La représentation du genre de la poésie d’éloge dans le recueil Barbin

DOI : 10.35562/pfl.92

p. 211-227

Plan

Texte

L’étude de la poésie d’éloge dans le recueil Barbin s’appuiera certes sur l’analyse de sa représentation au sein des volumes du recueil, mais elle suppose, au moins en arrière-fond, et parce que le recueil est une sélection de textes, une comparaison avec les autres pièces d’éloge existantes mais non reproduites, et surtout la mise en relation de ce recueil avec les autres recueils collectifs, publiés dans les mêmes années ou dans les décennies précédentes, pour évaluer ce qui serait particulier au recueil Barbin.

En effet – et même si la préface postule dès la première phrase qu’« il ne s’est peut-estre fait aucun Recueil de Vers, où l’on ait eu les mesmes veuës que dans celuy-ci » – le recueil Barbin s’inscrit cependant, et au moins en intention, dans un rapport aux autres recueils. Les exigences d’ordre et le souci d’objectivité qui s’expriment dans la présentation des pièces sont habituels dans les textes liminaires des recueils, les défauts (qu’ils soient réels ou supposés) des recueils concurrents permettant de valoriser le présent ouvrage1. La perspective historique lui est en revanche particulière, alors que les recueils de poésies dites « de ce temps » insistaient sur la nouveauté des pièces offertes à la lecture. Précisons toutefois que d’autres recueils publiés antérieurement reproduisaient des pièces « tant anciennes que modernes » : par exemple en 16132 à Lyon (recueil qui est donc oublié en 1692) ou en 16893 chez Pierre Marteau ; mais ils n’avaient pas la même ambition (la volumétrie des recueils est plus faible et la période couverte moins longue) et ne font donc pas ombrage au dessein du recueil Barbin de présenter une « Histoire complette dans toute sa variété ».

Ce contexte éditorial étant rapidement posé, la représentation du genre de la poésie d’éloge au fil des cinq volumes tient à la fois au nombre de pièces d’éloge, à leur répartition selon les volumes et les auteurs et, surtout, aux types d’éloges reproduits. La typologie des éloges sera analysée à travers quelques exemples emblématiques de ce qu’il advient de la poésie épidictique dans le recueil Barbin ou, pour le dire autrement, emblématiques de l’image de la poésie d’éloge construite par le recueil, construction qui tient à la fois du décalage temporel entre des textes du passé (puisqu’aucun auteur vivant n’est publié) réunis pour des lecteurs du temps présent et du processus de sélection inhérent aux recueils anthologiques, où la collecte des pièces (souvent comparée dans les préfaces à une cueillette de fleurs pour en composer un bouquet) implique leur recomposition par leur disposition dans le volume.

Pour ce qui est du nombre et de la répartition des poésies d’éloge, celles-ci représentent 9 % des pièces reproduites (sont exclus pour le moment de ce décompte les vers de ballets d’Isaac de Benserade). La poésie d’éloge est ici définie au sens minimal de poésie qui fait l’éloge d’une personne nommément désignée, quel qu’en soit le mode d’énonciation4. Il faut aussi préciser que les pièces adressées à des personnes nommées constituent 9 % supplémentaires – et nous verrons que la distinction entre pièce encomiastique et ce que nous appellerons ici par commodité « pièce adressée » est parfois ténue. La distribution des pièces d’éloge dans le recueil est très variable selon les volumes : 17 % dans le deuxième (qui comporte la section consacrée à François de Malherbe) et 15 % dans le cinquième, contre 1 % dans le premier ou 6 % dans le quatrième. Parmi les poètes, F. de Malherbe compte 75 % de pièces encomiastiques, Adam Billaut 33 %, Vincent Voiture 32 %, suivis d’Honorat de Racan, Paul Scarron et Chapelle à 30 % environ chacun. Pour les autres auteurs, la proportion est bien moindre, voire nulle pour seize auteurs sur les cinquante présents dans le recueil. La sélection ne répond donc pas nécessairement à un critère de proportionnalité : si le nombre important d’éloges signés par F. de Malherbe se comprend, on peut en revanche s’étonner que la partie consacrée à Pierre de Ronsard n’en contienne aucun, alors même que sa notice biographique décrit longuement sa place auprès de Charles IX.

Au sein de chaque section, les poèmes encomiastiques n’occupent pas une place spécifique et sont mêlés aux pièces d’autres registres, même lorsqu’elles sont dédiées au roi ou à un grand personnage du royaume, au contraire des autres recueils contemporains qui, pour la plupart, et surtout lorsqu’ils affichent une attention portée à l’ordonnancement des pièces, classent les poèmes selon l’importance des dédicataires ou selon le genre poétique. C’était le cas par exemple dans le recueil dit de Sercy publié en cinq parties entre 1653 et 16605. La valorisation du genre épidictique n’entre pas dans les desseins du libraire, ni même l’habituel souci de préséance qui veut que le prince et les grands soient souvent cités en premier, l’ordre des pièces reprenant l’ordre social ; et cela est déjà significatif de la vision donnée du genre encomiastique.

