Éditer le recueil Barbin

De Paris à Amsterdam, enquête sur une aventure éditoriale

DOI : 10.35562/pfl.82

p. 61-76

Plan

Texte

Le nom de Claude Barbin s’est imposé dans la tradition littéraire pour désigner le Recueil des plus belles pieces des poetes françois, tant anciens que modernes, depuis Villon jusqu’à M. de Benserade, anthologie poétique appelée communément « recueil Barbin ». Au cours des journées du colloque consacré à cet ouvrage, le nom du libraire a continué à se décliner, désignant le « colloque Barbin » puis les « actes Barbin » en préparation. Par glissement, le nom du libraire, seul contributeur attesté du recueil, s’est ainsi imposé pour désigner l’ouvrage et les travaux qui lui étaient associés.

La contribution effective de Barbin à la composition du recueil fait l’objet d’interrogations, tout comme celle de son fils Jules-Paul, parfois désigné comme un contributeur1. Si les formes exactes de leur implication sont incertaines, l’interrogation du catalogue de Claude Barbin démontre cependant que des recueils qu’il publie antérieurement sont mobilisés lors de la compilation des poèmes. De nombreuses logiques de « recyclage » sont à l’œuvre dans l’anthologie. Le premier à recycler est le libraire lui-même, qui puise dans son catalogue des textes déjà édités, voire réédités, en les proposant à la vente sous une forme nouvelle.

Par ailleurs, le nom de Claude Barbin est à rapprocher de celui de George Gallet, l’autre imprimeur-libraire du recueil pour l’édition dite B (voir l’introduction générale). Bien moins connu que celui de son homologue parisien, « George Gallet » est un nom associé à une entreprise d’imprimeurs lyonnais protestants réfugiés à Amsterdam à la fin du xviie siècle. Leur catalogue entretient des liens ténus avec celui de Barbin, mais leur choix de publier des ouvrages et des auteurs associés au libraire parisien, dont le recueil Barbin, s’inscrit surtout dans une stratégie éditoriale ambitieuse qui fera le succès commercial de leur firme. Leur copie du recueil, ainsi que la reprise de cette copie avec l’adresse de Barbin (état dit B’), réalisée certainement dans leurs ateliers, nous donne quelques indices sur les étapes d’élaboration de cet ouvrage, qu’ils ont largement contribué à diffuser.

Les recueils dans le recueil : l’anthologie au prisme du catalogue Barbin

On sait que Claude Barbin a été l’éditeur de grands poètes de son temps et la liste des ouvrages qu’il a publiés, telle que l’on peut la reconstituer à partir du CCfr2, le confirme. En miroir de son catalogue, on peut se demander si le Recueil des plus belles pieces des poetes françois, tant anciens que modernes, depuis Villon jusqu’à M. de Benserade ne serait pas, dans une certaine mesure, une compilation « des plus belles pieces » publiées par Barbin.

Cinquante-et-un poètes figurent dans le recueil de 1692. Nos recherches nous ont permis d’établir qu’au moins six d’entre eux étaient déjà présents dans le catalogue Barbin : Malherbe, Villedieu, La Sablière, Montreuil, Voiture et Sarrasin3. Entre 1659 et 1689, l’imprimeur-libraire a publié des recueils d’œuvres diverses de Malherbe, Voiture et Montreuil, un recueil de madrigaux de La Sablière, un recueil de poèmes de Sarrasin et plusieurs ouvrages de Mme de Villedieu – sans conteste la poétesse la plus présente dans sa production4 – dont des recueils de poèmes. Excepté Malherbe, les poètes présents au catalogue figurent tous à la fin de l’anthologie, dans les tomes quatre et cinq. Des dix derniers poètes représentés dans le recueil, cinq sont publiés par l’imprimeur-libraire, et deux le sont de leur vivant. On peut voir dans le choix de ces derniers poètes du recueil une stratégie de la part de l’imprimeur-libraire, qui tire une double utilité de la remobilisation de ce matériau littéraire. En faisant figurer dans le recueil des poètes déjà présents dans son catalogue, Claude Barbin valorise ces auteurs, leur redonne une actualité tout en les auréolant d’une autorité nouvelle, instituée par l’imprimeur-libraire lui-même, qui les inscrit dans la lignée des plus excellents poètes de langue française. L’intérêt publicitaire du recueil s’accompagne d’un intérêt pratique. Cette présence au catalogue facilite le travail de l’éditeur, qui peut éventuellement disposer d’un privilège sur cette œuvre, mais aussi celui du compilateur, qui a les textes à disposition.

Pour les six poètes déjà publiés par Barbin, les pièces retenues et la composition des sections nous permettent d’entrevoir le traitement réservé par le compilateur à ces recueils.

Malherbe est le plus ancien des poètes édités par Barbin. Il imprime sa correspondance et ses poésies, sans privilège, en 1659. À cette date, Claude Barbin est un jeune imprimeur-libraire, établi depuis 1656. Il s’agit d’une des toutes premières œuvres de son catalogue, et de la première œuvre poétique que nous avons retrouvée. Cette édition reproduit la première édition des Œuvres de Mre François de Malherbe, publiée par Chapelain en 1630. On y retrouve le discours liminaire de Godeau, et un agencement identique des pièces. Seule la pièce finale, Elle était jusqu’au nombril…, est un ajout, que la tradition éditoriale inclut dans les œuvres de Malherbe à partir de l’édition d’Antoine de Sommaville parue en 16425.

