La sécurité publique constitua un enjeu central lors de la dernière élection présidentielle mexicaine en 2018. Pendant la campagne qui mena Andrés Manuel López Obrador (dit AMLO), figure de la gauche, à la présidence du pays, celui-ci proposait une nouvelle approche de la sécurité, promettant de « renvoyer les forces armées à leurs casernes et de les retirer de la rue12 ». Alors que ses prédécesseurs avaient fait le choix de l’intervention massive des forces armées dans la lutte contre l’insécurité, AMLO entendait centrer son approche sur une prise en compte des causes profondes de celle-ci, en particulier les causes sociales. Si le président et sa majorité parlementaire ont effectivement réorganisé en profondeur la sécurité publique pendant ce sextennat, ce n’est pourtant pas dans le sens d’un retrait de l’armée des rues.
La révision constitutionnelle de 20193 fut au cœur de cette réorganisation de la sécurité publique, définie à l’article 21 §9 de la Constitution mexicaine comme « une fonction de l’État assurée par la Fédération, les entités fédérées et les municipalités, dont les missions sont de préserver la vie, les libertés, l’intégrité et le patrimoine des personnes, ainsi que de contribuer à la construction et à la préservation de l’ordre public et de la paix sociale, conformément à ce que prévoient la Constitution et les lois en la matière ». Selon ce même article, « [l’]action des institutions de sécurité publique est régie par les principes de légalité, d’objectivité, d’efficacité, de professionnalisme, d’honnêteté et de respect des droits de l’homme reconnus par cette Constitution ».
La notion de sécurité publique se distingue de celles de sécurité intérieure et de sécurité nationale. Cette distinction présente des enjeux importants en droit mexicain. Si la sécurité publique vise en principe à protéger la population des atteintes aux droits individuels et à l’ordre public4, la notion de sécurité intérieure renvoie à une protection plus institutionnelle que personnelle, c’est-à-dire à la garantie du bon fonctionnement des institutions étatiques5. Elle s’inscrit au Mexique, dans le cadre d’un État confronté à d’importantes violences internes, qui se trouve dans une sorte de « zone grise » entre la guerre et la paix6. La notion de sécurité intérieure avait été définie dans la loi du même nom en 20177, qui fut intégralement censurée par la Cour suprême mexicaine8. La définition qui y était adoptée, à savoir « la condition nécessaire, garantie par l’État, à la sauvegarde de ses institutions, de sa population, à la garantie du développement national et au maintien de l’État de droit et de la gouvernementalité du territoire9 », a en effet été jugée trop large par la Cour, au regard de son empiètement sur celle de sécurité publique. La sécurité nationale, enfin, apparaît comme un domaine plus large et comprend à la fois la sécurité intérieure et la défense nationale, c’est-à-dire la protection contre les menaces extérieures10. Ce concept apparaît pour la première fois dans la Constitution mexicaine avec la révision de 2004, sous l’influence notamment de la doctrine états-unienne11.
La distinction a des incidences sur la répartition des compétences, qu’elle soit horizontale entre le pouvoir législatif et exécutif, ou verticale entre les différents échelons fédéraux. En effet, les compétences en matière de sécurité nationale, y compris la sécurité intérieure, sont réservées à l’échelon fédéral avec une participation du président12 et du Congrès13, alors que les missions de sécurité publique sont partagées entre différents organes de la Fédération, des États et des communes14. La légalité de l’intervention des forces armées dépend également de cette qualification. En principe, la sécurité publique est assurée par des autorités civiles et non militaires, comme le prévoient les paragraphes 9 et 10 de l’article 21 de la Constitution mexicaine. Cependant, le phénomène de militarisation de la sécurité publique amène les forces armées à intervenir de manière croissante dans ce domaine.
Ce phénomène n’est pas propre au Mexique : il s’observe dans d’autres pays d’Amérique latine confrontés au narcotrafic comme la Colombie15, mais également dans des pays européens, y compris la France, dans le contexte de lutte contre le terrorisme16. Cette militarisation fait l’objet de multiples recherches et suscite des inquiétudes, émanant à la fois de la société civile, de la doctrine et d’organisations internationales. Celles-ci pointent les risques d’atteintes à la protection des droits de l’homme, en particulier au Mexique où, malgré d’importants efforts constitutionnels17, les violations demeurent fréquentes, y compris de la part des institutions publiques.
