Traduire le dépaysement : comment recréer le Riddleyspeak de Russell Hoban en français ?

DOI : 10.35562/textures.286

p. 351-365

Résumé

Dans Riddley Walker de Russell Hoban, le dépaysement procède à la fois du linguistique, du cognitif, de la narrativité et du fictionnel. Ce roman expérimental propose une expérience de lecture qui déclenche une immersion dépaysante dans un autre espace-temps. L’intrigue se situe dans une Angleterre post-apocalyptique défigurée par une explosion atomique. La topographie de la région dans laquelle se déroule l’action ne ressemble plus que vaguement au Kent et tous les noms de lieux semblent, à la première lecture, à la foi inconnus et étrangement familiers. Cette perte des repères cognitifs habituels constitue une invitation au voyage et lance la personne qui lit dans un jeu de pistes puisque la narration et le style sont également vecteurs de dépaysement : le narrateur homodiégétique est Riddley Walker, un jeune garçon de 12 ans. Comme son nom l’indique, il promène ses lecteurs au gré d’un récit inabouti qui obéit à sa logique propre et il s’exprime dans une langue étrange, énigmatique et fortement marquée par l’oralité : le Riddleyspeak. Cette langue transfigure la réalité et défamiliarise le lecteur qui, forcé de lire autrement, perd momentanément ses automatismes. L’écriture de la version française de ce roman – l’opération par laquelle le texte source a été transplanté dans une nouvelle langue-culture – a constitué en soi une nouvelle aventure placée sous le signe du dépaysement pour le traducteur. Nicolas Richard a dû s’approprier le Riddleyspeak pour créer une nouvelle langue, le Parlénigm qu’il s’agissait de parler couramment, comme une langue étrangère.

Plan

Texte

Russell C. Hoban est un écrivain américain né en Pennsylvanie en 1925 et décédé à Londres en 2011. Il publie son premier roman en 1967, un ouvrage pour la jeunesse illustré par son épouse Lillian Hoban : The Mouse and his Child (Puffin books). En 1969, il s’installe en Angleterre où il vivra jusqu’à sa mort. Ayant commencé sa carrière comme graphiste, illustrateur et auteur de romans pour enfants, il est également l’auteur de nombreux romans destinés à un lectorat adulte mais il n’a jamais cessé d’écrire pour la jeunesse.

Riddley Walker paraît en 1980 à Londres alors que la réputation littéraire de Russell Hoban est déjà bien établie. En 1982, ce roman est distingué par le John W. Campbell Award, attribué au meilleur roman de science fiction de l’année. Riddley Walker s’inscrit dans une œuvre littéraire placée sous le sceau de l’étrange, un choix esthétique que R. Hoban associe à son expérience personnelle. En effet, de l’aveu même de l’auteur, interviewé par Alex Clarke, l’étrangeté constitue sa profession de foi littéraire : « It has been my aim to be as strange as I can be […] and I’ve never been as strange as I’d like to be1 ». Dans cet entretien, Hoban établit un lien entre sa quête d’étrangeté et le sentiment d’être un étranger dans son propre pays, les États-Unis, comme dans son pays d’adoption, la Grande-Bretagne : « I felt myself a stranger in my own country […] and in London I really was a stranger and felt comfortable2 ».

Dans son ouvrage Riddley Walker, le dépaysement procède à la fois du linguistique, du cognitif, de la narrativité et du fictionnel. Ce roman expérimental propose une expérience de lecture qui déclenche une immersion dépaysante dans un autre espace-temps. Si toute expérience de lecture d’une œuvre de fiction est défamiliarisante3, celle que propose Riddley Walker l’est de façon encore plus radicale.

Nous aborderons dans un premier temps le monde textuel créé par l’auteur. L’intrigue se situe dans une Angleterre post-apocalyptique défigurée par une explosion atomique. La topographie de la région dans laquelle se déroule l’action ne ressemble plus que vaguement au Kent et tous les noms de lieux semblent, à la première lecture, à la foi inconnus et étrangement familiers.

La narration et le style sont également vecteurs de dépaysement : le narrateur homodiégétique est Riddley Walker, un jeune garçon de 12 ans. Comme son nom l’indique, il promène ses narrataires au gré d’un récit inabouti qui obéit à sa logique propre et il s’exprime dans une langue étrange, énigmatique et fortement marquée par l’oralité : le Riddleyspeak. Cette langue transfigure la réalité et défamiliarise celles et ceux qui, forcés de lire autrement, perdent momentanément leurs repères et leurs automatismes.

Enfin, l’écriture de la version française de ce roman constitue une nouvelle aventure placée sous le signe du dépaysement. L’opération par laquelle le texte source a été transplanté dans une nouvelle langue-culture soulève plusieurs questions : quelle marge de manœuvre créative a-t-elle été laissée au traducteur – par le texte, par son auteur et par l’éditeur français ? Quelle liberté créative Nicolas Richard s’est-il accordée à lui-même ?