Des seize poèmes de Malherbe figurant dans le recueil Barbin, tous sont présents dans le recueil de 1659. L’ordre du recueil est presque entièrement respecté, deux poèmes consécutifs dans le premier recueil ont été inversés, Pour le Roy allant chastier la rebellion des Rochelois et A la reyne mère du Roy sur sa bienvenue en France. Cette inversion fait alterner dans le recueil Barbin les pièces épidictiques dédiées au roi Henri et à la reine mère, qui appartiennent respectivement aux livres 3 et 4. Le compilateur emprunte à chacun des livres du recueil, mais il ne sélectionne qu’une seule pièce dans le premier livre, consacré aux poèmes d’inspiration biblique, plus longs, et six poèmes dans le dernier, où l’on retrouve les ballets et les pièces funèbres.

Le compilateur procède de la même manière dans le cas des Œuvres de Monsieur de Montreuil6. Tout en respectant l’ordre de l’édition Barbin, il regroupe ensemble les madrigaux, qui composent la majorité des pièces retenues, et les épigrammes.

Pour la section consacrée à Voiture, seul un poème a une place qui diffère de l’ordre des pièces publiées par Claude Barbin, dans une édition collective de 16777. Il s’agit de l’ultime poème, le sonnet Il faut finir mes jours en l’amour d’Uranie, qui était parmi les premières pièces du recueil.

Dans le cas de La Sablière, on constate à nouveau que les pièces reprises dans le recueil suivent le même ordre que dans les Madrigaux de M.D.L.S., édition originale des œuvres du poète, réalisée par son fils en 1679, et la seule édition du xviie siècle8. Le choix dans la compilation de 1692 s’est fait de manière à peu près égale au sein des quatre livres de ce petit volume.

Les pièces de Villedieu sélectionnées proviennent toutes du catalogue Barbin. À l’exception de la fable La tourterelle et le ramier, extraite des Fables, ou Histoires allégoriques (Paris, C. Barbin, 1670) elles sont toutes extraites d’une édition aujourd’hui très rare des Œuvres mêlées de Villedieu publiée par Claude Barbin en 16749. Dans l’anthologie, La tourterelle et le ramier est insérée avant l’ultime poème de la section, l’Explication de la fable de Diane et d’Actéon. La glose poétique vient clore la série de poèmes, ce qui est aussi le cas dans la sélection de poèmes de Sarrasin, qui ne sont pas cette fois puisés dans le catalogue Barbin.

En 1666 paraissent chez Augustin Courbé Les œuvres de Monsieur Sarazin10. Ce recueil posthume édité par son ami Gilles Ménage, à qui Sarrasin a confié son œuvre avant sa mort, contient une sélection de ses pièces poétiques. Ménage ne publie que les pièces qu’il juge les plus estimables, celles de moindre importance sont écartées. En 1674, Claude Barbin publie de Nouvelles œuvres de Monsieur Sarasin11, recueil composé de pièces inédites12. Aucune de ces pièces publiées par Barbin ne figure dans l’anthologie. Le compilateur semble ne s’être appuyé que sur l’édition de Ménage de 1666, dans laquelle on retrouve tous les poèmes retenus. À l’exception de trois poèmes, il suit l’ordre établi par Ménage. Les poèmes sont regroupés en fonction de leurs formes – les épigrammes sont réunies, et le poème A Monsieur Esprit, sur un sonnet de M. de Benserade, seule « glose » retenue, est placé en fin de section.

À l’exception des poèmes de Sarrasin, toutes les pièces poétiques reproduites dans le recueil ont donc déjà été publiées par Claude Barbin. Les Œuvres mêlées de Villedieu sont rééditées à Lyon en 1691 par Thomas Amaulry, un libraire lié à Barbin13. Le recueil de Sarrasin est réédité en 1685 par Nicolas Le Gras, qui avait participé à l’édition collective des œuvres de Voiture citée plus haut. Barbin lui-même réédite les poèmes de Malherbe, avec les commentaires de Ménage, en 1689. Ces trois reprises témoignent d’une actualité éditoriale de ces poètes à la veille de la parution de l’anthologie. Ce recueil de recueils participe d’une stratégie éditoriale plus globale du libraire, qui réexploite ici très efficacement son catalogue d’œuvres poétiques. La publication du recueil s’insère dans un même temps dans une autre stratégie éditoriale tout aussi efficace, celle des imprimeurs hollandais du recueil qui font paraître la même année une copie et une contrefaçon de l’ouvrage.

« George Gallet », ou l’imprimerie Huguetan

Les recueils poétiques publiés par Claude Barbin sont régulièrement contrefaits en France ou copiés à l’étranger. Le Recueil des plus belles pieces des poëtes françois n’échappe pas à cette pratique, qui est en forte expansion à la fin du xviie siècle, alors que des familles d’imprimeurs-libraires huguenots français s’installent aux Pays-Bas et pillent les catalogues français. À partir de 1685, les impressions en français à l’étranger connaissent une hausse significative, à Amsterdam notamment, où le nombre d’entreprises de presse huguenotes, de la décennie 1680 à la décennie 1690, passe de 4 à 1114, sur un total de 139 à 149 imprimeurs-libraires établis dans la ville hollandaise. Parmi ces onze entreprises, la plus importante est celle des frères Huguetan, issus d’une famille d’imprimeurs lyonnais actifs dès le tout début du xvie siècle15. Outre les cinquante-cinq ouvrages imprimés sous leur nom et recensés par David Van den Linden16, les cent dix-neuf ouvrages imprimés sous le nom de George Gallet en font l’entreprise d’imprimeurs-libraires français la plus active d’Amsterdam durant la décennie 1690. Le nom de George Gallet sur l’édition hollandaise du recueil Barbin renvoie en effet à l’imprimerie des Huguetan. George Gallet a pu être présenté comme un simple pseudonyme employé par les trois frères. Il semble plutôt qu’il s’agissait d’un important collaborateur de leur imprimerie. Dans leur édition de l’Architecture générale de Vitruve de 1691 on lit ainsi : « à Amsterdam, aux dépens des Huguetan, et se vend chez George Gallet sur le Keiser Graft ». Sur la page de titre de l’édition hollandaise de 1701 de la Dissertation préliminaire ou prolégomènes sur la Bible, par Louis Ellies Du Pin, il est cette fois indiqué : « à Amsterdam, Chez George Gallet, Directeur de l’Imprimerie des Huguetan17 ».

