La médiation en droit administratif colombien : ce que la loi ne pourrait pas faire…

DOI : 10.35562/droit-public-compare.662

Résumés

Bien que la médiation administrative soit prévue en droit colombien pour régler les conflits entre administrés et administrations, entre administrations, et même entre particuliers, ce mécanisme n’est suffisamment connu ni de la doctrine spécialisée ni des citoyens. Des réglementations en la matière ne sont intervenues que récemment. Alors que la sociologie du conflit montre un penchant traditionnel pour la juridictionnalisation de ce dernier, cet article discute le lent changement culturel, dans la société colombienne, tendant à l’utilisation d’autres moyens de résolution du « contentieux ». Aussi l’auteur propose-t-il de différencier les concepts de litige et de conflit, le dernier étant davantage propice à la médiation.

Administrative mediation is provided for in Colombian law to resolve conflicts between citizens and the administration, as well as conflicts between public authorities and even between individuals, but it is not a sufficiently well-known mechanism, not only by the specialized doctrine, but also by citizens. Regulations in this area have only recently taken place. While the sociology of conflict shows a traditional leaning for the judge, this article shows how a slow cultural change is taking place in Colombian society towards the use of other means of dispute resolution. Hence, the author proposes to distinguish between the concepts of litigation and conflict, the latter appearing to be more suitable for mediation.

Plan

Texte

Introduction

La médiation, en tant que mécanisme non juridictionnel de règlement des litiges, n’est pas une figure couramment utilisée en droit administratif colombien. Il ne s’agit pas là d’une quelconque déficience normative, mais d’une culture qui n’est pas, traditionnellement, favorable à ce genre de processus. Il existe néanmoins un dispositif légal, certes très limité, mais qui pourrait témoigner d’une certaine ouverture envers cet instrument. Ce développement timide s’explique par un phénomène plus large : l’essor d’un modèle juridictionnel de contrôle de l’activité administrative destiné à monopoliser le contentieux administratif1, qui s’est toutefois avéré défaillant ; face à la crise provoquée par la lenteur et le nombre cumulé d’affaires à trancher2, le modèle juridictionnel a fait l’objet de modifications organiques, processuelles, constantes et progressives ; autant de retouches d’un système clairement inapte à répondre à la demande croissante de justice3.

Dans ce contexte, les moyens non juridictionnels du contentieux administratif, tels que la conciliation et la médiation, connaissent, aujourd’hui, une lente progression ; certains apparaissent pour la première fois ; d’autres font l’objet d’adaptations ; d’autres encore sont redécouverts et peu à peu rétablis. Tel est le cas, notamment, de la fonction administrative de résolution des litiges par l’Administration4. Aussi, existe-t-il des raisons justifiant un parallèle entre l’activité contentieuse de l’Administration et la médiation administrative : d’une part, elles sont toutes deux des moyens d’accès à la justice, entendue de façon large et non pas uniquement comme synonyme de juridiction5. Pour cela, il est possible d’évoquer différentes voies ou systèmes de justice6. D’autre part, même si son étude initiale a été menée en partant du système juridictionnel, la doctrine spécialisée cherche à trouver une identité propre à ce moyen de justice7. Par conséquent, la médiation cherche à ne pas être perçue comme un moyen alternatif au juge, mais, comme un instrument de justice à part entière8. Pour la Cour Constitutionnelle colombienne, « des moyens tels que la médiation et la conciliation, bien plus que des mécanismes pour désencombrer le pouvoir judiciaire, sont des instruments favorisant un accès effectif à la justice, et qui visent à promouvoir une solution pacifique des conflits9 ». Or, il existe une claire différence entre l’activité contentieuse de l’Administration et la médiation administrative : cette dernière ne peut être conçue qu’à travers l’intervention d’un tiers face aux parties10, ce qui n’est pas le cas de l’activité contentieuse de l’Administration, dans laquelle, l’autorité peut être, à la fois, partie au litige et autorité chargée de sa résolution.

Grâce au développement de ces autres moyens de justice, il est possible de relativiser l’assimilation traditionnelle entre juridiction et contentieux (substituer ainsi l’expression « procédure administrative contentieuse » à celle de « procédure administrative juridictionnelle » ; ou encore celle de « recours contentieux » à celle de « recours juridictionnel »). Dans un effort de définition réelle du contentieux administratif, le panorama des horizons du contentieux a ainsi permis de le diviser en deux grandes catégories11 : d’un côté, le contentieux administratif juridictionnel et, d’un autre côté, le contentieux administratif non juridictionnel, qui renferme tant celui réglé directement par l’Administration dans l’exercice de sa fonction administrative (activité contentieuse de l’Administration), que celui qui est régi par l’« auto-composition ».

En droit colombien, la conciliation, la transaction, l’amiable composition, et la médiation sont des mécanismes proches, qui font partie de cette seconde catégorie. La proximité des notions est importante, parce que l’accord de conciliation et celui résultant de l’amiable composition ne peuvent porter que sur des affaires susceptibles de transaction12 ; de plus, la loi dispose que la décision de l’amiable compositeur possède les mêmes effets qu’une transaction13. De même, la médiation peut conduire à la conclusion d’une transaction.

Cette proximité conceptuelle n’empêche néanmoins pas leur définition par le droit positif colombien, à l’exception notable de la médiation. D’une part, la conciliation est un moyen de résolution des litiges dans lequel, les parties s’accordent elles-mêmes sur la résolution définitive du contentieux, via l’intervention d’un tiers dénommé « conciliateur », qui leur propose des formules d’arrangement à l’amiable14. D’autre part, la transaction est un type de contrat défini à l’article 1625 du Code civil, permettant l’extinction des obligations. Selon l’article 2469 du même Code, il s’agit d’un accord par lequel les parties règlent un litige existant ou en préviennent la naissance. Enfin, l’amiable composition est définie par la loi comme un mécanisme de résolution des litiges résultant d’un contrat (« contrat de composition15 »). Les parties confient ainsi la résolution du contentieux à un tiers, dénommé « amiable compositeur », dont la décision unilatérale a les mêmes effets qu’une transaction16. À la différence de l’arbitrage, la fonction qu’exerce l’amiable compositeur n’est pas de nature juridictionnelle.

