Une erreur est-elle si vite arrivée ?

DOI : 10.35562/canalpsy.2884

p. 9-12

Texte

J’exerce depuis 5 ans en cabinet libéral et je suis en formation didactique à la SFPA (Société Française de Psychologie Analytique) après un parcours en FPP. Une pratique encore récente donc, mais suffisante pour que je sente à quel point la partialité de l’analyste – avec ses références théoriques et son cadre d’appartenance – est son principal outil de travail. Je le sens, mais comment en faire part ? Qu’est-ce qui, dans ma pratique, signe ma subjectivité ? Une plongée dans ces quelques années de pratique m’amène à une curieuse hypothèse : ce pourrait être mes erreurs !

L’erreur du thérapeute dans la cure pourrait-elle être considérée comme le signe même de sa subjectivité ? L’un des lieux de la subjectivité de la relation transféro/contre-transférentielle ?

Que la réflexion sur nos erreurs soit féconde, nous n’en doutons pas, que l’erreur elle-même puisse l’être, nous le savons pour des sciences dites dures, une erreur d’expérimentation, de protocole, peut produire des résultats inattendus, voire précieux. Mais dans notre pratique, comment évaluer une erreur ? Comment même la qualifier ?

Que l’on qualifie la survenue de ces erreurs de « signes de l’inconscient » ou de « signes du hasard » n’est pas seulement un choix de vocabulaire, mais de perception de la réalité de l’inconscient. Nous parlons en général plus volontiers de « l’hypothèse de l’inconscient » que de sa réalité, mais je n’exercerais pas cette profession si je n’avais pas la conviction profonde de sa réalité.

La différence de qualification est pragmatique, concrète : si le hasard Intervient, il ne peut que se reproduire ou non… Nous y sommes, nous les humains, totalement extérieurs. L’hypothèse de l’inconscient est un peu différente, même si elle ne se situe pas du côté de la toute-puissance. Elle postule que certains contenus de l’inconscient peuvent devenir conscients et sortir ainsi de leur unilatéralité. Ils peuvent être ainsi contrebalancés, confrontés, polarisés par d’autres pôles dans la psyché. Sans devenir tout-puissant et en restant soumis à des mystères qui nous échappent largement, l’homme trouve ainsi un petit espace de liberté supplémentaire.

Ainsi, nous pouvons avancer l’hypothèse que l’erreur du thérapeute dans la cure fait intervenir l’inconscient. (Hypothèse minimale, convenons-en !)

Avant de développer un cas clinique, une remarque : je vais parler des erreurs, de l’erreur dans la cure. Mais de quelles erreurs parle-t-on ? Je voudrais d’emblée écarter un écueil et éliminer rapidement les erreurs qui proviendraient d’un manque de formation ou d’un manque de bases théoriques. Je dirai plutôt pour être vraiment claire d’un manque de travail sur soi. Vous le savez, nous travaillons à explorer la psyché par l’intermédiaire de notre psyché (c’est l’un des seuls domaines où l’outil de l’exploration se confond avec l’objet exploré), inutile de dire que nous ne connaissons jamais assez notre outil d’observation. (« L’intelligence, disait Coluche, on croit toujours en avoir assez puisque c’est avec ça qu’on la mesure », c’est un peu pareil de notre connaissance de la psyché…)

Un psychanalyste expérimenté et suffisamment âgé me disait récemment « avant 20 ou 25 ans de travail sur soi, on ne comprend rien à l’inconscient ». J’ai souri intérieurement lorsqu’il m’a dit cela, persuadée que mes 12 ans sur le divan… Quand même… Mais, plus j’y pense, plus je me cogne, plus j’espère commencer à entendre quelque chose de ce sujet dans les dix prochaines années.

Donc, j’aurais envie d’exclure ces erreurs-là (je veux dire les erreurs grossières, c’est-à-dire celles que font nos collègues !!! Non, je plaisante [à peine]), je veux dire ceux qui se prétendent collègues et qui n’ont pas la formation nécessaire, je pense par exemple à un patient atteint d’une maladie évolutive grave, qui avait consulté une « psy » qui lui avait proposé une séance de « rebirth » collective pour commencer. Là, ce n’est pas une erreur, c’est inqualifiable. Heureusement, il avait lui-même senti que ce serait trop violent et il n’y est pas retourné…

J’aurais pu d’ailleurs intituler ce travail « de la faute à l’erreur »… Le manque de formation, le manque de travail sur soi, c’est une faute éthique. C’est une forme de toute-puissance (d’omnipotence). « Je sais, je peux aider l’autre… Je vais aider mes patients. » Une toute-puissance qui n’a pas conscience des risques pour l’autre et c’est le propre de celle-ci d’exclure l’autre… d’exclure l’altérité.