C’est en réponse à ces craintes et aux critiques portées aux politiques sécuritaires de ses prédécesseurs qu’AMLO et son parti Morena (Movimiento de regeneración nacional), majoritaire au Congrès, ont proposé, dès 2018, de réformer en profondeur la sécurité. Le projet de réforme visait notamment à créer une Garde nationale (Guardia Nacional), dont la nature – civile ou militaire – prêtait initialement à débats. L’objectif était de disposer d’une institution plus adaptée que la police fédérale pour lutter contre le crime organisé, tout en limitant l’intervention des forces armées au sens strict dans cette mission. Une autre partie de la réforme autorisait, tout en l’encadrant, l’intervention des forces armées dans des tâches de sécurité publique. Enfin, deux nouveaux dispositifs pénaux furent créés : la détention provisoire officieuse (prisión preventiva oficiosa18), qui, contrairement à la détention provisoire justifiée (prisión preventiva justificada), est automatique dans certaines circonstances et l’extinction de domaine, qui consiste à supprimer la propriété sur certains biens liés à des crimes ou délits particuliers19. Ces deux aspects seront écartés ici, car ils ne concernent pas directement la militarisation de la sécurité publique.
La réforme de 2019 a fait l’objet d’importants débats au Mexique, tant lors des discussions qu’après son adoption. Selon le gouvernement, celle-ci permettait de limiter l’intervention des forces armées dans les tâches de sécurité publique, tout en répondant aux difficultés rencontrées par les corps civils traditionnels pour faire face au crime organisé. Pour ses opposants, elle amenait seulement à renforcer ou tout au moins entériner l’intervention des forces armées, directement ou indirectement, dans des missions de sécurité publique.
Alors que le mandat du président López Obrador s’achève, il semble intéressant de dresser un premier bilan des effets de la révision constitutionnelle de 2019 et des réformes de la sécurité publique qui l’ont complétée. L’objectif étant d’évaluer si ce nouveau droit de la sécurité a permis d’atteindre le but initialement affiché, à savoir la diminution de la militarisation et une meilleure garantie de la sécurité des habitants. La réforme peut ainsi être étudiée sous l’angle de l’effectivité du droit, en s’intéressant aux « effets, juridiques ou non, qu’elle engendre20 ». Pour mener à bien cette analyse et au regard de son approche comparatiste21, il est utile de replacer la réforme du droit dans le contexte historique, politique et juridique mexicain, en mobilisant des éléments de la science politique et de l’histoire récente. Afin d’évaluer les effets de la militarisation sur la réduction de l’insécurité – son but affiché – quelques données statistiques sont également utilisées, lesquelles visent plutôt à illustrer l’évolution de l’insécurité au Mexique qu’à apporter une évaluation chiffrée des effets de la réforme, ce qui sortirait du cadre de cette étude.
Ainsi, l’on constate que dans un premier temps, l’encadrement de la participation des forces armées aux missions de sécurité publique, qui visait à répondre aux écueils du passé, a globalement été salué (1.). Ce nouveau cadre n’a toutefois pas remis en cause le mouvement de militarisation de la sécurité publique, qui tend plutôt à se renforcer (2.).
1. Un encadrement salué de l’intervention des forces armées dans la sécurité publique
La réforme de 2019 est intervenue dans le contexte d’une situation sécuritaire problématique et du constat de l’inefficacité des politiques et du cadre juridique mis en place par les gouvernements précédents (1.1.). L’objectif affiché était ainsi d’encadrer l’intervention des forces armées dans la sécurité publique et portait une promesse d’apaisement (1.2.).
1.1. Le contexte de la réforme : une situation sécuritaire problématique
La réforme de 2019 s’inscrit dans le contexte d’une militarisation croissante des missions de sécurité publique par les gouvernements précédents, sans que celle-ci ne permette de contenir l’insécurité dans le pays.
Sur le plan politique, il faut noter que de 1917 – date de la révolution mexicaine et de l’adoption de l’actuelle Constitution – à 2000, le Mexique était gouverné par un même parti, le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI). Paradoxalement, la stabilité de ce pouvoir et la corruption existante contenaient dans une certaine mesure la montée de l’insécurité22. En 2000 eut lieu la première alternance politique, matérialisée par l’élection de Vicente Fox, chef du Parti d’action nationale (PAN), à la présidence de la République. Cette alternance, saluée pour le progrès démocratique qu’elle représentait, s’est également accompagnée d’une déstabilisation de la situation sécuritaire favorisée par la déstructuration des anciens réseaux de relations entre le crime organisé et la politique23. Cette montée de l’insécurité a incité les pouvoirs publics à chercher des solutions. Parmi celles-ci, le recours croissant aux forces armées, qui jouissent d’un pouvoir important dans les pays latino-américains24 et bénéficient d’une confiance assez élevée de la part des populations25.
C’est sous la présidence de Felipe Calderón (2006-2012) que s’opéra un réel tournant à ce sujet. Dès son élection, il déclara vouloir mener une « guerre contre la drogue ». Le 9 mai 2006, il adopta un décret présidentiel créant un corps spécial de l’armée et des forces aériennes, chargé de soutenir les forces policières dans la lutte contre la criminalité organisée, nommé Corps de soutien fédéral26. Ce corps de nature militaire, agissant sous les ordres du président de la République, dépendait en matière technique, opératoire et administrative du secrétariat de la Défense nationale (SEDENA, équivalent du ministère des Armées en France). Cela se solda par une intervention croissante de l’armée dans des missions liées à la vie quotidienne des individus, qui fut vivement critiquée dans le pays27. Loin de régler la question du narcotrafic, elle fut plutôt réputée responsable de l’augmentation de la violence, y compris envers des civils28.