Même si, traditionnellement, on englobe les moyens non juridictionnels de résolution du contentieux dans le concept de Modes Alternatifs de Résolution des Conflits (MARC), expression inspirée de celle de « Alternative Dispute Resolution » (ADR), en réalité, ces mécanismes ne sont pas tous conçus et aptes à la résolution des conflits ; la plupart ne résolvent que des litiges.

Cette affirmation requiert une explication : conflit et litige ne sont pas synonymes. Le conflit est un concept social, qui fait référence à une forme non apaisée de rapport humain et qui a différentes causes et solutions, qui n’ont pas nécessairement une consistance juridique. On parle notamment de conflit dans le couple17, au travail18, dans le milieu scolaire19 ou militaire20. Compte tenu de cette diversité, les moyens de résolution des conflits sont aussi variés : les différentes thérapies, le dialogue, etc. Certains éléments ou manifestations du conflit peuvent toutefois se transformer en litiges, en y intégrant des problèmes purement juridiques. Ainsi, la fonction du juge aux affaires familiales n’est pas de résoudre le conflit du couple, mais de trancher le litige concernant le divorce et la garde des enfants. Ainsi, souvent, la résolution du litige ne met pas un terme au conflit. De même, la fonction du conciliateur ne consiste pas à réconcilier, mais bien à concilier.

Or, dans la catégorie des instruments non juridictionnels de résolution du contentieux, la médiation est le seul moyen qui va « plus loin » en cherchant à résoudre les conflits, sans s’en tenir à trancher les litiges. Il s’agit là d’une spécificité. Par le recours à un tiers inspirant confiance aux parties en conflit, étant donné son impartialité et ses qualités (intellectuelles, morales, etc.), il s’agit d’un moyen de recomposition de la relation dégradée, de rétablissement d’un dialogue interrompu et de construction des bases de la relation future, afin d’éviter le retour du conflit ou l’émergence de nouvelles causes de ce dernier21. Dans ce contexte, le médiateur ne remplit pas sa fonction avec la seule célébration d’un accord entre les parties revêtu de la force de la chose jugée ; il accomplit aussi une fonction de vérification et d’accompagnement lors de l’exécution de l’accord. Voilà l’une des principales différences entre médiation et conciliation.

Partant de ce cadre conceptuel, cet article a pour objet de déterminer la place qu’occupe la médiation dans le droit administratif colombien. Pour cela, il ne traitera pas d’autres formes de médiation, telles que la médiation en matière pénale définie à l’article 523 du Code de procédure pénale comme « un mécanisme qui conçoit un espace institutionnel pour que la victime et son agresseur échangent des avis et exposent leurs points de vue afin que, par l’aide d’un médiateur neutre, celles-ci puissent résoudre le conflit résultant du délit22 ». Précisons seulement que cette médiation n’est possible que pour les délits d’une peine inférieure à cinq ans. L’accord ne peut porter que sur la réparation des victimes, la cessation du comportement ou la réalisation de travaux d’intérêt général, et il devra être pris en compte par le parquet au moment de l’exercice de l’action pénale.

Afin de déterminer la place de la médiation en droit administratif colombien, il est nécessaire de mentionner la tendance à légiférer sur le plan national. En effet, dans la culture juridique du pays, on croit naïvement à la capacité de la loi à provoquer des changements profonds de société, alors qu’en réalité, l’efficacité de nombreuses normes légales est très limitée. Ainsi, en dépit des quelques réglementations existantes (1) et des bienfaits que pourrait avoir le développement de la médiation en droit administratif colombien (2), l’absence d’une culture favorable à la médiation demeure la principale cause de son emploi rare (3). Elle « dicte » donc ce que la loi ne pourrait pas faire.

1. Une consécration légale limitée

La loi organique23 relative à l’administration de la justice renvoie à la loi ordinaire la prévision de « moyens alternatifs au procès, pour résoudre les conflits se présentant dans la société, et la détermination des cas où cette activité sera payante24 ». En ce sens, l’établissement d’un régime légal relatif à la médiation n’est pas une obligation, mais une simple faculté.

En droit positif colombien, il existe trois formes de médiation administrative : d’abord, celle concernant les conflits des administrés avec l’administration. Ensuite, la médiation administrative des conflits nés entre particuliers. Enfin, celle portant sur les conflits entre autorités publiques.

Concernant la médiation dans le cadre des conflits entre les administrés et l’Administration, il faut se référer à une autorité administrative indépendante, traditionnellement connue en droit comparé par sa fonction médiatrice, à savoir l’Ombudsman, dénommé « Défenseur du Peuple » à l’article 282 de la Constitution colombienne. Toutefois, et bien que la Colombie fasse partie des nombreux pays ayant adopté le modèle de l’ombudsman provenant des pays nordiques (comme c’est le cas en France, à travers l’ancien « Médiateur de la République25 » aujourd’hui élargi dans ses fonctions et dénommé « Défenseur des droits », ou encore en Espagne, à travers le « Défenseur du Peuple26 »), la médiation n’est pas la fonction principale ni caractéristique du « Défenseur colombien du peuple ». Il est vrai que la loi réglant ses attributions prévoit que ses délégués accomplissent une fonction de médiation dans les relations entre l’Administration et les administrés, en vue de la défense des droits humains27. Néanmoins, la doctrine considère que cette fonction permet seulement au Défenseur de saisir le juge en vue de protéger les droits des personnes28. Cette fonction n’est pas conçue comme un moyen de résolution des litiges, mais davantage comme un instrument de résolution des conflits sociaux. Selon la doctrine, « la fonction de médiation du Défenseur se limite, principalement, aux affaires dépourvues de consistance juridique, car sa finalité ne consiste pas en la résolution d’un litige, qui est le propre du procès, mais en la résolution de conflits de nature sociale29 ». Il s’agit, surtout, d’un instrument supplémentaire renforçant l’effectivité de la défense des droits humains, et c’est pour cela que cette médiation a été mise en œuvre notamment dans le milieu carcéral30 ainsi que dans le cadre des écoles, afin de lutter contre le harcèlement31.

