La distinction public-privé aux États-Unis et la tradition doctrinale du legal process

DOI : 10.35562/droit-public-compare.383

Abstracts

La tradition doctrinale du legal process est centrale dans la pensée juridique américaine, parce qu’elle représente une proposition intermédiaire, en réunissant certaines intuitions de la pensée juridique classique et du réalisme. Plus spécifiquement, dès lors qu’elle est comprise au travers de la distinction public-privé, l’école du legal process peut se donner à voir comme une tentative, celle de construire une théorie de la gouvernance par le droit, en dépassant la manière traditionnelle d’envisager cette opposition. Cet article met en perspective les principales conclusions de cette thèse et justifie l’emploi fait de la méthode culturelle en droit comparé. Bien que l’objectif n’ait pas été de comparer les États-Unis et la France, ce travail offre rétrospectivement une analyse comparatiste, en montrant que la distinction entre le droit privé et le droit public est partiellement similaire entre ces deux systèmes et toujours instructive, dès lors qu’il s’agit de mettre en lumière le rôle qui incombe à l’État dans toute société politique libérale.

The Legal Process tradition is central in American jurisprudence, because it offers a middle path between classical legal thought and legal realism. More specifically, understood through the public-private divide, the legal process school appears as an attempt to build a governance theory, going over the historical understanding of this divide. This paper explains the main conclusions of this thesis and justifies why the cultural approach in comparative law is here relevant. Although the objective was not strictly to compare the United States and France, this work offers a retrospective comparative analysis, by showing that the distinction between public law and private law is partly similar and always instructive when it comes to highlighting the role the state has to play in every liberal political society.

Outline

Text

Cette thèse, soutenue en novembre 2020 à l’université Paris II Panthéon-Assas, est consacrée à la distinction public-privé aux États-Unis et à la tradition doctrinale du legal process. Elle était destinée à éclairer les origines, l’originalité, mais aussi la postérité d’un « courant doctrinal », le legal process, qui tire son nom du casebook éponyme de ses deux principaux membres : Henry M. Hart Jr. et Albert Sacks1. Comme les auteurs processualistes n’ont pas manifesté une volonté explicite de créer une école de pensée, mes travaux de recherche mettent en perspective les grandes œuvres que la doctrine américaine rattache habituellement au legal process, celles de Henry Hart Jr., Albert Sacks, Lon L. Fuller, Herbert Wechsler, John Hart Ely et Alexander Bickel (1.). La méthode choisie se rapproche de la méthode culturelle en droit comparé (2.).

Présentation de la thèse

Ces recherches étaient justifiées par le constat qu’il existait très peu de littérature française qui était consacrée au processualisme, alors que celui-ci constitue un maillon de l’histoire de la pensée juridique américaine. En premier lieu, il se présente comme une transition historique entre deux courants mieux connus en France, que sont le réalisme juridique et les critical legal studies. En second lieu, il prend la forme d’une troisième voie théorique entre la pensée juridique classique de la fin du xixe siècle et le réalisme. Dans ses gènes, le legal process est en effet une réponse critique formulée par la communauté juridique de Harvard à l’encontre du réalisme juridique à la suite de la Seconde Guerre mondiale. Dans cette optique, la proposition processualiste nuance les critiques portées par les réalistes à l’encontre de la certitude et de la rationalité du droit. Il s’agit de tempérer la crainte que le droit soit posé par des acteurs irrationnels, qui seraient guidés par leurs caprices et non contraints par un droit au contenu ambigu. Leur projet consiste ainsi à défendre la rationalité du droit et son indépendance face à la politique partisane. Cette ambition est intimement liée à la rule of law, à la soumission de l’ensemble des individus – qu’ils soient gouvernés ou gouvernants – au droit. Les processualistes reprennent dès lors l’ambition des juristes classiques de la fin du xixe siècle, celle de fonder un gouvernement du droit et non des hommes en limitant le pouvoir discrétionnaire des gouvernants et des juges. En parallèle, pourtant, les auteurs du legal process sont indéniablement les héritiers de la sociological jurisprudence et du réalisme. La critique du raisonnement déductif et de l’isolement du droit face à des considérations extrajuridiques a en effet emporté la conviction durable selon laquelle le droit était avant tout orienté vers la société. Dans une perspective proche, les processualistes présentent le droit comme un outil d’ordonnancement social, de mise en ordre de la société (means of social ordering). Ils font ainsi leur la conception instrumentale du droit : le droit est également un instrument de gouvernement à la disposition de l’État. Les processualistes synthétisent dès lors les propositions classique et réaliste à partir des années 1940.