Enfin, Enrique Peña Nieto, président de 2012 à 2018, avait déclaré vouloir s’écarter de cette rhétorique militaire et en finir avec la « guerre », afin d’entamer une désescalade de la violence. Pour autant, son mandat ne marqua pas de retrait de « l’armée des rues ». Malgré la création d’une Gendarmerie nationale, corps de nature civile appartenant à la police fédérale et chargé de lutter contre le crime organisé, les militaires conservèrent leurs fonctions dans des missions de sécurité publique29. Son mandat fut également marqué par une tentative de réforme de la sécurité à travers l’adoption de la loi de sécurité intérieure, qui amena la Cour suprême mexicaine à se prononcer sur le cadre constitutionnel de la sécurité et sur les limites de la participation des militaires à l’exercice de missions de sécurité publique30.
Censurée par la Cour dans le cadre d’un contrôle a posteriori de constitutionnalité, cette loi prévoyait l’intervention de l’armée dans des missions qu’elle qualifiait de « sécurité intérieure ». Il ne s’agissait donc pas en théorie de missions de sécurité publique, comme le précisait expressément la loi dans son article 18 §2. Pourtant, l’initiative eut pour effet de relancer le débat sur la sécurité publique. En effet, la distinction opérée par la loi entre sécurité publique et sécurité intérieure fut immédiatement questionnée, d’abord par la doctrine31, puis par la Cour suprême. Les critiques estimaient que la loi prévoyait en réalité l’intervention des forces armées dans des tâches de sécurité publique, telles que des investigations ou des détentions. Cet empiètement des militaires dans des fonctions civiles, normalement assurées par la police et le ministère public, n’était pas assorti de garanties suffisantes en matière de droits de l’homme32. Il était jugé d’autant plus problématique que le pouvoir exécutif dispose de compétences étendues pour assurer la sécurité intérieure – contrairement à la sécurité publique – et que ce domaine est largement protégé du contrôle juridictionnel33.
La Cour suprême mexicaine a confirmé cette analyse. Sa décision, dans l’action en inconstitutionnalité34 6/2018, permet de positionner la question dans le cadre constitutionnel du pays. Pour censurer l’intégralité de la loi, la Cour s’est fondée sur deux motifs principaux. D’une part, elle a estimé que la loi méconnaissait l’article 129 de la Constitution qui interdit la participation des forces armées à des missions non militaires en temps de paix. Elle a jugé que la distinction opérée dans la loi entre sécurité intérieure et sécurité publique était artificielle, dès lors qu’elle se fondait uniquement sur une répartition fonctionnelle des compétences35. Ainsi, la loi prévoyait de facto de conférer des tâches de sécurité publique aux forces armées, en les qualifiant à tort de missions de sécurité intérieure, car elles étaient prises en charge par ces mêmes forces armées. D’autre part, la Cour a estimé qu’en raison de cette mauvaise qualification juridique, le Congrès avait outrepassé ses compétences, car les domaines concernés par la loi n’entraient en réalité pas tous dans la catégorie de la sécurité nationale36. La Cour n’écarta cependant pas toute possibilité d’intervention des forces armées dans des missions liées à la sécurité publique. Elle posa ainsi trois critères à cette participation : l’intervention doit être exceptionnelle, en appui à celle des autorités civiles et temporaire37. Cette décision pose donc le cadre constitutionnel dans lequel s’inscrit la réforme de 2019. Elle justifie également le choix de la révision constitutionnelle, dès lors que la participation des forces armées aux tâches de sécurité publique – existante de facto38 – se fondait sur un cadre juridique insuffisant et était même contraire à la Constitution.
La réforme de 2019 s’inscrit également dans un contexte d’augmentation de l’insécurité dans le pays. Sans entrer dans le détail des chiffres – l’insécurité étant par ailleurs difficilement quantifiable – on peut toutefois donner quelques indicateurs qui incitent à penser que les politiques sécuritaires, y compris l’intervention des militaires dans la lutte contre le crime organisé, n’ont pas permis de juguler ce phénomène. En choisissant deux indicateurs – le sentiment d’insécurité et le taux d’homicides – on constate que si une légère amélioration a eu lieu entre 2011 et 2014, celle-ci n’a pas perduré par la suite, des niveaux inédits de violence ayant même été atteints à partir de cette date. En 2011 par exemple, 69,5 % de la population mexicaine déclarait se sentir en insécurité dans son État. En 2012, ce pourcentage était descendu à 66,6 %, pour ensuite entamer une hausse continue jusqu’à présent, avec un taux de 79,4 % à la fin de la présidence d’Enrique Peña Nieto39. Concernant le taux d’homicides, celui-ci était de 24 homicides pour 100 000 habitants en 2011, de 17 pour 100 000 en 2014 et de 29 pour 100 000 en 2016. Ces taux plaçaient le Mexique dans les dix pays au plus fort taux d’homicides du monde40. Par comparaison, la France déplorait 1,3 homicide pour 100 000 habitants sur la période 2018-202041. Si ces seuls éléments ne permettent pas de conclure de l’inefficacité de l’intervention des forces armées dans la lutte contre le crime organisé, ils révèlent toutefois son caractère insuffisant.