Or, cette fonction médiatrice est peu connue et, surtout, elle ne concerne pas des affaires susceptibles d’être portées devant le juge administratif colombien32.

La médiation administrative mise en œuvre dans les conflits entre particuliers est confiée aux policiers depuis la loi no 1801 de 2016, elle-même modifiée par la loi no 2220 de 2022 : il s’agit d’une alternative à l’imposition de mesures unilatérales, contraignantes et coercitives, telles que les amendes, pour les conflits entre des administrés, à l’exclusion des droits et des biens dont ils n’ont pas la libre disposition33. La médiation policière n’est donc pas possible en matière d’urbanisme, d’environnement, d’ordre public sanitaire, d’espace public, d’ordre public économique, de liberté de circulation, dans les rapports avec les autorités, ou en ce qui concerne l’intégrité des enfants et des adolescents, l’exercice de la prostitution et le droit de réunion34. La loi dispose, également, que cette fonction médiatrice peut aussi être exercée par des conciliateurs35. L’accord entre les personnes privées ne revêt pas la force de chose jugée36 et, dès lors, l’inexécution des obligations fera l’objet de procédures ordinaires se rattachant aux infractions dénommées « comportements contraires à la coexistence sociale37 ».

Cette médiation policière relève de l’autorité même résultant de la fonction d’agent de police. Il est par conséquent logique que la loi la définisse comme étant dans la nature même de la fonction policière. Il n’existe pas d’études ou de données relatives à l’effectivité de cette forme de médiation.

Enfin, concernant les conflits entre les autorités relevant de l’Administration nationale, le 3e paragraphe de l’article 6 du décret-Loi no 4085 de 2011 dispose que l’Agence Nationale de Défense Juridique de l’État (ci-après : ANDJE) assure une fonction de médiation38. Cette nouvelle attribution n’a été consacrée qu’en 201539 sur le fondement suivant :

« Selon l’étude et le diagnostic élaborés par l’Agence Nationale de Défense Juridique de l’État, les conflits se nouant entre autorités publiques nationales représentent une charge tant administrative que budgétaire, pour celles-ci et pour la juridiction administrative. Ainsi, il revient à l’ANDJE de contribuer à la diminution de ces conflits par la voie de la médiation, afin que les autorités concluent des accords satisfaisants, permettant de surmonter leurs différends. Par cette fonction de médiation, l’ANDJE offrira à ces autorités un soutien expert, technique et impartial facilitant la résolution des conflits juridictionnels ou extra-juridictionnels se présentant devant elles. »

La réglementation prévoit l’existence d’une liste de médiateurs inscrits à l’ANDJE. Toutefois, la sélection de ces médiateurs n’a pas encore été effectuée à ce jour. Ainsi, présentement, ce sont les fonctionnaires de l’ANDJE qui exercent le rôle de médiateurs. Par ailleurs, le processus de médiation peut être initié par l’une des parties au conflit ou par l’ANDJE de oficio ; dans ce dernier cas, le consentement des parties est nécessaire. En outre, afin de formaliser l’acceptation du processus de médiation, les autorités administratives doivent obtenir l’accord favorable de leur « comité de conciliation40 ». Autre précision importante : le médiateur est tenu par un devoir de confidentialité, concernant le conflit et le processus de médiation. Dès lors, il est interdit d’enregistrer les discussions, les avis émis, les affirmations, ainsi que les propositions d’accord, sauf autorisation des parties ou s’il s’agit de documents publics.

Il convient également de mentionner que l’ANDJE n’engage pas sa responsabilité sur le résultat de la médiation ; la responsabilité du médiateur dépend, quant à elle, de son statut (fonctionnaire public ou agent contractuel). Cette réglementation nous paraît correcte, compte tenu du fait que le médiateur libéral n’exerce pas une fonction publique et que la médiation est entamée sur la base de l’autonomie de la volonté des parties41 : sa nature est donc contractuelle42. En effet, l’article 116 de la Constitution colombienne énumérant les particuliers administrant la justice ne mentionne que les conciliateurs et les arbitres ; son article 246 évoque les juges de paix. À partir de ces données constitutionnelles, il est possible de soutenir que les médiateurs ne sont pas des particuliers exerçant la fonction juridictionnelle43. « Ce sont des citoyens parmi les citoyens44 ».

Enfin, le décret prévoit que le résultat de la médiation peut se matérialiser par un acte ou un contrat, selon la législation en vigueur, qui doit prévoir les obligations des parties, ainsi que les conditions de son exécution. De même, l’inexécution de l’accord engage la responsabilité contractuelle des parties. En général, l’accord de médiation consiste en un contrat de transaction portant titre exécutoire et relevant du droit civil, qui prévoit un effet équivalent à celui de la chose jugée45. Enfin, comme tout accord, celui mettant fin à un litige avec une autorité administrative doit respecter l’ordonnancement juridique et reposer sur un support probatoire suffisant46, sans porter préjudice au patrimoine public.

La portée de cette réglementation est limitée. Tout d’abord, elle ne concerne que la médiation entre autorités de l’Administration nationale, même si, par sa nature contractuelle, elle pourrait être utilisée dans des conflits avec des autorités locales. Ensuite, elle n’encadre pas le déroulement de la médiation, ce qui est en soi favorable à la liberté des parties. Cette liberté contribue à l’effectivité de la médiation. Enfin, de façon expresse, la réglementation dispose que le déclenchement de la médiation n’interrompt pas les délais de prescription, ni de caducité de l’action en justice. De même, la médiation n’interrompt pas les procès en cours. Cette prévision normative est étrange, car elle met en péril l’accès au juge pour les autorités ayant recours à la médiation et, par conséquent, elle a un effet dissuasif tout en remettant en cause l’efficacité du mécanisme. « La médiation requiert […] un certain temps : le temps nécessaire pour écouter et formuler les questions subtiles permettant de (ré) créer le lien47 ». En droit colombien, la suspension des délais d’action en justice ne pourrait être introduite que par le législateur48. Or, pour l’instant, la question demeure réglée par le niveau réglementaire.

