À Paris 7, structures articulées pour l’action étudiante

DOI : 10.35562/canalpsy.3109

p. 4-5

Notes de la rédaction

Nous reprenons ici des extraits d’une interview accordée par J.-M. Ballester (actuellement en thèse) à E. Garcin pour Psychologues et psychologies, no 106, avril 92, p. 27-31. Interview de Jean-Michel Ballester qui a traversé toute l’histoire associative des étudiants en psychologie de Censier, histoire qui a pour originalité d’avoir démarré par le besoin très concret de fabrication de polycopiés, les étudiants salariés étant très nombreux du fait du parti-pris d’admission de l’UFR. Les principaux demandeurs ont pris eux-mêmes les choses en main…

Texte

Quelle forme a pris l’implication des étudiants dans la vie de l’UFR ?

[...] Sur le fond, je dirais que ses diverses formes sont le résultat d’une implication progressive des étudiants sur l’Université, en position d’acteurs sociaux impliqués dans leur propre processus de formation. C’est ce qui me semble important à souligner.

Depuis quand ce mouvement s’est-il dessiné et quelle est son origine ?

La première forme a donc consisté à créer une association qui réalise des polycopiés : Psynergie, puisqu’il semblait ne rien exister qui favorise les conditions d’études des salariés, ni horaires spécifiques, ni polycopiés des cours pour ceux qui ne pouvaient y assister. C’était en 1985. Cette association existe toujours. En sept ans, sur une population de plus de mille huit cents étudiants.

Elle réalise grâce à ses adhérents des polycopiés de presque tous les cours magistraux de psychologie du cursus, du 1er au 3e cycle. Et grâce à la gestion d’une salle attribuée par la direction aux représentants étudiants, elle assure un accueil, une animation et une information pour tous les étudiants de l’UFR, en collaboration avec les services administratifs de la scolarité. Enfin, elle essaye d’initier un travail avec certains enseignants.

Parallèlement, en 1986, à cause de problèmes internes que connaissait l’UER (fonctionnement sous administration provisoire sur fond de crises répétées, donc sans instances légales ni possibilités de représentation étudiante), un Collectif étudiant s’est créé pour manifester au moins symboliquement une présence étudiante lors des réunions entre enseignants. [...]

Et puis, à un niveau plus large, nous étions en pleine période de contestation contre la Loi Devaquet, avec les grèves étudiantes et certains d’entre nous ont commencé à s’interroger sur les limites et les missions de l’Université en tant que « service public », et notre responsabilité d’usagers. Il faut dire que notre UFR n’avait pas beaucoup réagi, en tout cas pas très vite par rapport à ces évènements.

Aussi, lorsque des élections furent de nouveau possibles pour reconstituer les instances légales, avons-nous présenté une liste complète de représentants étudiants (nous étions dix-huit à l’époque). Puis, lorsque notre UER s’est aligné sur la loi Savary de 1984, la reconfiguration du nouveau Conseil d’UFR nous a fait perdre six sièges étudiants, mais nous avons pu négocier au bénéfice de la cooptation d’au moins trois psychologues cliniciens siégeant dans le collège des « personnalités extérieures ». Ces trois psychologues cliniciens venaient ainsi rejoindre le seul et unique psychologue représentant un syndicat professionnel prévu par les textes, ce qui a permis au SNP d’avoir un siège à Censier.

Troisième implication, l’association des anciens : Impulsion psy. D’abord créée pour nous rassembler après notre sortie de l’Université, elle nous a conduit à nous demander autour de quelle identité nous rassembler. Et très vite, il nous est apparu important d’initier un travail visant à faire connaître notre formation en même temps que la profession à laquelle nous nous destinions. C’est pourquoi cette association des anciens s’est à la fois ouverte aux étudiants du cursus tout en se tournant vers l’extérieur, afin de créer ces passerelles entre université et monde professionnel que nous n’avions guère connues.