Enfin, l’armée pourrait avoir elle-même joué un rôle dans cette insécurité et participé à d’importantes violations des droits de l’homme. C’est en tout cas ce qu’indique le rapport du Groupe interdisciplinaire d’experts indépendants (GIEI), mandaté par la Commission interaméricaine des droits de l’homme pour enquêter sur l’affaire d’Ayotzinapa42. Cet évènement, qui concerne la disparition forcée de quarante-trois étudiants de l’école normale supérieure d’Ayotzinapa, le 26 septembre 2014, avait été entouré de nombreuses zones d’ombre quant à l’implication des différentes autorités – fédérales, locales, civiles, militaires – dans les crimes commis. Le rapport du GIEI avait en effet révélé la probable implication d’autorités fédérales, y compris la police et l’armée, dans la disparition des étudiants et leur livraison à des groupes criminels. Il ne s’agit pas du seul exemple à ce sujet, mais il permet d’illustrer l’un des enjeux de la militarisation de la sécurité publique au Mexique.
La réforme de 2019 s’inscrit ainsi dans un contexte de militarisation, de facto comme de jure, de la sécurité publique dans le pays, ainsi que de maintien, voire de croissance, de l’insécurité. En réponse, elle proposait de mieux encadrer l’intervention des forces armées.
1.2. Les promesses du nouveau cadre juridique : un encadrement de l’intervention des forces armées
Le gouvernement entama, dès 2018, une profonde réforme du système de sécurité publique. Celle-ci s’appuyait sur différents textes : des déclarations d’intention, une révision de la Constitution, puis un corpus législatif et réglementaire. Sur le fond, la réforme est particulièrement vaste : elle intègre aussi bien des questions opérationnelles que des mesures visant à lutter contre les causes sociales de l’insécurité.
Concernant les sources tout d’abord, celles-ci ont pris différentes formes. Le lancement de la réforme s’est matérialisé en premier lieu par une déclaration d’intention du président élu dans son Plan national pour la paix et la sécurité 2018-2024 du 14 novembre 201843. Bien que sans valeur juridique, le plan présente les objectifs qui ont servi de base aux réformes constitutionnelles et législatives. Ceux-ci sont regroupés en huit axes censés renforcer la paix et la sécurité au Mexique, parmi lesquels se trouvent par exemple l’amélioration des conditions sociales de la population (emploi, éducation, santé et bien-être), la promotion des droits de l’homme ou encore la recherche de la paix comme objectif de sécurité. Le dernier axe porte sur un « plan de sécurité publique », qui comprend trois sous-axes : repenser la sécurité nationale et réorienter le rôle des forces armées, créer une Garde nationale et renforcer la coordination régionale.
Ce plan a été suivi d’une proposition de révision constitutionnelle initiée par des députés du groupe parlementaire Morena le 20 novembre 201844. Dans l’exposé des motifs, la proposition initiale soulignait la nécessité d’encadrer l’intervention de l’armée, « pilier principal et le plus fiable pour la sécurité du pays », mais qui « manque d’un cadre légal spécifique et d’une formation institutionnelle adéquate pour participer aux tâches de sécurité publique »45. La révision intégrait ainsi la création d’un nouveau corps de sécurité, la Garde nationale et la réorientation des forces armées vers des tâches de sécurité publique46.
La Garde nationale existait déjà en tant que corps de réserve de l’armée dans la Constitution de 1857, mais n’opérait plus depuis le xxe siècle47. La proposition initiale de révision réinstituait ce corps, en le rattachant à l’État fédéral, mais sans préciser si sa nature était civile ou militaire. L’exposé des motifs entendait toutefois affirmer son caractère militaire, en s’appuyant sur les expériences étrangères (Garde civile espagnole, Gendarmerie française, Arme des carabiniers italienne, etc.) et sur des raisons pratiques, estimant que les moyens dont disposait déjà l’armée permettraient de répondre plus rapidement à l’urgence de la situation. Ainsi, la proposition prévoyait une institution hybride, répondant à la discipline militaire, composée de membres de la police comme de l’armée, ayant des attributions civiles. Cela suscita de vives critiques quant à la nature militaire de l’institution48. En conséquence, la proposition, modifiée après les débats parlementaires, insistait sur le caractère « civil, disciplinaire et professionnel » de cette institution49.