Certes, on pourrait affirmer que la médiation est bien présente dans toutes les formes de conflit : avec les autorités publiques, entre particuliers et entre autorités publiques. Néanmoins, comme nous venons de le montrer, sa réglementation est très limitée et ces fonctions sont à la fois peu connues et peu étudiées. Ces obstacles à la médiation en droit administratif colombien contrastent avec les différents bienfaits qu’entraînerait le développement de cet instrument.

2. Les bienfaits théoriques du développement de la médiation en droit administratif colombien

Il n’est pas anodin de s’interroger sur l’utilité de développer la médiation en droit administratif colombien. S’agit-il d’une vraie nécessité ou d’une simple mode dépourvue de fondement, de raison et de poids ? De notre point de vue, les bienfaits de la médiation sont si importants qu’ils justifieraient, largement, son développement.

Tout d’abord et d’une façon générale, il est possible de voir dans la médiation un moyen d’améliorer les rapports sociaux49. Elle permet le dialogue direct entre les parties en conflit. Le processus de médiation ne s’intéresse pas seulement à la fin du conflit, mais met l’accent sur le processus et sur l’importance de surmonter ses causes profondes, afin d’éviter sa réitération. De surcroît, la médiation a une vertu spéciale sur les autres mécanismes non juridictionnels de résolution du contentieux administratif, tels que la conciliation et la transaction : elle permet de résoudre non seulement des conflits juridiques, mais, aussi, des conflits de nature politique. Ainsi, il est possible que la médiation conduise à l’élaboration de politiques publiques adaptées aux demandes citoyennes. Dans ce cadre, l’Administration pourrait s’engager à modifier des actes administratifs, à suspendre des procédures administratives, à ne pas exécuter un acte administratif ou encore à le mettre en œuvre sous d’autres formes.

Fort de ce champ bien plus large, il est possible de mettre en doute la pertinence des limitations générales que la loi impose à l’ensemble des moyens non juridictionnels de résolution du contentieux : la négociation ne peut porter que sur des affaires d’intérêt privé, ayant un contenu économique et dont les personnes concernées ont la libre disposition50. Seul le juge serait compétent pour se prononcer sur des litiges touchant à l’intérêt général, aux prérogatives de puissance publique51 et à la légalité52. Calquer ce type de limitations dans le cadre de la médiation méconnaîtrait la nature même de ce mécanisme, car il ne s’agit en aucun cas d’une concession faite au médiateur afin que celui-ci décide de l’issue du litige. Certes, la médiation ne peut conduire ni à la méconnaissance de l’ordonnancement juridique ni à la violation des normes d’ordre public, mais, dans le cadre la légalité, l’Administration possède d’importantes marges d’action découlant de son pouvoir discrétionnaire, qui apparaissent adaptées à la médiation. Renoncer à exercer des prérogatives de puissance publique, dans le cadre d’une médiation, ne saurait être interprété comme une incompétence négative.

Ensuite, en droit colombien, à la différence du droit français53, la médiation n’est pas prévue « dans le cadre » juridictionnel. Autrement dit, le juge n’a aucunement la faculté de renvoyer l’affaire devant un médiateur ; la médiation ne peut pas non plus constituer un préalable obligatoire à la saisine de la juridiction. Néanmoins, à notre sens, l’instauration de ce type de médiation contribuerait à la déjudiciarisation de la société : les conflits sociaux pourraient ne pas tous se terminer devant un juge, et réduire ainsi le discrédit de ce dernier dans la vie sociale54. La médiation contribuerait alors à la lutte contre l’engorgement judiciaire et à l’apaisement des rapports sociaux. C’est pour cette raison qu’il est nécessaire de prévoir les effets juridiques des accords résultant d’une telle médiation55.

Enfin, la médiation contribue, d’une façon certaine, à une meilleure Administration. Le processus de médiation améliore la motivation des actes administratifs et, par-là, renforce la compréhension de son activité et, sans doute, de sa légitimité sociale. La médiation permet aux autorités administratives d’identifier les problèmes de son activité, ce qui peut conduire à l’implémentation de correctifs ou à la formulation de politiques plus adaptées. Tout cela aboutit à l’amélioration de l’efficacité de l’activité administrative.

En outre, il ne faut pas voir dans la médiation une perte regrettable d’autorité pour l’Administration. Les rapports verticaux, d’autorité ou hiérarchiques traditionnels, d’imposition de la volonté administrative se montrent de plus en plus inadaptés à la finalité d’une action publique plus efficace. Les rapports d'autorité traditionnellement hiérarchiques sont de plus en plus inadaptés à une action publique efficace.

Malgré les avantages et bienfaits que ce mécanisme pourrait apporter au droit administratif colombien, il n’existe pas encore, dans la société colombienne, une culture favorable à la médiation. Pour l’instant, l’accès au juge semble donc être la voie prioritaire.

3. L’absence d’une culture favorable à la médiation

Ainsi que nous venons de le montrer, la régulation actuelle de la médiation administrative en droit colombien est limitée. Sa principale limitation tient au fait que, s’agissant des conflits entre les autorités administratives et les administrés, elle ne soit pas prévue de manière générale, mais uniquement comme l’un des instruments à disposition du Défenseur du Peuple pour la protection des droits humains. De plus, cette médiation peu connue ne suspend pas les délais pour agir en justice, et les effets juridiques d’un éventuel accord demeurent flous. La réglementation la plus accomplie a trait à la médiation entre autorités publiques confiée à l’ANDJE : elle est sans doute celle qui a le plus de chances de succès. On pourrait penser que ce penchant pour la médiation entre autorités publiques est logique, au vu de la facilité d’entamer le dialogue56. Dès lors, la médiation trouve un terrain fertile dans le contentieux intra-administratif.