Dans ce cadre, leurs travaux suivent une approche commune, qui s’articule autour de trois idées fortes. Premièrement, le juriste doit se concentrer sur les processus de formation et d’application du droit plutôt que sur le contenu de ce dernier. Les processualistes sont pragmatiques : le juriste doit comprendre comment les processus d’élaboration et d’application du droit sont liés les uns aux autres. Il les examine, les perfectionne et les utilise pour répondre efficacement aux attentes sociales. Deuxièmement, les acteurs doivent respecter les contraintes qui pèsent sur leur raisonnement et leur processus décisionnel. Ils sont soumis à une intégrité procédurale, qui leur impose de suivre les préceptes de la raison pour élaborer un droit de qualité, qui soit capable de répondre aux aspirations sociales (reasoned decision-making). Troisièmement et enfin, les processualistes proposent une méthode pour répondre aux différends nés de la vie en société : il serait possible de classifier les questions et conflits sociaux ; puis de les résoudre, en les aiguillant vers l’institution la plus compétente. Cette méthode suppose de comparer les avantages et les défauts des différentes options institutionnelles disponibles, pour arbitrer entre les acteurs juridiques qu’ils soient publics ou privés. Selon les processualistes, cette méthode présente deux principaux avantages. D’une part, elle est utilitariste : elle est censée garantir l’adoption d’un droit qui « maximise la satisfaction » des besoins et désirs sociaux2. D’autre part, cette méthode protègerait la nature démocratique du régime américain : les individus sont invités à participer à l’ensemble des processus décisionnels pour défendre leurs intérêts. Le pluralisme assure la qualité de la décision adoptée.

Pour expliquer la perspective processualiste, j’ai fait deux choix.

Le premier a consisté à la replacer dans une histoire plus générale de la pensée juridique américaine, parce que le legal process se présente comme une synthèse de certaines propositions de la pensée classique et du réalisme. Mais, plus encore, l’examen de la pensée juridique américaine atteste d’une maturation progressive de la manière de penser en juriste, de l’enracinement progressif des théories dans la culture juridique, malgré les ruptures et les discontinuités suggérées par les théories critiques, au premier rang desquelles figurent le réalisme et les critical legal studies. Les débats doctrinaux ne conduisent pas à des tables rases répétées, mais à la construction d’un socle culturel et juridique partagé. Les juristes s’appuient sur celui-ci, souvent de manière instinctive, pour faire le droit et le penser. Par exemple, la méthode des cas (case method) du professeur de droit privé de la fin du xixe siècle Christopher C. Langdell a été profondément critiquée par les réalistes dès le début du xxe siècle, pour son incapacité à rendre compte du raisonnement juridictionnel effectivement suivi. La complétude du droit et la méthode déductive apparaissaient en effet grandement illusoires aux yeux de la pensée réaliste. Pourtant, cette critique frontale du raisonnement formaliste déductif n’a pas emporté la disparition de cette méthode ; elle a plutôt été modernisée, de sorte qu’il est aujourd’hui admis qu’il convient d’expliquer le raisonnement du juge en prenant également appui sur des éléments extrajuridiques, au sens où pouvait l’entendre Langdell3. Il s’agit ainsi bien d’affiner la présentation orthodoxe du raisonnement juridique en conséquence de ces chocs exogènes4.

Mon second choix a consisté à étudier le legal process en le confrontant à la définition doctrinale de la distinction public-privé aux États-Unis. L’objectif est d’expliquer pourquoi la doctrine définit aujourd’hui principalement le droit comme un outil d’ordonnancement social, en insistant sur la collaboration entre les acteurs privés et publics pour la production du droit. Tracer la frontière entre l’action publique et le champ d’autonomie des personnes privées suppose d’opérer un choix stratégique, qui ne dépend plus d’une concurrence entre les acteurs. Leur collaboration harmonieuse dans le cadre de la gouvernance est supposée permettre d’ajuster les intérêts en concurrence et d’adopter des règles de droit répondant aux objectifs sociaux. Nos conclusions proposent d’expliquer cet état actuel de la pensée juridique en examinant l’histoire de la critique de la distinction public-privé libérale, telle qu’elle était pensée à la fin du xixe siècle. En effet, la proposition du legal process, qui a influencé la manière actuelle de définir le droit comme un moyen d’ordonnancement social, pouvait apparaître, de prime abord, contre-intuitive dans un système politique libéral. Les processualistes ambitionnent en effet de définir le champ d’action des institutions publiques et des acteurs privés, non plus en fonction du souci de protéger les droits de l’individu face à l’État, mais seulement dans l’optique d’adopter un droit efficace pour répondre aux besoins sociaux. Ils aiguillent donc les différends socio-économiques vers le forum décisionnel le plus adapté ; ce qui revient à comparer sur un même plan analytique, par exemple, le recours au contrat de droit privé, l’emploi de la législation ou la délégation législative de compétences à des agences administratives. Il n’est donc pas question de protéger l’autonomie des individus en insistant sur la garantie principielle des droits individuels face à l’État. Le projet consiste davantage à arbitrer entre des options institutionnelles comparables, pour des raisons tenant à l’efficacité du droit. Il n’existe donc pas de préférence initiale à la faveur de l’autonomie individuelle ou de l’interventionnisme étatique. En ce sens, le legal process prend partiellement la forme d’une remise en cause du discours libéral classique de la fin du xixe siècle. Cette proposition théorique se comprend à la lumière du tournant qui se produit à partir des années 1920 en doctrine, avec les réalistes américains : ces derniers insistent sur l’utilité et la finalité sociales du droit, en considérant que l’État peut modeler l’ensemble des règles de droit pour réaliser ses ambitions.

