Le soin des troubles psychotiques en institution

DOI : 10.35562/canalpsy.3277

p. 11-13

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Editor's notes

Le Dr Sassolas a assuré pendant une trentaine d’années les fonctions de psychiatre dans le cadre de l’Association « Santé mentale et communauté » dont il est aujourd’hui président.
Il a participé à la création d’un certain nombre de structures innovantes, en particulier à Villeurbanne : le Foyer du Cerisier, la Maison de la Baïsse, la Maison d’Accueil Psychothérapique, la Pension Le Florian, la structure Accueil-Liaison-Psychothérapie destinée aux prises en charge de suicidants.
Il est membre du Groupe Lyonnais de Psychanalyse Rhône-Alpes. Il assure la direction scientifique du « Cours sur les techniques de soin en psychiatrie de secteur » qui a lieu à Villeurbanne tous les deux ans, et dont les actes sont publiés aux Éditions ERES. La treizième session de ce cours s’est tenue du 28 au 31 mars 2006 sur le thème : « Conflits et conflictualité dans le soin psychique ».

Text

La remise en question de l’hôpital psychiatrique comme institution soignante dans les années 60 et 70 a été, dans tout le monde occidental, le préalable au renouveau de la psychiatrie. À cette époque où les psychiatres italiens obtenaient par voie législative sa fermeture, en France certains psychiatres – dont je suis – choisirent de lui tourner le dos, et d’inventer au jour le jour une pratique centrée sur la relation avec le patient, soit dans des consultations ambulatoires, soit à leur domicile.

L’intérêt des prises en charge institutionnelles

Au fil des années, la réflexion autant que l’expérience quotidienne m’ont amené à reconnaître la nécessité et l’intérêt de prises en charge institutionnelles au sein de petites structures. Renoncer à toute forme d’institution pour privilégier la seule relation verbale, ce serait ne pas tenir compte de la place particulière tenue par la réalité matérielle dans le fonctionnement mental psychotique. Les patients psychotiques entretiennent en effet avec la réalité extérieure une relation très particulière, et nous avons tout intérêt à tenir compte (et même à utiliser) cette particularité dans l’élaboration de notre stratégie de soins. La réalité a en effet pour eux une double fonction : celle de moyen de communication privilégié, celle de support de leur vie psychique extravasée dans le monde extérieur (dont les soignants font partie).

La réalité, vecteur de communication

Ce sont les troubles de la symbolisation qui sont à l’origine de cette particularité amenant le patient à utiliser la réalité – les objets, les actes – comme nous utilisons habituellement le langage, ensemble de symboles représentant ces réalités. Donc à communiquer avec autrui – et avec eux-mêmes – par le truchement de ces réalités qui deviennent les vecteurs essentiels de notre communication avec eux1. Si nous ne faisons pas l’effort de réviser, à la lumière de cette donnée de l’observation et de l’expérience clinique, notre manière de communiquer avec eux, nous pataugeons dans un perpétuel malentendu.

P.-C. Racamier a noté avec beaucoup de pertinence qu’un patient psychotique ne s’identifiera qu’à celui qui aura préalablement accepté de s’identifier à lui2. La même remarque vaut pour la communication : il ne parlera un jour notre langue – celle dont les vecteurs sont les mots, les symboles – que si nous avons au préalable accepté de parler aussi la sienne, dont les vecteurs sont les actes et les choses. Parler sa langue, c’est observer et comprendre notre relation avec lui en la regardant de son point de vue, et non du nôtre. Cela signifie d’une part, entendre les particularités de sa relation à la réalité, ses actes et ses comportements comme des messages dotés de sens et de cohérence (même si l’un comme l’autre pour l’instant nous échappent) et non comme des témoignages de sa folie ; d’autre part, voir nos actes et les réalités du dispositif soignant que nous lui proposons comme il les voit, c’est-à-dire comme des messages plus significatifs et plus parlants que nos paroles.

D’une certaine manière, il me semble que pour aborder les patients psychotiques il faut créer une situation dans laquelle ceux-ci se sentent libres d’associer des actes les uns aux autres – comme il est proposé aux patients névrotiques en psychothérapie de se laisser aller à associer les unes aux autres les pensées qui leur viennent à l’esprit.