La médiation ne requiert pas de dispositions normatives très précises. Au contraire, la doctrine considère que la faible réglementation normative est favorable à son développement, car elle laisse aux parties une plus grande marge quant au déroulement du processus57. Ainsi, il semble que la consécration de la médiation préalable obligatoire aurait des effets pervers et convertirait la médiation en une étape formelle d’accès au juge ; la médiation est, avant tout, un processus informel dérivé de l’autonomie de la volonté : son imposition obligatoire serait contraire à son essence58. Par ailleurs, à notre sens, le développement éventuel de la médiation administrative avec les administrés ne pourrait pas être confié à l’ANDJE car ce n’est pas une autorité administrative indépendante : elle n’offrirait ainsi pas de garantie d’impartialité à l’égard des particuliers. Sa dénomination même, en tant qu’agence de « Défense Juridique de l’État », nuirait aux apparences d’impartialité et sèmerait le doute dans l’esprit des administrés. Face à ce constat, on pourrait penser qu’il suffirait d’introduire une disposition légale et une réglementation semblable à celle de la médiation dans le contentieux intra-administratif.

Mais en réalité, de nos jours, il n’existe pas encore de culture favorable à la médiation administrative en Colombie, contrairement au droit de l’Union Européenne. Il suffit de constater que l’une des finalités de l’Union, consacrée par le Traité de Lisbonne en matière de coopération judiciaire internationale, consiste à développer les moyens alternatifs de résolution des litiges, ou encore se référer à la Directive du Parlement et du Conseil datant du 21 mai 2008. Le fait que la loi colombienne ne prévoit pas de mécanisme général de médiation administrative dans les conflits entre l’Administration et les administrés est un indice du manque d’intérêt social pour cette question. Comment l’expliquer ?

Tout d’abord, cette réticence dépasse la sphère du droit administratif. Dans l’histoire de la Colombie, les conflits armés n’étaient pas résolus, traditionnellement, par la voie de la médiation d’un pays tiers et impartial. Lors de la négociation de l’accord de paix avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie, le Mexique, Cuba, le Venezuela, le Chili, le Brésil et la Norvège se sont portés garants de la négociation, mais leur rôle ne consistait pas en une médiation. L’Allemagne, la Suisse, la Suède et l’Espagne, de leur côté, n’étaient que des observateurs. Cette donnée est importante, compte tenu du fait que la médiation était, à l’origine, un mécanisme utilisé dans ce genre de conflits.

Par ailleurs, si on considère la médiation comme une évolution de la conciliation59, le manque d’efficacité de cette dernière pourrait aussi expliquer l’absence du développement de la médiation. Bien que la conciliation soit couramment pratiquée en Colombie et qu’elle soit prévue en tant que condition préalable à l’accès au juge, son taux d’effectivité est très médiocre60.

En outre, la médiation exige la présence d’un tiers ayant des qualités spécifiques, non seulement d’un point de vue technique, mais aussi d’un point de vue moral (reconnaissance, respectabilité, etc.), car ces conditions permettent de convaincre les parties de l’impartialité et de la neutralité du tiers chargé de tisser un lien entre elles, et suite à la rupture ou la dégradation de leur relation. Ainsi, la méfiance envers le tiers ou la difficulté à sélectionner des personnes ou des institutions garantes de ces qualités peut aussi être l’une des causes de l’absence de recours à la médiation.

Enfin, pour tenter d’expliquer les causes possibles de cette culture, certes non hostile, mais peu favorable à la médiation, on pourrait penser au niveau de développement de la conscience sociale. Ainsi, la médiation est, avant tout, un « dispositif permettant de transformer les passions humaines, dans des moyens préférés d’expression socialement plus acceptés61 ». De ce point de vue, il paraît que pour la plupart des Colombiens, le combat devant le juge, avec des « gagnants » et des « perdants », condamnés à payer les frais du procès, serait un moyen plus « digne » et, surtout, plus en accord avec l’état actuel de la culture sociale du pays62.

Conclusion

La fonction médiatrice du Défenseur du Peuple existe depuis 1991, mais elle est peu connue. La médiation menée par l’Agence de Défense Juridique de l’État existe depuis 2011, mais elle n’a été réglementée qu’en 2015. La médiation policière est prévue depuis 2016, sans données disponibles. Cela montre que, dans le droit positif, la médiation est un mécanisme plutôt récent, même si on ne dispose pas d’études chiffrées et de statistiques montrant la progression de son utilisation. La déclaration de son inefficacité totale serait donc une conclusion hâtive. En effet, l’ouverture vers des issues non juridictionnelles au contentieux est un processus lent, mais qui a déjà été entamé. Dès lors, une conclusion prudente s’impose, fondée sur l’espoir d’un changement de culture nationale abandonnant, progressivement, son penchant pour les décisions juridictionnelles qui déclarent un « vainqueur » et un « vaincu ».

Il revient donc à la loi d’ouvrir la porte, d’une façon plus ample, à la médiation en droit administratif colombien. Il s’agirait d’instaurer une réglementation minimale prévoyant, dans le respect de la liberté des parties, les effets juridiques du processus de médiation, notamment la suspension des délais d’action en justice ainsi que les devoirs de confidentialité et d’impartialité du médiateur, et les effets juridiques de l’accord final. Les questions restantes, y compris celle relative au déroulement de la médiation, devraient relever de l’autonomie de la volonté des parties en conflit.

Voilà ce que la loi devrait faire. Néanmoins, ce que la loi ne pourrait pas faire, dans l’immédiat, à coups d’obligations légales et de sanctions, serait de transformer la culture juridique colombienne, en modifiant son penchant pour les juges, malgré leur lenteur à trancher les litiges et, très souvent, leur incapacité à régler les conflits…

Notes

1 « Afin d’atteindre une modernité juridique, il était nécessaire de surmonter des modèles considérés archaïques pour la résolution des litiges, afin que le pouvoir juridictionnel ne soit pas le seul chargé de cette fonction, dans le respect de toutes les garanties processuelles » : A. F. Ospina GarzÓn, « El contencioso administrativo no jurisdiccional : el despertar lento de la función contenciosa de la administración », in J. A. Pimiento (dir.), Las transformaciones de la administración pública y del derecho administrativo, t. III, Bogotá, éd. Universidad Externado de Colombia, 2019, p. 278. Dans le cadre de cet article, toutes les traductions de l’espagnol au français sont de l’auteur. Retour au texte