Pour cerner mieux mon sujet, je dirai donc que je vais parler d’un certain type d’erreur, dans une situation classique avec un psychothérapeute/psychanalyste, normalement et insuffisamment formé, un psy suffisamment bon et qui travaille autant qu’il le peut la question du transfert/contre-transfert.

Je voudrais également éliminer un deuxième écueil, l’évaluation de l’erreur par l’intensité du sentiment de culpabilité ressenti… Et donc, et encore, de la toute-puissance.

 

 

Caroline Bartal

Un exemple pour être plus claire sur ce lien entre la culpabilité et l’omnipotence : Mon coiffeur (car la psychanalyse, c’est la compréhension de l’humain et ces flashs de compréhension nous les avons en lisant des ouvrages ardus, en lisant des romans, sur le divan qui nous accueille, mais aussi dans la vie de tous les jours par des apports divers à condition d’y être attentifs), donc, ce coiffeur me raconte que le mari d’une de ses clientes venait de la quitter pour un homme, il s’était découvert homosexuel. Cette femme se ronge de culpabilité en se disant que c’est à cause d’elle. Elle n’a jamais été à la hauteur de la situation et si elle avait été une meilleure maîtresse pour son mari, il ne serait pas devenu homosexuel… (C’est drôle, car j’aurais tendance à penser que si son mari était homosexuel, il préférait qu’elle soit une mauvaise maîtresse… Mais ce n’est pas le propos.)

Elle vient par ce sentiment de faute, s’immiscer dans la nouvelle vie de son ex-mari. Elle ne supporte pas d’en être exclue alors qu’il lui signifie qu’il ne veut plus d’elle. Le sentiment de culpabilité lui permet de rester au centre de ce nouveau couple (dans son fantasme à elle).

Ce sentiment de culpabilité, vous sentez combien il est pris dans l’autoérotisme. L’autre n’existe pas… Ce sentiment de culpabilité là, n’autorise aucune élaboration, aucune ouverture, il tourne en rond… « J’aurais dû, j’aurais pu, tout est de ma faute. »

Nous devons donc, nous en méfier, nous les psychothérapeutes, car il signe la négation de l’altérité du patient.

J’essaie donc d’aborder le thème de l’erreur dans la cure en évitant ces deux écueils : ni absoudre toute faute en pensant qu’elle signe quelque chose du transfert/contre-transfert, ni enfermer la réflexion dans la culpabilité auto-érotique et non propice à l’élaboration du sens de cette erreur dans cette rencontre intersubjective. Cette introduction est un peu longue, mais elle me semblait nécessaire avant d’aborder l’histoire clinique que je souhaitais aborder.

Patricia a été une petite fille sage et silencieuse. Elle est jolie, très jolie, elle me fait penser à Cécile De France, des jeunes femmes très propres, à la fois très féminine et un peu masculine, un peu lisse…

Elle me touche beaucoup, d’emblée. Elle parle très lentement, chaque mot est difficile et vient de loin. Je la reçois en face-à-face et elle a mis plus d’un an à croiser mon regard. J’ai vu alors un magnifique regard vert, que je ne soupçonnais même pas.

Elle me raconte qu’elle a écrit un roman, publié avec un certain succès, mais qu’elle a arrêté brutalement et aujourd’hui elle exerce un tout autre métier, très peu valorisé et très difficile. D’emblée, j’imagine qu’elle a beaucoup de talent et je me dis ou plutôt, je ne me dis pas, mais cela me guide comme une évidence : « Elle recommencera à écrire. »

Je le sais, et vous le savez, la base peut-être de notre écoute est d’interroger les évidences, surtout les nôtres… Là, évidemment, je n’interroge rien. Inutile de vous dire aussi que la création littéraire a un sens très particulier pour moi dans mon histoire familiale !