La finalité soignante de toute vie institutionnelle

Évidemment, ce qui fait une institution, ce ne sont pas les murs qui la circonscrivent, mais la finalité pour laquelle elle existe et le cadre qui incarne cette finalité – cadre dont les soignants sont la partie la plus vivante. La finalité de nos institutions, c’est le soin psychique – pas le gardiennage, ni la normalisation des comportements, ni la protection de la société. Évidemment, parfois une institution doit faire face prioritairement à une de ces fonctions-là, ce qui l’amène à renoncer temporairement ou définitivement, partiellement ou totalement, au soin psychique.

Puisque notre vocation est le soin psychique, pour l’exercer il est nécessaire d’entrer psychiquement en relation avec ces personnes. Je ne parle pas seulement ici de contact social, de la rencontre d’individus – je parle de rencontre entre deux psychismes, le leur et le nôtre. Deux personnes peuvent se rencontrer souvent ou longtemps sans qu’il y ait pour autant une véritable rencontre psychique entre eux. Leur relation peut rester à un niveau opératoire, il y a entre elles, échange d’informations mais non échange intersubjectif.

Établir une communication entre deux psychismes

La séance classique de psychothérapie ou d’analyse est l’exemple type de communication psychique. Mais que faire lorsque la pathologie du patient ne permet pas cet échange intersubjectif, s’il le perçoit comme une stimulation psychique dangereuse ? Écoutez Winnicott dans son livre Jeu et réalité : « En psychothérapie, à quoi a-t-on affaire ? À deux personnes en train de jouer ensemble. Le corollaire sera donc que là où le jeu n’est pas possible, le travail du thérapeute vise à amener le patient d’un état où il n’est pas capable de jouer à un état où il est capable de le faire ». Ce jeu entre deux psychismes, voilà en effet l’objectif de notre rencontre avec ces patients. Le séjour dans nos structures est une tentative pour les amener de l’état où ils ne sont pas capables de jouer psychiquement avec nous à celui où ils seront capables de le faire.

Créer un climat de familiarité

Une des difficultés réside dans le fait que les troubles psychotiques, ou les graves carences narcissiques, dont souffrent les patients dont il s’agit ici, les amènent à vivre toute rencontre authentique avec un autre être humain comme une source potentielle de danger. C’est pourquoi le préalable à la création d’une rencontre intersubjective entre eux et nous est la création d’un certain climat de familiarité rendant la proximité moins inquiétante, moins dangereuse – qu’ils puissent nous reconnaître comme leurs semblables, et réciproquement. C’est là l’essentiel de la fonction d’accueil institutionnel. Ainsi toutes les situations de partage de la vie quotidienne dans l’institution sont l’occasion d’exercer cette fonction d’accueil, qu’il s’agisse d’une institution résidentielle ou d’une structure de jour. La charge de ceux qui l’exercent est de créer, à travers ces réalités partagées, ce climat de familiarité dont je viens de parler : faire que peu à peu le patient se sente à l’aise chez nous, et s’approprie progressivement cette maison jusqu’à la vivre comme sienne. Une fois créé ce climat de familiarité source de sécurité psychique, le jeu psychique entre eux et nous pourra se mettre en place.

Les défenses psychotiques

Mais beaucoup de difficultés nous attendent sur ce chemin-là, qui sont inhérentes aux modes de défense psychotique. Au-delà des symptômes présentés à tel ou tel moment par ces personnes – délires, hallucinations, repli autistique, troubles de la pensée, angoisses de morcellement, troubles du comportement, passages à l’acte suicidaires – c’est leur fonctionnement mental particulier que nous allons devoir rencontrer au quotidien. Fonctionnement d’autant plus particulier que son objectif est la réduction de la vie psychique à sa plus simple expression – extinction des affects, laminage des fantasmes, distorsion ou extinction des pensées et des souvenirs, dissolution de tout ce qui fait l’identité de chacun dans l’anonymat, la confusion, l’absence de sens, l’oubli. La vie psychique étant vécue par de tels patients non seulement comme un risque de souffrance mais aussi comme un danger mortel de destruction, les processus défensifs psychotiques cherchent à les en protéger, en falsifiant et en laminant son contenu par le déni jusqu’à le détruire, ou en l’éjectant au-dehors sous forme de délires, d’hallucinations ou de vécus de persécution.