Ainsi, le décret final de modification de la Constitution50 est le fruit d’un compromis à l’issue des différentes étapes de révision. Pour être adoptée, une proposition de révision constitutionnelle doit recueillir deux tiers des votes des membres présents au Congrès (composé de la Chambre des députés et du Sénat), ainsi que l’accord de la majorité absolue des trente-deux législatures des États membres et de la ville de Mexico51. Il est intéressant de constater que si la proposition initiale avait fait l’objet de nombreuses critiques, la version finale, avec les modifications qui y ont été apportées, est parvenue à un large consensus52. En effet, l’accord final a obtenu la totalité des votes – à une voix près – au Congrès, ainsi que l’approbation de l’ensemble des trente-deux législatures des États53. Cela provenait notamment de la volonté de la majorité de conférer une plus grande légitimité à la réforme en raison de son caractère controversé54.
La révision constitutionnelle a été suivie de quatre lois visant à compléter le cadre juridique de la nouvelle organisation de la sécurité publique : la loi sur la Garde nationale55, la loi nationale sur le registre de détentions56, la loi générale sur le système national de sécurité publique57 ainsi que la loi nationale sur l’usage de la force58.
La Garde nationale fut ainsi conçue comme une institution de sécurité publique de caractère civil, rattachée au secrétariat de Sécurité et de protection citoyenne59. Sa coordination opérationnelle était toutefois partagée avec le secrétariat de la Défense nationale et celui de la Marine60. Sa fonction est d’assurer les missions de sécurité publique qui relèvent des compétences de la Fédération, ainsi que dans certains cas, de contribuer temporairement à l’exercice de celles à la charge des entités fédérales et municipales61. Son organisation est similaire à l’organisation militaire, avec à sa tête des chefs d’état-major issus de la Défense nationale, de l’armée et de la Marine62. Enfin, la loi prévoit l’obligation pour le président de la République d’informer annuellement le Sénat des activités de la Garde nationale et laisse une période de transition pour mettre en place l’institution et évaluer son efficacité63. L’objectif de cette organisation hybride est de remédier à l’état critique de la police fédérale, en sous-effectif et ne disposant pas selon le gouvernement des capacités et de la formation suffisantes pour faire face au crime organisé64. Ce choix était initialement considéré comme pragmatique et provisoire, dans un contexte particulièrement tendu.
Enfin, l’accord65 du 11 mai 2020 permet aux forces armées permanentes de participer, à titre exceptionnel et en complément de la Garde nationale, à des fonctions de sécurité publique dans ses domaines de compétence, et ce initialement pour une durée maximale de cinq ans66. Le texte rappelle l’obligation de respect des droits de l’homme dans l’action des forces armées. Cet accord fut présenté par le gouvernement comme un mal nécessaire pour organiser l’intervention des forces armées, déjà présentes de fait sur le terrain et pour s’assurer que celle-ci se fasse dans le respect du droit.
Le cadre juridique mis en place proposait donc d’encadrer l’intervention des forces armées dans la sécurité publique, d’une part en instituant un corps civil spécialement prévu à cet effet et d’autre part en précisant ses limites lorsqu’elle intervient dans un autre cadre. Il ne semble toutefois pas avoir tenu ses promesses, dès lors que les craintes liées à militarisation croissante de la sécurité publique semblent se révéler fondées.
2. Des craintes persistantes quant à la militarisation de la sécurité publique
Dès l’adoption de la réforme, l’une de ses principales critiques portait sur l’absence de remise en cause claire de la militarisation de la sécurité publique (2.1.). Le nouveau cadre juridique aurait à l’inverse entériné cette intervention, au risque de porter atteinte à la garantie de l’État de droit. À ce jour, la réforme ne semble en effet pas avoir tenu ses promesses : la militarisation a été accentuée, pour un résultat peu satisfaisant sur la situation sécuritaire du pays (2.2.). D’autant plus que les nouvelles modifications du cadre juridique intervenues depuis s’orientent plus encore vers la militarisation.
2.1. Des inquiétudes face à l’absence de remise en cause de la militarisation
Malgré la volonté affichée par le gouvernement de faire évoluer la rhétorique sécuritaire, plusieurs juristes et organisations de défense des droits de l’homme ont relevé que la réforme n’avait fait qu’accentuer la militarisation déjà en cours de la sécurité publique dans le pays. Selon eux, la Garde nationale, malgré son caractère civil, s’avère n’être qu’une institution militaire supplémentaire dans l’horizon de la sécurité. Par ailleurs, l’intégration dans le droit de l’intervention des forces armées au sens strict dans certaines tâches conduit à la légitimer67.