2 « Face à cette situation d’engorgement juridictionnel, l’idée selon laquelle les juges sont la seule réponse au contentieux commence à être mise en doute. De même, le dogme de la séparation idéale des pouvoirs, entendue comme monopole des fonctions, est aussi contesté et repéré comme l’une des causes de l’inactivité de l’État » : ibid., p. 287. Retour au texte

3 À partir de 1991, le droit colombien commence à tenter de mettre en place des voies non juridictionnelles pour résoudre des contentieux, notamment, la conciliation. En droit administratif colombien, la loi no 23 de 1991 a introduit, pour la première fois, la conciliation, l’arbitrage et l’amiable compositeur au sein du contentieux administratif. Retour au texte

4 A. F. Ospina Garzón, L’activité contentieuse de l’administration en droit français et colombien, Saarbrücken, éd. Universitaires Européennes, 2012 ; « La justicia administrativa o los “medios de control” para la paz », in La constitucionalización del derecho administrativo, t. II : El derecho administrativo para la paz, Bogotá, Universidad Externado de Colombia, 2016, p. 633-727 ; « El contencioso administrativo no jurisdiccional: el despertar… », op. cit., p. 261-331. Retour au texte

5 « Ces moyens alternatifs de résolution des conflits garantissent […] le droit d’accès à l’administration de la justice » : V. Peláez-Guitiérrez, « Alcance y límites de los mecanismos alternativos de solución de conflictos en el derecho administrativo : conciliación, transacción y amigable composición », in J. A. Pimiento (dir.), op. cit., p. 218. Or, certains auteurs continuent à distinguer la résolution du litige de la justice : « Dans la conciliation et la médiation, les personnes sont aidées par un tiers afin qu’elles-mêmes changent leurs visions et puissent résoudre le conflit. Ce sont les parties qui dessinent et réalisent les changements pour le futur. Ainsi, la finalité de la conciliation et de la médiation consiste en la résolution du conflit et non à faire justice » : H. Peña, Conciliación y mediación narrativa, teoría, práctica y reflexión, Bogotá, Tirant lo Blanch, 2021, p. 95. Retour au texte

6 Le droit d’accès à la justice concerne « la possibilité ouverte à toute personne, indépendamment de sa condition, d’avoir accès aux systèmes de justice disponibles » : Instituto Interamericano de Derechos Humanos (IIDH), Guía Informativa, XVIII Curso Interdisciplinario de Derechos Humanos, San José de Costa Rica, IIDH, 2000, p. 17. Retour au texte

7 « […] La médiation doit être conçue dans son contenu propre, indépendamment du contentieux juridictionnel » : R. Bousta, « La mediación administrativa “en el marco” jurisdiccional en el derecho francés : de una “alternativa” al juez, a una justicia alternativa », in Horizontes del Contencioso administrativo, t. I : El contencioso administrativo no jurisdiccional, Bogotá, Universidad Externado de Colombia, 2022, p. 557 (traduction de l’espagnol) ; « Quand l’activité contentieuse de l’Administration sera ajustée et que la fonction administrative de résolution des litiges montrera ses fruits, il ne sera plus nécessaire d’utiliser l’expression “contentieux administratif non juridictionnel” et on pourra parler du contentieux de l’Administration publique » : A. F. Ospina Garzón, « El contencioso administrativo no jurisdiccional : el despertar… », op. cit., p. 318. Retour au texte

8 « D’avantage que de contribuer à lutter contre l’encombrement de la justice, les MASC sont des voies effectives d’accès à la justice. Ils ne sont pas seulement alternatifs, mais complémentaires par rapport à la justice traditionnelle » : V. Peláez-Guitiérrez, « Alcance y límites », art. cit., p. 224. Retour au texte

9 Cour Constitutionnelle de la Colombie, arrêt no C-1195, 2001. Cet arrêt ne concerne pas la médiation, mais la conciliation préalable obligatoire. Retour au texte

10 L’article L.213-1 du Code français de justice administrative définit la médiation comme « tout processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par la juridiction ». Retour au texte

11 A. F. Ospina Garzón, « Introducción. La definición del contencioso administrativo », in Horizontes del contencioso…, op. cit., p. 14-17. Retour au texte

12 L’article 7 de la Loi no 2220 de 2022 relative au statut de la conciliation dispose que seules les affaires susceptibles de transaction peuvent être l’objet d’une conciliation. Retour au texte

13 Article 59 de la Loi no 1563 de 2012 relative au statut de l’arbitrage. Retour au texte

14 Cette définition est issue de l’article 3 de la Loi no 2220 de 2022 précitée. Retour au texte

15 Cour Constitutionnelle de la Colombie, Arrêt no T-017, 2005. Retour au texte

16 Article 59 de la Loi no 1563 de 2012 précitée. Retour au texte

17 M. Cavalié, « Gérer les conflits dans le couple : comment les désamorcer ? » , Coopleo.care, <https://www.coopleo.care/conflit-couple/# :~ :text =Adopter %20la %20bonne %20attitude %20pour,qui %20pourrait %20aggraver %20la %20situation>, consulté le 17 avril 2025. Retour au texte

18 RHalf, roberthalf.com, « Six méthodes pour une meilleure gestion des conflits au travail », mis en ligne 1er août 2024, <https://www.roberthalf.com/fr/fr/tendances/conseils-management/comment-gerer-le-conflit-au-travail-6-methodes# :~ :text =G %C3 %A9n %C3 %A9ralement %2C %20le %20conflit %20au %20travail,prendre %20parti %20dans %20un %20conflit>, consulté le 17 avril 2025. Retour au texte

19 P. Merle, « Le conflit dans l’école : question scolaire et question sociale », Le Télémaque, no 31, mai 2007, p. 51-62, <https://doi-org.ujm.idm.oclc.org/10.3917/tele.031.0051>, consulté le 17 avril 2025. Retour au texte

20 « Conflits armés dans le monde » : <https://www.unicef.fr/convention-droits-enfants/urgences/conflits-armes/>, consulté le 24/06/2025. Retour au texte

