Les représentations de l’identité nationale dans le discours du pouvoir russe contemporain

L’enjeu de la légitimation

DOI : 10.35562/elad-silda.1127

Cet article est consacré à l’étude des stratégies discursives de plusieurs personnalités politiques, particulièrement présentes dans le champ communicatif et médiatique en Russie contemporaine depuis les dix dernières années. L’analyse qualitative d’un corpus sélectionné selon plusieurs critères, dont le caractère dialogal des échanges, permet de dégager dans un premier temps des représentations discursives de l’identité nationale qui s’inscrivent dans un modèle plus large que les gouvernants russes cherchent à promouvoir devant leurs publics. Dans un second temps, cette étude montre comment ces représentations identitaires sont utilisées dans les stratégies discursives à des fins de légitimation. Il s’agit notamment des procédés visant à argumenter le modèle identitaire que le pouvoir propose à la société tout en légitimant sa place à l’avant-garde de la nation. D’autre part, la légitimité est recherchée par les autorités russes à travers la stratégie d’autoreprésentation où les différents traits d’une identité collective permettent de construire un éthos individuel d’un dirigeant légitime et un éthos institutionnel d’un pouvoir politique identifié à la nation.

Данная статья посвящена исследованию дискурсивных стратегий нескольких политических деятелей, занимающих последние десять лет доминирующее положение в коммуникативном и медийном поле современной России. Качественный анализ корпуса, отобранного по нескольким критериям, включая диалогический характер дискурса, позволяет выявить ряд дискурсивных репрезентаций национальной идентичности, включенных в более широкую модель нации, которую российские лидеры стремятся продвигать перед своей аудиторией. Проведенное исследование показывает, как эти репрезентации идентичности используются в дискурсивных стратегиях, направленных на легитимацию. В частности, речь идет о речевых тактиках, направленных на построение модели идентичности, которую коммуникант представляет как релевантную обществу, легитимируя при этом свое место в авангарде нации. С другой стороны, российская власть позиционирует свою легитимность через стратегию самопрезентации, где различные черты коллективной идентичности позволяют сконструировать индивидуальный этос легитимного лидера и институциональный этос политической власти, отождествляемой с нацией.

This article is intended to study the discursive strategies of several political figures, particularly present in the field of communication and media in contemporary Russia over the last ten years. The qualitative analysis of a corpus selected according to several criteria, including the dialogical nature of the exchanges, makes it possible to identify discursive representations of national identity that are part of a broader model that Russian officials are seeking to promote before their audiences. Secondly, this study shows how these identity representations are used in discursive strategies for the purposes of legitimation. These include processes aimed at arguing the identity model that power proposes to society while legitimising its place in the vanguard of the nation. On the other hand, legitimacy is sought by the Russian authorities through the strategy of self-representation where the different features of a collective identity allow the construction of an individual ethos of a legitimate leader and an institutional ethos of a political power identified with the Nation.

Plan

Texte

Introduction

Depuis sa consolidation au début des années 2000, le pouvoir politique russe actuel, soucieux de sa pérennisation, construit un système de communication avec la population où l’usage de diverses stratégies discursives permet de mettre en valeur l’efficacité, la crédibilité et surtout la légitimité de ce pouvoir. Dans l’espace discursif des dirigeants russes, le défi de la légitimation est relevé, en particulier, au moyen des stratégies d’autoreprésentation et d’argumentation, comportant à leur tour des procédés langagiers utilisés pour construire respectivement divers éthos d’identification [P. Charaudeau 2005 : 106] ou pour argumenter la légitimité de son action devant des destinataires parfois multiples. Cet article propose ainsi une approche de l’analyse du discours par l’étude qualitative des stratégies de ce discours et de la rhétorique politique.

Les stratégies discursives du pouvoir russe pendant les dix dernières années, et surtout depuis la crise de 2014 en Ukraine, sont marquées par l’accent mis sur les représentations de l’identité nationale. Cela se manifeste tant dans la construction des raisonnements que dans la construction de l’image de soi. En Occident, certains journalistes et observateurs de la vie politique en Russie évoquent le renforcement du discours nationaliste de V. Poutine en lui conférant des ambitions expansionnistes [J. Ioffe 2017 ; D. Vernet 2013]. La question se pose donc, dans un premier temps, de la nature des représentations de cette identité nationale et des moyens déployés pour construire diverses facettes de cette identité. Les interrogations portent également sur les procédés discursifs visant à justifier le modèle identitaire que le pouvoir propose à la population en cherchant son adhésion. D’une manière plus générale, s’agit-il de délégitimer, par la défense de caractéristiques nationales enracinées dans une tradition propre, le processus même de la globalisation, pointée, entre autres, comme une tendance néfaste pour la souveraineté de la Russie ? Peut-on voir dans les représentations discursives une tentative de saper, au nom de la relativité culturelle, tout sentiment d’adhésion aux valeurs universelles, suspectées de faire le jeu des anciennes puissances dominantes ?