Cette définition du droit s’inscrit en rupture avec une manière traditionnelle d’envisager la protection de l’autonomie de l’individu face à l’État, qui semble assez éloignée et étrangère à notre manière de concevoir ces questions en France. Aux États-Unis, au xixe siècle, le juge ne représente traditionnellement pas l’État ; il garantit les droits prépolitiques et naturels de l’individu face au pouvoir public, sans que la décision de justice ne représente la contrainte publique. Par exemple, quand le juge contrôle que les lois respectent la liberté contractuelle, il limite strictement l’intervention de l’État pour protéger l’autonomie privée, sans que son raisonnement soit perçu comme politique. En effet, pour définir le sens de la liberté contractuelle, le juge prend appui sur la common law qui autorise les parties à définir le contenu de leur contrat de droit privé. Le juge emploie le raisonnement déductif et applique les grands principes du droit privé, sans opter pour la solution qu’il pense être la plus pertinente face aux objectifs du gouvernement. Le juge peut dès lors déclarer que les lois qui contreviennent à l’autonomie individuelle sont inconstitutionnelles, sans participer lui-même à la contrainte politique5. Cette idée a été largement remise en cause dans les premières décennies du xxe siècle. Les réalistes affirment alors que le juge représente l’État lorsqu’il détermine, par exemple, quels contrats doivent être exécutés. Le juge définit de manière discrétionnaire quel est le champ de l’autonomie de l’individu face à l’État. La liberté contractuelle n’est donc pas prépolitique, mais concédée par l’État. La manière de dissocier la sphère d’action des personnes privées et celle du pouvoir public dépend d’un choix politique volontariste ; que celui-ci soit l’œuvre du juge ou du législateur. Au-delà du dualisme entre le droit privé et le droit public, le droit est, dans son ensemble, un instrument de gouvernement.

Cette évolution constitue les prémisses de la méthode processualiste. Cette analyse est ainsi explicative de certaines tendances de la doctrine américaine.

En premier lieu, elle contribue à expliquer l’importance que revêt le droit en action dans la pensée juridique américaine contemporaine : le droit est un outil de mise en ordre la société, destiné à répondre aux besoins sociaux. Par exemple, l’analyse économique du droit portée entre autres par Richard Posner entretient une certaine proximité avec le legal process. Ce sont des discours instrumentaux sur le droit, qui sont les héritiers du réalisme juridique. En ce sens, l’analyse économique du droit tire profit de l’ouverture du droit sur les sciences sociales et prend partiellement appui sur la doctrine de la compétence institutionnelle du legal process, qui a contribué à populariser l’instrumentalisme et la comparaison institutionnelle au sein des écoles de droit6. À rebours des processualistes pourtant, Richard Posner insiste sur l’incapacité du droit à fournir des réponses objectives et rationnelles aux conflits sociaux. La science économique devient dès lors une aide pour élaborer les règles juridiques7.

En deuxième lieu, cette évolution témoigne de la manière dont la doctrine a participé à légitimer et à justifier l’interventionnisme étatique croissant depuis la fin du xixe siècle. L’histoire de la défense, de la critique, puis du dépassement de la distinction public-privé libérale retranscrit un discours doctrinal sur l’État aux États-Unis, qui se décompose en trois temps : l’État libéral, l’État providence et l’État pluraliste.

Premièrement, l’État libéral de la fin du xixe siècle est marqué par une dissociation franche des sphères privée et publique, et par l’idée que le pouvoir public doit avant tout respecter les libertés individuelles. Le règne du droit et non des hommes suppose que celui-ci s’applique de manière égale à tous les citoyens, indépendamment de leurs situations subjectives. L’intervention de l’État répond aux standards constitutionnels seulement si celui-ci démontre un intérêt public et que les moyens qu’il met en œuvre sont strictement en adéquation avec la finalité poursuivie8. Le dualisme du droit privé et du droit public est utile pour le juge, qui peut contrôler strictement l’intervention de l’État dans les relations individuelles, sans que sa décision soit perçue comme motivée par des considérations politiques. Le droit privé est en effet largement présenté par la doctrine comme étant rationnel et indépendant de l’État, parce qu’il est principalement produit par la common law au niveau des juridictions des États fédérés. C’est pourquoi la doctrine est réticente à admettre que l’État puisse modifier l’ensemble des règles de droit pour régir les relations entre les personnes privées pour atteindre ses objectifs politiques : le droit privé dispose de sa propre rationalité, émancipé des politiques étatiques volontaristes. Il fait dès lors partie de l’un des fondements apolitiques au soutien de la protection de certaines libertés individuelles, comme la liberté contractuelle et le droit de propriété.

Deuxièmement, les premières décennies du xxe siècle attestent de la naissance de la figure de l’État providence, qui se caractérise par l’omniprésence de l’État dans la sphère privée. La critique du contrat et de la propriété signifie à l’époque que l’État structure toujours les rapports sociaux, en posant le cadre juridique des interactions privées. Comme l’État intervient déjà dans le cadre de l’économie de marché, il peut aussi agir dans un but de protection sociale. Cette option dépend d’un choix politique. Dans cette optique, le droit privé n’est plus dissocié du droit public. La doctrine insiste plutôt sur leur nature commune : ils sont tous les deux présentés comme étant à la disposition de l’État. Le droit est en effet, dans son ensemble, un instrument de gouvernement. Cette remise en cause de la pertinence du dualisme classique entre le droit privé et le droit public par la doctrine américaine a permis à la fois de légitimer et de renforcer l’action de l’État.