21 « En ce qui concerne la médiation administrative, elle peut être définie, comme un processus tertiaire, guidé par un tiers neutral et impartial, qui cherche à (ré) établir le lien avec l’Administration publique » : R. Bousta, La notion de médiation administrative, Paris, L’Harmattan, 2021, p. 548. Retour au texte

22 Cour Constitutionnelle de la Colombie, Arrêt no C-979 de 2005. Retour au texte

23 En droit colombien, on emploie plutôt l’expression « loi statutaire » pour désigner la catégorie de loi ayant un rang supérieur dans l’ordonnancement juridique, et qui peut déterminer la constitutionnalité des lois ordinaires. Les domaines réservés aux lois statutaires sont définis par la Constitution : notamment, les droits fondamentaux, le régime des partis politiques, l’exercice du droit à l’opposition politique, les mécanismes de participation démocratique, ainsi que l’administration de la justice. L’adoption des lois statutaires requiert des majorités qualifiées et, une fois adoptées, la Cour Constitutionnelle exerce un contrôle préalable. Retour au texte

24 Article 8 de la loi no 270 de 1996, modifié par l’article 3 de la loi no 1285 de 2009. Retour au texte

25 Loi du 3 janvier 1973. Retour au texte

26 Art. 54 de la Constitution de 1978. Retour au texte

27 L’article 13-11 du Décret-Loi no 25 de 2014 prévoit, parmi les fonctions des défenseurs délégués, « l’exercice de la médiation à l’égard des pétitions collectives présentées devant l’Administration par des organisations citoyennes ou populaires, si celles-ci le demandent, et celle entre des usagers du service public et les entreprises publiques ou privées chargées de sa prestation […] ». Retour au texte

28 « Dans les fonctions du Défenseur du peuple, on trouve la défense des citoyens, ce qui fait du Défenseur une espèce de médiateur entre ceux-ci et l’Administration publique. Pour accomplir cette fonction, le Défenseur doit avoir des moyens adéquats pour répondre aux demandes des citoyens […] Dans l’exercice de cette fonction, le Défenseur peut saisir la justice : exercer des actions pour la défense des droits collectifs, « actions populaires », ainsi que des actions pour la protection des droits fondamentaux « actions en tutelle » et l’habeas corpus dans la défense des personnes » : N. Osuna, « El defensor del pueblo », Credencial Historia, no 156, 2002. Retour au texte

29 M. E. Marín-Santoyo, « La mediación en el derecho administrativo colombiano : una oportunidad para la resolución de controversias », in Horizontes del Contencioso administrativo, op. cit., 2022, p. 592. Retour au texte

30 « La médiation qui est pratiquée par le Défenseur du Peuple est dérivée de sa fonction de défense des droits humains » : P. Ramos-rodríguez et al. (dir.), El papel mediador de la Defensoría del Pueblo de Colombia en los casos de alteración del orden interno en los centros de reclusión, Instituto Interamericano de derechos humanos (IIDH), 2005, [en ligne] <https://www.corteidh.or.cr/tablas/24209.pdf>, consulté le 24/06/2025. Retour au texte

31 M. Càrdenas et R. Torres, Previniendo y actuando frente al acoso escolar, Bogotá, Defensoría del Pueblo, 2015, [en ligne] <https://repositorio.defensoria.gov.co/server/api/core/bitstreams/284c04f0-577f-4aaf-9856-c0d2b0126b98/content>, consulté le 24/06/2025. Retour au texte

32 « Juridiction du Contentieux Administratif » est le nom exact donné par la Constitution colombienne. Il ne s’agit donc pas du pur équivalent d’une « juridiction administrative », telle qu’entendu en France, car elle est située, organiquement parlant, au sein du pouvoir judiciaire ; de plus, à aucun moment, il n’a été considéré que sa fonction soit de nature administrative. Selon Rivero, « la Colombie a eu l’intelligence de purger le système français de la vieille défiance de l’administration envers le juge judiciaire dont il garde encore trop de traces, qu’il s’agisse du caractère unilatéral de l’élévation du conflit positif ou de la complexité des solutions données au problème des questions préjudicielles ; simplifications bénéfiques et dont, par un phénomène de choc en retour, la France gagnerait à s’inspirer », J. Rivero, « Préface », in L. A. Luna Benitez (dir.), Lo contencioso administrativo, Bogotà, Librería del profesional, 1981, p. 7. Retour au texte

33 Art. 73 de la Loi no 2220 de 2022, modifiant l’art. 231 de la Loi no 1801 de 2016. Retour au texte

34 Art. 74 de la Loi no 2220 de 2022, modifiant l’art. 232 de la Loi no 1801 de 2016. Retour au texte

35 Art. 76 de la Loi no 2220 de 2022, modifiant l’art. 234 de la Loi no 1801 de 2016. Retour au texte

36 Au contraire, l’article 233 de la Loi no 1801 de 2016 disposait, dans sa version originale, que l’accord possédait les effets de la chose jugée. Retour au texte

37 Art. 77 de la Loi no 2220 de 2022, incluant un article 234A dans la Loi no 1801 de 2016. Retour au texte

38 Art. 6-3-XII du Décret-Loi no 4085 de 2011 relatif aux fonctions de l’ANDJE. Retour au texte

39 Décret no 2137 de 2015 modifiant le Décret réglementaire no 1069 de 2015 relatif au secteur de la justice. Néanmoins, cette attribution s’exerçait auparavant, selon le rapport d’activité de l’ANDJE : <https://www.defensajuridica.gov.co/gestion/informes/informes-gestion/Documents/informe_gestion_2012.pdf> consulté le 19/06/2025 Retour au texte

40 Le nom donné à cet organe est erroné, considérant que sa fonction ne se borne pas à la conciliation, mais, d’une façon plus large, et à l’intérieur de chaque autorité administrative, à la préparation de la ligne de défense de l’organe concerné en vue du contentieux. Retour au texte

41 L’article 59 de la loi no 1563 de 2012 fonde le recours à ce type de mécanismes sur l’autonomie de la volonté des parties. Retour au texte