À un niveau interpersonnel, chaque soignant est confronté à ces processus-là, et ce sont ses propres réactions psychiques à cette manière d’être qui vont constituer le fil d’Ariane lui permettant de ne pas se laisser égarer, et de rester en contact avec les affects, les pensées, les souvenirs, les désirs et les peurs véritables du patient, tenus à distance, falsifiés, projetés ou menacés de destruction par les artifices psychotiques.

Réalité extérieure et réalité intérieure

Le soignant psychiatrique est à la charnière de deux réalités : la réalité extérieure (j’emploie ce terme pour désigner tout ce qui est extérieur au patient), et la réalité intérieure, c’est-à-dire la vie psychique du patient. Ils ne peuvent être utiles aux patients psychotiques que s’ils y restent, et gardent sans cesse le contact avec ces deux parties de leur univers. En se maintenant sur cette frontière, ils constituent une véritable épine irritative psychique pour le patient, puisqu’ils se refusent à aller dans le sens des processus défensifs psychotiques qui escamotent toujours l’une ou l’autre de ces deux réalités.

Au niveau institutionnel, la difficulté est beaucoup plus grande, car les défenses psychotiques y agissent de façon plus difficilement repérable, et avec des effets plus massifs. Plus précisément, c’est sur le terrain institutionnel que va se jouer la problématique majeure que je viens d’évoquer, à savoir cette difficulté des patients psychotiques à concilier les exigences impérieuses et contradictoires de ces deux réalités : celles du monde extérieur dont l’institution fait partie, et qui n’en finit pas de résister durement à la toute-puissance de leurs désirs et de leurs fantasmes, et celles de leur vie psychique qu’ils ont besoin de neutraliser par le déni, la projection ou l’extinction. Notre travail, c’est non seulement de leur rappeler sans cesse – et pas seulement avec des mots – que ces deux réalités existent, mais de les aider à vivre leur coexistence, sans dénier l’une et sans détruire l’autre.

 

 

Laurence Chassard

La contamination de l’institution par le déni

Toute institution concernée par des patients psychotiques risque sans cesse d’être contaminée par le processus défensif le plus actif dans la psychose : le déni.

Déni de la réalité extérieure : l’institution est soumise aux mouvements psychiques anarchiques des patients qui ne respectent plus les obligations du cadre, les places et les rôles des uns et des autres deviennent confus, le fonctionnement devient chaotique, imprévisible, les relations avec tout ce qui est extérieur à la structure se détériorent ou s’amenuisent. Le symptôme majeur de cette contamination par le déni de la réalité est l’apparition puis la multiplication des passages à l’acte, des patients d’abord, de l’institution ensuite, signant une défaillance du cadre dans sa fonction de protection contre l’omnipotence des uns et des autres.

Déni de la réalité intérieure : l’institution se rigidifie sur des procédures opératoires cloisonnées, les activités proposées aux patients deviennent une fin en soi et non un moyen d’atteindre leur vie psychique, le fonctionnel l’emporte sur le relationnel, les places respectives des soignants et des patients se figent dans des rôles. Le symptôme majeur de cette contamination par le déni de la vie psychique est l’apparition insidieuse d’un climat de répétition et d’ennui – que traduisent l’absentéisme des patients et la lassitude des soignants.

Il y a sans doute diverses manières d’aborder l’étude d’un fonctionnement institutionnel. Une voie d’approche intéressante est l’étude du type d’investissement que suscite, favorise, ou au contraire interdit ce fonctionnement. Le préalable à l’efficacité de n’importe quelle relation soignante est l’investissement de celle-ci par les deux parties : patient d’un côté, soignant ou dispositif institutionnel de l’autre. Voici une vérité élémentaire qu’il est plus que jamais nécessaire de rappeler : le premier ingrédient du soin, c’est l’investissement que les professionnels font de leur outil de travail, c’est-à-dire du dispositif soignant proposé au patient. Le deuxième, c’est l’investissement de ce même dispositif par le patient.