Nous nous y sommes évertués à combler certains manques de notre formation, en priorité sur la question de l’identité du psychologue. Pour ce faire, nous avons édité un journal, L’être psy dans lequel nous avons traité divers thèmes sous forme de dossiers (l’Université, les études de psychologie en France, l’insertion professionnelle, etc.). Nous avons également organisé des manifestations destinées au grand public, donc sur des lieux comme la FNAC (débat-rencontre en 1989 : « Profession psychologue, qui a besoin des psychologues ? », ou la « Semaine des psychologues » en 1990).

Cette action s’est un peu essoufflée cette année car à courir trop de lièvres à la fois, on s’épuise… mais notre étape suivante nous conduisait ces derniers temps à multiplier les contacts et les réalisations communes avec des associations professionnelles, comme l’ANREP1 ou l’ANAPSYpe2. Ces endroits nous apparaissaient comme de véritables viviers de connaissances, nés du métier, et qui pouvaient venir combler certains manques de notre formation, tant en termes de savoir-faire que de capacités à penser !

Ce qui est assez étonnant, en substance, c’est que plus ou moins inconsciemment, nous sommes un certain nombre à avoir intégré cette implication progressive dans un travail collectif à notre propre démarche individuelle de formation, alors que nous partions parfois de préoccupations qui pouvaient sembler « à ras les pâquerettes »… et sans que ces dimensions se clivent, mais au contraire en faisant en sorte qu’elles tissent un réseau de significations de plus en plus solide. Cela me semble un point important à souligner pour expliquer la pérennité de notre action. [...]

Quelles propositions feriez-vous en matière de formation ?

De mieux fixer quelques-uns des critères de ce à quoi notre formation universitaire devrait aboutir. Former oui, mais qui et à quoi ? Quels en seraient les principes-clefs ? Et qui peut en être garant ? À partir de là, éviter l’inféodation à un seul objectif, donc à un seul groupe d’acteurs : Recherche contre Professionnalisation, par exemple, ou l’inverse… et garantir une structure assez ouverte pour permettre une évaluation permanente des enseignements et un réajustement continu par tous ceux que la formation concerne !

Pour cela, dire en priorité aux enseignants qu’il leur faut apprendre à travailler avec d’autres, notamment avec les professionnels et avec les étudiants. [...]

Quel message développer auprès des professionnels ?

Comme représentants étudiants, nous avons pris l’option de demander que notre formation soit beaucoup plus conçue et réalisée avec le concours des psychologues praticiens. C’était un choix délibéré mais au moment où nous l’avons fait, nous étions quelques-uns à savoir que nous anticipions sur les préoccupations de la profession elle-même. Souhaitons que celle-ci soit aujourd’hui plus convaincue de son rôle dans la transmission… peut-être pas d’un savoir (encore que) mais au moins des éléments d’une identité. [...]

Aux professionnels, il revient d’apprendre à penser qu’ils doivent travailler à la formation de leurs futurs pairs, hors ou dans l’Université, et qu’ils ont la responsabilité particulièrement lourde de devoir le faire sans reproduire un enseignement de type universitaire. Pas plus dans la forme que dans le contenu. Cela exige maintenant un réel effort de réflexion et de formalisation à partir des pratiques. Je suis persuadé que c’est un des enjeux majeurs du développement de notre profession. [...]

Notes

1 Association nationale pour la recherche et l’étude en psychologie. 4 bis rue Châteaudun, 75009 Paris.

2 Association nationale des psychologues de la petite enfance. 83 rue Lamarck, 75018 Paris.

Citer cet article

Référence papier

« À Paris 7, structures articulées pour l’action étudiante », Canal Psy, 3 | 1993, 4-5.

Référence électronique

« À Paris 7, structures articulées pour l’action étudiante », Canal Psy [En ligne], 3 | 1993, mis en ligne le 20 mai 2021, consulté le 23 juillet 2025. URL : https://publications-prairial.fr/canalpsy/index.php?id=3109

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