Trois questions à…

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Texte

Le conseil d’administration et le conseil scientifique de l’ABES ont été des instances essentielles pour l’adoption du nouveau projet d’établissement. Arabesques a donc interrogé Jean-Pierre Finance, président du conseil d’administration de l’ABES, président de l’université Nancy 1, et Laurent Romary, président du conseil scientifique, directeur de recherche à l’INRIA, pour recueillir leurs premiers sentiments sur ce projet.

Jean-Pierre Finance

Jean-Pierre Finance

Laurent Romary

Laurent Romary

En quoi, le nouveau projet d’établisse- ment de l’ABES rejoint-il les attentes respectives du président d’université ou du directeur de recherche que vous êtes ?

Jean-Pierre Finance : Au-delà de son nom et de la revue Arabesques, l’ABES reste encore un établissement assez peu connu de la communauté universitaire, si l’on excepte évidemment les professionnels de l’information scientifique et technique (IST). Cette remarque vaut également pour la plupart des présidents d’université. L’adoption d’un nouveau projet d’établissement est l’occasion, d’une part, de regarder l’adéquation entre les missions de l’agence et les stratégies d’universités et, d’autre part, de vulgariser ces missions en définissant l’ABES comme l’un des outils nationaux de mutualisation de services.

Je verrais donc, au travers de ce projet quadriennal, l’importance de la dimension mutualisation :

  • mutualisation des énergies dans le socle d’activités qui est le signalement par le biais d’une association étroite entre les services de documentation des universités et l’ABES ;
  • mutualisation de ressources dans la volonté de rendre interopérables les différents catalogues ;
  • mutualisation d’outils logiciels en pro- posant aux établissements un système de gestion défini en commun et devant s’intégrer dans leurs systèmes d’information, mais également en proposant une « boîte à outils » permettant aux établissements qui le veulent, et qui en ont la capacité, de construire leurs propres solutions ;
  • mutualisation enfin dans le rôle de porteur de groupements de commandes, brique indispensable aux démarches de négociations collectives avec les fournisseurs de documentation scientifique. Un autre pas important franchi par ce projet est le développement de services à destination de l’utilisateur final (chercheur, étudiant...), par exemple via le Portail des thèses.

Laurent Romary : Le travail de mise en cohérence des descriptions de fonds scientifiques que l’ABES réalise au service des universités, mais aussi plus largement des établissements d’enseignement supérieur et de recherche, va contribuer à offrir au chercheur un environnement homogène d’accès à l’information scientifique. Intégrés à d’autres services tels que les archives de publications (notamment avec la plateforme HAL), ces avancées façonneront de nouveaux espaces virtuels de recherche.

Quels sont, selon vous, les chantiers prioritaires à mener par l’ABES ?

Jean-Pierre Finance : Il n’est pas simple de choisir car ce projet est précis et ras- semblé en un nombre limité d’items qui tous doivent être réalisés. Néanmoins, s’il faut prioriser les activités, je placerais bien entendu en premier ce qui concerne le signalement et le renforcement du réseau des bibliothèques : évolution des codes de catalogage, conduite du changement, animation de la communauté des professionnels de l’IST...

La construction de métadonnées de la recherche, facilitée par la numérisation, change la dimension de l’IST parce qu’elle transforme la planète en un vaste laboratoire où l’acquisition de données, leur stockage et leur exploitation ne sont plus confi à un seul site géographique. Il est stratégique pour l’ABES d’être l’un des partenaires qui s’engagent dans la fourni- ture d’outils favorisant cette évolution. En- fi la fonction « achat » est indispensable à la communauté nationale de l’enseigne- ment supérieur et de la recherche.

Laurent Romary : Je mettrais en plus haute priorité le renforcement des activités de back office de l’ABES de façon à limiter la dispersion des fonds descriptifs hétérogènes sur le territoire national. En particulier, la construction de référentiels de qualité, notamment d’auteurs, doit s’associer à un travail d’interface optimisant les accès et les mises à jour en lien avec les utilisateurs.

Quelles recommandations particulières pourriez-vous faire concernant la mise en œuvre de ce projet d’établissement ?

Jean-Pierre Finance : L’une des difficultés majeures dans le secteur d’activité de l’ABES est la dépendance forte à l’évolution technologique. Le passage de plus en plus rapide du papier au numérique, l’importance de l’interopérabilité et des normes, l’évolution rapide des outils logiciels impliquent une évolution rapide des différentes attentes et des différents métiers. L’enjeu pour l’ABES est donc de tenir le cap du projet dessiné aujourd’hui, tout en étant attentive aux évolutions et capable d’infléchir les choix actuels si cela se révèle nécessaire.

Par ailleurs, l’organisation structurelle du paysage de l’IST est complexe, davantage fruit de l’histoire que construction d’un architecte visionnaire. La mise en œuvre de ce projet d’établissement ne peut se concevoir que dans une démarche de partenariat et de mise en cohérence des missions entre l’ABES et les autres structures nationales (BNF, INIST- CNRS, Couperin, CCSD...). Un cadre global est en train de se construire au travers de la « Bibliothèque scientifique numérique », l’ABES y a toute sa place dès lors que les champs d’action des différents opérateurs sont clairement définis, ainsi que les diverses interactions entre eux. Ce projet quadriennal prend totalement en compte cette dimension systémique et je m’en réjouis.

Laurent Romary : Ce projet s’intègre résolument dans la politique nationale de mise en cohérence du paysage de l’information scientifique au sein de l’initiative « Bibliothèque scientifique numérique ». Dans ce cadre, j’encourage l’ABES à travailler en étroite collaboration avec ses partenaires nationaux, notamment l’INIST-CNRS, dans ses missions à venir. Le rôle d’interlocuteur de référence que l’ABES peut être amenée à jouer est certes une responsabilité importante, mais doit permettre à la communauté de l’information scientifique de consacrer sa réflexion aux nécessaires évolutions de services, plutôt qu’à son organisation institutionnelle.

Le projet d’établissement de l’ABES, adopté par le conseil d’administration du 24 novembre 2011, est consultable dans son intégralité sur le site de l’Agence. Nous en publions dans ce numéro des extraits en regard des articles qui en évoquent des points spécifiques.

Illustrations

Jean-Pierre Finance

Jean-Pierre Finance

Laurent Romary

Citer cet article

Référence papier

« Trois questions à… », Arabesques, 65 | 2012, 4-5.

Référence électronique

« Trois questions à… », Arabesques [En ligne], 65 | 2012, mis en ligne le 20 décembre 2019, consulté le 19 avril 2024. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=1355

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