Enfin, l’ode n’est pas la forme majoritaire des éloges reproduits, beaucoup d’entre eux sont des pièces courtes, des sonnets, mais aussi des épigrammes ou des quatrains. La grande ode, dont F. de Malherbe est l’auteur exemplaire, et qui se trouve essentiellement dans le deuxième volume, n’apparaît plus, à la lecture du recueil et dans son déroulement chronologique, comme le modèle encomiastique.

Condé ou la fin de l’héroïsme

La typologie de la poésie encomiastique telle qu’elle est présentée dans le recueil Barbin s’observe de façon assez exemplaire autour de la figure du prince de Condé, auquel cinq pièces d’éloge sont dédiées, composées à des dates très différentes, deux d’entre elles s’adressant encore au duc d’Enghien ; elles sont reproduites dans les troisième, quatrième et cinquième volumes.

Avec cinq pièces qui lui sont offertes, Condé est l’une des personnes les plus citées dans le recueil Barbin, notamment pour sa génération. Le recueil se caractérise en effet par une grande diversité des dédicataires, parmi lesquels les femmes sont très présentes comparativement à d’autres recueils. Dans ce recueil collectif paru en 1692, pour ce qui est des dédicataires habituels de ce type de textes, c’est-à-dire le prince et son entourage, Henri IV reste très présent par rapport à ses prédécesseurs, recevant huit pièces d’éloge. Les reines Marie de Médicis et Anne d’Autriche sont présentes. Mais seules quatre pièces sont dédiées à Louis XIII contre dix à Richelieu, ce qui correspond finalement assez bien aux représentations que donnaient les recueils collectifs parus antérieurement, dans lesquels Richelieu supplantait le roi qu’il servait en nombre de dédicaces (et même en termes de valorisation encomiastique). Gaston d’Orléans reçoit pour sa part deux éloges, Mazarin un seul (c’est un dizain) et Colbert un quatrain.

L’image forte d’Henri IV, procurée par la présence dans le deuxième volume de plusieurs poèmes encomiastiques à sa gloire et par leur réunion dans un nombre relativement réduit de pages, perpétue la renommée de celui qui apparaît toujours comme une figure de grand roi. Quant à Louis XIV, il est l’objet de trois dédicaces : l’une de Jean-Louis Faucon de Ris, marquis de Charleval dans le quatrième volume6 et deux de Claude-Emmanuel Luillier, dit Chapelle dans le cinquième7 ; il faut ensuite attendre la toute fin du cinquième volume pour qu’il apparaisse plus fortement dans les vers de ballets de Benserade (sur lesquels nous reviendrons).

Les éloges dédiés à Condé, quant à eux, sont de formes très différentes. Le premier, « Avis de la France, A Monsieur le Prince, estant encore Duc d’Anguyen, l’an 1647. Que l’ancienne dignité des Lettres se doit rétablir par son exemple et par sa faveur8 », composé par le père Le Moyne, contient presque tout l’éloge dans son titre. Les stances développent le thème du retour des arts en France après la période d’ignorance qu’entraînèrent les troubles civils, retour que permit l’action de Richelieu, dont l’exemple clôt le poème et dont le titre indique clairement à Condé qu’il doit lui succéder dans la protection des arts et des lettres. L’éloge est donc celui de ses compétences culturelles dans l’héritage de Richelieu où il est placé. Le sonnet de Charles Vion d’Alibray « Sur le cabinet en saillie que fit faire Mons. le Duc d’Anguien, et qui offusquait celuy de l’Autheur9 » accuse Condé, sur un ton plaisant, d’avoir offusqué le soleil par sa renommée, reprenant ainsi le topos de la rencontre entre Alexandre et Diogène. L’éloge ne manifeste pas de déférence, mais rapproche – par le ton léger et par la référence à Diogène peu impressionné par Alexandre – l’énonciateur du poème et le dédicataire, par-delà leurs positions sociales respectives. La pièce de Denis Sanguin de Saint-Pavin est encore plus courte : il s’agit d’un quatrain dont le titre (« Mr. le Prince de Condé ayant promis mille écus à celui qui feroit des Vers sur ses Victoires pour mettre comme une Inscription sur la Porte du Château de Chantilly, un Gascon fit ce quatrain sur ce sujet10 »), aussi long que la pièce elle-même, dit l’essentiel, les vers formulant un jeu d’esprit sur l’aspect dérisoire que sont mille écus par rapport à tant de gloire. L’éloge est purement circonstanciel, en réponse à l’appel fait par Condé aux poètes. L’« Ode à Monseigneur le Duc d’Enguien11 » qui ouvre la section consacrée aux pièces de Jean-François Sarasin souligne bien, quant à elle, la gloire acquise par les armes et les exploits militaires du prince, mais elle pose dès l’ouverture du poème une égalité en termes de renommée entre les conquêtes militaires et les conquêtes amoureuses puisque le prince « d’Amour et de Mars / Porte[s] le cœur et le visage ». Les quatrains 3 et 10, notamment, détournent très précisément la terminologie guerrière pour servir à la représentation de la séduction galante12.