Le Kent post-apocalyptique de Riddley Walker – un espace fictionnel dépaysant

Des toponymes qui désorientent, une topographie vaguement familière

Le roman de Russell Hoban plonge d’emblée ses lecteurs dans un monde futuriste presqu’entièrement défiguré par une explosion nucléaire. Les dégâts que cette déflagration a infligés à la civilisation humaine sont d’une telle ampleur que les survivants ont perdu jusqu’à la mémoire des noms de lieux. Qui entame la lecture de Riddley Walker est donc désorienté ; c’est au prix d’un effort cognitif que l’on retrouve certains repères spatio-temporels familiers.

De ce fait, l’univers créé par l’auteur possède les caractéristiques d’un monde fictionnel qui relève de ce que la traductologue Geneviève Roux-Faucard appelle « l’effet de distance » qui donne à la lectrice ou au lecteur le sentiment que ce monde textuel n’est pas le sien. La personne qui lit se retrouve « en terre étrangère, […] ce monde se refuse, le refuse4 ». Il s’agit d’un effet textuel et cognitif complexe auquel contribuent notamment l’utilisation de noms propres fictionnels peu familiers ou inconnus, la représentation d’une langue-culture étrangère voire fabriquée de toutes pièces et l’insertion dans le récit de repères spatio-temporels non familiers5.

Pourtant, ce roman nous parle indirectement de notre monde et, pour l’indiquer à son lectorat, R. Hoban a inséré une carte au début de son roman : son tracé aux contours familiers est évocateur ; on reconnaît aisément un décalque du Kent et, sur cette base, on cherche à déceler des noms familiers derrière ceux qui sont présentés sur la carte. Au terme de ce jeu de pistes qui relève du palimpseste, on peut identifier par exemple Canterbury [Cambry], Dover [Do It Over] ou Folkestone [Fork Stoan].

L’humour n’est pas absent de cette réécriture des toponymes : des termes suggestifs aux connotations grivoises y ont été insérés, comme l’attestent les noms tels que Bernt Arse (lire Burnt Arse6 ; Cul Brûlé7 dans la version française), Bollock Stoans (Bollocks Stones / Pyèr Couill) ou encore Horny Boy (Gars en Rut dans la version française). Le traducteur parle à ce propos d’un « humour potache » : « Il y a chez Hoban une dimension ludique, potache, qui est importante aussi. Les noms de lieux déformés, par exemple, qui ont presque tous une sonorité grivoise8. » Cet humour, que l’on retrouve dans certains noms de personnages fictionnels ou légendaires qui sont mentionnés de façon récurrente dans le récit, transforme beaucoup de toponymes et d’anthroponymes en rébus qu’il s’agit de résoudre en empruntant des voies tantôt paradigmatiques et tantôt syntagmatiques. Le cheminement cognitif proposé aux lectrices et aux lecteurs qui cherchent à déchiffrer les noms propres constitutifs de ce pays fictionnel n’est pas entièrement prévisible. Il désarçonne en même temps qu’il amuse, la déstabilisation cognitive étant destinée à stimuler la curiosité et l’inventivité dans l’esprit de celle ou celui qui lit tandis que l’humour favorise l’intérêt pour le jeu lectoriel que propose le texte.

La perte des repères familiers dans un futurisme médiéval

La civilisation que l’on découvre à travers le récit de Riddley Walker est un composite hybride qui sollicite notre bagage culturel en même temps qu’il met nos repères cognitifs à rude épreuve. Pour que ce monde textuel nous dépayse, il faut que nous venions de quelque part, si bien que la découverte de l’univers fictionnel et des chemins textuels proposés par le roman est ancrée dans un socle de connaissances et de souvenirs qui constitue en quelque sorte notre Heimat.

Dans le chapitre de son ouvrage intitulé « Compléments cognitifs », Jean Delisle décrit cet horizon de lecture dans ses composantes multiples – rationnelle, émotionnelle, expérientielle –, et essentiellement déverbalisées :

Le traducteur n’aborde jamais un texte l’esprit vide de toute connaissance, pas plus qu’un lecteur qui se plonge dans la lecture d’un roman. Il y apporte sa connaissance du monde, ses souvenirs, ses expériences diverses, de même que ses connaissances théoriques, le fruit de ses lectures, son savoir spécialisé et tout ce qui compose sa culture générale. Ces milliards de petits détails tissent son identité. Toutes ces connaissances sont gardées dans son cerveau sous une forme déverbalisée. C’est à cette source qu’il puise pour comprendre un texte9 […].

Il assied ses analyses sur celle de Marianne Lederer, qui distingue d’une part le versant affectif et le versant cognitif et, d’autre part le versant purement linguistique de l’extralinguistique :

L’affectif et le cognitif étant physiologiquement inséparables et ayant tous deux leur origine dans le cerveau, je les englobe sous le seul terme de compléments cognitifs et dans ceux-ci, je distingue pour un découpage d’un autre ordre, le bagage cognitif, connaissances linguistiques et extralinguistiques emmagasinées à plus ou moins long terme dans la mémoire, et le contexte cognitif constitué par les connaissances acquises à la lecture du texte, conservées en mémoire à court terme et servant à l’interprétation des segments du texte suivants10.