Troisièmement, les processualistes dépassent le dualisme entre le droit privé et le droit public, parce qu’ils conçoivent le droit comme un outil de mise en ordre de la société. L’État pluraliste prend forme sous leur plume au milieu du xxe siècle. Ce dernier désigne deux phénomènes. D’une part, il est demandé à l’État d’organiser le jeu des intérêts et le débat entre les personnes intéressées par la prise de décision. Les individus sont appelés à concourir à la formation de la règle de droit, peu importe le processus décisionnel suivi. L’interaction continue entre les acteurs privés et publics est censée garantir un droit efficace, ce qui témoigne de l’émergence d’une nouvelle manière de gouverner, la gouvernance. D’autre part, les processualistes accordent une attention particulière au pluralisme institutionnel au sein de l’État. Ils évoquent la richesse de l’étude des différents foyers de normativité. Ce choix implique de se décentrer de la seule étude de l’État. Par exemple, pour Fuller, il convient de comprendre comment l’ensemble des acteurs interagissent et la manière dont le droit naît spontanément de la vie en société9. Ces développements nous montrent que ce n’est pas l’État en tant que tel qui est craint aux États-Unis, mais une manière de gouverner qui serait excessivement centralisatrice au risque de menacer les fondements même de l’autonomie des personnes privées.

Enjeux d’une recherche en droit comparé

Plusieurs enjeux de droit comparé se sont posés dans le cadre de mes recherches. Ils recoupent des questions relatives à la méthode choisie, qui se rapproche de la méthode dite culturelle et à l’ambition d’une thèse en la matière.

La première difficulté à laquelle j’ai fait face, lorsque je me suis inscrite en thèse, était évidemment d’en définir le sujet. Voulais-je faire une thèse de droit comparé ? de droit étranger ? est-ce le même exercice ? J’ai alors opté pour une thèse de « droit étranger ». Le projet de cette thèse n’avait en effet pas, a priori, de dimension comparatiste à proprement parler : il n’était pas question de rapprocher la France des États-Unis, en s’intéressant à de potentielles différences ou similitudes entre ces systèmes juridiques. L’objet principal était de présenter la recherche pour ce qu’elle est, pour ce qu’elle nous apprend d’un système étranger. L’étude de la doctrine américaine présentait le mérite de révéler certaines grandes tendances du droit public américain, du fait de la grande proximité qui existe, aux États-Unis, entre la doctrine et la jurisprudence. C’est pourquoi j’ai choisi de mettre en perspective l’évolution de la doctrine juridique américaine avec l’étude de mécanismes juridiques de droit positif (comme les pouvoirs de police, l’expropriation, ou encore la garantie juridictionnelle des contrats de droit privé). Mon ambition était celle de rendre compte de la façon dont la doctrine a progressivement défini le droit comme un outil d’ordonnancement social (means of social ordering).

Cette démarche complète ainsi le fonds de recherche en droit étranger et participe à la compréhension de la culture juridique américaine10. Étudier un droit étranger pour ce qu’il est fait ainsi état d’une préférence pour la méthode « culturelle », selon la typologie des méthodes de droit comparé présentée par Marie-Claire Ponthereau11. Cette méthode a permis de construire la problématique de cette thèse, en dépassant certains a priori sur le système américain.

La mise en œuvre de la méthode culturelle

La méthode culturelle a été privilégiée à deux niveaux principaux.

En premier lieu, mes recherches éclairent certaines représentations intellectuelles qui sont à l’œuvre dès lors que les acteurs pensent et disent le droit. Elles permettent de sonder ce fond culturel pour éclairer l’origine, la signification, mais aussi la particularité de certains lieux communs et cadres de pensée familiers à la communauté juridique américaine. Ce constat peut être fait tant pour le legal process que pour la distinction public-privé.

D’une part, le legal process ne se résume pas à un courant doctrinal identifié, qui serait tombé en désuétude du fait de la critique forte que la doctrine postérieure lui a adressée, comme les critical legal studies et Ronald Dworkin. Cette désuétude n’est pas négligeable, parce que le legal process, entendu comme un courant doctrinal, a certainement vieilli et a fait l’objet d’une forme de marginalisation à l’université. Pourtant, la perspective processualiste sur le droit s’est fondue dans la pensée juridique américaine et la manière contemporaine de concevoir le droit public. La manière de penser en juriste s’est formée par couches successives, de sorte que l’influence du legal process se situe au sein d’un environnement intellectuel pluraliste. La méthode processualiste reste en ce sens pertinente pour montrer comment, par exemple, les relations entre le juge, les agences administratives et le législateur se sont nouées au niveau fédéral depuis le milieu du xxe siècle. C’est la raison pour laquelle le legal process peut être qualifié de tradition doctrinale, certaines idées processualistes (comme la rationalité procédurale de la décision ou la doctrine de la compétence institutionnelle) étant devenues habituelles et ordinaires dans le paysage juridique américain.