Enfin, le dernier éloge adressé à Condé est dû à V. Voiture : il s’agit de l’« Epistre à Monseigneur le Prince de Condé, sur son retour d’Allemagne l’An 164513 », épître longue de trois cent vingt-trois octosyllabes. La pièce dit bien la valeur militaire de Condé, rappelle ses victoires, convoque des grands noms (dont celui de Jules César), comparaison en soi flatteuse pour celui qui en est l’objet, mais la construction de la pièce et les thèmes qui y sont développés et qui portent l’éloge ne sont pas nécessairement ceux attendus quand on s’adresse à un chef d’armée revenu vainqueur d’une campagne militaire (celle de Nordlingen). Outre que la carrière militaire de Condé est rappelée à partir du vers 219 sur un ton déceptif, proche d’un memento mori, qui semble annuler ce que l’énoncé de sa réputation aurait pu avoir de laudatif, et même si le poème s’achève sur une exhortation faite à Condé de prendre garde à sa vie, pour lui-même et pour la France, la première partie de la pièce est plus équivoque encore quant à la louange du grand homme. Dès les premiers vers est évoquée la maladie qui frappa Condé et qui fit craindre pour sa vie. Certes, l’espoir conçu par l’Espagne qui voit dans cette maladie, selon la pièce de V. Voiture, l’occasion d’emporter une victoire qui n’aurait pas été possible si Condé n’avait pas été affaibli, est une forme d’éloge. Mais l’épître s’emploie à décrire les maux soufferts par Condé14, à rappeler l’humanité du prince dans sa fragilité devant la mort, à l’égal de n’importe quel autre homme, posant face à face la gloire et la déchéance physique, la réduction de l’être à la condition humaine devenant presque cruelle à force d’être répétée, par exemple :

Et que vous autres Demy dieux,
Quand la mort ferme ainsi vos yeux,
Avez peur comme d’autres hommes.15

Ou encore :

Et, Seigneur, c’est fort peu de chose,
Qu’un Demy-dieu quand il est mort.16

Si Condé est donné à voir par l’épître dans sa condition humaine, ce n’est pas par des vertus qui s’ajouteraient à ses qualités militaires comme dans l’ode de Sarasin, c’est l’image même du chef d’armée qui est attaquée par le rappel de son caractère mortel, de sa fragilité face à la fièvre et au risque de mort. Ainsi se trouvent récusés les rêves d’une gloire posthume garantie notamment par les écrits des poètes, selon la topique développée depuis toujours pour chanter les grands hommes. Ici, Condé est prévenu, il ne doit rien espérer des chants des poètes, car la gloire importe peu à celui qui est mort :

Mais de ces œuvres magnifiques,
De nos airs et de nos Cantiques,
Seigneur, vous n’eussiez rien oui,17

La pièce démolit donc le topos selon lequel les chants des poètes donnent l’immortalité à ceux qui en sont l’objet, tout comme elle déconstruit la figure héroïque. Les Muses « n’ont pas l’art de ressusciter », et les écrits qui sont traditionnellement réputés plus durables que le marbre dans le genre encomiastique sont ici à peine « plus durable[s] que le cuivre », ce qui amoindrit fortement leur valeur.

L’analyse faite par Alain Génetiot de la poésie encomiastique mondaine des années 1630-1660 qui, par opposition aux époques précédentes, « consacre donc l’interpénétration des valeurs héroïques et des valeurs mondaines18 » et se détourne progressivement des événements politiques pour appuyer ses éloges, s’applique très bien aux quatre premières pièces citées, dans lesquelles le point d’appui initial de l’éloge, à savoir la gloire de Condé, est dépassé par d’autres valeurs (culturelle et amoureuse) ou débordé par le ton de l’énonciation qui rapproche les deux allocutaires de l’éloge. Mais, dans la dernière pièce de V. Voiture, ce qui se joue est différent : au sein même de l’éloge, où la valeur militaire de Condé est amplement développée, le texte détruit par l’énonciation elle-même la solidité de la réputation à l’aune du temps, la notion de courage quand l’homme tremble face à la mort, l’utilité de la poésie à conserver trace de ce qui fut grand. C’est en dénonçant le caractère éphémère de la renommée face au temps et à la mort, l’oubli qui touchera nécessairement les actes de Condé après lui et l’inutilité de la gloire à le maintenir vivant dans la mémoire par la poésie, que les éloges sont énoncés. Les éloges se vident alors de leur substance à mesure qu’ils se disent. Le poème déconstruit ainsi l’image du héros, mais aussi celle du poète, démonétisant la valeur des vers, qui permettait aux poètes de faire valoir leur art et donc leur place auprès des grands.

Scarron et les éloges intéressés

Si le topos de l’éloge comme garantie d’accéder à l’immortalité pour le dédicataire est déconstruit par l’épître de V. Voiture, des éloges composés pour solliciter le dédicataire, type fréquent d’éloges s’inscrivant explicitement dans une relation d’échange entre le dédicataire et le poète, et souvent implicitement dévalorisant pour le locuteur en posture de suppliant, sont présents dans le recueil Barbin. Ils ne correspondent pas à la forme la plus mise en avant de la poésie encomiastique par les poètes eux-mêmes, mais ils constituent néanmoins une part certaine de la production épidictique car directement utilitaires, notamment quand le défaut de statut social oblige les hommes de lettres à recourir aux grands pour des emplois ou des gratifications. Cette nécessité n’est pas abolie à l’époque du recueil Barbin, mais elle se dit moins ouvertement dans les textes et donc moins publiquement, la reconnaissance symbolique de l’état de poète cachant une nécessité matérielle qui demeure pour qui n’a pas de ressources propres. Les deux seules pièces d’éloge reproduites dans la section de Clément Marot sont d’ailleurs des éloges de sollicitation19.