42 En ce sens, on pourrait comparer la nature contractuelle de la médiation avec celle de l’amiable composition : T. O. Acosta et F. Ternera Barrios, « El contrato sui generis de amigable composición, una alternativa para la solución de controversias en los proyectos de infraestructura », Revista de Derecho Público, n° 35, juillet-déc. 2015, p. 10. Retour au texte

43 A contrario, voir : M. E. Marín-Santoyo, art. cit., p. 590. Retour au texte

44 J.-F. Six, Dinámica de la mediación, Barcelona, Paidós Ibérica, 1997, p. 159. Retour au texte

45 M. E. Marín-Santoyo, art. cit., p. 590. Retour au texte

46 Article 9 du Décret no 1716 de 2009. « Même si ces exigences ont l’air d’être contraires à la nature de la médiation, elles ne peuvent pas être méconnues dans l’accord mettant fin au conflit, afin d’éviter que l’accord soit privé d’effets ou qu’il soit contesté devant les juges », ibid. Retour au texte

47 R. Bousta, op. cit., p. 549. Retour au texte

48 Cour Constitutionnelle de la Colombie, arrêt no C-901/18. Retour au texte

49 « Il sera toujours mieux de résoudre les conflits de façon pacifique, par accord et rapidement, entre ceux qui y sont mêlés, au lieu d’attendre qu’un tiers leur impose une décision, après plusieurs années de procès » : V. Peláez-Gutiérrez, art. cit., p. 215. Retour au texte

50 Article 1er du Décret no 1716 de 2009. Retour au texte

51 J. Tornos Mas, “La mediación en el derecho administrativo”, in : <https://blogs.uoc.edu/edcp/wp-content/uploads/sites/24/2019/01/Joaquin-Tornos-Mas.pdf> consulté le 19 juin 2025 Retour au texte

52 « La résolution d’un conflit impliquant l’intérêt général est de la compétence exclusive du juge […] sur la légalité duquel on ne peut ni concilier ni transiger » : ibid., p. 226. Retour au texte

53 Loi de modernisation de la justice du xxie siècle, no 2016-1547, 18/11/2016, JORF du 19/11/2016, no 0269, texte no 1 (art. L.213-1 sq. du Code de Justice administrative) ; Décret relatif à la médiation dans les litiges relevant de la compétence du juge administratif, 18/04/2017, no 2017-566, JORF du 20/04/2017, no 0093, texte no 23. En Colombie, la médiation n’est pas un préalable obligatoire à la saisine du juge (voir, s’agissant de la France, le Décret du 25 mars 2022), et ce dernier n’a pas le pouvoir de renvoyer l’affaire devant un médiateur. Retour au texte

54 « Aujourd’hui, le pouvoir judiciaire est omniprésent dans la vie juridique des citoyens, ce qui a conduit à ce que le système ne fonctionne plus » : S. Barona Vilar, « Las ADR en la justicia del siglo XXI, en especial la mediación », Revista de Derecho, Universidad Católica del Norte, Año 18, no 1, 2011, p. 191. Retour au texte

55 « Il est important que la résolution du conflit ait un effet processuel car, dans le cas contraire, l’accord pourrait être méconnu et cela nuirait à sa finalité » : M. E. Marín-Santoyo, art. cit., p. 583. En droit français, l’article L 213-4 du Code de justice administrative prévoit l’homologation juridictionnelle de l’accord : R. Bousta, op. cit., p. 549 ; p. 563. Retour au texte

56 « Les fonctionnaires publics se sont confrontés aux mêmes problèmes lors du conflit et ils sont soumis aux mêmes contrôles. Ils ont tous la même fonction de protéger le patrimoine public » : M. E. Marín-Santoyo, art. cit., p. 594. Retour au texte

57 « L’excès de formalisme et de réglementation des moyens alternatifs de résolution des conflits n’est pas positif ; au contraire, cela les momifie, contribuant à établir des camisoles de force nuisant à leur efficacité » : V. Peláez-Gutiérrez, art. cit., p. 233-234. Retour au texte

58 S. Barona Vilar, art. cit., p. 207. Retour au texte

59 « La médiation est une évolution de la conciliation, car le conciliateur a besoin d’apprendre à être un bon médiateur, par des formations lui apprenant à rapprocher les parties, à travailler avec elles, à transformer le langage négatif en langage positif […]. » : ibid., p. 199. Retour au texte

60 « Entre 2011 et 2014, la moyenne des accords de conciliation rapportés au nombre de demandes de conciliation a été de 10,07 %. Cependant, ce pourcentage est moindre, car il ne tient pas compte des accords qui ont été effectivement homologués par le juge […]. Les chiffres montrent que la conciliation extrajudiciaire ne constitue pas une politique publique générale en faveur de la résolution des conflits dans le contentieux administratif. La conciliation n’est devenue qu’un mécanisme qui doit être déclenché pour que la requête soit recevable devant le juge » : V. Peláez-Guitiérrez, « Evaluación de treinta años de conciliación extrajudicial en asuntos de lo contencioso administrativo : un balance amargo en cuanto a su excesivo formalismo y a su eficacia », in Horizontes del Contencioso Administrativo, op. cit., p. 651 , p. 653. Retour au texte

61 F. Ben Mrad, Sociologie des pratiques de médiation, Entre principes et compétences, Paris, L’Harmattan, 2002, p. 183, cité par R. Bousta, op. cit. Retour au texte

62 Au contraire, en France, « cette évolution récente met en évidence le changement culturel qui est en train de se faire et qui est loin d’être complètement terminé » : ibid., p. 551. Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Andrés Fernando Ospina-Garzón, « La médiation en droit administratif colombien : ce que la loi ne pourrait pas faire… », Droit Public Comparé [En ligne], 4 | 2025, mis en ligne le 01 juillet 2025, consulté le 01 août 2025. URL : https://publications-prairial.fr/droit-public-compare/index.php?id=662

Auteur

Andrés Fernando Ospina-Garzón

Professeur en droit public – Université Externado de Colombia, Membre fondateur du réseau « RAICA »

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