L’erreur, selon la définition du Littré, c’est : « L’action d’errer moralement ou intellectuellement ; l’état d’un esprit qui se trompe. »

Justement là, si je reprends les termes de la définition du Littré, je n’ai pas erré… Je n’ai pas laissé flotter mon imagination, ma pensée, j’ai eu une certitude pour elle, qui pourrait s’énoncer ainsi : « Grâce à ce travail avec moi, elle reprendra l’écriture. » Nous avons traversé 3 ans ainsi. Il s’est passé beaucoup de choses, des rêves, des reprises importantes, un transfert positif très fort et, vous l’avez entendu, un contre-transfert tout aussi fort… Cela, je l’ai beaucoup interrogé, seule et en supervision.

Patricia est une analysante parfaite. C’est extrêmement agréable pour le thérapeute, des rêves clairs qui arrivent aux bons moments, une psyché en mouvement, elle parle, mais elle me laisse intervenir sans en sembler heurtée, et elle élabore d’une séance à l’autre, enfin sa psyché élabore… Elle parle moins lentement… Elle va mieux… des mouvements de vie apparaissent. J’ai presque l’impression de lire un ouvrage sur le déroulement d’une cure idéale.

Mais cette perfection signe aussi la répétition de la névrose… Cela, je le voyais, même si j’étais en partie prise dans le plaisir du travail avec elle. J’attendais donc un moment où, dans le transfert, quelque chose pourrait devenir imparfait… Je n’avais pas imaginé que c’était déjà-là ! Et là depuis le tout début ! Que l’erreur venait de moi, que je continuais de l’enfermer dans une demande inconsciente et paradoxale, qui parlait autant de mon histoire que de la sienne ou plus précisément qui se trouvait à la croisée de nos chemins.

Lorsque je parle d’enfermement, ce n’est pas un mot en l’air. Elle racontait comment enfant, elle avait été prise dans le désir de sa mère, on pourrait dire comment l’imago maternelle l’étouffait. Une image : elle a 6 ou 7 ans, elle est debout, elle regarde des enfants jouer, elle ne joue pas, elle sent sa mère qui regarde les enfants à travers elle. On voit là, la force de l’imago…

Elle avait fait une tentative de suicide plus jeune et la tentation du suicide, la possibilité du suicide, a rôdé longtemps en toile de fond des séances. Même cela ne m’a pas vraiment alertée. Je restais plutôt agréablement cramponnée à mon contre-transfert positif.

Elle a abordé longuement sa difficulté à créer, la forme de suicide qui l’avait conduite à arrêter brutalement. Elle savait que ses parents voulaient qu’elle écrive, mais aussi que sa mère ne pouvait pas supporter qu‘elle réussisse quoi que ce soit… Surtout pas quelque chose d’artistique qu’elle-même n’avait pas réussi.

Je n’entendais toujours rien. Enfin si ! plein de choses et je m’en réjouissais en me disant « chouette, elle va pouvoir recommencer à créer… »

Lors d’une séance, elle raconte un rêve : elle marche dans son lieu de travail, ses yeux sont fermés, elle ne voit rien. Elle vient dire au revoir à ses collègues, elle n’est pas triste. Elle descend des escaliers, elle croise quelqu’un qui veut l’aider, mais elle refuse en se disant « ce n’est pas grave d’avoir les yeux fermés… »

Pourquoi ce rêve a-t-il déclenché en moi la révélation de mon « erreur » ? En laissant pendant la séance vagabonder ma pensée, je m’interrogeais sur les différentes significations. Qui est cette rêveuse ? Pourquoi a-t-elle les yeux fermés ? Pourquoi n’est-ce pas triste ? A-t-elle raison de ne pas accepter l’aide de cette personne ? Pourquoi vient-elle dire au revoir ? Enfin, peut-être, j’ai laissé ma pensée errer, je l’ai dégagée des présupposés, de mes présupposés.

Elle, associait sur ce qu’elle vivait dans cette profession, lorsque j’ai pensé que le rêve s’adressait à moi. Comme tous les rêves décrits en séance bien sûr, mais peut-être plus précisément… C’est en l’écoutant que j’ai pensé que je faisais comme ses parents, je voulais qu’elle écrive ! Mais pire encore (car elle avait déjà évoqué le fait que ce pouvait être et le désir parental et le sien), j’ai compris que je surdéterminais cette réalisation.