Dans la section de P. Scarron, plusieurs pièces appartiennent à ce type de poèmes d’éloge que l’on pourrait qualifier « de nécessité ». Trois pièces sont dédiées à la reine Anne d’Autriche, une à Mme de Hautefort et deux au cardinal de Richelieu20. L’ode intitulée « Remerciement à Monseigneur le Cardinal de Richelieu » est écrite comme un éloge presque « classique », eu égard à la position et aux actes de Richelieu ; y sont loués son gouvernement, les conquêtes aux dépens des autres pays et la paix qui règne au royaume de France. La faveur qu’a reçue le poète du cardinal n’est mentionnée que dans la première strophe, et le remerciement à Richelieu dépasse la personne du poète, qui se fait ici la voix du royaume pour louer les actions bienfaisantes du ministre. Notons d’ailleurs que la notice biographique cite un extrait de la requête à Richelieu et mentionne qu’il obtint « pension du Cardinal de Richelieu, qui fut charmé par cette Requeste ». La gratification semblerait donc résulter de la qualité de la pièce et du plaisir ressenti par le lecteur qu’est le cardinal, et non pas seulement de la demande en soi.

P. Scarron ne dissimule en rien l’objet très matériel de ses autres vers de louange, le premier quatrain de l’ode « A la Reyne » est même assez explicite à cet égard :

            Reyne, dont la compassion
Me rend despuis trois ans mes malheurs supportables,
            Faites-moy mettre aux Incurabes,
Ou faites-moy bien-tost payer ma Pension.

Mais les pièces de P. Scarron ne se limitent pas à cet événement circonstanciel et particulier de la vie de l’homme de lettres. Le ton des pièces, qu’elles soient adressées à la reine, à Mme de Hautefort ou à Richelieu pour la requête, n’est pas celui du suppliant respectueux qui louerait le dédicataire en espérant que, flatté, celui-ci le rétribue : des éloges contre une pension, comme un échange de valeurs. L’argumentation des requêtes s’appuie sur un autoportrait plein de dérision. Les poèmes, assez longs, s’attachent à décrire les maux de P. Scarron, ses souffrances et difformités, sa mauvaise mine et ses vêtements en désordre. Les poèmes parlent donc plus du requérant que du ou de la dédicataire ; mais ce que pourrait avoir de pitoyable un tel portrait est compensé par la verve de la description, par la moquerie qu’il fait de lui-même, devançant celle des autres (et ainsi l’annulant), ce qui fait la démonstration de son talent littéraire. P. Scarron est poète avant que d’être malade. Le caractère drolatique, burlesque des pièces encomiastiques déborde donc la tonalité habituelle du genre, et la façon directe dont le poète use pour s’adresser aux dédicataires, notamment à Anne d’Autriche, affiche une certaine proximité entre les deux protagonistes de l’éloge, en particulier un rapprochement par le rire qui semble gommer la distance sociale, comme dans le quatrième quatrain de l’ode à la reine :

            Vous-mesme me voyant ainsi,
Encor que vous ayez pitié de mon martyre,
            Vous ririez ; et vous voyant rire,
Je vous honore trop, pour n’en pas rire aussi.

Ces cinq poèmes encomiastiques sont nés d’une circonstance particulière : l’urgence financière d’un poète malade et infirme, une circonstance propre à l’auteur des vers – et non relative au dédicataire et qui serait alors l’occasion pour le poète de faire valoir ses talents et d’en espérer rétribution ; mais ils ne se résument pas à la circonstance anecdotique, même si l’ordre des pièces reproduit l’enchaînement de leur circulation dans la réalité, ce qui est déjà en soi une forme de valorisation des dédicataires qui se sont montrés généreux. Mais leur ampleur permet de développer une écriture burlesque de la maladie qui peut être lue à distance, par des lecteurs indifférents à l’enjeu financier, comme des portraits pleins de verve, ce qu’accentue encore la publication en recueil, qui détache les pièces de leur objectif pratique initial et les inscrit dans un contexte poétique.

Desmarets de Saint-Sorlin et Richelieu

Les pièces relatives à la figure du prince de Condé ainsi que celles de P. Scarron montrent donc une évolution des positions des protagonistes des éloges. Comparativement aux grands poèmes d’éloge tels qu’on peut les lire dans le deuxième volume, sous la plume de F. de Malherbe, J.D. Du Perron ou H. de Racan par exemple, construits sur un événement politique, les pièces plus tardives donnent à lire un rapprochement du poète et du dédicataire dans les propos eux-mêmes et dans le ton employé. La distance et la révérence du poète, qui marquaient l’admiration et la grandeur de la personne louée, tendent à se réduire, et la relation, qui jouait implicitement sur une posture d’infériorité/supériorité, se rééquilibre au profit du poète qui apparaît dans les vers, sinon comme un véritable alter ego du dédicataire, du moins comme l’interlocuteur d’un échange social et non comme un subordonné.