Les Huguetan débutent leur entreprise amsterdamoise en 1691. On supposait jusqu’à présent qu’ils avaient immigré en 1685, ce qui laissait un vide de cinq ans entre leur départ de France et leur installation à Amsterdam. Le « Catalogus librorum » inséré dans leurs premières impressions hollandaises18 mentionne cependant des titres datés de cette période. Dix livres en latin auraient été publiés à « Lugduni » entre 1687 et 1690. Ces dates et cette localisation, si elles sont exactes, nous indiqueraient que les Huguetan auraient en fait poursuivi une activité en France jusqu’à l’installation de leur imprimerie à Amsterdam19. L’imprimerie familiale ferme en 1703, dernière année où l’on trouve des impressions au nom de George Gallet. Deux causes sont avancées pour expliquer l’arrêt de l’entreprise éditoriale : la mort, en 1702, de Marc, le frère aîné, et le départ de Jean-Henri, qui part vivre à Genève. Pierre, le frère cadet, aurait poursuivi seul l’activité jusqu’en 1705, année où s’achève une entreprise familiale vieille de deux siècles.

Pierre Bayle, dans une lettre à Vincent Minutoli du 28 août 1692, nous renseigne sur l’imprimerie des frères Huguetan, qui « font rouler incessament dix ou douze presses20 », ce qui constitue des moyens de production très importants pour l’époque, et explique en partie la domination exercée par la famille sur le marché du livre français à Amsterdam durant une décennie. Les machines seraient cependant inutiles sans un épais catalogue disponible pour impression. Dès 1691, les Huguetan s’emploient à constituer un fonds conséquent. On retrouve ce catalogue à la fin de certains exemplaires du premier volume du Recueil des plus belles pieces des poëtes françois21. Un an après le lancement de l’imprimerie, il contient déjà vingt-deux ouvrages22, auxquels s’ajoutent quelques textes en latin, présents dans des variantes antérieures du catalogue.

La comparaison des variantes du catalogue Huguetan permet d’isoler neuf ouvrages, constamment mentionnés, qui sont vraisemblablement les neuf premiers ouvrages imprimés à Amsterdam23. Ils apparaissent en tête des différentes versions, dans une liste d’ouvrages suivant l’ordre chronologique des parutions. Lorsqu’on parcourt ces ouvrages, seule leur présence au catalogue commun permet de saisir qu’ils proviennent bien de la même entreprise, alors que les noms d’imprimeurs-libraires varient. On trouve ainsi :

  • « Aux dépens des Huguetan » : le Cours entier de philosophie, ou système général selon les principes de Descartes, la Bibliothèque des auteurs ecclésiastiques, en 4 volumes, et le Dictionnaire mathématique d’Ozanam ;
  • Sous le nom de George Gallet : le Traité de l’âme et de la connaissance des bêtes… suivant les principes de Descartes ;
  • Sous les deux noms : L’Architecture générale de Vitruve, déjà mentionnée ;
  • Sous le nom de Jacques Ollier : Les Comédies de Terence, traduites en françois, avec des remarques, par Mme Dacier ;
  • Sous le nom de Jean Obié : la Nouvelle pratique de chirurgie médicale et raisonnée par Ettmuller ;
  • Sous le nom de Denis Thierry et Claude Barbin, la contrefaçon des Œuvres d’Horace, traduites en français, avec des notes et des remarques critiques sur tout l’ouvrage par M. Dacier, que les libraires parisiens publient en 1689 ;
  • Sans nom d’imprimeur : L’Art de jetter les bombes de Blondel24.

Les Huguetan sont coutumiers des pseudonymes. Parmi ces neuf premiers livres, trois seulement sont publiés sous leur nom. C’est cette proportion (un tiers d’ouvrages au nom d’Huguetan, deux tiers d’ouvrages sous nom d’emprunt) que l’on retrouve dans les chiffres de Linden – qui ne précise cependant pas s’il a pris en compte seulement le pseudonyme George Gallet ou tous les pseudonymes que nous venons de citer. Les noms de Jean Obié et Jacques Ollier n’ont, semble-t-il, pas été réutilisés25. Les premières impressions sous noms d’emprunt n’empêchent pas les frères Huguetan de diffuser, dès le début de leur entreprise, des contrefaçons, à commencer par la traduction d’Horace, une œuvre poétique précisément publiée par Claude Barbin26.