À partir de l’analyse des représentations de l’identité, la question se posera de la place et du rôle que le pouvoir s’attribue dans son projet de reconstruction de la nation. En quoi le pouvoir voit-il sa légitimité dans ce modèle identitaire ? Peut-on parler d’une corrélation entre l’imaginaire de modernité, et celui de la tradition [P. Charaudeau 2007 : 52] ? Comment l’économisme et le technologisme sont articulés au traditionnel, alors que les autorités prêchent le pragmatisme et l’efficacité dans un monde où tout est soumis à la concurrence des uns et des autres ?

L’analyse qualitative porte sur un corpus, composé de 70 verbatim de conférences de presse et d’interviews de plusieurs personnalités politiques russes (S. Lavrov, D. Medvedev, V. Medinski, V. Poutine) qui, sans avoir aujourd’hui la même fonction et le même statut communicatif que par le passé, ont toutefois participé, pendant la période allant de 2008 à 2019, à la promotion par la mise en discours du modèle identitaire national. L’étude qualitative de ce type de discours considéré ici comme dialogal [J. Bres 2005 : 54] nous conduira à dégager les différentes représentations de l’identité qui sont utilisées dans les stratégies discursives des communicants, à des fins de légitimation du régime en place en général, et de soi en particulier. Le caractère dialogal du discours supposant l’interaction des interlocuteurs nous amène également à prendre en considération l’orientation des communicants vers des destinataires effectivement présents au moment de l’échange, ou potentiellement récepteurs, ainsi que d’autres facteurs, comme le moment et le lieu de la production du discours, le statut du communicant au moment de son intervention. Tous ces paramètres permettront d’affiner les visées légitimatives en fonction du contexte et de la situation de communication.

Les représentations d’une nouvelle identité avec ses enjeux et contradictions

C’est à partir du début des années 2000 que le pouvoir russe commence à prendre conscience du fait que « dans le monde de la communication globale, les représentations deviennent un facteur matériel dont le poids est égal, et parfois supérieur, aux formes classiques d’affirmation de la puissance » [F. Loukianov 2013 : 148]. Ainsi, on cherche des appuis à sa légitimité dans l’ambiguïté des constructions idéologiques, en se tournant vers les idées conservatrices et patriotiques, tout en prêchant le libéralisme économique. Les autorités russes évitent de s’imposer un cadre idéologique trop rigide qui limiterait leur marge de manœuvre et le soutien de la population. La vision du monde du Kremlin peut être suffisamment précise pour délégitimer les adversaires potentiels, mais elle reste, en même temps, assez large pour que le plus grand nombre puisse y adhérer et reconnaitre ainsi sa légitimité au pouvoir.

Il y a donc un prérequis minimal pour s’inscrire dans ce cadre. Ce prérequis est centré principalement sur les manifestations d’un « patriotisme raisonnable ». En dehors de ce cadre commun, il est possible d’exposer différentes doctrines politiques, allant de l’apologie de l’Empire russe et du panslavisme jusqu’aux projets de restauration de l’Union soviétique. Le Kremlin laisse d’ailleurs ces différents courants d’idées s’affronter dans des rapports de concurrence en s’attribuant le rôle d’arbitre « au-dessus de la mêlée ». Ainsi, lors de son intervention à la conférence du Club de Valdaï1, Vladimir Poutine assimile le pluralisme politique à un marché libéral où les idées se trouvent dans des rapports de concurrence, avec une très faible intervention de l’État2.