Le sentiment d’appartenance

Or les patients psychotiques ont un mode d’investissement très particulier, qui est de nature narcissique, nécessitant qu’ils puissent se reconnaître dans ce dispositif, ses lieux et ses rouages relationnels. Un service hospitalier peut difficilement susciter un tel investissement, il est trop hétérogène à ceux qu’il reçoit : dans son fonctionnement, l’accent est mis sur ce qui différencie les uns, venus subir des soins, et les autres qui sont là pour les leur donner – et non pas sur les points communs pouvant permettre aux uns de s’identifier aux autres. À l’opposé, la grande qualité des structures intermédiaires comme les Communautés ou les clubs thérapeutiques, les Centres de crise, c’est de pouvoir être investies narcissiquement par leurs utilisateurs. Encore faut-il pour cela que leur fonctionnement ne soit pas rigidifié ou cloisonné comme celui des hôpitaux, et que pour cela soit évitée la mise à l’écart réciproque de la réalité quotidienne des soignants et de celle des patients.

Lorsque le fonctionnement institutionnel n’est pas trop hétérogène au fonctionnement psychique du patient et lui permet de se reconnaître en lui, cet investissement narcissique du dispositif par celui-ci va permettre l’instauration progressive en lui d’un sentiment d’appartenance à ce dispositif, vécu comme une instance idéalisée à laquelle il s’identifie. Une plus-value narcissique se dégage pour lui de cette appartenance. Une fois installé ce sentiment bénéfique d’appartenance, le travail thérapeutique va porter sur l’intégration progressive des déceptions successives que vont susciter les insuffisances réelles de cet objet idéalisé. Ce sentiment d’appartenance va permettre un début d’évocation et d’élaboration des conflits relationnels et intra-psychiques appartenant au registre de la symbiose, de la dépendance, de l’autonomie.

Le vécu d’appropriation

Mais cette confrontation du patient avec sa vie psychique sera beaucoup plus fructueuse si, de ce vécu d’appartenance, il peut passer à un vécu d’appropriation. C’est-à-dire si le fonctionnement du dispositif lui permet de vivre avec l’illusion que celui-ci lui appartient, qu’il en est même le créateur. Tous les fonctionnements institutionnels ne permettent pas l’installation de cette illusion créatrice, de ce vécu d’appropriation : ce n’est pourtant que lorsque celui-ci existe que les avatars de la vie institutionnelle deviennent significatifs pour le patient. Désormais il ne se contente plus de les subir, il les ressent comme autant d’événements qui le concernent. Un détour par la théorie est ici nécessaire pour mieux prendre la mesure de ce qui se joue dans de telles situations.

L’illusion créatrice selon Winnicott

C’est Winnicott qui a écrit les textes les plus pertinents sur l’illusion créatrice, et les notions dont je vais faire usage ici sont toutes extraites d’un livre que je ne me lasse pas de relire et dont je vous conseille vivement la lecture ou la relecture Jeu et réalité, dont la première édition française date de 1975.

Évoquant les premières semaines de la vie du petit être humain, Winnicott dit qu’au début la mère par une adaptation qui est presque à 100 %, permet au bébé d’avoir l’illusion que son sein à elle est une partie de lui, l’enfant. Le sein est pour ainsi dire sous le contrôle magique du bébé. La tâche ultime de la mère va être de désillusionner progressivement l’enfant, mais elle ne peut espérer réussir que si elle s’est d’abord montrée capable de donner des possibilités suffisantes d’illusion. En d’autres termes, le sein est créé et sans cesse recréé par l’enfant à partir de sa capacité d’aimer ou à partir de son besoin. Encore faut-il pour cela que la mère place le sein réel juste là où l’enfant est prêt à le créer, et au bon moment. Ce processus est valable évidemment pour les enfants non nourris au sein, et le mot sein désigne en fait l’ensemble des techniques de maternage.

C’est cela l’illusion créatrice, cette possibilité donnée au bébé par une mère attentive à ses besoins, de rencontrer au bon moment une réalité correspondant si bien à ses attentes qu’il a le sentiment de l’avoir lui-même créée. L’adaptation de la mère aux besoins du bébé, quand celle-ci est suffisamment bonne, donne à celui-ci l’illusion qu’une réalité extérieure existe et qu’elle correspond à sa propre capacité de créer. Il s’agit là d’une expérience fondatrice : dès sa naissance l’être humain est confronté au problème de la relation entre ce qui est objectivement perçu et ce qui est subjectivement conçu.