Cet échantillon d’ouvrages illustre la diversité du catalogue Huguetan. Des classiques de la littérature latine côtoient les ouvrages de Descartes et de Blondel, des auteurs dont les textes connaissent de multiples éditions dans la seconde moitié du xviie siècle. Le Dictionnaire mathématique d’Ozanam se distingue : on ne le retrouve dans aucune des bibliographies du mathématicien. Il pourrait donc s’agir de la première fausse attribution des imprimeurs, précédant l’attribution du recueil Barbin à Mme d’Aulnoy. L’attribution apparaît d’ailleurs comme l’élément unifiant du catalogue, dans lequel l’auteur de chaque ouvrage est renseigné. On ignore si les Huguetan ont constitué leur catalogue en s’appuyant sur des noms d’auteur connus, qui leur auraient garanti un succès commercial, ou si, inversement, ils ont attribué les ouvrages anonymes qu’ils avaient choisi de publier. La présence systématique d’un nom d’auteur, alors que les publications anonymes restaient courantes à l’époque, rend compte d’une stratégie commerciale faisant de l’auteur un argument de vente.

Parmi les neuf premiers ouvrages cités, deux avaient été publiés par Barbin, Les Comédies de Terence, traduites par Anne Dacier et Les Œuvres d’Horace latin et françois, avec des remarques, traduites par André Dacier. D’autres œuvres des Dacier publiées chez Barbin figurent par la suite dans le catalogue Huguetan : La Poétique d’Aristote d’André Dacier, Les comédies de Plaute latin et françois, avec des remarques d’Anne Dacier, imprimés à Amsterdam à la même période que le recueil Barbin. Les œuvres des Dacier présentes au catalogue Huguetan ne se limitent cependant pas aux œuvres éditées par Barbin. Les Huguetan ont publié une grande partie de leurs ouvrages, de 1691 à 1702, soit durant toute la durée de leur activité à Amsterdam27, et collaboraient directement avec le couple28. Il semble que les liens entre les catalogues Barbin et Huguetan se soient limités, d’une part, à ces deux auteurs, d’autre part, à l’impression du Recueil des plus belles pieces des poetes françois. Rien n’indique que les Huguetan et Barbin aient collaboré à l’occasion de ces impressions, ni même qu’ils aient été en contact, et il semble bien plutôt que l’impression hollandaise se soit faite sans l’accord de Barbin, qui aurait eu à imprimer en urgence le recueil pour faire face à cette concurrence inattendue. C’est ce dont témoignent les différents états du texte publié.

De l’édition parisienne à l’édition hollandaise

Nous avons pu constater, en parcourant les catalogues de Claude Barbin et des frères Huguetan, la cohérence de ces deux entreprises éditoriales et le rôle que joue le recueil dans un ensemble de stratégies économiques. Là où Barbin réutilise le matériau littéraire à sa disposition et achève, dans le recueil, un parcours de publication d’œuvres poétiques de son temps, les Huguetan sélectionnent l’ouvrage d’un libraire à succès, auquel ils ajoutent un nom d’auteur en vogue, pour compléter un catalogue diversifié. Après l’étude de leurs catalogues, il nous reste à envisager les deux éditions du recueil produites par ces deux imprimeries. Elles présentent des dissemblances textuelles diverses : des éléments ajoutés, modifiés ou manquants. Dans le cas du recueil, il nous paraît inexact de parler de « suppression » s’agissant des pièces manquantes dans certains exemplaires, car rien n’indique que les imprimeurs-libraires aient délibérément retiré des parties de l’ouvrage. Il semble plutôt, comme on va le voir, qu’ils aient eu à composer avec des états plus ou moins achevés des éléments constitutifs du recueil.

Des éditions morcelées

Dans le Dictionnaire historique de Bayle, la notice Benserade fait mention du Recueil des plus belles pieces des poëtes françois, que l’auteur a pu acquérir lors de son passage à Amsterdam en août 1692 : « Ce Recueil est en 5 tomes », précise l’annotateur du texte de Bayle. « L’auteur des Mémoires et Voyages d’Espagne l’a publié à Paris l’an 1692. Il fut d’abord contrefait à Amsterdam.29 » Outre la fausse attribution de l’édition hollandaise reprise ici, l’absence que souligne Bayle de la notice Benserade30 confirme qu’il évoque bien l’édition Huguetan. Ce témoignage est le seul que nous ayons trouvé en mesure de nous renseigner sur la chronologie de ces deux parutions. Les différences entre les deux éditions invitent à suivre la piste d’une publication antérieure de l’édition hollandaise, s’appuyant sur un état antérieur du texte.

Dans l’édition hollandaise neuf notices sont manquantes, celles de Dalibray, Cerisy, Villedieu, La Sablière, Montreuil, de Charleval, Saint-Pavin dans le tome 4, celles de Sarrasin et Benserade dans le tome 5. Une notice ne correspond pas à l’auteur des poèmes qui suivent, il s’agit de la notice « Daceuilly », qui est placée avant la section « D’Alibray ». Les neuf notices manquantes de l’édition hollandaise sont présentes dans tous les exemplaires de l’édition Barbin que nous avons été en mesure de consulter. Dans l’édition parisienne, la notice biographique « Habert » précède la section « Cerisy » et la notice « Daceuilly » précède la section « Chevalier de Cagny ». Quoique les titres divergent, l’œuvre poétique qui suit est bien celle des poètes évoqués dans les notices. Ce sont les deux seuls cas de divergence entre un titre de notice et un titre de section. Ces divergences peuvent être le signe d’une précipitation au moment de « boucler » le quatrième volume. L’imprimeur hollandais, qui avait au moins l’une des deux notices en sa possession, n’a pas su l’associer à la section poétique correspondante.