(01) Я думаю, что государство должно делать это очень аккуратно, предоставляя возможность людям с разными точками зрения формулировать свои позиции, высказывать и конкурировать, допустим, с Вашей позицией. Может быть, это даже неожиданно с моей стороны прозвучит, но я считаю, что это именно так. (Poutine, Valdaï, 18.10.2018)

À certains moments, les concepts et notions des uns et des autres sont repris dans le discours officiel et abandonnés ensuite s’ils ne remplissent pas la fonction intégratrice recherchée par le pouvoir. C’est ainsi que les idées néo-eurasistes ont fourni un cadre conceptuel au projet d’Union économique eurasienne et à celui du Monde russe en 2014-2015. L’intérêt pour ces concepts commence à se manifester particulièrement dans le discours officiel à partir de la publication d’un article de Vladimir Poutine le 23 janvier 2012. Ce texte, considéré comme un des points du programme électoral de Poutine, semble donner des gages sérieux aux idées mettant en valeur le particularisme de la Russie.

Il s’agit en effet de reprendre le concept d’État-nation pluriethnique, avec un vocabulaire qui en introduit les notions de base, comme le « code culturel » (kul’turnyj kod), le « peuple russe bâtisseur d’État » (gosudarstvoobrazujuščij narod), les « attaches spirituelles » (duxovnye skrepy). En somme, le discours du pouvoir s’approprie des mots-clés inspirés des travaux du philosophe slavophile Nikolaï Danilevski (1822-1885), dont la vision critique de la civilisation européenne et de l’eurocentrisme a été largement relayée dans l’Empire russe à la fin du xixe siècle.

(02) Русский народ является государствообразующим – по факту существования России. Великая миссия русских – объединять, скреплять цивилизацию. […] скреплять русских армян, русских азербайджанцев, русских немцев, русских татар. Скреплять в такой тип государства-цивилизации, где нет «нацменов», а принцип распознания «свой–чужой» определяется общей культурой и общими ценностями (Poutine, 23.01.2012).

Dans la lignée de l’article de Poutine, le discours du pouvoir se saisit de l’idée de Danilevski selon laquelle la Russie, avec son parcours historique particulier, sait comment construire une société pluriethnique unie. Elle sait comment gérer les contradictions interethniques internes. De ce fait, elle se positionne à l’avant-garde de l’Europe et peut même lui servir d’exemple. Cette idée du rôle messianique de la Russie, pour l’Europe ayant oublié ses racines, a été modernisée et remise à jour dans le contexte contemporain, marqué par la globalisation et la crise des États-nations.

La généralisation du nationalisme

Malgré une certaine attractivité de l’idée messianique flattant la fierté nationale, le public susceptible de la partager sans réserve semble être relativement restreint. Le risque est ainsi bien réel de s’enfermer dans une doctrine nationaliste qui ne trouve pas que des adeptes dans la société russe, qui est loin d’être homogène sur les plans ethnique, culturel ou idéologique. C’est ainsi que le modèle identitaire pluriethnique est justifié par la confrontation de diverses représentations du nationalisme, mettant en avant un « nationalisme raisonnable ». Certes ce concept manque de précision et se fonde principalement sur une opposition entre un « nationalisme de caverne », primitif et destructeur, prônant la primauté des Russes par rapport à d’autres ethnies, et une certaine idée patriotique respectant l’égalité des peuples au sein d’une nation. Cependant, en évitant les détails sur le fond par l’introduction de qualificatifs d’appréciation de ce qu’il ne doit pas être (durackij, priduročnyj), Poutine présente sa vision du nationalisme comme un pilier idéologique légitime et l’outil indispensable d’une mobilisation sociale dont dépendrait la survie de l’État et de la nation.

(03) А если мы будем выпячивать такой пещерный национализм вперёд, поливать грязью представителей других этносов, мы развалим страну, в чём не заинтересован русский народ. А я хочу, чтобы Россия сохранилась, в том числе и в интересах русского народа. И в этом смысле я и сказал, что самым правильным, самым настоящим националистом и самым эффективным являюсь я. Но это не пещерный национализм, дурацкий и придурочный, который ведёт к развалу нашего государства. Вот в чём разница. (Poutine, Valdaï, 18.10.2018)

Le pouvoir reste ainsi relativement prudent dans la mise en discours de son modèle du nationalisme et de la Nation « pluriethnique », en généralisant les représentations, avec l’accent mis sur la consolidation de l’État. Les sujets relatifs à l’identité sont abordés principalement dans le discours présidentiel, sans toutefois être dominants parmi les questions évoquées dans ses interventions publiques, et surtout lorsque ce discours s’adresse à un destinataire extérieur. Il s’agit notamment des échanges avec des interlocuteurs étrangers, comme le Club de Valdaï, ou des interviews accordées à la presse occidentale. Les autres communicants du pouvoir se contentent d’y faire allusion d’une manière implicite. Cependant, ce modèle est présenté comme étant le fruit d’un consensus entre les élites et la population de la Russie, dont le président devient le porte-parole.

