écrits, op. cit., p. 738. Retour au texte

70 Ibid. Retour au texte

71 Michel Foucault, « Le Gai Savoir », art. cit., p. 44. Retour au texte

72 Gilles Deleuze, Foucault, Paris, les Editions de Minuit, 1986, p. 36. Retour au texte

73 Ibid., p. 74. Retour au texte

74 Michel Foucault, « Michel Foucault, une interview : sexe, pouvoir et la politique de l’identité », Dits et écrits, op. cit., p. 743. Retour au texte

75 Michel Foucault, « Que fabriquent donc les hommes ensemble ? », Le Nouvel Observateur, n° 1098, 1985, p. 54. Retour au texte

76 Michel Foucault, « Une interview de Michel Foucault par Stephen Riggins », Dits et écrits, op. cit., p. 534. Retour au texte

77 « Une fois j’ai été renversé par une voiture dans la rue. Je marchais. Et pendant deux secondes peut-être, j’ai eu l’impression que j’étais en train de mourir, et j’ai vraiment éprouvé un plaisir très, très intense. », Michel Foucault, « Une interview de Michel Foucault par Stephen Riggins », Dits et écrits, op. cit., p. 534. Retour au texte

78 Michel Foucault, « Michel Foucault, une interview : sexe, pouvoir et la politique de l’identité », Dits et écrits, op. cit., p. 738. Retour au texte

79 Michel Foucault, « L’éthique du souci de soi comme pratique de la liberté », Dits et écrits, t. 4, Paris, Gallimard, 1994, p. 729. Retour au texte

80 Michel Foucault, « Michel Foucault, une interview : sexe, pouvoir et la politique de l’identité », Dits et écrits, op. cit., p. 743. Retour au texte

81 Ibid., p. 742. Retour au texte

82 Ibid., p. 743. Retour au texte

83 Ibid. Retour au texte

84 David Halperin, Saint Foucault, op. cit., p. 100. Retour au texte

Citer cet article

Référence papier

Thomas Ngameni, « Désexualisation du plaisir et transformation de soi chez Michel Foucault », Textures, 23 | 2018, 279-293.

Référence électronique

Thomas Ngameni, « Désexualisation du plaisir et transformation de soi chez Michel Foucault », Textures [En ligne], 23 | 2018, mis en ligne le 17 janvier 2023, consulté le 04 août 2025. URL : https://publications-prairial.fr/textures/index.php?id=222

Auteur

Thomas Ngameni

Université de Louvain

Droits d'auteur

CC BY 4.0