On remarque encore que parmi les notices manquantes, quatre sont celles d’auteurs publiés auparavant par Barbin (Villedieu, La Sablière, Montreuil, Sarrasin). Leur rédaction et leur insertion ont pu être repoussées à la fin de la composition du recueil. Cela a notamment pu être le cas des deux notices manquantes du tome 5, celle de Sarrasin, poète pour lequel on a fait tardivement le choix de ne pas puiser dans le catalogue mais dans l’ouvrage de Ménage, et celle de Benserade, dont la mort très récente et l’ampleur de l’œuvre à traiter – sa section est la plus conséquente – pourraient expliquer une rédaction de notice plus tardive.

L’absence de notices et les erreurs d’insertion dans l’édition hollandaise incitent ainsi à penser que les Huguetan ne disposaient pas d’une version aboutie du recueil, mais d’une épreuve intermédiaire, à laquelle il pouvait manquer certaines notices, qui étaient en cours de rédaction, ou d’impression. Dans un exemplaire du troisième volume de l’édition Barbin, conservé à la bibliothèque municipale de Lyon31, diverses notices sont reliées en fin de volume au lieu d’être insérées correctement avant les sections32, ce qui, d’une part, témoigne d’une urgence ou d’une négligence de la part de l’imprimeur parisien lui-même, qui s’est peut-être empressé de produire un ouvrage déjà en vente de l’autre côté de la frontière, et d’autre part, indique que les notices du troisième volume ont été imprimées sur des feuillets indépendants, insérables dans le corps de l’œuvre a posteriori. Dans un exemplaire du premier volume consulté à Toulouse33, l’absence de tranchefile nous a permis d’étudier la composition des premiers cahiers, et de remarquer que les trois premières notices (Villon, Marot et Saint-Gelais) sont là encore imprimées sur des feuillets indépendants.

Parmi les notices du quatrième volume, l’une d’elles retient notre attention, celle de « Madame de La Suze ». Comme dans la notice Habert, l’auteur de la notice apporte une correction à la fin de celle-ci :

On a appris depuis que l’on a imprimé ce Recueil, que la Piece commençant par ce Vers,
Unique sujet de ma flâme
Qui est une imitation du Pastor fido, qui a passé jusqu’icy sous le nom de Madame de la Suze, n’est point d’elle, mais de M. Regnier de l’Academie françoise.

Cette correction, sans doute tardive, n’apparaît que dans l’édition Barbin. Les Huguetan devaient disposer d’une version antérieure de cette notice, modifiée par la suite par un des contributeurs. Le poème en question est, lui, présent dans toutes les éditions. Comme dans le cas de la notice Habert, la correction évite à l’imprimeur d’apporter des modifications aux sections de poèmes, qui devaient déjà être imprimées.

Outre les notices citées, les imprimeurs hollandais ne disposent pas non plus de la table des matières, qu’ils reconstituent en se fiant aux titres erronés des sections, et en commettant une erreur de lecture flagrante. La table des matières indique en effet, toujours dans le quatrième volume, une section consacrée au poète « Vaudeville ». « Vaudeville » n’est, en fait, pas le titre d’une section désignant un poète, mais l’indication générique d’une sous-section des poèmes de Charleval. Cette erreur rend compte d’une méconnaissance, de la part du créateur de la table, du lexique littéraire, et sans doute de la langue française elle-même. On connaît en outre le manque d’application, très courant à l’époque, dans la réalisation des pages de table des matières. Elle nous renseigne enfin sur l’état du texte parvenu aux imprimeurs hollandais : ce dernier, s’il ne contenait pas de table, avait déjà des sections ordonnées, reliées entre elles, dans leur ordre définitif, que les ouvriers de l’imprimerie ont reproduit.

Deux autres notices manquent dans l’édition hollandaise du recueil, les notices Brébeuf et Tristan. À la différence des notices précédemment citées, elles sont aussi manquantes dans certains exemplaires de l’édition Barbin. Elles ne figurent effectivement que dans deux des quatre exemplaires du volume trois que nous avons pu consulter34. Il faudrait consulter d’autres exemplaires de l’édition Barbin pour déterminer si l’absence de ces deux notices est récurrente ou si elle ne s’observe que dans de rares exemplaires. Cette différence manifeste de contenu dans des recueils supposés identiques incite à reconsidérer la distinction établie entre les éditions du recueil à partir de leur lieu d’impression et de l’identité de l’imprimeur-libraire. En vérité, les variations au sein de ce qui est considéré comme une seule édition, sont multiples, notamment dans les exemplaires Barbin, où les erreurs dans l’insertion des notices varient d’un exemplaire à l’autre. L’imprimé constitue ainsi une trace, qui nous renseigne sur les différents états du texte et étapes de sa composition et de son impression. Faute d’épreuves, ces variations permettent d’entrevoir le travail de l’imprimeur, dont les erreurs et ajouts tardifs manifestent à nos yeux les divers impératifs du métier auxquels la production du livre est soumise.