Tout d’abord, le caractère militaire de la Garde nationale, que l’on observait dès sa création, n’a fait que se renforcer depuis. Le juriste Sergio García Ramírez, qui semblait pourtant plutôt favorable à la réforme, reconnaissait en 2019 qu’elle était « évidemment, […] un corps majoritairement militaire, qui prédomine dans le panorama général de la police du pays68 ». Si beaucoup ont pu qualifier cette institution de corps militaire de facto69, c’est d’abord en raison de sa composition, majoritairement militaire. En 2019, 77 % de ses membres étaient issus des forces armées, à savoir de l’armée de terre ou de la Marine70. Par ailleurs, trente-et-une des trente-deux coordinations étatiques se trouvaient sous la direction d’un militaire, octroyant de fait un pouvoir important à ces derniers71. Cette composition a plusieurs incidences sur le fonctionnement de l’institution : non seulement la majorité de ses membres disposent d’une formation initiale militaire et non civile, mais ils continuent par ailleurs de dépendre administrativement des secrétariats chargés de la Défense nationale et de la Marine. Au-delà des seules ressources humaines, plusieurs infrastructures destinées à la Garde nationale sont fournies ou créées par des instances militaires72. Une fois encore, cela tend à placer la Garde nationale autant – voire plus – sous l’égide d’autorités militaires que d’autorités civiles. Ces aspects sont encore renforcés par un fonctionnement hiérarchisé et discipliné issu du milieu militaire, avec un commandant nommé par le président de la République73, des coordinations territoriales, étatiques et régionales, des unités et des quartiers généraux74. Enfin, la formation des nouveaux membres de la Garde se rapproche de celle des militaires plus que de celle des forces de police75.
La tentative de réforme de l’institution en 202276, invalidée par la Cour suprême77, témoigne de l’orientation vers un renforcement du caractère militaire de l’organisation. La révision de plusieurs textes encadrant la Garde nationale78 transférait la majorité des ressources humaines et matérielles de l’institution au secrétariat de la Défense nationale. La Cour suprême a invalidé ce transfert, dès lors qu’il méconnaissait le caractère civil de la sécurité publique reconnu par l’article 21 de la Constitution. Elle laissait un délai de huit mois aux autorités pour se conformer à la décision, ce qui amenait au 1er janvier 2024. Toutefois, l’application effective de la décision par le gouvernement n’est pas encore actée, le président ayant d’abord déclaré qu’il chercherait un accord au Congrès pour constitutionnaliser la réforme79. Début janvier 2024, il a toutefois indiqué « qu’il se conformerait à la décision de la Cour80 », sans que cela ne se soit pour l’instant concrétisé81.
Pour ce qui relève de la participation des forces armées, au sens strict, à des missions de sécurité publique, elle a également augmenté depuis l’adoption de la réforme de 2019. Les tâches de sécurité publique concernées par l’accord présidentiel82 sont nombreuses et intègrent notamment la prévention des délits, la sauvegarde de l’intégrité des personnes, l’exécution de mesures de détentions, des tâches de surveillance ou le traitement d’informations pour la prévention des délits83, missions traditionnellement partagées entre le ministère public et la police. Les forces mobilisées sont importantes et ont tendance à augmenter84. Cette participation, en principe provisoire, a été prolongée par un décret de novembre2022 modifiant les dispositions qui permettaient de déroger provisoirement à certaines dispositions constitutionnelles concernant la participation des forces armées à ces missions85. Ainsi, en vertu de l’article 5 transitoire de ce décret, elles disposent désormais de ces prérogatives jusqu’à 2028.
Il pèse par ailleurs encore des doutes sur la constitutionnalité de l’accord du 11 mai 2020. Un juge de district, saisi d’une demande d’amparo indirecto86 par l’organisation Mexico unido contra la delincuencia, a estimé que l’accord était inconstitutionnel, en ce qu’il méconnaissait l’article 129 de la Constitution tel qu’interprété par la Cour suprême dans sa jurisprudence87. La décision a été confirmée par le tribunal supérieur après un recours du gouvernement88. La Cour suprême, qui s’est prononcée dans une autre affaire sur la constitutionnalité de l’accord89, n’a pas entièrement réglé cette question. Saisie par la présidente de la Chambre des députés, la Cour devait principalement se prononcer sur la question de l’éventuel empiètement du président sur le pouvoir du Parlement par l’adoption de l’accord. La Cour a rejeté le recours, estimant que l’accord se conformait au décret constitutionnel cité précédemment90. La question de la constitutionnalité de la militarisation de la sécurité publique au Mexique reste toutefois posée et des affaires sont pendantes91.