Surdéterminer cela impliquait : Je sais ce qui est bon pour elle (sous-entendu mieux qu’elle ; sous-entendu elle ne sait pas et ne saura jamais ce qui est bon pour elle). L’imago maternelle pouvait garder toute sa place dans sa psyché, nous n’y touchions pas.

En attendant, il ne sert à rien de vivre. Rien de ce qu’elle fait aujourd’hui n’a de sens (ce que vous imaginez bien, sa mère lui répétait sans cesse et ce dont elle ne doutait pas).

Et enfin, elle vivra lorsqu’elle écrira de nouveau, donc en étant gratifiante… là, je l’enfermais vraiment… je la réduisais à une utilité narcissique (moi la bonne thérapeute, j’allais lui permettre de réaliser quelque chose, mais en attendant, rien d’autre n’avait vraiment d’importance pour elle). Et ce serait plutôt grâce à moi que grâce à elle !

La cure n’avait pas pour objectif qu’elle se réalise dans son processus intérieur, mais qu’elle entreprenne quelque chose… qui me convenait.

J’ai senti que dans le rêve, je pouvais être la personne qui lui proposait de l’aide, mais que pour elle, mieux valait avoir les yeux fermés et vivre à sa façon ce qu’elle avait à vivre… les yeux fermés, c’est sûrement réduire ses possibilités, mais c’est aussi écouter mieux ce qui vient de l’intérieur et non ce qui est imposé de l’extérieur… Premier pas, peut-être, de sa capacité de différenciation entre elle et moi, entre l’imago maternelle et le moi.

On verrait là, le recul de l’imago maternelle, dont elle peut enfin refuser l’aide !

J’ai apprécié la délicatesse avec laquelle son inconscient me le faisait comprendre sans me blesser… Mais n’est-ce pas le propre des enfants habitués à soutenir des parents « états limites », que d’apprendre à se débrouiller seuls, sans blesser celui qui est censé les soutenir ? L’enfant captif du narcissisme parental est souvent un enfant très « délicat ».

Inutile de vous dire que je n’ai rien évoqué de tout cela, mais que l’année qui a suivi a été d’une richesse extrême. À mon grand étonnement, ce qui est arrivé d’abord c’est une remémoration de l’histoire familiale datant de la guerre, liée à la création, à la réparation, et qui associait… la littérature et la mort ! Puis vinrent d’autres contenus plus personnels et plus récents…

Pourquoi parler si longuement de cette erreur ? Parce ce qu’elle m’a appris deux choses :

D’une part, la force et la réalité du transfert/contre-transfert et des identifications projectives sur lesquelles ils s’accrochent et combien il est aisé de s’y laisser prendre et enfermer…

Je pourrais simplement penser que cette erreur s’appuie sur une des taches aveugles de ma psyché ou bien, dans une perspective plus large du contre-transfert que cette erreur m’est quasiment dictée par certains aspects de la communication inconsciente de Patricia à l’égard du monde et en l’espèce, à mon égard, par le biais notamment de l’identification projective.

L’identification projective est une méthode pour transmettre directement une expérience à autrui. Sans aucun clivage, ni violence, on parle d’empathie, mais elle désigne aussi une forme prototypique de relation d’objet agressive consistant pour l’enfant à expulser et à projeter à l’intérieur du corps de la mère des parties clivées, mauvaises, chargées de haine. Cette partie projetée est celle qui ne peut être intégrée, « la mauvaise ». L’identification projective permet de cliver la pulsion destructrice et de la projeter à l’extérieur. Melanie Klein considérait cette forme particulière d’identification projective comme le prototype d’une relation d’objet agressive (Ciccone, A., 1999, p.43).
(On pourrait ici la penser en contrepoint du transfert positif qui ne peut contenir consciemment l’agressivité !) En situation analytique, cette forme d’interaction entre deux psychismes est l’une des modalités du contre-transfert. Des parties de la personne de l’analyste se trouvent enchevêtrées avec les parties de la personne propre du patient que ce dernier cherche à projeter sur l’analyste.