Dans les représentations du nationalisme, le pouvoir russe se légitime d’une part par la mise en avant de l’efficacité de son leadership dans la mise en route et la promotion de ce concept, constitutif du modèle identitaire. Cela donne lieu à l’usage d’expressions comportant des adjectifs qui ne s’utilisent pas habituellement avec le mot nationalisme (pravil’nyj, effektivnyj), et dont l’objectif serait d’éveiller l’intérêt du public, mais aussi de réhabiliter et moderniser la notion, perçue généralement comme un fait social dépassé et politiquement compromis par l’histoire. D’autre part, l’éthos de légitimité se renforce par l’affirmation explicite de l’adhésion collective au « nationalisme raisonnable ».

(04) Ф.Лукьянов: Если Вы один, то это мало. У Вас есть единомышленники, такие же не националисты?
В.Путин: Есть. Почти 146 миллионов человек. (Poutine, Valdaï, 18.10.2018)

Cette tentative d’associer les masses à la représentation du « nationalisme efficace » s’appuie sur le concept d’État pluriethnique, qui devient, dans le discours, un autre élément constitutif du modèle identitaire. Il se présente comme un socle idéologique commun et un terrain de réflexion pour les partisans d’idéologies diverses. C’est encore une manière de poser un cadre national, pour une vision du monde ayant un fort ancrage dans le patriotisme, une vision qui serait suffisamment large pour emporter l’adhésion du plus grand nombre des Russes quelle que soit leur origine ethnique.

Le discours du pouvoir défend ainsi un modèle d’État-nation qui se construit à partir de deux procédés de constitution d’un ensemble national : l’appel au mythe de la communauté des origines, et la projection d’une communauté de destin. Le recours au mythe du passé commun implique les représentations de l’identité par rapport à l’histoire, la culture et la construction de la mémoire collective. La projection de la communauté du destin renvoie aux représentations des traditions et de la modernité, où les premières sont pérennisées ou transformées, face aux enjeux du monde contemporain. Ce modèle permet, d’une part, de donner l’impression à la majorité des concitoyens d’appartenir à un grand ensemble social uni par l’histoire commune. De l’autre, il vise à mettre en valeur les institutions de reproduction de la nation, ce qui lui assure son attractivité. Par conséquent, c’est la légitimité des gouvernants qui en ressort renforcée, comme étant le résultat de l’unité entre la société et ses dirigeants, mais elle émane aussi de la disposition du pouvoir d’accepter la diversité des positions idéologiques, dans la mesure où cette diversité n’outrepasse pas un certain cadre patriotique du modèle identitaire. Vladimir Poutine résume ce point de vue dans l’exemple suivant, en soulignant explicitement l’importance de certains critères, tels que la souveraineté ou l’intégrité territoriale, pour la survie de l’État, que le pouvoir défend d’une manière légitime, au nom des intérêts collectifs.

(05) Нам всем: и так называемым неославянофилам, и неозападникам, государственникам и так называемым либералам – всему обществу предстоит совместно работать над формированием общих целей развития. […] Суверенитет, самостоятельность, целостность России безусловны. Это те «красные линии», за которые нельзя никому заходить. При всей разнице наших взглядов дискуссия об идентичности, о национальном будущем невозможна без патриотизма всех её участников. Патриотизма, конечно, в самом чистом значении этого слова. (Poutine, Valdaï, 19.09.2013)

L’argumentaire du modèle identitaire

La mise en discours du modèle identitaire s’accompagne de l’argumentation de sa nécessité. Les raisonnements s’appuient souvent, dans le discours, sur le rappel des menaces du passé et les alertes sur le risque d’oubli de ce passé. Cela implique donc l’enjeu de la constitution et de la préservation de la mémoire historique nationale. Cet argumentaire faisant référence au passé s’appuie également sur le procédé illustratif, avec des exemples tirés tant de l’histoire des autres pays, que de l’expérience soviétique, où le moment révolutionnaire de 1917 se présente justement comme un vecteur de destruction de l’identité traditionnelle. Ce qui est particulier dans le propos suivant de V. Medinski, c’est sa manière de moderniser l’idée de préserver le traditionnel en présentant l’identité comme un ensemble de « codes nationaux ». Faisant écho aux « codes civilisationnels » de l’article de V. Poutine, cette expression fait partie d’un vocabulaire composé de néologismes récents, dont le discours du pouvoir se saisit afin de renforcer l’éthos de modernité. Il s’agit ainsi de se donner une image experte et à la pointe des tendances contemporaines (byt’ v trende, otvetit’ na vyzovy), mais aussi de donner un aspect scientifique, et donc légitime, au traditionalisme identitaire (ADN nacii, kul’turnyj kod).