La Cour interaméricaine des droits de l’homme encadre pourtant l’intervention des forces armées dans des missions de sécurité publique. Les critères d’intervention utilisés par la Cour suprême mexicaine92 sont ainsi inspirés des conditions posées par la jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIDH), issus de l’affaire Cabrera García y Montiel Flores v. México93, puis confirmés par des jurisprudences postérieures. Ainsi, la participation des forces armées dans des fonctions qui relèvent de la compétence des autorités civiles doit être extraordinaire, c’est-à-dire strictement nécessaire aux circonstances de l’espèce, subordonnée et complémentaire à l’action des corps de sécurité civile, régulée par des mécanismes légaux et des protocoles sur l’usage de la force et enfin contrôlée par des organismes civils compétents et indépendants. La Cour rappelle également que cette participation peut impliquer un risque pour les droits de l’homme et que les fonctions d’investigation de la police judiciaire doivent être à la charge des autorités civiles. Dans la décision Alvaro Espinoza v. Mexico du 28 novembre 2018, la CIDH rappelle que l’intervention des forces armées dans la sécurité publique doit respecter les exigences de la Convention, cet emploi devant « être limité au maximum et répondre à de stricts critères d’exception pour confronter des situations de criminalité ou de violence interne ». Cette interprétation avait d’ailleurs amené la Cour à condamner le Mexique.
La CIDH comme la SCJN soulèvent en effet les risques de la militarisation. Ceux-ci proviennent d’abord de la formation des agents. Les militaires sont formés à « vaincre un ennemi94 » alors que la formation des policiers est supposée tournée vers la « protection et le contrôle des civils95 ». Comme le souligne François Sureau, « l’emploi de la force en vue de la destruction d’un ennemi “étranger” », rôle de l’armée, peut « dans l’intérêt général, transcender les catégories habituelles du droit, au sens où, par exemple, on peut passer une trêve temporaire, consentir à un armistice, à une cessation d’hostilité, avec l’ennemi étranger, alors qu’on n’imagine pas la police s’abstenir, pour telle raison d’opportunité, de pourchasser des criminels »96.
Ainsi, des inquiétudes pèsent sur la menace que ces évolutions représentent pour la protection des droits de l’homme reconnus constitutionnellement et internationalement. Selon Jaime Cárdenas Gracia : « L’idée d’un État où les forces armées jouent un rôle notable dans la défense de l’ordre constitutionnel et de la souveraineté est contradictoire avec la logique générale de l’État de droit constitutionnel et démocratique97 ». La guerre doit en effet être l’ultime recours dans un État démocratique et rester une exception. Le Comité des droits de l’homme de l’ONU, dans son rapport sur le Mexique de 2019, s’était également dit préoccupé par la militarisation de la sécurité publique98, enjoignant même à l’État de « démilitariser la Garde nationale ». Une lettre ouverte de nombreuses ONG, membres de l’Observatoire international des droits de l’homme au Mexique, dénonçait également la militarisation99.
Se pose également la question de la répartition des compétences et du contrôle des forces armées. Le secret qui entoure l’intervention militaire ainsi que le droit d’exception dont elle fait l’objet peuvent entraîner des problèmes quant à la transparence de leur action de maintien de la sécurité publique, qui est pourtant essentielle pour garantir l’État de droit. L’INAI, autorité de protection des données et de transparence de la vie publique mexicaine, a d’ailleurs exigé de la Garde nationale qu’elle communique publiquement ses rapports sur l’usage de la force par ses membres100. Par ailleurs, la militarisation renforce le pouvoir exécutif par rapport au législatif, puisqu’il dispose de la Garde nationale et des forces armées, ce qui crée un déséquilibre entre les institutions.
Enfin, la limite temporelle de l’intervention des forces armées101 et l’examen régulier de l’efficacité de la Garde nationale ne constituent pas des garanties suffisantes pour éviter la militarisation. En effet, comme le note Jaime Cárdenas Gracia, malgré le délai de trois ans avant évaluation, le plus probable est que la Garde nationale se militarise et se maintienne indéfiniment102. D’autant plus que les forces armées chercheront probablement à conserver ce pouvoir103. Quoiqu’il en soit, si des moyens plus importants ne sont pas investis dans le fonctionnement des institutions civiles de sécurité, il est peu probable que le gouvernement puisse se passer des forces militaires pour sa politique de sécurité publique. Ces premières inquiétudes ont été renforcées par le bilan mitigé de la réforme.
2.2. Un bilan mitigé
Quelques années de recul ne suffisent pas à dresser un bilan complet des effets de la réforme sur la militarisation ou la réduction de l’insécurité. Elles permettent néanmoins d’observer l’orientation que prennent ces politiques et d’évaluer si les engagements pris ont été respectés. La Garde nationale a en effet été déployée dans l’ensemble du pays et ses moyens ont fortement augmenté depuis sa création. Mais force est de constater que depuis l’adoption de la réforme, la politique de sécurité publique a penché vers de plus en plus de militarisation, sans amélioration de la situation sécuritaire.