Albert Ciccone (1999) et Marc Lhopital (1991) dans leur étude détaillée ont notamment mis en évidence que si l’identification projective normale est au service de la communication, l’identification projective pathologique est, elle, au service de l’évacuation. Dans le sens pathologique, l’un des objectifs de l’identification projective est aussi de contrôler l’analyste…

Il est possible alors de définir le contre-transfert comme l’ensemble des réactions conscientes et inconscientes du thérapeute au transfert du patient, y compris les sentiments projetés en lui par celui-ci. Ma patiente me faisait ressentir le besoin qu’elle avait d’être soumise à une injonction paradoxale… « Fais et ne fais pas… Tu ne peux rien faire d’autre que de la littérature, mais tu ne peux pas non plus le réussir… Ta vie n’a pas de sens si tu n’y arrives pas, mais si tu y arrives, ce sera grâce à moi. » En bref, le besoin du moi d’être soumis à une imago maternelle que j’acceptais bien volontiers de reprendre à mon compte dans le transfert/contre-transfert.

Mais encore faut-il que l’identification projective puisse s’installer dans l’analyste !

C’est le deuxième point important qui relie les taches aveugles de ma psyché aux parties psychiques non élaborées de ma patiente. Tache aveugle, répétition de l’histoire personnelle ou collective… Il faut toujours un sujet pour recevoir la projection.

L’analyste doit être en lien avec cette partie « projetée » et déposée en lui. L’identification projective maintient le lien symbiotique et permet au processus de transformation de s’opérer.

Voilà le deuxième point que je souhaite mettre en lumière :

D’autre part, la nécessité de l’accrochage du transfert/contre-transfert. Si celui-ci n’avait pas pu s’accrocher (comme un hameçon) à cette part de mon histoire familiale qui a joué comme point aveugle, qui a pu recevoir la projection et qui a laissé vivre la répétition, il me semble qu’il n’aurait pas été assez solide pour soutenir le début du travail commun.

Point d’enfermement et de libération, le même lieu, le même nœud qui se noue pour pouvoir enfin se dénouer. Il aurait été terrible de ne pas s’en dégager. Pour autant ce point d’arrimage était nécessaire.

Ainsi, ce que j’ai appelé « une erreur » serait à la fois le point d’accroche, le lieu de la répétition et le lieu de la possible libération par l’émergence d’un sens…

La répétition dans le transfert/contre-transfert vient nous toucher au plus profond de notre subjectivité, c’est-à-dire dans ces points aveugles des profondeurs de notre psyché, dans ce qui demeure inconscient en chacun de nous. La réalité de l’inconscient est que, ce « qui est inconscient, nous ne le savons pas » (même si nous l’avons beaucoup abordé quelquefois). C’est l’inconnu en nous, malgré nos années d’analyse à faire pâlir Woody Allen, malgré les supervisions et les groupes cliniques…

Seul l’inconscient de Patricia, ou seule la rencontre de nos inconscients (grâce à son rêve et à ma rêverie) a permis que le point d’ancrage se dégage au moment opportun… à l’insu de la situation consciente.

En ce cas, « l’erreur » en ce qu’elle dévoile ce processus de transmission inconsciente – émission et réception – signe la subjectivité du thérapeute, l’endroit où la rencontre (comme celle des parents avec leurs enfants) est unique. Elle signe aussi la subjectivité de l’analysant.

Quelques mois après cette « révélation » (de mon point de vue, les prises de conscience sont des révélations, le ciel nous est tombé sur la tête et nous ne sommes plus les mêmes après), Patricia a pu me dire qu’elle avait envisagé à un moment donné d’arrêter la thérapie. J’ai entendu là, sa crainte inconsciente que je ne me dégage pas « de mon erreur », mais aussi qu’elle pouvait arrêter de me protéger, ne plus être une analysante parfaite… et que de belles surprises nous attendaient !

Bibliographie

Ciccone A. (1999), La transmission psychique inconsciente, Paris, Dunod.

Ciccone A., Lhopital M. (1991), Naissance à la vie psychique, Paris, Dunod.

Illustrations

Citer cet article

Référence papier

Sophie Braun, « Une erreur est-elle si vite arrivée ? », Canal Psy, 93 | 2010, 9-12.

Référence électronique

Sophie Braun, « Une erreur est-elle si vite arrivée ? », Canal Psy [En ligne], 93 | 2010, mis en ligne le 01 octobre 2021, consulté le 23 juillet 2025. URL : https://publications-prairial.fr/canalpsy/index.php?id=2884

Auteur

Sophie Braun

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