D’autre part, la distinction public-privé charrie également, avec elle, un ensemble de représentations qui sont révélatrices d’une pensée doctrinale de l’État aux États-Unis. En effet, la distinction entre le droit privé et le droit public ne se limite pas à une distinction disciplinaire. Elle fait aussi état d’une différence d’esprit entre eux : le droit privé serait le droit de la liberté individuelle ; le droit public celui de l’autorité de l’État. La doctrine va donc parfois considérer que l’immixtion croissante de l’État dans les relations entre les individus, par l’adoption de normes impératives, est la manifestation d’une « publicisation » du droit privé. De manière assez surprenante pour un juriste français, certains mécanismes de droit privé sont ainsi parfois théoriquement rattachés au droit public, leur fonctionnement dépendant d’une décision étatique qui s’impose au contrat de droit privé – que cette décision soit celle du juge, du législateur ou des agences administratives. Par exemple, l’unconscionability est un standard utilisé par le juge pour contrôler le caractère déraisonnable des accords entre personnes privées. Certains vont considérer que ce contrôle est la preuve d’une interférence de l’État en droit privé : les juges imposent en effet un standard extérieur aux individus, en leur adressant des contraintes auxquelles ils n’ont pas consenti. Ces auteurs critiquent en ce sens l’autonomie et la rationalité interne propre du droit privé : il est question, en révélant cette influence de l’État, de montrer que le privé est politique et que dans son ensemble, le droit est un instrument de gouvernement. D’autres, au contraire, continuent de protéger l’autonomie du droit privé en souhaitant canaliser l’ingérence de l’État dans les relations privées ; le standard de l’unconscionability est ainsi cette fois-ci présenté comme protecteur de l’autonomie individuelle. Le caractère déraisonnable de l’accord démontrerait une absence de consentement véritable de l’une des parties au contrat, de sorte qu’il n’y aurait, in fine, aucun contrat à exécuter. Le juge se bornerait dès lors à tirer les conséquences du comportement des parties, sans que son contrôle ne mette en œuvre des politiques publiques destinées à lutter contre le déséquilibre du pouvoir de négociation contractuelle (unequal bargaining power). Cette manière d’ordonner les règles de droit, en les associant théoriquement au droit privé ou au droit public, illustre la manière dont la doctrine conçoit les relations entre l’État et les personnes privées, ainsi que le rôle approprié du premier.

En second lieu, cette immersion dans la culture juridique américaine n’avait pas pour vocation première de systématiquement faire œuvre de comparaison avec le cadre français. Une affinité existe entre cette méthode et certains choix méthodologiques et rédactionnels que j’ai faits. Premièrement, j’ai d’abord travaillé exclusivement sur des sources américaines originales, en langue anglaise. Pour retracer une histoire de la pensée juridique, il était en effet important de s’immerger dans la manière dont les juristes américains rendent compte du droit et du raisonnement juridique. Il s’agissait de suivre l’évolution de l’utilisation de certains concepts et notions juridiques, sans dépendre d’une traduction proposée par des lecteurs français. Deuxièmement, je n’ai pas traduit certaines notions ; ou, ai parfois préféré exclure certaines traductions, afin d’éviter qu’un lecteur français projette un lot de représentations spécifiques à la France en lisant une thèse pourtant consacrée à un système juridique étranger.

Certains intraduisibles témoignent, tout d’abord, de cette démarche culturelle. Quatre exemples l’illustrent : l’adjudication, le due process, la consideration et l’enforcement. Tout d’abord, j’ai choisi de ne pas traduire « adjudication » par « fonction juridictionnelle », parce que la notion anglo-américaine fait à la fois référence à la fonction juridictionnelle et au processus de décision suivi. Ce terme désigne l’activité consistant à trancher des différends individuels, en argumentant juridiquement et en motivant la décision. Ensuite, la notion de « due process », centrale en droit constitutionnel américain, désigne l’ensemble des garanties dues à l’individu en application du droit. Elle recouvre à la fois les garanties procédurales, principalement liées au respect des procédures de décision et au droit d’accès à un juge (procedural due process) et les garanties substantielles des droits individuels (substantive due process). Les citoyens ne peuvent pas être privés de leur vie, de leur liberté et de leur propriété sans « due process of law12 ». Cette notion véhicule ainsi un projet politique libéral de « protection de l’être humain face au pouvoir organisé13 ». Certaines traductions peuvent certes être envisagées, comme les « garanties dues par le droit ». Elles présentent cependant l’inconvénient de ne pas restituer, à elles seules, la spécificité de la clause du due process et son histoire intimement liée à l’activisme de la Cour suprême14. Enfin, certains intraduisibles sont également présents en droit privé, comme la consideration et l’enforcement. La consideration est une condition essentielle à la formation du contrat de droit privé. Elle se distingue de l’ancienne exigence de « cause » en droit français. En common law, la consideration suppose un effort de négociation et de marchandage entre les parties, de sorte que chacun doit donner quelque chose en échange de la promesse formulée15. Quant à l’enforcement, il décrit l’exécution du contrat par les juridictions, qui octroient à l’accord privé une force obligatoire. Cette notion est difficilement traduisible, parce qu’elle désigne l’exercice de la force « autorisée, une force qui se justifie ou qui est justifiée à s’appliquer » pour exécuter un accord privé16 – idée que la traduction française d’exécution juridictionnelle du contrat ne permet pas de retranscrire précisément.