(06) Нельзя разрушать национальные коды !
— Чем это чревато?
— Разрушаются […] представления о добре и зле. […] Все понятия нравственности и морали носят цивилизационный, временной характер. Но в совокупности они образуют что-то, что называется культурой, на основании чего мы с вами сейчас и живем. Если это разрушать — будет то, что произошло в 1917 году. Я не за революцию и не против. Говорю о полном разрушении культурной основы и полном разрушении представления, сложившегося в обществе, о добре и зле. Это и привело в 1917-м к рекам крови. Если Бога нет, значит, все дозволено… (Medinski, interview MK, 24.03.2017)

La comparaison avec le passé est un procédé récurrent dans la légitimation du concept d’identité, de même que l’argumentation comparative est fréquente dans la légitimation du pouvoir en général. Il s’agit soit d’évoquer son passé, comme dans l’exemple précédent, soit de se positionner par rapport à l’autre. Ces structures comparatives se construisent à partir d’un lieu commun et permettent de dégager un certain nombre de particularités du caractère national, comme la tolérance, l’ouverture d’esprit, la solidarité collective, la créativité, la bravoure et le courage, etc. D’autre part, les représentations puisées dans les domaines de l’histoire ou de la culture valorisent les traits collectifs spécifiques auxquels le communicant s’associe personnellement, obtenant ainsi l’adhésion du public à ses opinions.

Dans l’exemple suivant, le particularisme identitaire se présente comme une opposition entre l’individualisme occidental et le collectivisme russe, élément identitaire bien connu depuis les slavophiles du xixe et réactualisé aujourd’hui par les partisans contemporains de l’idée de sobornost’ [С. Караганов, 2013]. Dans son propos, V. Poutine crée un contraste sémiotique de références littéraires, qui construit une représentation de l’identité collective à la fois floue et élevée par son caractère spirituel. Le flou domine le propos, dans la mesure où la mentalité russe est présentée comme une substance spirituelle insaisissable et impossible à mettre en discours. Cette manière d’appuyer l’expression d’une idée floue avec des références littéraires bien concrètes permet ainsi de formuler, pour l’audience principalement étrangère de la chaîne RT, une représentation énigmatique de « l’âme russe » avec l’accent mis sur son caractère immatériel.

(07) В основе американского самосознания лежит индивидуалистическая идея. В основе российского – коллективистская. Вот есть один из исследователей Пушкина, который об этом очень точно и ясно сказал. Вот в «Унесённых ветром», помните, там главная героиня говорит: «Я не могу себе представить, что я буду голодать». Для неё это самое главное. А в нашем представлении, в представлении русского человека, всё-таки другие задачи, что-то такое, за горизонт уходящее. Что-то такое душевное. Что-то такое, связанное с Богом. Понимаете, это немного разные философии жизни. И поэтому понять друг друга довольно сложно. (Poutine, interview RT, 11.06.2013)

Bien que la légitimité du modèle identitaire soit présentée comme un fait collectif où se reconnait la majorité de la population, les structures comparatives dans le discours du pouvoir révèlent également la différence d’un autre interne, russe qui aurait renié les traits identitaires de la majorité. Ce type de public est a priori placé dans le cercle de l’autre, sans que les critères de cette distinction soient clairement exprimés. Souvent il s’agit de reprocher à ces personnes leurs désaccords avec la vision officielle de certains événements historiques, notamment, la seconde guerre mondiale. Cependant, de par leur identité, présentée comme différente par rapport à celle de la majorité et du pouvoir, elles sont illégitimes pour faire partie de la nation et présenter une alternative au pouvoir en place. C’est donc une autre façon pour le pouvoir de se légitimer, en mettant en cause la légitimité de l’opposition, qui ne répondrait pas aux critères identitaires, dont les formulations floues sont ici ramenées à une divergence des points de vue sur tel ou tel épisode de l’histoire. Or c’est le pouvoir lui-même qui est l’auteur de ces critères, inscrits dans la politique mémorielle, et présentés pourtant comme objectifs.

