Au cœur du réseau documentaire archéologique, pôle d’excellence en archéologie grecque, la bibliothèque de l’EFA, l’École française d’Athènes, est aussi un centre d’études pour la Grèce byzantine, pour la Grèce moderne et pour les Balkans.
Parvenir à la bibliothèque de l’EFA est le résultat de quelques efforts. Nichée au pied du Lycabette, l’École française d’Athènes impose à ses visiteurs une ascension assez marquée sur les trottoirs incertains d’Athènes. On en savoure d’autant plus le réconfort du jardin superbe sur lequel ouvre la grille d’entrée. Cap sur le palmier central au bout de l’allée, puis quart de tour à droite, les marches de marbre vous mènent vers la terrasse de l’école. Le bâtiment, construit en 1846, a fière allure. Le corps principal est la bibliothèque, ceinte à droite par le bâtiment de la direction, à gauche par celui des bureaux des membres de l’école. Pas de salles de classes, pas de bâtiment de cours, puisque cette école accueille des étudiants et chercheurs déjà suffisamment instruits pour n’avoir qu’à poursuivre leur thèse ou leurs recherches.
Rêve pour un chercheur
Imaginez une bibliothèque universitaire de haut niveau où le catalogue est le reflet exact de ce que vous trouverez sous vos yeux et en libre accès. Un rêve pour un chercheur que de pouvoir trouver avec certitude la revue ou le livre repérés sur le catalogue en ligne et de savoir qu’une fois dans les murs de l’École française d’Athènes, il n’aura qu’à tendre la main vers un rayonnage pour le saisir sans plus attendre. Voilà déjà une bonne raison de se déplacer à Athènes pour beaucoup d’historiens de la Grèce antique, byzantine ou moderne. Étant donné la spécialisation des fonds, le niveau recherche des documents proposés et sa capacité d’accueil limitée à 58 places, la bibliothèque réserve son accès aux étudiants inscrits en cycle doctoral, aux titulaires d’un doctorat, aux chercheurs et enseignants des universités, ainsi, bien sûr, qu’aux membres des services archéologiques grecs et aux membres des écoles archéologiques étrangères.
Cette bibliothèque française accueille des visiteurs principalement grecs et français, comme en témoignent les cartes de lecteur et le règlement bilingues. Mais si français et grec représentent les langues les plus fréquemment entendues dans les salles, on y entend aussi toutes les langues européennes, espagnol, allemand, italien, anglais, néerlandais, ainsi que bien des langues slaves ou d’Europe centrale… Les échanges internationaux comptent d’ailleurs pour une bonne part dans l’accroissement des collections (39 % des périodiques et 22 % des monographies en 2005). Près de 300 titres de périodiques et environ 300 monographies parviennent à l’école grâce à ses relations avec plus de 300 institutions dont un cinquième en France, un dixième en Grèce et le reste dans 40 autres pays. Il faut rappeler que l’École française d’Athènes a une politique éditoriale ambitieuse avec la publication du Bulletin de correspondance hellénique, de nombreuses monographies et actes de colloque. Les achats sont aussi cosmopolites ; en 2005, pour les monographies, 16 % des commandes ont été faites en France, 27 % en Grande-Bretagne, 21 % en Italie, 15 % en Allemagne et 11 % aux États-Unis.
