C’est quoi, la magie de lire ? Une phrase qui vient à point nommé et condense toute l’émotion :
« Je vois ma mère.
Je me redresse sur ma chaise.
Elle a le visage que j’aime. Celui des jours fragiles. »
Ce pourrait être un poème, c’est un poème qui ne s’en vante pas, qui se partage dans le fil du récit.
Après cela, on a juste envie de silence. Mais aussi de faire découvrir ce si beau livre, alors on fait un peu de bruit quand même. Capitaine Rosalie est publié par Gallimard jeunesse, mais comme tous les grands livres pour la jeunesse, ce n’est pas une histoire d’âge.
Rosalie a cinq ans. Son père est à la guerre de 1914 dont on ne sait pas encore qu’elle finira en 1918. Sa mère est obligée de travailler, elle confie Rosalie tôt le matin à l’instituteur bienveillant qui la laisse au fond de la classe, elle peut dessiner, écouter les grands… Mais Rosalie a un secret, elle est en mission, elle est Capitaine, Rosalie. Et elle a choisi un lieutenant, Edgar, le cancre, un cancre attentif, intelligent du cœur.
Dans une écriture simple, sobre autant que profonde, T. de Fombelle, un des grands auteurs jeunesse (mais pas seulement !), créateur de Tobie Lolness, Vango, entre autres, nous fait vivre la vie toute simple, entre maison et école, courrier et silence, ou presque, sur la guerre (le maître n’a plus qu’un bras) d’une petite fille que le monde pousse à grandir pour comprendre les silences.
Et puis, ce texte est accompagné d’illustrations elles aussi tout en délicatesse d’Isabelle Arsenault. Adultes, osons les albums, ils nous ouvrent aux rêves autant qu’au monde :
« Et puis un jour, pour mon anniversaire, je reçois de la neige. »
Jean-Marc Talpin