(08) Я считаю очень опасным поощрять разговоры о том, что «у нас происходит милитаризация сознания», «мы зря так мощно празднуем годовщину Победы», «посмотрите, там где-то просто промаршировали какие-то солдатики с мушкетами Первой мировой войны, и все хорошо». Во-первых, это совсем не так. В статье я привел факты, как это празднуется, в том числе и в США, с авиацией, бронетехникой. Во-вторых, это из той же философии, которая как-то пробилась на одном из наших независимых каналов по теме блокады Ленинграда: «Зачем же столько жизней потеряли, людей заморили голодом? Можно было бы пересидеть, как Париж». Я не буду даже комментировать это. Это, может быть, подходит для какого-то другого народа, но не для нашего. (Lavrov, interview RBK, 06.06.2019)

Parallèlement aux représentations de l’identité collective et à l’argumentation du modèle dont le discours du pouvoir assure la promotion, les dirigeants s’efforcent de se donner une légitimité personnelle par divers procédés relevant de la stratégie d’autoreprésentation.

La légitimation de soi à travers l’appartenance identitaire

Dans le cadre de l’autoreprésentation, il s’agit de se positionner davantage comme une partie intégrante du modèle identitaire qu’en tant que son promoteur. Ce positionnement peut se faire d’une manière explicite.

(09) Конечно, я русский, мои корни все в России, мои предки 300 лет жили в одной деревне и ходили в одну и ту же церковь, и это видно по церковным документам. Это всё очень любопытно для меня, я ощущаю себя частью страны и частью русского народа, как это ни покажется высокопарным, но так и есть, я чувствую. (Poutine, Valdaï, 18.10.2018)

Le discours privilégie parfois l’implicite, par rapport à l’explicite, en fonction du public destinataire, du contexte et du statut du communicant. Le dénominateur commun pour cette stratégie est la distinction entre le soi personnel et le soi institutionnel. Lorsqu’il s’agit des sujets intimes, relatifs aux éléments constitutifs de cette identité, par exemple, la pratique de la foi orthodoxe, l’attitude à l’égard des minorités sexuelles, etc. le communicant souligne expressément qu’il s’agit de son opinion personnelle. En revanche, quand on touche à des questions controversées qui ont trait au rôle de l’État dans la protection de l’identité particulière russe dans le domaine de l’histoire, de la culture ou l’éducation, c’est le soi institutionnel qui est avancé au premier plan.

Dans son propos, D. Medvedev commence par s’associer personnellement à l’expression de l’identité à travers la culture, rappelant au passage la particularité pluriethnique de cette identité. Ensuite, le raisonnement se construit à partir de la posture institutionnelle, dont la légitimation s’appuie sur la comparaison avec les politiques culturelles d’autres pays (la France, les États-Unis). Il ne s’agit donc pas de se placer devant les autres nations, mais de les donner en exemple pour le rôle de l’État dans la protection de l’identité culturelle. Cela légitime ainsi des mesures protectrices similaires en Russie.

(10) Мы вправе гордиться нашей великой национальной культурой, культурой Российской Федерации. Российской Федерации, которая состоит из людей разных национальностей, разных религий. Необходимо правильным образом распределять приоритеты по поддержке культуры. […] У нас принято приводить в пример кинематограф в Европе, особенно французский, - они умеют поддерживать свой кинематограф. […] Это как бы одно измерение. Второе - это, допустим, фильмы, как принято говорить, патриотического свойства. Очень часто […] американские фильмы очень неплохо продвигают именно патриотические ценности Соединённых Штатов Америки. […] Нам тоже нужно определённым образом выстраивать приоритеты. Но ничего нельзя навязывать, культура должна быть разной. Если мы просто [...] скажем, что нужно делать, это будет не культура, это будет цензура. Но приоритеты - это другая история. И в этом смысле у государства есть способы, средства регулирования. (Medvedev, interview à la télévision, 06.12.2018)

Qu’il s’agisse d’une posture institutionnelle ou personnelle, les communicants du pouvoir cherchent toujours à se représenter en communion identitaire avec l’ensemble de la population qu’ils gouvernent. Ce n’est donc pas tant par l’affirmation du soutien électoral que la légitimité du pouvoir est argumentée, mais davantage par la mise en discours de différents éléments constitutifs de l’identité collective, qui font apparaitre la proximité entre les dirigeants et le public. Ce marquage de la communauté identitaire se fait souvent au niveau implicite avec l’utilisation de divers procédés de solidarisation avec le public, qui peut être physiquement présent au moment de l’échange ou imaginé par le communicant dans certaines situations. Quels sont ces procédés ?