J’ai arbitré, ensuite, en faveur de certaines traductions qui sont destinées à éviter un contresens, qui pourrait naître d’une identification intuitive entre les cadres intellectuels français et américain. Tout d’abord, il est communément admis que le rule of law ne peut pas se comprendre dans les termes de la distinction classique entre l’État de droit et l’État de police que l’on retrouve chez Carré-de-Malberg, avec sa théorie de l’autolimitation de l’État par le droit. La primauté du droit fait plutôt écho au pouvoir du droit, auquel sont soumis les citoyens et les dirigeants. La soumission au droit est source de liberté, car l’individu libre est celui qui n’est pas soumis au pouvoir arbitraire d’un autre, mais à un droit prévisible et impersonnel. Le « règne du droit » ou la « prééminence du droit » permettent ainsi de marquer cette différence culturelle importante entre la France et le monde anglo-américain. Ensuite, pour évoquer l’État ou les manifestations de sa volonté, j’ai fait deux choix. Le premier a consisté à délaisser la notion de « puissance publique » qui retranscrit, pour le lecteur français, un ensemble de représentations culturelles très liées à l’histoire française du droit administratif. La notion privilégiée ici de « pouvoir public » permet ainsi de montrer que les juristes américains n’ont pas notre culture de l’État et qu’il n’est pas question de reconnaitre une « puissance publique » en tant que telle17. Dans la continuité de ce premier point, mon second choix a consisté à concevoir l’État dans son opposition au pouvoir privé et à comprendre comment se manifeste l’État par l’examen de processus de gouvernement, c’est-à-dire des différentes manières de gouverner la collectivité et d’organiser la res publica. L’État est ainsi représenté par les différentes autorités publiques normatives distinctes des acteurs privés, qui disposent du monopole de la contrainte collective et d’un appareil suffisant à réaliser leurs prétentions, selon des formes impersonnelles. Les juristes américains passent ainsi très souvent sous silence la souveraineté, lorsqu’ils évoquent l’État en l’accompagnant d’une épithète : l’État libéral (liberal state), l’État administratif (administrative state), l’État providence (welfare state) ou encore l’État régulateur (regulatory state) ont tous trait à un type particulier de relations qui unissent l’individu au pouvoir public.

L’intérêt de la méthode culturelle

Cette approche culturelle a présenté l’intérêt de dépasser certains lieux communs, concernant notamment la distinction public-privé, qui pouvait être intuitivement perçue comme insignifiante aux États-Unis. Cette méthode permet ainsi de procéder plus explicitement à une comparaison ultérieure entre les systèmes juridiques, pour en révéler les points communs et les différences.

Certaines similitudes existent ainsi entre la France et les États-Unis à propos de l’opposition entre le droit privé et le droit public. Certes, des différences nettes ne peuvent pas être ignorées ; il n’existe pas, aux États-Unis, de dualisme juridictionnel et l’État n’est pas compris en des termes similaires à la France. Cependant, plusieurs similitudes méritent d’être notées. Une distinction disciplinaire semblable, à l’exception du droit pénal, peut être constatée. Mais, plus encore, le droit privé et le droit public sont marqués par une philosophie différente18 : le droit privé est celui de l’autonomie et de la liberté de l’individu ; le droit public celui de l’autorité de l’État et de l’unilatéralité19. Dans ce cadre, la question de la « publicisation » du droit privé devient un enjeu en doctrine dans les premières décennies du xxe siècle : une règle va relever théoriquement du droit public si l’État a participé à son édiction, qu’elle représente une contrainte définie par l’État et qu’elle est imposée aux personnes privées dans un souci de protection des intérêts de la communauté. Lorsque le pouvoir public étend son emprise sur les relations privées, la doctrine américaine a donc tendance à y voir la manifestation d’une « publicisation » du droit privé. Le réaliste américain Morris Cohen décrit alors le droit privé des contrats comme une « branche subsidiaire20 » du droit public dans les années 1930 : il appartient aux parties de déclencher le pouvoir coercitif de l’État lorsqu’elles demandent l’exécution juridictionnelle du contrat. Sans l’intervention du juge, l’accord entre les parties n’aurait aucune force juridique obligatoire21. De la même manière, Leon Green qualifie le droit de la responsabilité délictuelle de « droit public déguisé22 » (public law in disguise). Pour déterminer l’existence d’un duty of care23, le juge doit en effet mettre en balance différents intérêts sociaux et politiques « en dehors et au-delà des intérêts des parties aux litiges24 », c’est-à-dire en prenant en considération les intérêts de la communauté. En France, le dualisme du droit privé et du droit public a aussi pu se comprendre en fonction d’une perception de la place et du rôle de l’État dans les relations individuelles. Benoît Plessix remarque ainsi qu’une partie des privatistes conservateurs ont, à la suite de la Seconde Guerre mondiale, pris note d’une « fusion-absorption du droit privé par le droit public » du fait du développement de la législation applicable aux relations privées25. C’est pourquoi, René Savatier, dans le contexte de l’essor de l’État providence, exprime à l’époque ses inquiétudes face à la publicisation du droit privé et à la soumission croissante de l’individuel au collectif26. Il dénonce l’emprise croissante de règles impératives sur les relations individuelles. De la même manière, Georges Ripert fait du droit public, comme outre-Atlantique, un droit extérieur aux particuliers en 1949. Remarquant l’accroissement des règles juridiques protectrices des travailleurs placés dans une situation de faiblesse et d’inégalité, Ripert écrit :