À cet égard, la distinction évoquée en introduction entre les pièces d’éloge (c’est-à-dire les pièces dédiées) et les pièces « adressées » à une personne nommément désignée mais sur un mode proche de l’épistolaire, quelle que soit la qualité sociale du destinataire, est significative de l’évolution de la poésie telle qu’elle est représentée dans le recueil Barbin. La discrimination entre poésie « dédiée » et poésie « adressée » est parfois délicate à faire, quand il faut distinguer entre un poème d’éloge indirect et un poème qui contient un trait d’éloge. Par exemple, les satires commencent souvent par une adresse à un personnage important, et donc par un trait d’éloge direct dans les premiers vers, qui est parfois repris à la fin du texte, pour souligner la capacité du destinataire à entendre une parole vraie et à reconnaître les défauts de ses contemporains dans la satire, défaut dont il est implicitement exempt puisqu’il est un destinataire extérieur à la situation qui est dénoncée. Cette pratique est assez généralisée et depuis longtemps. Elle permet aussi, comme le souligne Pascal Debailly dans un article consacré à l’adresse dans la satire, « de situer le poète dans la hiérarchie sociale21 ». Et cela ne vaut pas uniquement pour le genre satirique.

Ce qui est plus intéressant est la mise en scène qui est donnée à lire, dans le quatrième volume, de la relation entre Jean Desmarets de Saint-Sorlin et Richelieu, relation que la notice biographique avait déjà exposée, et qui se donne à voir à travers deux pièces, l’une constituant un éloge très formel puisqu’il s’agit du « Tombeau du Cardinal de Richelieu22 », longue ode de vingt-sept dizains, qui déroule la vie et les grandes actions du cardinal ministre pour la France et contre ceux qui voulaient l’attaquer à l’extérieur comme à l’intérieur. La seconde pièce qui lui succède immédiatement dans l’ordre du recueil est un poème de fantaisie, intitulé « Les Amours du Compas et de la Regle ; et ceux du Soleil et de l’Ombre. A M. le Cardinal Duc de Richelieu. Poème23 », qui se déploie sur cent soixante-neuf alexandrins. Le poème n’a d’autre but déclaré que le plaisir du lecteur qu’est Richelieu ainsi que l’affirment les quatre derniers vers du poème :

Richelieu, c’est assez, j’abuse de ton temps ;
Repren le fil laissé de tes soins importants.
France, son cher soucy, pardon si je l’amuse
Des contes enfantez d’une riante muse.

Le cardinal apparaît dans ces deux pièces à la fois comme le grand ministre qui dirigea la France et comme un esprit sensible aux belles-lettres et accessible à une forme plus légère d’écriture. Mais surtout, la figure du poète se dédouble, à son avantage, par la reproduction simultanée des deux pièces. La pièce « dédiée » le pose dans la posture alors topique du poète dispensant et diffusant la gloire, et montrant ainsi des compétences à composer, dans ce qui est encore considéré à l’époque de la mort de Richelieu comme un grand genre, l’éloge funèbre d’un ministre. Et la pièce « adressée » enrichit le portrait du poète d’éloge, qui n’est pas seulement au service de celui dont il chante la gloire, mais aussi suffisamment proche, et libre, pour s’autoriser cette fantaisie pour le distraire. Le second texte affiche une proximité entre les deux hommes qui dépasse la relation supposée de la pièce d’éloge. Les deux pièces se présentent donc comme deux facettes d’une relation, la poésie d’éloge correspondrait à une relation officielle, et la seconde, la fantaisie adressée au ministre, comme une relation personnelle, relevant davantage du privé. Là encore, la distance entre les deux interlocuteurs, qui peut être supposée d’après l’éloge funèbre, est transformée et réduite par la pièce « adressée ».

Benserade : des hommes et des femmes

Une autre spécificité du recueil Barbin par rapport notamment aux recueils collectifs qui l’ont précédé est la place des femmes parmi les dédicataires des pièces d’éloge, mais aussi des pièces « adressées ». Les femmes reçoivent un tiers des pièces « dédiées » et « adressées » confondues, proportion remarquable, notamment concernant les éloges. Les femmes qui recevaient auparavant des louanges dans les recueils collectifs étaient les reines, surtout pendant leur régence, et quelques grandes dames. Celles-ci restent présentes dans le recueil, de même que les reines Elizabeth d’Angleterre ou Christine de Suède par exemple, mais d’autres figures apparaissent, moins renommées, et qui sont louées en tant que femmes et non pour le titre qu’elles portent.

La section consacrée à I. de Benserade est à cet égard exemplaire ; toutes les pièces « adressées » et les poèmes encomiastiques sont consacrés à des femmes (sont toujours exclus du décompte les vers de ballets). Les deux éloges sont dédiés à Mme de Hautefort et à la duchesse de Nevers ; les pièces non encomiastiques sont adressées par exemple aux « filles de la Reyne », « A Mademoiselle de Brionne » ou « A Mademoiselle de Guerchy ». La forte représentation des femmes dans cette partie, mais aussi dans l’ensemble du recueil, reflète donc bien l’évolution des pratiques scripturaires et l’adaptation aux goûts du public. Cela conforte l’analyse faite par Marie-Gabrielle Lallemand sur l’adéquation du recueil Barbin au « goût du public mondain, dans lequel l’élément féminin est prépondérant24 ». Et la diversité des noms et des figures accentue encore l’impression de forte présence féminine dans le recueil.