Dans Riddley Walker, les repères historiques et chronologiques sont volontairement brouillés. Les indices qui renvoient à une société médiévale y côtoient non seulement les traces d’un retour à l’Âge de fer mais aussi des éléments fictionnels indiquant que ce monde a connu un stade de développement technologique avancé. Telle est la civilisation composite et déroutante des personnages qui ont survécu à l’apocalypse nucléaire et cherchent à glaner les indices d’un monde perdu dont ils ne gardent qu’un vague souvenir.

In […] Hoban’s novels, the entire archive of civilized men and women lies buried beneath muck and rubble. The traces of civilization which do exist are inscrutable and only remind the postatomic mind of its inferiority. ‘O what we ben! And what we come to!’ cries Riddley after seeing the shiny remains of a power plant11.

L’éclectisme de cette civilisation se reflète dans la langue de la narration : le Riddleyspeak est une langue disparate, qui mélange les registres – les éléments de technolecte y côtoient les mots familiers, les termes archaïsants et les créations verbales pures. Cet aspect de la littérarité de Riddley Walker fera l’objet d’un développement dans la suite de l’article.

Par ailleurs, le contexte cognitif, au sens où l’entend M. Lederer, est volontairement déstructuré par une narration qui se perd volontiers en digressions, enchâsse les récits dans une série de mises en abyme vertigineuses. L’activité cognitive de la personne qui lit est compliquée par la démultiplication des chemins narratifs, d’autant que certains de ces chemins semblent aboutir à des impasses tandis que d’autres revêtent une dimension symbolique qui lui ouvrent de nouvelles voies interprétatives, de nouvelles pistes de lecture.

Circularités spatio-temporelles

Le Kent de Riddley Walker est aussi une région d’Angleterre dont la spatialité circulaire s’organise autour d’un cratère : en effet, la ville de Cambry est située au cœur d’un fossé circulaire appelé Ring Ditch qui délimite la zone la plus dévastée de ce Kent fictionnel. Il s’agit de l’épicentre de l’explosion nucléaire – un cataclysme appelé « le Grand Boum » dans la version française du roman – qui a ravagé le pays tout entier et peut-être le reste de l’Europe. Le récit du jeune narrateur se lit comme une quête, un périple qui le ramène à ce centre dévasté qu’il décrit en des termes qui rappellent beaucoup l’expression Ground Zero :

I knowit Cambry Senter ben flattent the werst of all the dead town senters it ben Zero Groun it ben where the wite shadderd stood up over every thing.
(RW, p. 15912)

Je savv que le sentre de Cambry avété à plati pyr de tous les sentres des villes mortes cété Sol Zéro là où les zombres blanche sété dressé dssus tout.
(EM, p. 201)

Dans le récit de Riddley, ce cratère est à la fois un lieu interdit par les autorités locales aux personnages du roman et un espace ravagé où, enfant, le personnage principal aimait aller jouer en cachette avec ses amis.

The Ram dint allow no 1 in the dead towns but when I ben littl we use to sly in when ever we got the chance and kids a nuff for crowd.
(RW, p. 14)

Le Ram a torisé prsonne dans les villes mortes mais quand jété petit on y allé en douss à la premyèr occaz dès quon été assez nombreux pour fer une foul.
(
EM, p. 19)

C’est le trou noir autour duquel s’organise l’espace-temps du roman.

[Cambry] is where a new year zero commenced. It is also ‘Zero ground’: uninhabitable, with radioactive decay tangible in the air; it is a mark of absence, a scar on the landscape a locus of nothingness. In the novel, we are given a map that draws the Power Ring – the ditch left by the particle accelerator that once stood around the town – as a concentric circle around the crater, a topographical zero with an empty centre. The image is a fitting one for a novel that deals with nuclear annihilation13.

Mais ce centre interdit reste hermétique, il se refuse au jeune narrateur qui a l’impression désespérante de tourner en rond dans sa quête de la connaissance et de la compréhension du passé. En définitive, après son détour par Cambry, Riddley Walker revient à son point de départ, une sorte de ferme néolithique. Le cratère est certes un lieu immuable mais il n’a livré aucun de ses secrets au jeune narrateur. Cet aspect du récit me conduit à analyser la figure du narrateur non fiable dont les vagabondages narratifs ne semblent mener nulle part.

Le pérégri-narrateur non fiable de Russell Hoban – cheville-ouvrière d’une expérience déroutante pour les narrataires

Le narrateur non fiable et l’impossible quête des origines

La notion de narrateur non fiable définie par W. C. Booth dans The Rhetoric of Fiction correspond à des personnages narrateurs dont les valeurs, la situation ou les capacités cognitives s’écartent significativement de celles des narrataires. De ce fait, son récit n’est pas considéré comme entièrement fiable ; il demandera donc une coopération lectorielle14 et un degré d’activité herméneutique plus importants que le récit de narrateurs fiables.