« Pour protéger les uns et désarmer les autres, il faut nécessairement faire appel à une force supérieure à tous. Cette force ne peut être que celle de l’État. Si elle intervient dans les rapports privés entre les hommes, le droit privé cède le pas aux règles de droit public. La publicisation est le moyen de rendre le droit social27. »

La méthode culturelle a ainsi permis de mettre au jour, a posteriori, des préoccupations communes entre les doctrines française et américaine, par un dépassement de l’idée selon laquelle la summa divisio entre le droit privé et le droit public serait secondaire aux États-Unis.

Notes

1 H. M. Hart Jr. et A. Sacks, The Legal Process: Basic Problems in the Making and Application of Law, The Foundation Press, Westbury, New York, 1994. Return to text

2 La formulation de ce principe est très claire dans H. M. Hart Jr. and A. Sacks, The Legal Process: Basic Problems in the Making and Application of Law, op. cit., p. 104. Return to text

3 Richard Posner, l’un des fondateurs de l’analyse économique du droit, tend ainsi à expliquer les décisions du juge par des critères de rationalité économique, alors que les penseurs des critical legal studies insistent davantage sur l’idéologie et les biais politiques des juges. En ce sens, voir notamment B. Leiter, « Legal Realism, Old and New », Valparaiso University Law Review, 2014, vol. 47, no 4, p. 949-963, p. 954. Return to text

4 Sur ce point, voir notamment G. E. White, « The Inevitability of Critical Legal Studies », Stanford Law Review, 1984, vol. 36, n1 & 2, p. 649-672, p. 650. Return to text

5 C’est notamment le cas de la célèbre décision Lochner, dans laquelle la Cour suprême fédérale déclare inconstitutionnelle une loi de l’État de New York qui réglementait le temps de travail des boulangers, voir Lochner v. New York, 198 US 45 (1905). Return to text

6 En ce sens, voir notamment W. Eskridge Jr. et P. Frickey, « An Historical and Critical Introduction to The Legal Process », in : H. M. Hart Jr et A. Sacks, The Legal Process: Basic Problems in the Making and Application of Law, W. Eskridge Jr et P. Frickey (dir.), The Foundation Press, Westbury, New York, 1994, p. 51-136, p. 122-123. Return to text

7 En ce sens, voir notamment R. A. Posner, Overcoming Law, Harvard University Press, Cambridge, Massachusetts, and London, 1997, p. 34 et s. Return to text

8 La Cour suprême a renforcé le contrôle de constitutionnalité des mesures de police ; voir par exemple les décisions Lawton v. Steele (152 US 133 (1894)) et Chicago, Milwaukee & St. Paul Railway Co. v. Minnesota, 134 US 418 (1890). Dans la continuité de cette évolution, la Cour suprême contrôle strictement la finalité de la loi qui réglementait le temps de travail en boulangerie puis l’adéquation des moyens employés aux finalités poursuivies dans la décision Lochner v. New-York, 198 US 45 (1905). Cet arrêt a donné son nom à l’ère Lochner, pendant laquelle les juridictions contrôlaient strictement les lois, et notamment celles protectrices des travailleurs, sans pour autant les déclarer systématiquement inconstitutionnelles. L’ère Lochner a duré quarante ans. Elle s’étend de la décision Allgeyer v. Louisiana, 165 US 578 (1897), à la décision West Coast Hotel Co. v. Parrish, 300 US 379 (1937). Return to text

9 Ces considérations sont présentes dans l’ensemble des contributions de Lon Fuller relatives à l’eunomie (eunomics), c’est-à-dire « la science, la théorie ou l’étude du bon ordre et des agencements sociaux réalisables », voir L. L. Fuller, « American Legal Philosophy at Mid-Century – A Review of Edwin W. Patterson’s Jurisprudence, Men and Ideas of the Law », Journal of Legal Education, 1953, vol. 6, no 4, p. 457-485, p. 477. Ce projet est au cœur de la moralité interne du droit, que Fuller détaille notamment dans L. L. Fuller, The Morality of Law, Yale University Press, 1964 et dans L. L. Fuller, « Positivism and Fidelity to Law: A Reply to Professor Hart », Harvard Law Review, vol. 71, no 4, 1958, p. 630-672. Return to text