La Garde nationale et les forces armées sont intervenues dans plusieurs missions de sécurité publique, l’étendue de ces missions s’étant par ailleurs élargie. Aux tâches auparavant assurées par les forces armées s’ajoutèrent la lutte contre le vol de combustible, la surveillance des réseaux de distribution du pétrole, la distribution d’essence, de manuels scolaires et d’engrais, la surveillance de la frontière et la détention de migrants en transit vers les États-Unis. La Garde nationale et l’armée interviennent également dans la construction d’un nouvel aéroport civil et ont contribué à la distribution des aides pendant la pandémie de covid-19104. Récemment, l’intervention de la Garde nationale dans des opérations de contrôle migratoire a été fortement médiatisée, notamment en raison de l’usage de la force à l’encontre des migrants, d’autant plus que cette action s’écarte des missions pour lesquelles elle fut initialement créée105. Cette intervention fut par ailleurs condamnée par la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), autorité administrative indépendante de protection des droits de l’homme au Mexique106. Les militaires sont donc impliqués dans une série de domaines ne relevant pas des missions traditionnelles de l’armée. Amnesty International a même montré que le gouvernement actuel avait déployé plus de militaires dans les fonctions de sécurité publique que ses prédécesseurs107.
Cette diversité des tâches s’est accompagnée d’une augmentation des ressources. Au 1er janvier 2020, le budget assigné à la Garde nationale était de 3,84 milliards de pesos mexicains (équivalent à environ 165 millions d’euros). Par la suite, la Garde nationale se vit transférer des ressources de la part de la police fédérale, du secrétariat de Défense nationale et du secrétariat de la Marine, pour un montant total de 56,85 milliards de pesos (environ 2,5 milliards d’euros)108. Ce transfert s’est inscrit dans le cadre de l’absorption de la police fédérale par la Garde nationale, laquelle fut dissoute officiellement le 31 décembre 2019.
Il est vrai que le sentiment d’insécurité et le taux d’homicide ont légèrement baissé dans le pays depuis 2018, mais ils restent particulièrement élevés, y compris en comparaison à d’autres périodes au cours du xxie siècle. Le sentiment d’insécurité est ainsi passé de 79,4 % à 74,6 %109, et le nombre d’homicides de 29 à 25 pour 100 000 habitants110. Il n’est pas établi que la militarisation de la sécurité publique permettrait de réduire l’insécurité. Concernant l’idée selon laquelle la Garde nationale serait moins corrompue et plus fiable que les autres institutions de sécurité, elle n’a pas été démontrée dans les faits. En effet, les membres de la Garde nationale sont tout autant mis en cause dans des plaintes contre des violations des droits de l’homme dans l’exercice de leurs fonctions que ceux de l’armée ou de l’ancienne police fédérale. La CNDH a reçu 577 plaintes pour violations des droits de l’homme concernant les membres de la Garde nationale en 2022, ce qui en fait l’organisme de sécurité visé par le plus grand nombre de plaintes111. Ainsi, la mise en place de la Garde nationale n’a pas à ce jour permis d’éviter les violences commises par les institutions de sécurité dans le cadre de leur mission.
Par ailleurs, comme le démontrent les révisions présentées précédemment, le gouvernement ne semble pas revenir en arrière sur cette orientation. L’intention du gouvernement semble actuellement être de militariser la Garde nationale en révisant la Constitution pour outrepasser les décisions de la Cour suprême. Si cette réforme est menée à bien, la militarisation de la sécurité publique sera probablement entérinée dans le pays.
Face à ce mouvement, des voix s’élèvent pour proposer des solutions alternatives. Parmi elles, le renforcement des institutions policières civiles. C’est l’objet par exemple de l’initiative de Seguridad sin guerra, portée par plusieurs universitaires et personnalités publiques112. Cette solution est également plébiscitée par des juristes, comme Dante Jaime Haro-Reyes113. Le renforcement des autorités civiles pourrait également se traduire par la revalorisation des forces de police locales114. Enfin, Jaime Cárdenas Gracia propose différentes solutions, parmi lesquelles : établir un plan de pacification nationale, mieux protéger les droits économiques et sociaux, la prise en compte de leurs responsabilités en termes de sécurité publique par les instances qui en sont responsables, la constitution d’une Commission de la vérité pour rechercher les actes et omissions ayant impliqué des violations des droits de l’homme par des conduites civiles ou militaires et dépénaliser les délits liés à la drogue115.
Ainsi, la militarisation de la sécurité publique n’apparaît pas comme la seule voie possible pour lutter contre les problèmes de crime organisé que rencontre le Mexique. Plus encore, celle-ci semble avoir un effet néfaste sur la sécurité et la protection des droits de l’homme. Elle tend à éloigner le Mexique de la pacification de sa politique de sécurité, pourtant indispensable au renforcement de sa démocratie et à l’édification de son État de droit. On peut espérer que la justice contribuera à limiter ce phénomène, dans le respect du cadre constitutionnel qui octroie une place centrale aux droits de l’homme depuis la révision constitutionnelle de 2011, lesquels sont supposés irriguer l’ensemble du droit mexicain116.