Indéniablement, avec ses nombreuses digressions, ses retours en arrières et ses impasses, le récit de Riddley Walker demande à celles et ceux qui le lisent à la fois une intense activité cognitive, sans laquelle un récit incohérent pourrait les lasser, et une capacité à se laisser mener par le bout du nez. Cette fonction narrative et cette prédisposition à l’errance sont inscrites dans le nom du personnage-narrateur, qui est – littéralement et explicitement – un pérégri-narrateur :

Walker is my name and I am the same. Riddley Walker. Walking my riddels where ever theyve took me and walking them now on this paper the same.
(RW, p. 8)

Marcheur je me nomme et je suis tout comme. Enig Marcheur. Je marche avec les nigmes par tout où elles me mènent et je marche avec elles main tenant sur ce papier de meum.
(
EM, p. 11)

Tel est l’éclaireur et le guide que Russell Hoban nous demande de suivre au fil de son récit et de ses déplacements dans la contrée dépaysante qui recèle des secrets et des énigmes. Les narrataires doivent renoncer à tout comprendre d’emblée et accepter de tâtonner comme le fait le héros éponyme dans sa propre quête. Riddley Walker avoue lui-même que son récit n’a ni queue ni tête, qu’il mentionne certains événements trop tôt et devra y revenir par la suite. Il s’agit d’un apprenti-narrateur qui n’en sait pas forcément assez pour livrer à ses narrataires un récit complet et intelligible :

Wel this aint the place to say no mor about it Iwl tel that part when I come to it. Ive only wrote this down here becaws my mynd ben running on it that day and if itd run farther I mytve knowit mor. There aint that many sir prizes in life if you take noatis of every thing. Every time wil have its happenings out and every place the same. What ever eats mus shit.
(
RW, p. 15)

Bon cest pas le lieu d’en dir plus dssus je vainarr ce bout le moment venu. J’ai juste écri ça ici parsq mon espryt mouliné dssus ce jour là et il seré allé plus loin j’en orée su peu d’être plus. Y a pas tant de sur prises dans la vie si tu es tentif à tout. À chac époc il rive quelc chose et à chac en droit cest tout comme. Qui bouffe chie.
(
EM, p. 19)

Vagabondage linguistique et bifurcations lexicales

La quête erratique de Riddley possède un versant linguistique. Son voyage initiatique est en fait une sorte d’école buissonnière de la langue anglaise. L’idiome créé par Russell Hoban prend volontiers des chemins de traverse : il emprunte la voie de l’oralité, une oralité qui, paradoxalement, contraint les lectrices et les lecteurs à prendre le chemin des écoliers.

L’auteur a tout d’abord cherché à créer un parler, une langue orale à laquelle il faut prêter l’oreille pour accéder au sens. Le détour par l’oralité que ce texte écrit impose à celles et ceux qui le lisent trouve son origine dans le goût de Russell Hoban pour la musicalité de la langue et les jeux que permet la face sonore du signe linguistique. Dans la postface de Riddley Walker, l’auteur écrit :

I like to play with sounds, and when alone in the house I often talk in strange accents and nonsense words. […] Riddleyspeak is only a breaking down and twisting of standard English, so the reader who sounds out the words and uses a little imagination ought to be able to understand it. Technically it works well with the story because it slows the reader down to Riddley’s rate of comprehension15.

Ces remarques indiquent que l’auteur concevait avant tout le Riddleyspeak comme une langue parlée et, de façon significative, il la compare ici à un idiome étranger, une langue aux sonorités déformées qui ralentit la lecture et la compréhension. Le dépaysement linguistique ne se résume ni à l’emploi de termes inconnus aux sonorités barbares ni à des inventions humoristiques. Il ne s’agit pas non plus de créer de toutes pièces une langue étrangère qui n’évoquerait absolument rien tant elle serait novatrice. La science fiction de Russell Hoban est autant régressive que futuriste.

Pour commencer, l’orthographe phonétique rappelle aux narrataires que l’idiome de cette contrée ravagée est avant tout une langue orale. À titre d’exemple je citerai les nombreuses contractions qui amalgament l’élément verbal et la négation : dans « aint » et « dint », qui sont quasiment systématiquement utilisés, la marque de l’élision disparaît également, même si les lectrices et les lecteurs reconnaissent en filigrane dans « aint » la forme familière et populaire « ain’t ».

Beaucoup d’auxiliaires utilisés pour conjuguer des verbes au passé sont également escamotés à la faveur de ces raccourcis linguistiques correspondant à une réalisation orale de la langue. La première forme verbale de l’extrait ci-après est représentative de ce trait linguistique. La deuxième forme verbale soulignée correspond également à une oralisation de la langue. Il s’agit de la disparition de l’auxiliaire du present perfect, dans laquelle Russell Hoban voit la première étape d’une utilisation dévoyée de la langue standard, caractéristique des évolutions que fait volontiers subir la langue orale à la grammaire codifiée :

The grammatical decline began with the dropping of the auxiliary verb in the present perfect tense; many of the children I went to school with in Pennsylvania spoke that way: ‘I been there’ and ‘I done that’. One thing led to another, and the vernacular I ended up with seems entirely plausible to me; language doesn’t stand still16 […].

Comme le passage ci-dessous et sa traduction française l’indiquent, il s’agit d’une langue orale simple et atomisée, réduite à des mots courts, pour la plupart constitués d’une ou deux syllabes. Une langue régressive, retombée en enfance dans la mesure où elle est en partie nourrie de souvenirs d’école de Russell Hoban.