Les conditions d’apparition de l’illusion créatrice en institution

Comme le bébé a besoin de rencontrer au bon moment une réalité correspondant si bien à ses attentes qu’il a le sentiment de l’avoir lui-même créée, le patient a besoin que l’institution qui l’accueille corresponde si bien à ses attentes qu’il puisse avoir parfois le sentiment sinon de l’avoir lui-même créée, du moins d’être une pièce essentielle de son fonctionnement. Pour cela il est nécessaire que dans le fonctionnement institutionnel ne soient pas seulement prises en compte les défaillances et les souffrances qui ont rendu nécessaire ce recours institutionnel, mais aussi les compétences qui lui permettent d’y vivre et d’en tirer bénéfice.

Ce message n’est vraiment perçu par le patient que si des signes concrets lui montrent que l’institution a besoin de sa participation pour fonctionner – comme par exemple, dans les structures résidentielles de Villeurbanne, l’absence délibérée de soignants à demeure dans les unes, de personnel hôtelier dans les autres. Participation à la vie matérielle d’abord, mais participation relationnelle aussi : le refus des soignants de prendre en charge la vie quotidienne de chacun, de gérer leur vie relationnelle dans la maison comme à l’extérieur, d’intervenir systématiquement dans la poursuite de leur traitement médicamenteux, constitue un message agi adressé au patient, dont le contenu est clair : vous n’êtes pas que malade, vous êtes compétent pour remplir ces diverses tâches. Bien entendu, d’autres messages institutionnels sont nécessaires pour éviter que ce recours aux compétences de chacun soit vécu comme un abandon.

L’anticipation thérapeutique

Faire de cette participation du patient un des ingrédients indispensables au fonctionnement institutionnel, c’est mettre l’accent sur ses potentialités – même virtuelles. C’est donc anticiper ses progrès, c’est lui montrer que l’objet de notre investissement soignant n’est pas seulement lui, avec ses souffrances, ses insuffisances et ses compétences actuelles, mais aussi ses potentialités – c’est-à-dire ce qui à terme va lui permettre de se détourner de nous, de se passer de nous.

L’exercice de la sollicitude

Un des intérêts de cette attitude institutionnelle d’anticipation thérapeutique est de donner au patient la possibilité d’exercer, grâce au soutien du cadre, sa capacité de sollicitude, c’est-à-dire sa capacité à prendre soin de lui et des autres – sur le plan psychique comme sur le plan matériel. Cette possibilité de prendre soin de soi dément et modifie le vécu d’incapacité à se venir en aide à soi-même, souvent présent chez de tels patients, et qui constitue une blessure narcissique permanente, dommageable pour l’estime de soi, source d’auto-dépréciation et de vécu dépressif.

Quant à la possibilité de prendre soin des autres patients, elle donne à chacun l’occasion de vivre des attitudes bénéfiques de réparation que Melanie Klein et Harold Searles ont avec pertinence relié au vécu inconscient de culpabilité suscité par les fantasmes violents envers l’imago maternelle qui accompagnent tout mouvement vers la séparation et l’autonomie. Trop souvent les situations institutionnelles réservent aux seuls professionnels l’exercice de cette salutaire capacité de réparation – au détriment des patients qui en sont exclus alors qu’ils auraient tant besoin de pouvoir l’exercer !

Bibliography

La psychose à rebrousse-poil, ERES, 1997.

Les soins psychiques confrontés aux ruptures du lien social, ouvrage collectif, ERES, 1997.

Le groupe soignant, des liens et des repères, ouvrage collectif, ERES, 1999.

Les portes du soin en psychiatrie, ouvrage collectif, ERES, 2002.

Malaise dans la psychiatrie, ouvrage collectif, ERES, 2004.

Éloge du risque dans le soin psychiatrique, ouvrage collectif, ERES, à paraître février 2006.

Notes

1 Hanna Segal, Délire et créativité. Éditions des femmes, Chapitre IV : « Notes sur la formation des symboles » (p. 93). Chapitre VIII : « Quelques aspects de l’analyse d’un schizophrène » (p. 180).

2 Paul-Claude Racamier, Les schizophrènes, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 1980.

Illustrations

References

Bibliographical reference

Marcel Sassolas, « Le soin des troubles psychotiques en institution », Canal Psy, 72 | 2006, 11-13.

Electronic reference

Marcel Sassolas, « Le soin des troubles psychotiques en institution », Canal Psy [Online], 72 | 2006, Online since 14 septembre 2021, connection on 22 juillet 2025. URL : https://publications-prairial.fr/canalpsy/index.php?id=3277

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Marcel Sassolas

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