En 2022 eurent lieu des “Mélanges” offert à Georges Gaillard, en même temps qu’à Bruno Cuvillier, deux enseignants-chercheurs investis dans la formation continue, et plus particulièrement dans la FPP (Formation à Partir de la Pratique), au sein de l’Institut de Psychologie. “Mélanges” est un terme académique, il ne laisse pas de surprendre. Il vient ici un peu en contrepoint du travail d’un chercheur dont le travail témoigne d’une centration profonde : l’institution certes, le groupe certes, mais, plus fondamentalement, la Kulturarbeit, le travail de la culture qui n’en finit jamais de border, de tenter de faire barrage, au mieux de lier le travail, frontal ou insidieux, de la pulsion de mort. L’actualité de ce mois de novembre 2023 vient le rappeler, et je songe à ce que G. Gaillard pourrait en penser, avant que d’en dire quelque chose.
Georges Gaillard a œuvré à ce travail de la culture par la sienne propre, dont il n’est guère question ici, lui qui aime la poésie, la littérature ; par ses travaux scientifiques, mais aussi, dans la pratique, par ses interventions auprès/avec les étudiants : de FPP, de Master 2 en particulier, car pour lui la formation est profondément liée à l’expérience, à la professionnalisation.
À lire les différentes contributions de ce numéro ressortent les liens avec Georges Gaillard : lien de filiation avec A-N. Henri, lien de fraternité/amitié avec B. Ravon, avec J-P. Pinel, avec A. Brun qui nous invite au portrait chinois. Lien d’amitié, aussi en partie de filiation, mais cette fois G. Gaillard est en position de père, avec trois collègues brésilien-ne-s qui proposent de penser le Brésil en présence de Georges Gaillard dans une manière nouvelle d’extension de la psychanalyse, pour reprendre R. Kaës. En effet, G. Gaillard n’a jamais travaillé sur cet objet complexe que sont un pays et son histoire.
En lisant en particulier A-N. Henri, B. Ravon et J-P. Pinel, vient à l’idée que la formule de Goethe reprise par Freud « ce que tu as hérité de tes pères, acquiers-le » pourrait aussi s’écrire « ce que tu as hérité de tes pairs, acquiers-le » ; sans parler de comment tu laisses acquérir ceux qui héritent de toi.
En somme, des histoires de filiation, de transmission, de généalogie verticale, mais aussi horizontale. Car G. Gaillard, le pair, est aussi celui qui est en dialogue, celui qui travaille à deux, à plusieurs, un compagnon exigeant dans la pensée.
Bonne lecture donc de textes qui sont aussi une invitation à lire le travail de G. Gaillard, travail d’écriture qui a un peu plus de temps depuis qu’il est à la retraite, là où la/sa pensée n’en prend pas, pressée qu’elle est par le travail de la pulsion de mort, de la haine, de la destructivité, dans les guerres, les injustices, mais tout autant dans les menaces, multipliées par l’homme, pour la planète.
La pensée est un fragile, mais indispensable rempart ; elle est un nom de l’espérance pour un monde au bord du gouffre.