We come to where the clifsve fel in to the sea time back way back its broakin groun there all a jumbl we use to go there our crowd of kids when I ben littl.
(RW, p. 103)

On est rivé là où la falaiz tombé dans la mer à l’époc d’entend c’est du terre toir brizé tout un fatras avant on y allé la foule des môm de quand j’été ptit.
(EM, p. 131)

Cette langue fictionnelle mâtinée d’américanismes et de déviances par rapport à la norme, d’aucuns pourraient la considérer comme une représentation de l’abâtardissement de l’anglais britannique dont elle est issue. Quoi qu’il en soit, d’après S. Sorlin, certains mots reflètent bel et bien l’accent américain de l’auteur. Cet aspect phonétique rapproche lui aussi la langue de Riddley d’un babil enfantin, avec des voyelles très ouvertes et des sons voisés.

Certains mots trahissent les origines américaines de l’auteur : l’ouverture du < o > explique l’écriture de « arper sit » (opposite) et « arnge » (orange), le voisement du /t/ intervocalique celle de « saddlelite » (satelite). De même, la simplification phonologique du groupe consonantique /n/ + /t/ ou /d/ est à l’origine des retranscriptions suivantes : « inner acting » (interacting), « unner stan » (understand), « wunner » (wonder), « gennl man » (gentlemen), « venny later » (ventilator)17.

Le Riddleyspeak est également la langue des bifurcations lexicales qui transforment de nombreux mots et des phrases entières en échappées sémantiques. En effet, en subvertissant l’orthographe pour transfigurer la langue anglaise, R. Hoban crée dans ce roman ce que la stylisticienne S. Sorlin appelle « ce langage rhizomatique qu’est le Riddleyspeak, [par lequel] d’autres signifiants poussent au milieu des mots déposés sur la page, faisant émerger d’autres sens18 ».

Ici, l’expérience dépaysante de la lecture se fait aventureuse, dans la mesure où le Riddleyspeak n’est pas seulement déviance et errance mais une forme de régénérescence jubilatoire de la langue standard. En effet, les déformations orthographiques et les scissions de mots favorisent l’émergence de métaphores vives qui libèrent la langue de l’automatisme et semblent même annuler en partie l’arbitraire du signe linguistique. Voici quelques exemples représentatifs de cette créativité, cités dans l’ouvrage de S. Sorlin : « gallack seas » pour « galaxies », « nebyul eye » pour « nebula19 ».

C’est l’activité cognitive de Riddley Walker et de ses congénères qui contribue à cette réinvention linguistique qui modifie la perception de la réalité des lectrices et des lecteurs. Ainsi, ces habitants du Kent ne peuvent saisir ce qu’est un avion qu’en le comparant à un bateau volant (« boat in the air ») ; de même, les technologies permettant de diffuser des images et des sons aboutissent, pour les contemporains du narrateur, à des images portées par le vent (« pictures on the win20 »).

Le récit d’une quête linguistique inaboutie

Parce que, malgré ces belles échappées sémantiques et son admirable capacité à se déjouer des codifications de la langue standard, la langue atomisée de Riddley Walker est irrémédiablement coupée de ses origines étymologiques, parce les discours politiques et religieux qui ont cours dans cette civilisation sont corrompus, la quête du personnage-narrateur ne peut pas aboutir. Sa langue ne lui permet pas de dépasser le stade des circonvolutions, d’accéder à la compréhension du passé et d’éclairer le temps présent : les réponses qu’il cherche se dérobent obstinément.

My feet begun to walk me down rivver tords Cambry. Thats where the senter is. All roun myt be a fools circel but the senter is stil what it is and where it is.
(RW, p. 196)

Mes pieds se sont mis à me guider le long de la rivvière vers Cambry. C’est là qu’est le sentre. Tout autour c’est peu dêtre la foll ronde mais le sentre est encore ce qu’il est et où il est.
(
EM, p. 247)

En définitive, lorsque la boucle narrative est bouclée, le voyage débouche sur une tautologie aussi évidente que décevante. L’immuable stabilité du centre névralgique du Kent de Riddley Walker constitue effectivement l’œil d’un cyclone qui entraîne dans sa folle ronde la langue, le sémantisme et l’activité lectorielle elle-même. Ce mouvement perpétuel empêche toute résolution des énigmes, tout figement du Riddleyspeak ; il conserve sa qualité irrémédiablement étrange à un monde fictionnel qui refuse de devenir familier jusqu’à la dernière page du roman.

C’est dans un autre voyage linguistique et culturel, facteur d’instabilité et de défamiliarisation, que l’écriture d’une traduction française entraîne le roman culte de Russell Hoban.

Traduire Riddley Walker en français – le roman de Russell Hoban en terre étrangère

Publié en 1980, Riddley Walker a dû attendre 2012 pour paraître en France, suite au décès de Russell Hoban en 2011. En effet, l’auteur s’est longtemps opposé à ce que son roman soit traduit et Dominique Bordes, l’éditeur, a dû déployer beaucoup d’énergie pour l’en convaincre in extremis. Or, Enig Marcheur n’est présenté ni comme un roman traduit de l’anglais ni comme texte écrit en français mais comme une œuvre traduite en « parlénigm ». Avec la complicité de l’éditeur, le traducteur Nicolas Richard s’est lancé dans une entreprise de trans-création littéraire qui aboutit à la création d’une langue autre, nouveau point d’ancrage de l’étrangeté anglo-saxonne du roman.