Mais cela n’est pas le seul effet. L’adresse privilégiée aux femmes, la tournure des pièces, le ton moins cérémonieux que dans les éloges plus formels inscrivent là encore le poète dans un échange qui semble contourner les préséances sociales. Les figures féminines convoquées par les pièces sont certes de bonne naissance, comme les « filles de la reine », mais la proximité affichée par les poèmes d’I. de Benserade, qui suppose une certaine familiarité entre le poète et la femme, que la familiarité soit réelle ou exagérée, ou même que les textes soient initialement écrits par un autre que l’homme de lettres qui signe la pièce, cette proximité donc construit pour le poète un réseau social valorisant car souvent aristocratique et curial (via les dédicataires inscrits dans le recueil), aux yeux des lecteurs du moins. La forte présence féminine atteste donc – et affiche peut-être plus que cela n’est réellement – une évolution du public lettré et la constitution d’un groupe social moins hiérarchisé (en apparence), auquel les poètes peuvent accéder grâce à leurs compétences scripturaires et qui a en partage des valeurs sociales de civilité et de culture.

L’absent du recueil

Enfin (et nous l’avions mentionné au début), il est un nom qui est quasiment absent du recueil jusqu’à la page 255 du dernier volume, celui de Louis XIV. Trois éloges seulement lui sont adressés (un sonnet de Charleval sur ses victoires en Flandres, une ode de Chapelle sur ses campagnes militaires, mais très peu référentielle, et un autre poème de Chapelle sur son mariage), ce qui est finalement très peu. Certes, aucun auteur vivant ne figure dans le recueil, mais H. de Racan, par exemple, a composé une « Ode au Roy » en 165925 qui aurait pu être insérée dans sa section. Un souci de chronologie historique n’explique pas de façon pleinement satisfaisante cette absence. Des éloges à Richelieu sont imprimés dans différents volumes, et la section d’H. de Racan qui contient un éloge à Louis XIII aurait pu contenir un poème au fils, après les vers encomiastiques pour Henri IV des sections de J.D. Du Perron et de F. de Malherbe. À moins qu’H. de Racan (présent dans le deuxième volume) ne fût considéré comme un poète « ancien » et que le règne de Louis XIV ne soit celui des poètes « modernes » (des volumes suivants).

Il faut donc attendre les vers de ballet d’I. de Benserade pour que Louis XIV apparaisse véritablement dans le recueil. Les vers de ballet reproduits ici sont des pièces très courtes de quelques vers, qui donnent des portraits des personnages de fantaisie joués dans les ballets ; et ces pièces, notamment lorsqu’elles sont destinées au roi, contiennent fréquemment des traits d’éloge à son égard, et traits d’éloge plus qu’éloges tant les pièces sont brèves. La présence du roi dans ces quelques pages est en revanche extrêmement forte, puisque vingt-six pièces sur cinquante-six lui sont dédiées, et de façon somme toute logique puisque le roi est la figure centrale des ballets où il danse. Figure très présente donc, mais démultipliée par les rôles qu’il incarne ; les pièces sont tour à tour « Pour le Roy, representant un Berger », « un Egyptien », un « Débauché », « un Filou », « le Printems », « un esprit folet », « une Furie », « Jupiter », « une Fille de Village », « un Bohémien », et la liste n’est pas exhaustive. Le roi est donc omniprésent dans ces pages qui terminent pratiquement le recueil, et d’autant plus que sa quasi-absence des quatre autres volumes était remarquable ; mais c’est une certaine image du roi qui est présentée. Loin de le représenter dans sa fonction souveraine, les vers de ballet donnent l’image du roi à travers les fêtes qu’il a certes organisées, dont il occupe la place centrale et qui sont aussi une manifestation de puissance ; mais la succession des différents personnages ne peut restituer entièrement le faste et l’éclat des ballets ; et le roi n’apparaît ainsi que déguisé, derrière des masques.

L’image est particulière donc et de surcroît datée quand paraît le recueil Barbin, puisque c’est un roi jeune qui est montré (or il a alors 54 ans et ne danse plus dans les ballets depuis 1670). Image particulière et quasi unique représentation du roi dans le recueil, mais image galante, et non majestueuse ou souveraine, enfin image d’un roi qui, en 1692, est un souvenir.

***

Pour conclure, la représentation du genre de l’éloge par la sélection des pièces du recueil Barbin montre les inflexions du genre par rapport notamment au deuxième volume, mais aussi par rapport à d’autres pièces contemporaines, comme celles composées par Nicolas Boileau dans les mêmes années.

La distinction concomitante du grand et du poète ne passe plus nécessairement par la grande ode encomiastique telle qu’elle peut se lire dans le deuxième volume chez F. de Malherbe ou J.D. Du Perron ; elle se joue aussi dans les poèmes adressés non épidictiques, qui affichent l’appartenance du poète et du destinataire de l’adresse à un groupe social commun, supposé être choisi et donc distinctif.

