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Les psychologues à l’Éducation nationale se sont battus et se battent encore pour le respect de l’esprit de la loi de 1985, protégeant l’usage du titre professionnel. Ils revendiquent encore l’accès à la qualification sur la base d’un diplôme universitaire de 3e cycle (DESS ou DEA plus stage).

Or, depuis septembre 1989, en créant le Diplôme d’État de Psychologie Scolaire (DEPS), le ministère de l’Éducation nationale a privilégié une logique qui sauvegarde l’unité de la profession d’enseignant, au détriment de la profession de psychologue.

Être psychologue dans l’institution scolaire signifierait donc être d’abord titulaire dans un corps d’enseignants du 1er degré, justifier de l’obtention d’une licence de psychologie, ainsi que de trois années d’enseignement effectif dans une classe. Il suffirait ensuite d’être sélectionné à la formation organisée dans le cadre des Instituts Universitaires de Formation des Maîtres (IUFM), formation sur une année, sanctionnée par le DEPS. Il s’agit bien là d’une spécialisation du métier d’enseignant.

Cependant, depuis 1990, pour pallier l’absence de titulaires du DEPS, les Inspecteurs d’Académie ont pu nommer, à titre définitif, sur un poste de psychologue scolaire, des instituteurs ou professeurs d’école possédant un diplôme de haut niveau en psychologie1 à condition d’avoir exercé pendant un an les fonctions de psychologue scolaire.

Ainsi sont titularisés dans les fonctions bon nombre de candidats possédant un DESS. Ils viennent s’ajouter à tous ceux qui, pratiquant la psychologie à l’école depuis plusieurs années, se sont personnellement dotés d’un DESS ou DEA.

Nous pouvons donc dire qu’il existe ainsi, des psychologues de l’Éducation nationale, et des psychologues à l’Éducation nationale.

Tous sont tenus d’exercer leur métier avec un statut d’enseignant spécialisé, et leur travail reste évalué, comme les enseignants, par les Inspecteurs Départementaux de l’Éducation nationale. Ils restent donc les seuls à ne pas avoir de statut, les autres secteurs de la Fonction publique ayant déjà clarifié leurs conditions d’exercice.

En maintenant cette confusion, l’institution tente de limiter leurs pratiques, inféodant le psychologique aux objectifs pédagogiques. Elle essaie par ailleurs d’entraver la possibilité de travailler dans le respect de l’éthique et de la déontologie propres à la profession de psychologue.

Les textes définissant leurs missions auraient tendance à ne vouloir privilégier que l’analyse des processus « d’appropriation des connaissances et des savoir-faire, tout en fournissant aux maîtres et aux familles, des indications précieuses sur les stratégies à adopter pour favoriser l’éducation des enfants2 ».

Mais, à vouloir cantonner le psychologue qui travaille en milieu scolaire, dans un rôle de promoteur de la représentation du bon élève, l’institution semble vouloir ignorer l’hétérogénéité de la population d’enfants en difficulté, et la polysémie des symptômes présentés. En effet, l’échec reste bien souvent le premier symptôme mis en avant, qui peut témoigner de l’existence d’attitudes conflictuelles, de craintes, d’entraves au désir de grandir, ou être le signe d’un trouble plus global de la personnalité. L’institution semble aussi vouloir ignorer que l’échec se trouve renforcé par la réalité sociale, et que les enfants sont de plus en plus nombreux à être victimes de maltraitances, de négligences, de violences. Les demandes adressées au psychologue à l’école sont de plus en plus nombreuses, et n’émanent pas toujours des enseignants. La rencontre avec un psychologue à l’école permet à l’enfant d’exprimer ce qu’il perçoit de sa difficulté, elle lui permet aussi de s’exprimer sur ce qu’on en dit, et seule, l’intervention du psychologue présente la garantie que la dimension de sens, dont le symptôme est porteur, sera prise en compte dans la recherche d’une réponse adaptée. Pouvoir créer un tel espace au sein de l’institution scolaire, a conduit beaucoup de psychologues à compléter leur formation initiale, à acquérir de nouveaux référents théoriques, et cela à leurs frais, et sur leur temps personnel.

Plutôt que de les craindre, ou d’imaginer qu’elles peuvent nuire à l’unité de la profession, leurs différentes pratiques, la diversité des outils et des méthodes utilisées, permettraient sans doute, si elles étaient regroupées au sein d’un même service de psychologie, de dégager, face aux multiples demandes, les problèmes fondamentaux qu’elles génèrent et les formes de pensées les plus adaptées à leur résolution.

Notes

1 En référence au décret n° 90-255 du 22 mars 1990, modifié par le décret n° 93-536 du 27 mars 1993. Ce ou ces diplômes de haut niveau en psychologie ont été acquis à titre personnel, et n’entrent pas en compte pour le recrutement à l’entrée des IUFM.

2 Missions des psychologues scolaires. Circulaire n° 90-083 du 10 avril 1990.

Citer cet article

Référence papier

Françoise Forestier, « Psychologue en milieu scolaire », Canal Psy, 21 | 1995, 6.

Référence électronique

Françoise Forestier, « Psychologue en milieu scolaire », Canal Psy [En ligne], 21 | 1995, mis en ligne le 27 août 2021, consulté le 24 juillet 2025. URL : https://publications-prairial.fr/canalpsy/index.php?id=2532

Auteur

Françoise Forestier

Psychologue

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