Recréer une expérience de lecture défamiliarisante

Pour transplanter ce texte déroutant, pour en créer une version française qui ralentit et dépayse la lecture, Nicolas Richard a dû négocier un écart entre la langue française standard et l’idiome fictionnel qu’il a recréé. Cet écart devait reproduire des effets de lecture similaires à ceux que produisent l’écart entre la langue anglaise standard et l’avatar de cette langue qu’a inventé Russell Hoban.

L’entretien accordé par le traducteur à la revue professionnelle Transittérature révèle qu’il a immédiatement conçu cette tâche comme une entreprise poétique :

J’ai tenu à conserver ce sentiment initial que j’avais eu d’un jaillissement poétique, d’une magie. Je ne suis pas friand a priori des projets expérimentaux comme celui-là. Il faut avant tout que ça marche, que ça me parle, cet équilibre rugueux qu’il a trouvé, c’est ça qu’il fallait absolument conserver21.

Ces propos associent de façon intéressante les notions de jaillissement poétique et d’équilibre rugueux, le mouvement et une forme d’équilibre qui, pour rester fidèle à la poétique de Riddley Walker, devra éviter la stabilisation. Les paroles de Nicolas Richard portent sur la nécessité de conserver un effet magique qu’il décrit avant tout comme un ressenti, un sentiment. Elles font écho à la conception de la traduction d’Henri Meschonnic ; d’après le traductologue, il s’agit de faire dans la langue d’arrivée ce que le texte source fait dans la langue de départ :

Traduire est une pratique du langage particulière, qui ne se confondra jamais avec l’écriture, pas plus que la traduction avec son texte, mais qui doit faire ce que fait le texte.22

Une telle entreprise de recréation d’effets de lecture avec d’autres moyens linguistiques et sous de nouveaux horizons culturels passe nécessairement par l’élaboration d’une « poétique expérimentale du texte traduit23 » notamment dans les composantes prosodiques, rythmiques et musicales constitutives de sa signifiance. De fait, le traducteur garde le souvenir grisant d’une expérience de traduction qui lui a permis de goûter au « plaisir de jongler avec une nouvelle langue… son rythme, ses sonorités24 ».

Renouer avec une poétique de l’oralité

Ce que j’ai écrit précédemment sur le Riddleyspeak et sur son oralité commande nécessairement au traducteur de travailler à recréer une poétique de l’oralité : un texte qui impose à celles et ceux qui le lisent un détour par la prononciation pour identifier les mots et leur sens. Il s’agissait donc de renouer avec l’oralité non seulement comme registre familier mais surtout comme mise en œuvre verbale du texte littéraire.

L’examen des extraits de traduction cités plus haut permet d’observer le travail du traducteur et le degré de liberté qu’il s’est accordé pour recréer une langue qui procède de l’éparpillement syllabique25 – sorte d’atomisation linguistique – et de la créativité lexicale afin de susciter le jaillissement poétique dont il parle dans Translittérature.

Si ce type d’écriture défamiliarisante, qui opacifie le texte, ralentit la lecture et modifie la perception du réel26, peut apparaître comme un espace de liberté totale pour le traducteur, la création d’un idiome adossé à la langue française et ne comportant que des mots d’une ou deux syllabes constitue une contrainte forte. Le traducteur a réussi à relever le défi de la troncation en tenant compte des contraintes linguistiques propres au français, si bien qu’il a tantôt coupé les suffixes de mots et tantôt escamoté les syllabes situées à l’initiale quand il n’a pas tout simplement coupé les mots en deux.

Soucieux de restituer la dynamique de l’éparpillement et de la bifurcation sémantique qui sont à l’œuvre dans le roman de Russell Hoban, il a saisi ces occasions d’atomiser la langue sans oublier de faire jaillir des rhizomes sémantiques inattendus ou déroutants de mots tels que territoire, qu’il a transformé en « terre toir27 », les énigmes, « les nigmes », partout « par tout » et maintenant « main tenant28 ».

Par ailleurs, N. Richard s’est attaché à une forme de retenue dans la restitution du Riddleyspeak en parlénigm : il dit avoir voulu éviter la tentation de surcharger le texte de jeux de mots qui ne s’y trouvent pas29. Pourtant, si on se penche sur sa traduction, l’alignement contrastif de certains extraits avec le texte source révèle que bon nombre de manipulations lexicales obéissent à la logique de celles observées dans l’original mais sont appliquées ailleurs dans le texte cible.

Every day we gone the same way to and from and every day we seen that smoak nor I never give it no thot. This day tho every thing begun to look diffrent.
(
RW, p. 14)

Chaque jour on feusé le meum par court dans un sens puis dans l’aurt et chaque jour on voyé cette va peur mais jy pensé jamais. Ce jourlà n’en pêche tout a commencé à parêtre diff errant.
(
EM, p. 18)

La stratégie de traduction à l’œuvre dans ce passage, où certains mots monosyllabiques ou écrits d’un seul tenant dans la version anglaise se retrouvent scindés dans la version française tandis que d’autres qui sont disjoints en anglais apparaissent sous une forme condensée ou contractée en français, correspond à ce que les traductologues et les stylisticiens appellent la compensation30.