Archives manuscrites, estampages d’inscriptions & trains de reliure
La bibliothèque compte aujourd’hui 90 000 volumes dont plus de 1 650 titres de périodiques. Elle couvre tous les domaines de l’archéologie et de l’histoire de l’art du monde grec, de la préhistoire à l’époque moderne en passant par la Grèce byzantine. Outre l’archéologie de la Grèce, du bassin méditerranéen et de la mer Noire, celle de la France et des pays slaves est aussi bien représentée. Un fonds est consacrée à la Grèce moderne et aux Balkans. La bibliothèque abrite également des archives manuscrites qui concernent, pour l’essentiel, l’activité scientifique de l’EFA depuis sa création, que ce soit en Grèce, en Turquie, à Chypre ou en Albanie. Ces dernières réunissent carnets de fouilles et rapports, ainsi que 9 000 estampages d’inscriptions. La planothèque (environ 36 000 documents) et la photothèque (plus de 550 000 clichés) se trouvent dans un autre bâtiment, à proximité du service des publications. Bibliothèque de conservation, elle s’efforce de protéger au mieux ses collections soumises à l’épreuve de la chaleur, de la poussière soulevée par la sécheresse et au fait que les fenêtres restent ouvertes la plupart du temps pour ménager une ventilation rafraîchissante. Des rayonnages compactus sont un atout dans ce projet puisqu’ils permettent de protéger les collections de la lumière et de la poussière tout en assurant un gain de place appréciable. D’autre part, le nettoyage des salles et des rayonnages est quotidien. La reliure est appliquée systématiquement aux périodiques en fascicules et les ouvrages ont, selon le goût du personnel préposé à la préparation des trains de reliure, des dos agréablement variés en couleur avec pièce de titres en cuir. La profession de la reliure est, à Athènes, florissante, surtout dans le quartier de l’école qui est aussi celui de l’université. Enfin, sur place, étant donné l’importance du patrimoine, un personnel qualifié assure les opérations de restauration légère et les opérations de conservation préventive sur les cas les plus graves. L’école possède 4 000 ouvrages dits de réserve, exceptionnellement en accès indirect, allant du récit du voyage de Tournefort aux grands in folios contenant les remarquables photographies de Fred Boissonnas. Pour ces ouvrages, une réserve fonctionnelle est en cours d’aménagement dans les sous-sols du bâtiment. Comment vit une bibliothèque exposée à un été brûlant de mai à septembre ? En ouvrant tôt (le matin, dès 9 heures, le public est accueilli) et tard le soir, avec la fermeture à 20 heures. Les membres de l’école et les boursiers de chaque mois ainsi que les hôtes de l’école bénéficient de la fraîcheur nocturne puisque les salles leur restent ouvertes à toute heure du jour et de la nuit. Deux salles sur quatre ainsi que les bureaux du personnel sont climatisés. Comme à la Bibliothèque nationale, il est attribué à chaque lecteur, en fonction de ses recherches, une place numérotée dans la salle classique ou byzantine ou dans une des deux salles de périodiques.
Bibliothèque de l’EFA : salle classique - Août 2006
Crédit photo : Philippe Collet. philippe.collet[at]efa.fr
Catalogue grec cet automne
La bibliothèque de l’EFA, traditionnelle dans ses bâtiments, est résolument tournée vers l’avenir, avec un catalogue en ligne depuis www.efa.gr et l’adjonction de son catalogue grec (6 000 notices) à l’automne 2006, grâce à l’installation d’une version en unicode du système de gestion de bibliothèque. L’intégration au Système universitaire de documentation, le Sudoc, intégration effective en juin 2006, permettra en outre un accès en translittération à ces documents grecs, dont, souvent, l’EFA est la seule détentrice dans le réseau universitaire français. La numérisation des archives manuscrites, au moins pour les carnets de fouilles, devrait assurer une conservation à long terme de ces documents fragiles et irremplaçables pour l’archéologie. La documentation électronique est assurée par l’accès à Internet depuis tous les postes de consultation du catalogue, la mention des liens aux éditions électroniques de périodiques dans chaque notice concernée (4 630 notices en 2005) ; en outre, le portail de la bibliothèque indique les ressources électroniques payantes auxquelles a souscrit la bibliothèque : l’Année philologique, Thesaurus linguae graecae, Brepolis latin, Dyabola. Des bases de données sont aussi consultables sur cédérom – Bibliographie papyrologique, Byzantinische Zeitschrift : Bibliographie, Gnomon Bibliographische Datenbank… La bibliothèque a des moyens en acquisitions avec le même niveau relatif d’année en année ; les moyens en personnel tendent à régresser. Dotée de six postes budgétaires, dont un réparti entre deux vacataires à mi-temps, elle offre 55 heures d’ouverture par semaine.
Avec ses 1 372 lecteurs inscrits en 2005, ses 8 147 visites de lecteurs répartis sur 250 jours en 2005, ses 560 m2, la bibliothèque de l’École française d’Athènes est un lieu bourdonnant sous le chant des cigales.