Les titres du recueil

De Paris à Amsterdam, le recueil change de nom. De Recueil des plus belles pieces des poëtes françois, tant anciens que modernes, depuis Villon jusqu’à M. de Benserade il devient Recueil des plus belles pieces des poëtes françois, tant Anciens que Modernes, avec l’histoire de leur vie, par l’auteur des Mémoires et Voyage d’Espagne. C’est là la seule modification d’importance que les Huguetan apportent à l’ouvrage. Là encore, le choix des éditeurs, qui s’appuie sur une stratégie commerciale déjà observée dans le catalogue, est de mettre en avant un nom d’auteur. Pour le lecteur du xviie siècle, l’autrice désignée, Marie-Catherine d’Aulnoy, est associée au libraire Claude Barbin35. Les deux ouvrages cités, les Memoires de la cour d’Espagne et la Relation du voyage d’Espagne, sont en effet publiés à Paris, chez Claude Barbin, en 1690 et 1691. Cette actualité éditoriale française s’accompagne d’une actualité éditoriale hollandaise. En 1692, quatre ouvrages publiés à La Haye, chez deux éditeurs différents, lui sont attribués : deux éditions de l’Histoire de Jean de Bourbon, prince de Carency, par l’auteur des Mémoires et voyage d’Espagne, l’une chez Adrien Moetjens, l’autre chez Jean Alberts (l’ouvrage est publié la même année en France, cette fois chez Jean Guignard, et sans nom d’auteur), les Mémoires des avantures singulières de la cour de France par l’auteur de Voyage et Mémoires d’Espagne et une Histoire nouvelle de la cour d’Espagne, par l’auteur des Mémoires et voyage d’Espagne, toujours chez Jean Alberts. Ces deux dernières attributions sont, semble-t-il, fausses. Le recueil publié par les Huguetan porte à cinq le nombre d’éditions hollandaises attribuées à « l’auteur des Mémoires et Voyage d’Espagne » en 1692, et à trois le nombre d’attributions contestées. Les lecteurs francophones ne peuvent s’y tromper, la périphrase désigne de manière transparente Marie-Catherine d’Aulnoy. L’occurrence de l’expression dans les titres d’ouvrages témoigne d’un succès éditorial certain des ouvrages de l’autrice, succès dont les Huguetan tentent de tirer profit avec cette attribution surprenante. En effet, contrairement à leurs concurrents, qui associent le nom d’Aulnoy à des textes en lien avec ses véritables publications – des mémoires, relations de voyage, qui glissent parfois vers l’histoire secrète, et des contes – ils font d’elle l’autrice d’une anthologie poétique, genre très éloigné de sa bibliographie. La crédibilité de l’attribution importe moins que l’attrait du nom dans une stratégie de vente assez grossière, mais à laquelle des commentateurs ont pu se laisser prendre.

C’est le titre hollandais, et non le titre parisien, qui est reporté sur une autre version du recueil réalisée par les Huguetan, dite B’ (voir l’introduction du volume), qui porte elle l’adresse de Claude Barbin (alors que le contenu de l’édition est identique à celle parue sous le nom de Georges Gallet). S’agit-il là d’une négligence des contrefacteurs, qui modifient seulement l’adresse et le nom d’imprimeur sur la page de titre ? On peut en douter. Le maintien du titre hollandais a pu être un choix délibéré. L’attribution est en effet un argument de vente certain. Il faut cependant garder à l’esprit que les Huguetan n’étaient pas en possession de la version finale du recueil. Le sous-titre du recueil a pu être décidé tardivement – il n’est pas renseigné dans le privilège qui cite « Le recueil des plus belles Pieces des Poëtes François, tant anciens que modernes ». Selon cette hypothèse, les imprimeurs hollandais, faute d’un état achevé du texte, complètent plutôt qu’ils ne modifient ce titre.

En publiant le Recueil des plus belles pieces des poetes françois, les Huguetan réalisent un coup éditorial à la hauteur des ambitions de leur imprimerie. Ils ajoutent à leur catalogue déjà bien fourni une anthologie de poètes français des xvie et xviie siècles et y font entrer, en même temps qu’une cinquantaine de poètes, une autrice très en vogue. Cette parution leur permet de concurrencer les grands imprimeurs-libraires de Paris et de La Haye, et d’installer leur hégémonie sur le marché du livre français aux Pays-Bas, ainsi qu’en Europe. Le coup éditorial, pour Barbin, est aussi important, quoique amoindri par cette concurrence qui, quelques années plus tard, sera en partie la cause de sa ruine36. Ce sont là deux modes de fabrication du livre, deux logiques de marché qui s’opposent. D’un côté, une entreprise parisienne installée, qui a lentement constitué et consolidé son catalogue d’auteurs et de publications sur lesquels elle possède des privilèges qu’elle tente de conserver. De l’autre, une officine hollandaise beaucoup moins contrainte, qui imprime à grands tirages des ouvrages français destinés à inonder le marché européen. Cette réalité nouvelle du marché profite au livre, à défaut de profiter à celui qui le fabrique, puisque les éditions hollandaises ont participé à la large diffusion du recueil Barbin37, et par là à sa grande postérité.

Notes

1 Sur le libraire Claude Barbin, on consultera l’ouvrage de référence de Gervais E. Reed Claude Barbin, libraire de Paris sous le règne de Louis XIV, Paris/Genève, Droz, 1974, ainsi que la notice de Jean-Dominique Mellot et Élisabeth Queval, Répertoire d’imprimeurs-libraires : xvie -xviie siècle, Paris, Bibliothèque nationale de France, 1997.

2 Catalogue collectif de France :
https://ccfr.bnf.fr/portailccfr/jsp/public/index.jsp?failure=%2Fjsp%2Fpublic%2Ffailure.jsp&success=%2Fjsp%2Fpublic%2Findex.jsp&profile=public

3 Dans « Claude Barbin, un libraire pour dames ? » (Revue de la BnF, vol. 39, no 3,‎ 2011, p. 22-27) Nathalie Grande indique que Claude Barbin édite en 1664 et 1680 des poésies de Mme de La Suze. Nous n’avons toutefois pas retrouvé ces éditions (qui ne sont pas mentionnées non plus par Reed).