En tenant compte des contraintes inhérentes à la langue française mais aussi de la poétique du texte à traduire, N. Richard déplace le lieu de production des effets recherchés tout en préservant l’économie globale du texte. Il semble important de souligner au passage que la traduction tire astucieusement parti des opportunités qu’offre le génie de la langue française, opportunités qui sont mises au service de la signifiance du texte à traduire.

Ainsi, la simple contraction « diffrent » voulu par R. Hoban donne lieu à une bifurcation lexicale sous la plume de N. Richard : « diff errant » fait jaillir un sens nouveau du mot différent. En effet, cette fission lexicale aboutit à une association nouvelle entre la notion de différence et l’errance. L’insertion sémantique qui vient se loger dans l’intervalle entre les deux fragments lexicaux constitue le point de départ du récit de Riddley au sens littéral du terme. Sa perception du monde change, et cette différence – qui est aussi une différence de statut entre lui et ses congénères – le pousse à partir explorer son Kent post-apocalyptique et à entamer son récit.

Du Riddleyspeak au Parlénigm : s’appropier une langue pour la réinventer

Les échanges entre N. Richard et son éditeur révèlent que le roman de Russell Hoban et les défis liés à sa traduction ont favorisé une grande complicité entre eux. L’un et l’autre se sont immergés dans le texte au point de s’approprier le Riddleyspeak si bien que chacun s’est mis à écrire sa propre variété dialectale du parlénigm en cours d’élaboration.

Or, cette appropriation de la langue propre à un roman et cet attachement à resituer une voix narrative sont les deux conditions d’une capacité véritable à réinventer une langue fictionnelle dans sa dimension organique.

L’échange de courriels entre Nicolas Richard et Dominique Borde qui est reproduit dans Translittérature donne la mesure du travail accompli par le traducteur – et de la capacité de son éditeur à lire cette langue couramment :

À propos du glossaire…
Il m’apparaît que la meilleure façon de jouer avec la notion de glossaire est d’en fer non pas un comme en tairre dix stancié du roman de Hoban, mais, et cela très concrètement, une passerelle d’abordaj pour le lecteur français curieux de se rixq dans l’Anterre d’Enig. Bref, il ne s’agit pas de mettre à portée quelques termes du parlénigm, mais bel et bien de fournir à l’Enig Lecteur une sort de tirail pour il antre de lui meum dans la venture. Notre mission est que BAM ! les genss qui auront cet écri entre les mains aient en vie de fer le juteux avec le parlénigm. […]31

Le traducteur semble avoir à cœur de mettre à la disposition des lectrices et des lecteurs un outil opérationnel qui les rendra autonomes dans leur aventure lectorielle plutôt que de leur proposer une glose du Parlénigm. La découverte du texte et de sa langue sont décrits comme un voyage (« une passerelle d’abordage ») périlleux (« se risquer dans l’Angleterre d’Enig »).

Conclusion

Par le truchement de ce roman dépaysant, Russell Hoban invite son lectorat à réfléchir au monde fragile dans lequel nous vivons et aux dangers que nous lui faisons courir : la catastrophe nucléaire, mais aussi les épidémies, la destruction des sociétés et des civilisations humaines telles que nous les connaissons.

Ce monde étrangement familier fait de nous les découvreurs d’un monde perdu – qui était le nôtre – mais cette aventure dépaysante nous révèle à nous-mêmes : la précarité cognitive dans laquelle nous placent Riddley Walker et Enig Marcheur nous rappelle nos fragilités. Le temps de lire ces romans, nous apprenons à renouer non seulement avec l’aventure du voyage mais aussi avec la vulnérabilité de l’exilé qui se retrouve dans un univers dérangeant ; remise en cause ce qu’on sait, ce qu’on connaît, cet univers questionne notre compréhension des choses et refuse de se laisser apprivoiser.

Si le texte lance un défi cognitif et culturel à qui tente de le lire en déjouant les mécanismes qui permettent ordinairement de faire sens à partir d’une langue et d’un récit, l’humour qui jaillit des détournements lexicaux et des créations verbales compense le caractère très sombre de l’univers créé par R. Hoban et la dimension déstabilisante, voire aride de l’expérience de lecture qu’il propose.

Le traducteur a été attentif à restituer ce mélange complexe de tonalités en évitant tout excès dans la recréation de l’humour. La complexité d’un tel travail et le talent dont il a fait montre avec l’aide complice de son éditeur ont été récompensés par le Prix Maurice-Edgar Coindreau de la Société des Gens de Lettres en 2013.