D’une manière générale, les procédés de solidarisation visent à délimiter le « cercle » des interlocuteurs qui se reconnaissent dans le point de vue exprimé. Dans notre cas, il s’agit de substituer à la persuasion les marqueurs implicites d’adhésion à l’identité commune. Cela ne dispense pas le communicant de l’usage de l’argumentation, mais lui permet de réunir d’emblée autour de ses raisonnements le public prêt à y adhérer par la proximité identitaire implicitement présente dans l’énoncé. L’argumentation individuelle prend ainsi une apparence collective.

L’éthos du soi collectif se construit d’abord par des moyens lexicaux qui confèrent à des propos traitant des thématiques diverses, non liées à l’identité, l’aspect d’un consensus social. Il s’agit notamment des variations d’emploi d’un « nous » inclusif et exclusif qui peut signifier l’appartenance à un groupe de gouvernants, mais aussi l’alliance gouvernants-gouvernés constituant la nation. Au cours des années 2010, cette dernière signification est devenue particulièrement fréquente, notamment dans le discours de V. Poutine, suivant l’élaboration et la mise en discours du modèle identitaire [Ю. Галямина 2016 : 165]. Les représentations de liens de proximité se font par les mots « amis », « partenaires » même si l’emploi de ce dernier suppose des degrés de proximité différents en fonction du contexte.

La solidarisation se renforce par l’introduction dans le discours de formules impliquant des traits identitaires plus précis comme Daj im Bog zdorovja, Ne daj Bog, Slava Bogu. En principe, ces formules remplissent diverses fonctions pragmatiques dans l’énoncé en exprimant l’attitude du communicant vis-à-vis de ce qu’il dit, notamment l’ironie, la crainte, le souhait. Dans le même temps, elles traduisent implicitement la proximité du communicant et de son public sur le terrain d’une identité commune, religieuse orthodoxe dans notre exemple (voir ci-dessous). Quand bien même le sens religieux de ces expressions se serait effacé à force d’usage et n’aurait plus la même charge religieuse que par le passé, elles jouent encore pleinement leur rôle de marqueurs d’appartenance à une communauté identitaire.

(11) Подпишут, дай бог здоровья, молдавские руководители этот документ, придёт на молдавский рынок дешёвое и качественное итальянское и французское вино. (Poutine, Valdaï, 19.09.2013)

La solidarisation avec le public implique la construction, par l’orateur, de son auditoire, c’est-à-dire la prise en compte de son bagage culturel, du milieu dont il fait partie, du niveau d’éducation. Cela amène les communicants à introduire dans leurs énoncés différents éléments de la doxa et des stéréotypes. Il s’agit notamment des proverbes, aphorismes, citations, propres à la culture populaire, mais aussi plus ou moins savante, en fonction du public. Le discours réunit des éléments en apparence épars dans un modèle culturel préexistant qui souligne l’appartenance identitaire du communicant.

Dans le cas des destinataires multiples, l’usage des proverbes dans le discours s’accompagne souvent de phrases introductives renforçant l’identification du dirigeant à la nation (kak u nas govoriat). Ces incises s’introduisent dans les propos orientés vers un destinataire étranger, mais elles visent en même temps le public russe, pour qui l’usage des expressions populaires est un des signes d’une identité commune.

(12) А на муниципальном уровне – там уже, как у нас говорят, труба пониже и дым пожиже – и права другие. (Poutine, interview, Time, 12.12.2007)

Les tournures introductives prennent parfois des formes plus ou moins marquées par les représentations identitaires promues par le pouvoir. Dans l’exemple suivant, le nom historique de l’État (Rus’), porteur d’une valeur globalisante, est employé avec le prédicat au présent et le marqueur déictique (u nas). Ce n’est donc pas tant le proverbe que la phrase introductive qui reflète l’intention d’identification de Medvedev, qui transpose à l’époque contemporaine ce concept territorial et historique, dans son interprétation officielle, c’est-à-dire qui défend la filiation directe entre la Rus’ de Kiev et la Russie d’aujourd’hui. Cette actualisation dénote également la volonté de revendiquer un paradigme historico-culturel commun, et de s’en approprier les origines, afin de constituer pour la société un socle patriotique commun.