Les valeurs sur lesquelles se fondent les éloges ne sont plus les valeurs militaires de courage, de force et de gloire, comme le montre de façon exemplaire l’épître de V. Voiture au prince de Condé, où l’humanisation du dédicataire aboutit à la déconstruction de la figure même du héros par l’insistance à décrire la fragilité de celui-ci face à la maladie et à la mort. En outre, les valeurs de civilité et d’esprit louées chez les dédicataires, si elles distinguent des individualités par rapport à leurs contemporains, ne caractérisent plus nécessairement une position sociale de naissance, mais des qualités propres à certaines personnes et partagées, quelle que soit la noblesse de la naissance. L’accent n’est plus mis sur des valeurs purement aristocratiques ; et l’élévation des poètes dans la représentation de la poésie d’éloge qu’en donne le recueil passe donc à la fois par la réputation que les poètes peuvent acquérir, mais aussi par l’« abaissement » des grands.

Les éloges reproduits ici, et même quand ils s’énoncent à l’occasion d’un événement politique, le débordent rapidement et largement, l’événement semblant davantage un prétexte qu’une finalité en soi. Il s’écrit pourtant dans les mêmes années des éloges politiques au sens fort, mais ils sont réservés au seul roi. Surtout, les éloges politiques s’énoncent souvent à la première personne du pluriel ou convoquent les sujets du royaume comme témoins ; c’est alors l’éloge du prince par un poète porte-parole d’une communauté ou l’éloge du prince présenté à l’admiration de tous. Ici, le poème d’éloge, dans son énoncé, est le plus souvent une relation à deux, quasi égalitaire, dans son affichage du moins ; la distinction semble fonctionner sur le registre du privé, de l’entre soi. Si l’enjeu de l’éloge se définit à l’intérieur d’un groupe social restreint, la diffusion des pièces par le recueil donne à lire et à voir, comme un constat, ce qui serait alors un nouveau mode de relation entre les hommes de lettres et les grands. L’évolution du genre épidictique, telle qu’elle se lit au fil des cinq volumes du recueil, présente la poésie d’éloge comme une pratique sociale de civilité et de sociabilité (et non comme une pratique sociale de dépendance ou de nécessité, ce qu’elle est bien plus souvent dans sa pratique), dont le caractère politique est souvent atténué, voire annihilé dans les pièces choisies et par le dispositif qui organise les poésies dans les volumes. Il n’empêche que tout discours politique n’est pas absent du recueil Barbin, fût-ce en sourdine, par exemple, dans certaines épigrammes satiriques de Maynard ou dans les pièces contre les frondeurs dans la section de P. Scarron, ou encore à travers l’évocation des guerres civiles et religieuses dans quelques pièces de G. Du Bartas et J.D. Du Perron.

Aussi, et malgré la prétention du préfacier et/ou de l’ordonnateur du recueil de faire une « Histoire complète dans toute sa variété », ne semble-t-il pas qu’il se soit véritablement « dépoüill[é] de son goust particulier », au moins pour le choix des pièces d’éloge reproduites et pour la représentation qui est donnée du genre dans les cinq volumes du recueil Barbin. Car, si l’on suit l’ordre du recueil, on en déduit que la poésie d’éloge telle qu’elle s’écrivait sous la plume des auteurs du deuxième volume n’existerait plus, comme tendraient à le montrer les trois volumes suivants (ce qui n’est que partiellement exact, eu égard à la production encomiastique contemporaine du recueil ou juste antérieure). Si histoire littéraire il y a, et une histoire de la poésie d’éloge pour ce cas précis, c’est une histoire poétique mondaine, qui recompose une évolution du genre encomiastique par le biais d’un choix éditorial et sélectionne des textes du passé (certains d’entre eux, et non d’autres) pour le temps présent.

Notes

1 B. Brottier. « Le travail du libraire dans les avis au lecteurs des recueils collectifs de poésies du premier XVIIe siècle », in : M.-P. Luneau et D. Saint-Amand, La Préface. Formes et enjeux d’un discours d’escorte, Paris, Classiques Garnier, 2016, p. 209-224.

2 Les Marguerites poétiques tirées des plus fameux poètes françois, tant anciens que modernes, réduites en forme de lieux communs et selon l’ordre alphabétique, nouvellement recueillies et mises en lumière par Esprit Aubert, avec un indice très ample de chaque matière, Lyon, Barthélémy Ancelin, 1613.

3 Ramas de poésies vieilles et nouvelles où l’on a joint en vers héroïques l’expédition du Prince d’Orange en Angleterre, Cologne, Pierre Marteau, 1689. (Selon F. Lachèvre, il s’agirait pour ce volume de l’imprimeur Joseph Ravoux à Bourg.)

4 B. Brottier, « Je n’estime pas moins tes lettres que ses armes ». La poésie d’éloge du premier xviie siècle dans les recueils collectifs de Toussaint Du Bray, Paris, H. Champion, 2015, p. 19-20.

5 Poésies choisies de Messieurs Corneille, Bensserade, de Scudéry, Boisrobert, Sarrasin, Desmarets, Bertaud, S. Laurent, Colletet, La Mesnardière, de Montereuil, Vignier, Chevreau, Malleville, Tristant, Testu-Mauroy, de Prade, Girard, de l’Âgé. Et plusieurs autres, Paris, Charles de Sercy, 1653-1660.