4 E. Keller-Rahbé, « Mme de Villedieu, la « poule aux œufs d’or » de Claude Barbin ? », E. Keller-Rahbé (dir.), Les Arrière-boutiques de la littérature. Auteurs et imprimeurs-libraires aux xviie et xviie siècles, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 2010, p. 87-111.

5 Malherbe, Œuvres, éd. A. Adam, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1971, p. 765.

6 [M. de Montreuil] Les Œuvres de Monsieur de Montreüil, Paris, Barbin, 1666.

7 [V. Voiture] Les Œuvres de Monsieur de Voiture, Paris, par la Société [J. Le Gras, N. Le Gras, C. Barbin, G. de Luyne, T. Girard, P. Trabouillet, Vve Mauger et C. Osmont], 1677.

8 On trouve deux copies hollandaises de cette édition, publiées en 1679 à Amsterdam, l’une d’A. Wolfgang, l’autre des Elzévier.

9 Rudolf Harneit en recense aujourd’hui seulement trois séries d’exemplaires, ce qui explique qu’une contrefaçon rouennaise ait longtemps été considérée comme l’édition originale de ce recueil. R. Harneit, « Le Portefeuille de Madame de Villedieu : édition originale et réimpressions des Œuvres meslées au xviie siècle », Revue d’histoire littéraire de la France, 2001/5 (Vol. 101, n° 5, 2001), p. 1455-1462.
https://www.cairn.info/revue-d-histoire-litteraire-de-la-france-2001-5-page-1455.html

10 [J.-F. Sarrasin] Les Œuvres de Monsieur Sarazin, Paris, A. Courbé, 1656.

11 [J.-F. Sarrasin] Nouvelles Œuvres de Monsieur Sarasin, Paris, Barbin, 1674.

12 Plusieurs commentateurs racontent que ces pièces auraient été achetées par Barbin à Fleuri, l’ancien secrétaire de Ménage, qui aurait fait une copie, des années auparavant, de ces pièces écartées. L’anecdote se trouve dans les Mémoires du marquis de Sallengre ou dans les Jugemens des savans sur les principaux ouvrages des auteurs, par Adrien Baillet, revûs, annotez et augmentez par M. de la Monnoye, nouvelle édition, vol. 4, seconde partie, Amsterdam, Aux dépens de la compagnie, 1725, p. 265.

13 Nouvelles œuvres meslées de Madame De Villedieu, Lyon, Thomas Amaulry, 1691. Cet imprimeur lyonnais entretenait des liens commerciaux étroits avec Barbin, qui l’a fait bénéficier des privilèges obtenus pour l’impression de plusieurs œuvres de Villedieu, dont Mademoiselle d’Alençon, nouvelles galantes en 1683 ou le Portrait des faiblesses humaines en 1686. Dans ces deux cas, l’édition Amaulry suit de quelques années l’édition Barbin.

14 Les chiffres avancés par David Van den Linden ont été établis en s’appuyant sur les données du Short Title Catalogue of the Netherlands. La part de marché des imprimeurs-libraires huguenots passe dans le même temps de 3,3 % à 9,4 %, et de 18,4 % à 32 % en ce qui concerne les livres publiés en français : Experiencing Exile. Huguenot Refugees in the Dutch Republic, 1680-1700, London, Routledge, 2016.

15 Jacques et Jean I Huguetan, fils d’un marchand lyonnais, sont membres de la première Compagnie des libraires de Lyon. Jacques, l’aîné, aurait commencé son activité en 1492 et imprimé quelques incunables. Il se rend à Toulouse et à Paris avant de s’établir à Lyon, où il développe son activité. A. Vingtrinier, Histoire de l’imprimerie à Lyon de l’origine à nos jours, Lyon, A. Storck, 1894, p. 129-133 et p. 354-360.

16 Experiencing Exile. Huguenot Refugees in the Dutch Republic, op. cit.

17 Ces deux mentions peuvent être un indice de l’évolution socio-professionnelle de George Gallet, passé de collaborateur à directeur des activités d’impression de l’entreprise familiale. Il est vraisemblable que les frères aient délégué cette direction, alors qu’ils étaient eux-mêmes occupés à diriger des activités commerciales plus conséquentes. Nous savons en effet que la librairie est loin d’être la seule source de revenus de la famille. Les trois hommes furent impliqués dans divers commerces, notamment Jean-Henri, le deuxième frère, qui fit des affaires en France, en Angleterre, en Suisse et au Danemark, où il fut l’un des fondateurs de la banque nationale.

18 On le trouve dans le Dictionnaire mathématique d’Ozanam et dans L’Architecture générale de Vitruve publiés en 1691.

19 Les éléments biographiques dont on dispose sur Jean-Henri Huguetan témoignent que l’exil en Hollande n’est pas radical, puisqu’il s’est au moins rendu à Paris en 1686, où son fils illégitime naît en mai 1687.

20 Lettre à Vincent Minutoli, à Rotterdam, le 28 août 1692. Lettre n° 882 de l’édition électronique de la correspondance de Pierre Bayle réalisée par Anthony McKenna, consultable en ligne à l’adresse http://bayle-correspondance.univ-st-etienne.fr/.

21 Parmi les exemplaires consultables en ligne, c’est le cas de ceux conservés à la bibliothèque du congrès de Washington, cote PQ 1101, à la BCU de Lausanne, cote VD 2397475, et à la BU de Gand, cote BIB. HER. 002131 v. 1 :
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k579930?rk=64378;0 ;
https://books.google.ch/books?id=4WQ7AAAAcAAJ&hl=fr&source=gbs_navlinks_s ;
https://books.google.be/books?id=TDBbAAAAQAAJ&hl=fr&source=gbs_navlinks_s.