10 Dans le même sens, M.-C. Ponthoreau fait état des « structures profondes de la rationalité juridique selon lesquelles un juriste ne raisonne pas de la même manière suivant son appartenance au monde de la common law ou au monde du civil law », voir M.-C. Ponthoreau, Droit(s) constitutionnel(s) comparé(s), Paris, Economica, coll. « Corpus droit public », 2e édition, 2021, p. 130. Return to text

11 Sur ce point, voir Ibid., p. 69 et s. Return to text

12 Cinquième et quatorzième amendements de la Constitution fédérale. Return to text

13 En ce sens, voir E. Zoller, « Due Process of Law et principes généraux du droit », in : Mélanges en l’honneur de Benoît Jeanneau, Dalloz, 2002, p. 235-247 p. 237. Return to text

14 La clause du due process a en effet servi de fondement à l’activisme de la Cour suprême sous l’ère Lochner, de sorte que celle-ci a par la suite été plus mesurée dans l’application du due process, comme en atteste la jurisprudence de la Cour relative à la protection du droit au respect de la vie privée (right to privacy). La Cour l’a fondé, dans un premier temps dans la décision Griswold v. Connecticut (381 US 479, 1965), sur divers amendements de la Constitution des États-Unis, qui le garantiraient dans leur « pénombre » ; avant de le faire explicitement sur la base du due process dans la décision Roe v. Wade (410 US 113, 1973). Sur ce point, voir notamment M. Fabre-Magnan, L’institution de la liberté, PUF, 1re édition, 2018, p. 34 et s. Return to text

15 Sur ce point, voir notamment P. Malinvaud, D. Fenouillet, M. Mekki, Droit des obligations, LexisNexis, 14e édition, 2017, p. 292 ; B. Bix, Contract Law: Rules, Theory and Context, Cambridge University Press, University of Minnesota, 2012, p. 32-33. Return to text

16 J. Derrida, Force de loi. Le « Fondement mystique de l’autorité », Galilée, 1994, p. 17 et s. Return to text

17 Je remercie sur ce point Maud Michaut pour nos nombreux échanges pendant la rédaction de nos thèses. Pour la présentation de cette idée, voir M. Michaut, L’État administratif aux États-Unis, thèse de doctorat, université Paris II Panthéon-Assas, 2021, p. 69 et s. Return to text

18 En ce sens, voir notamment B. Plessix, Droit administratif, Paris, LexisNexis, 2016, p. 657-658. Return to text

19 En ce sens, voir notamment D. Truchet, Le droit public, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 4e édition, 2018, p. 20. Return to text

20 M. Cohen, « The Basis of Contract », Harvard Law Review, 1933, vol. 46, no 4, p. 553-592. Return to text

21 M. Cohen, « The Basis of Contract », Harvard Law Review, 1933, vol. 46, no 4, p. 553-592, notamment p. 556. Return to text

22 L. Green, « Tort Law Public Law in Disguise: I », Texas Law Review, 1959-1960, vol. 38, no 1, p. 1-13; L. Green, « Tort Law Public Law in Disguise: II », Texas Law Review, 1959-1960, vol. 38, no 3, p. 257-269. Return to text

23 Le demandeur doit prouver le lien de causalité (causation), l’existence d’un devoir de diligence ou de vigilance auquel le défendeur est soumis (duty of care), la violation de ce devoir, la pertinence et la possibilité de réparer le préjudice (remedy). Return to text

24 L. Green, « Tort Law Public Law in Disguise: I », op. cit., 2. Return to text

25 B. Plessix, Le droit public, Que sais-je ?, 2022, p. 5 : « Les nationalisations et les planifications de la Libération, les nécessités de la reconstruction et du développement économique et le développement de législations moins individualistes firent redouter l’avènement d’un socialisme […], au point d’oublier que, même dans une démocratie libérale, l’État est toujours le créateur et le gardien de toutes les règles de droit ». Return to text

26 Le droit privé devenait alors un moyen de protéger l’autonomie individuelle. En ce sens, voir O. Beaud, « La distinction entre droit public et droit privé : un dualisme qui résiste aux critiques », in : J.-B. Auby et M. Freedland (dir.), La distinction du droit public et du droit privé : regards français et britanniques, Paris, LGDJ, éditions Panthéon-Assas, 2004, p. 29-46, p. 30 et s. Sur ce point, voir R. Savatier, Du droit civil au droit public à travers les personnes, les biens et la responsabilité civile, Paris, LGDJ, 1945. Return to text

27 G. Ripert, Le Déclin du droit. Études sur la législation contemporaine, Paris, LGDJ, 1949, p. 39. Plus généralement, voir le chapitre II, « Tout devient droit public », p. 37-66. Return to text

References

Electronic reference

Mathilde Laporte, « La distinction public-privé aux États-Unis et la tradition doctrinale du legal process », Droit Public Comparé [Online], 2 | 2024, Online since 02 juillet 2024, connection on 01 août 2025. URL : https://publications-prairial.fr/droit-public-compare/index.php?id=383

Author

Mathilde Laporte

Professeur de droit public, université de Pau et des Pays de l’Adour, E2S UPPA, CDRE, Bayonne

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