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Notes

1 Alex Clark, « A Writer’s Life: Russell Hoban », The Telegraph [en ligne], 30 mai 2005 ; consulté le 19 avril 2019 sur <https://www.telegraph.co.uk/culture/books/3635918/A-writers-life-Russell-Hoban.html>. Retour au texte

2 Ibid. Retour au texte

3  Sandrine Sorlin, La Défamiliarisation linguistique dans le roman anglais contemporain, Montpellier, Presses Universitaires de la Méditerranée, 2010, p. 13. Retour au texte

4 Geneviève Roux-Faucard, Poétique du récit traduit, Caen, Lettres Modernes Minard, 2008, p. 65. Retour au texte

5 Ibid., p. 71. Retour au texte

6 Russell Hoban, Riddley Walker [1980], New Haven, Indiana University Press, 1998, n. p. Retour au texte

7  Russell Hoban, Enig Marcheur, Nicolas Richard (trad.), Bordeaux, Monsieur Toussaint Louverture, 2012, p. 2. Retour au texte

8 Nicolas Richard et Valérie Le Plouhinec, « Le Grand Boum de Nicolas Richard [Entretien] », Translittérature, n° 45, 2013, p. 11. Retour au texte

9  Jean Delisle, [1993], La Traduction raisonnée – Manuel d’initiation à la traduction professionnelle de l’anglais vers le français, Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa, 2013, p. 223. Retour au texte

10 Marianne Lederer, La Traduction aujourd’hui. Le Modèle interprétatif, Paris, Hachette, 1994, p. 37, citée dans Delisle, op. cit., p. 23. Retour au texte

11 Jeffrey Porter, « ‘Three Quarks for Muster Mark’: Quantum Wordplay and Nuclear Discourse in Russell Hoban’s ‘Riddley Walker’ », dans Contemporary Literature, Vol. 31, n° 4, 1990, p. 452, je souligne. Retour au texte

12 Toutes les citations en exergue en anglais de Riddley Walker, de Russell Hoban, sont issues de l’édition 1998 (New Haven, Indiana University Press). Les citations en français qui les suivent sont issues de la traduction de Nicolas Richard intitulée Enig Marcheur (Bordeaux, Monsieur Toussaint Louverture, 2012). Pour alléger la lecture, les références à ces ouvrages sont indiquées dans le corps du texte, entre parenthèses (RW pour le roman en langue originale et EM pour sa traduction, suivi du numéro de page). Je souligne dans toutes ces citations. Retour au texte

13  Adam Gyngell, « Writing the unthinkable: narrative, the bomb and nuclear holocaust », Opticon1826, n° 6, Printemps 2009, p. 4, je souligne. Retour au texte

14 U. Eco considère en effet que tout texte est un mécanisme paresseux qui « requiert des mouvements coopératifs actifs et conscients de la part du lecteur. » Umberto Eco, Lector in Fabula [1985], Myriem Bouzaher (trad.), Paris, Le Livre de Poche, « Biblio essais », 2012, p. 62-63. Retour au texte

15 Russell Hoban, Riddley Walker, op. cit., p. 225, je souligne. Retour au texte

16 Ibid. Retour au texte

17 Sandrine Sorlin, op. cit., p. 85. Retour au texte

18 Ibid., p. 112, je souligne. Retour au texte

19 Ibid., p. 86. Retour au texte

20 Ibidem. Retour au texte

21  Nicolas Richard et Valérie Le Plouhinec, « Le Grand Boum de Nicolas Richard [Entretien] », Translittérature, op. cit., p. 8, je souligne. Retour au texte

22 Henri Meschonnic, Poétique du traduire, Paris, Verdier, 1999, p. 161, je souligne. Retour au texte

23 Henri Meschonnic, « Traduire au XXIe siècle », Quadrens n° 15, p. 58. Retour au texte

24 Nicolas Richard et Valérie Le Plouhinec, « Le Grand Boum de Nicolas Richard [Entretien] », Translittérature, op. cit., p. 13, je souligne. Retour au texte

25 Sandrine Sorlin, op. cit., p. 83. Retour au texte

26 Viktor Chklovski, « L’art comme procédé » [1917, 1965], dans Théorie de la littérature, Tzvetan Todorov (éd. / trad.), Paris, Seuil, 2001, p. 94. Retour au texte

27 Russell Hoban, Enig Marcheur, op. cit., p. 131. Retour au texte

28 Ibid., p. 11. Retour au texte

29 Nicolas Richard et Valérie Le Plouhinec, « Le Grand Boum de Nicolas Richard [Entretien] », Translittérature, op. cit., p. 8. Retour au texte

30 Dans Stylistique comparée du français et de l’anglais, J.-P. Vinay et J. Darbelnet définissent la compensation en ces termes : « Procédé stylistique qui vise à garder la tonalité de l’ensemble en rétablissant sur un autre point de l’énoncé la nuance qui n’a pu être rendue au même endroit que dans l’original » (Vinay et Darbelnet, Stylistique comparée du français et de l’anglais [1958], Paris, Didier, 2017, p. 6). Retour au texte

31 Nicolas Richard et Valérie Le Plouhinec, « Le Grand Boum de Nicolas Richard [Entretien] », Translittérature, op. cit., p. 14. Retour au texte

Citer cet article

Référence papier

Virginie Buhl, « Traduire le dépaysement : comment recréer le Riddleyspeak de Russell Hoban en français ? », Textures, 24-25 | 2021, 351-365.

Référence électronique

Virginie Buhl, « Traduire le dépaysement : comment recréer le Riddleyspeak de Russell Hoban en français ? », Textures [En ligne], 24-25 | 2021, mis en ligne le 30 janvier 2023, consulté le 05 septembre 2025. URL : https://publications-prairial.fr/textures/index.php?id=286

Auteur

Virginie Buhl

Université Paris 3 Sorbonne-Nouvelle

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