22 À titre de comparaison, on ne trouve dans le CCfr que douze ouvrages publiés par Claude Barbin entre 1656 et 1660, soit les quatre premières années de son activité.

23 Dans le « Catalogus librorum », on l’a noté, des ouvrages précèdent cette date de lancement « officielle ». Cependant aucun d’entre eux n’est localisé à Amsterdam.

24 L’exemplaire de ce texte localisé à Amsterdam est daté de 1690. Il n’a pas de page de titre et est le seul, des neuf ouvrages consultés, à ne pas contenir de catalogue. Nous ne sommes donc pas absolument certaine qu’il s’agisse bien de l’édition mentionnée dans le catalogue Huguetan.

25 Le nom « Jacques Ollier » renvoie à celui d’un imprimeur lyonnais du milieu du xviie siècle (Florus de la maison de Savoye, Lyon, J. Ollier, 1654). Les ouvrages que publie sa veuve dès 1667 (Relation d’un signalé combat donné au siège de la table place d’importance, Lyon, Vve J. Ollier, 1667) nous indiquent qu’il n’a pas pu collaborer avec les frères Huguetan ; l’aîné, Marc, est né en 1655.

26 La correspondance de Bayle signale que les frères Huguetan sont des contrefacteurs bien identifiés aux Pays-Bas. Il craint d’ailleurs qu’ils ne contrefassent son dictionnaire : voir la lettre à François Janisson, à Rotterdam, le 21 mars 1697 (lettre n° 1138 de l’édition électronique, http://bayle-correspondance.univ-st-etienne.fr/).

27 Les Dacier ouvrent et clôturent le catalogue Huguetan. Parmi les derniers ouvrages qu’ils impriment se trouvent ainsi deux textes d’Anne : Dictys Cretensis et Dares Phrygius, de Bello et excidio Trojæ in usum serenissimi Delphini, cum interpretatione Annæ Daceriæ (Amsterdam, Georges Gallet, 1702) ; L. Annæi Flori Rerum romanarum epitome, interpretatione et notis illustravit Anna Tanaquilli Fabri filia, in usum Delphini. Ex recensione J. Georg. Graevii, cum ejusd. Annotat. (Amsterdam, Georges Gallet, 1702, 2 vol.).

28 Deux lettres d’André Dacier à Pierre et Jean-Henri Huguetan nous sont en effet parvenues. Datées du 12 mai 1699 et du 20 août 1700, elles témoignent d’une négociation en cours entre les Dacier et les Huguetan portant sur la suite des traductions de Plutarque. Voir Jean-Philippe Grosperrin, « Les époux Dacier : une bibliographie », Littératures classiques, n° 72, 2010, p. 259-286.

29 Dictionnaire historique et critique de Pierre Bayle [1697], nouvelle éd. par Adrien-Jean-Quentin Beuchot, Paris, Desoer, 1820, vol. XXX, p. 316.

30 « J’espérais trouver beaucoup de choses sur la vie de M. de Benserade dans le Recueil des plus belles pièces des poëtes français : le titre m’en assurait ; mais quand j’ai été à la page marquée à la table, je n’y ai pas trouvé une seule ligne d’histoire », ibid.

31 Cote 344429. L’exemplaire est consultable en ligne sur Google Books :
https://books.google.fr/books?vid=BML37001102301954

32 On trouve, dans l’ordre, les notices de Gombaud, Desmarets (dont la section figure dans le tome 4), Lingendes, Boisrobert, Malleville, Motin, Lestoille, Théophile, Saint-Amant, du père Lemoine et du Menuisier de Nevers.

33 Exemplaire conservé à la bibliothèque universitaire centrale de l’université Jean-Jaurès, cote XD 6235-1.

34 Il s’agit des deux exemplaires conservés à la bibliothèque d’étude et du patrimoine de Toulouse : FaD 11951 (3) et FaD 2277 (3).

35 Pour plus de précisions sur ces liens, voir l’étude réalisée par Emma Dussauge : Auctorialité et paratextualité féminine. Le cas de Marie-Catherine d’Aulnoy, mémoire de Master 2 dirigé par E. Keller-Rahbé, soutenu en juin 2019 à l’Université Lumière-Lyon 2.

36 À partir de 1692, la situation financière du libraire se dégrade. La guerre, mais aussi la concurrence exacerbée avec les libraires de province et étrangers, le poussent presque à la faillite, et il se voit dans l’obligation de vendre son fonds et ses biens : G. E. Reed, Claude Barbin, libraire de Paris sous le règne de Louis xiv, op. cit., p. 47-54.

37 Les Huguetan possédaient des comptoirs en Hollande, en Suisse, en Allemagne, en Grande-Bretagne : c’est dans ces pays que se retrouvent aujourd’hui la majorité des exemplaires conservés de leur édition du recueil. À l’inverse, les exemplaires de l’édition parisienne sont conservés, dans leur majorité, sur le territoire français.

Citer cet article

Référence papier

Fanny Boutinet, « Éditer le recueil Barbin », Pratiques et formes littéraires, 16 | -1, 61-76.

Référence électronique

Fanny Boutinet, « Éditer le recueil Barbin », Pratiques et formes littéraires [En ligne], 16 | 2019, mis en ligne le 26 novembre 2019, consulté le 29 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/pratiques-et-formes-litteraires/index.php?id=82

Auteur

Fanny Boutinet

Université Jean Moulin Lyon 3 IHRIM

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