6 « Au Roy » (C’est trop peu de lauriers qui couronnent ta teste), p. 301.

7 « Au Roy. Sur son Départ » (Es-tu d’accord avec les Cieux), p. 128 ; « Chant Royal » (On crût jadis que l’Habitant du Tage), p. 173.

8 Troisième volume, (Les Reynes des Esprits, les neuf Filles sçavantes), p. 328.

9 Quatrième volume, (Dedans un petit cabinet), p. 153.

10 Quatrième volume, (Pour celebrer tant de Vertus), p. 359.

11 Cinquième volume, (Grand Duc, qui d’Amour et de Mars), p. 97.

12 « Ayant fait triompher les Lys / Et dompté l’orgüeil d’Allemagne / Vien commencer pour ta Phylis / Une autre sorte de campagne » (vers 9-12), « Vien donc hardiment attaquer / Phylis, comme tu fis Baviere ;  / Tu la prendras sans y manquer, / Fust elle mille fois plus fiere. » (vers 37-40).

13 Cinquième volume, (Soyez Seigneur, bien revenu), p. 52.

14 « Vous sembloit-il pas bien injuste, / Que sous l’ombrage des Lauriers, / Qui mettent vostre front auguste / Sur celuy de tant de Guerriers : / Sous cette feüille verdoyante, / Que l’ire du Ciel foudroyante, / Respecte & n’oseroit toucher ; / La fiévre chagrine et peureuse, / Triste, défaite et langoureuse, / Eust le cœur de vous approcher, / Qu’elle arrestat vostre courage, / Quelle changeast vostre visage, / Qu’elle fit trembler vos genoux ? » (vers 50-62).

15 Vers 37-39.

16 Vers 157-158.

17 Vers 112-114.

18 « Avec Malherbe la poésie encomiastique célébrait le roi et les grands princes à travers un événement politique de portée symbolique pour la collectivité nationale […]. La poésie encomiastique mondaine consacre l’interpénétration des valeurs héroïques et des valeurs mondaines. En outre célébrant traditionnellement la personne à travers l’événement politique et militaire, elle tend à choisir des événements de moins en moins politiques et de plus en plus mondains, c’est-à-dire essentiellement anecdotiques. » (A. Génetiot. Les Genres lyriques mondains [1630-1660]. Étude des poésies de Voiture, Vion d’Alibray, Sarasin et Scarron, Genève, Droz, 1990, p. 150-152.) Cf. aussi A. Viala. L’Esthétique galante, Toulouse, Société de littératures classiques, 1989, p. 37.

19 Premier volume : « Au Roy. Pour le delivrer de Prison » (Roy des François, plein de toutes bontez), p. 15 ; « A Monseigneur le Dauphin. Du temps de son exil » (En mon vivant, n’apres ma mort avec), p. 19.

20 Cinquième volume : « A la Reyne » (Reyne dont la compassion), p. 82 ; « Remerciement à la Reyne » (Reyne de qui j’ay tous les ans), p. 83 ; « A Monseigneur le Cardinal Duc de Richelieu » (Tres humblement vous presente Requeste), p. 84 ; « Remerciement à Monseigneur le Cardinal » (Grand Armand, à l’humble Requeste), p. 88 ; « A Madame de Hautefort » (J’ay beau faire du quant à moy), p. 91 ; « A la Reyne. Requeste » (Scarron par la grace de Dieu), p. 94.

21 « Sous la forme d’une dédicace ou d’une interpellation liminaire, l’adresse a donc pour première fonction de situer le poète dans la hiérarchie sociale, de désigner et de confronter sa place à l’intérieur de divers groupes de référence, dont les strates se superposent et s’interpénètrent. » (P. Debailly, « “Quid fit Mecenas”. La question de l’adresse dans la satire lucilienne », in A. Chamayou (dir.). Éloge de l’adresse, Arras, Artois Presse Université, 2000, p. 103-106.)

22 (Place aux Muses immortelles), p. 40.

23 (Animé du beau feu d’une nouvelle audace), p. 49.

24 M.-G. Lallemand, « Bertaut dans l’Histoire de la poésie de Mlle de Scudéry et dans celle de Fontenelle », M.-G. Lallemand (dir.), De la Grande Rhétorique à la poésie galante. L’exemple des poètes caennais aux xviie et xviiie siècles, Presses universitaires de Caen, 2004, p. 184.

25 Ode au Roy, faite par Monsieur le Marquis de Racan. Sur les affaires de ce temps. Dont les cinq premieres Stances sont imitées du Pseaume 128. Sæpe expugnaverunt, Slnd.

Citer cet article

Référence papier

Béatrice Brottier, « La représentation du genre de la poésie d’éloge dans le recueil Barbin », Pratiques et formes littéraires, 16 | -1, 211-227.

Référence électronique

Béatrice Brottier, « La représentation du genre de la poésie d’éloge dans le recueil Barbin », Pratiques et formes littéraires [En ligne], 16 | 2019, mis en ligne le 26 novembre 2019, consulté le 28 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/pratiques-et-formes-litteraires/index.php?id=92

Auteur

Béatrice Brottier

Grihl, Paris 3-université Sorbonne nouvelle/EHESS

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