(13) Во-первых, сооружать – это хорошо. Как принято у нас на Руси говорить: ломать – не строить. (Medvedev, interview à la télévision, 06.12.2013)

Les stéréotypes renvoyant à l’identité comportent parfois une comparaison mettant en valeur certains traits nationaux. Dans ce cas, on procède par l’usage légèrement détourné des proverbes qui soulignent la différence et la particularité de chaque nation, sans pour autant souligner leurs qualités ou défauts. Il s’agit ainsi notamment pour V. Poutine d’illustrer implicitement sa vision du « nationalisme civilisé, raisonnable et tolérant », dont il fait la promotion depuis 2013.

(14) Я люблю Германию, но Вы знаете известное выражение: там, где русскому хорошо, немцу может быть смерть . И наоборот. (Poutine, « Ligne Directe », 20.06.2019)

Le rappel implicite de l’appartenance à une identité commune peut également avoir lieu lorsque l’autoreprésentation du communicant fait partie d’une stratégie d’argumentation qui s’appuie, entre autres, sur le procédé du recours à l’autorité d’une personnalité historique. Le discours du pouvoir privilégie les références à la Russie d’avant la révolution, où l’on cherche des éléments identitaires oubliés pendant la période soviétique. Il est assez emblématique pour V. Poutine de citer ici (ci-dessous) une phrase attribuée à Alexandre III, le tsar conservateur, dont le nom n’est pas évoqué explicitement. En 2011, les premiers éléments de la construction identitaire étaient en cours d’élaboration, et l’idéologie dominante pendant le règne d’Alexandre III semblait devoir servir de source d’inspiration.

(15) Это один из наших императоров, все время давая наставления своему сыну, говорил: "Нашей огромности все боятся". (Poutine, interview à la télévision, 15.12.2011)

D’une manière générale, la recherche d’autorité sous la forme de citations des personnalités d’avant la révolution (Stolypine, Herzen, etc.) vise à étayer et à légitimer la prétention du pouvoir à la rationalité et à la protection de la stabilité de l’ordre existant, opposé au chaos des changements révolutionnaires rapides. C’est donc dans la promotion de ce monde stable et rationnel, dont il se considère comme l’avant-garde, que le pouvoir cherche sa légitimité. Le modèle identitaire spécifique est alors placé au cœur de ce monde comme condition primordiale de son existence.

Conclusion

En conclusion, il convient d’abord de noter que malgré la présence de divers éléments renvoyant au concept d’identité dans le discours du pouvoir, celui-ci ne semble pas être soumis à un cadre doctrinal rigide. Il s’agit plutôt de mettre en discours un modèle identitaire rassemblant un certain nombre de propriétés, provenant de la doxa, qui remplissent une fonction utilitaire dans les stratégies discursives. Notamment cela permet d’assurer l’adhésion de l’auditoire aux arguments du communicant. D’autre part, par le même biais, on fait accepter au public l’idée de l’unité de la majorité de la nation avec le pouvoir, qui ne fait que la représenter, et qui défend ses intérêts. Cela s’inscrit dans un concept plus général d’un ordre stable, établi et protégé par les gouvernants, au nom des intérêts collectifs.

Les représentations de l’identité en tant qu’outil de légitimation se manifestent dans le discours à travers divers procédés de solidarisation avec le public, où un lien intrinsèque du pouvoir avec le modèle identitaire collectif s’établit d’une manière implicite. En créant ces rapports de proximité à l’intérieur de leur « cercle identitaire », les élites dirigeantes russes tentent de se légitimer en tant que « représentants » de la nation. Bien qu’il s’agisse d’une élite de « fonctionnaires », nommés par leurs supérieurs et, dans une moindre mesure, de politiques mandatés par leurs électeurs, la solidarisation avec le public par divers procédés implicites leur permet de construire une légitimité imaginée, qui a priori pourrait ne pas leur être accordée.

L’étude du corpus révèle que le discours vise en priorité le destinataire russe, même s’il peut être développé devant un public étranger, lorsqu’il s’agit de préciser les particularités identitaires des Russes, pour légitimer le positionnement de la Russie dans le monde extérieur. Les constructions identitaires visent ainsi à légitimer la nécessité de la stabilité du régime politique en place, en le présentant comme le seul, en Europe et dans le monde, capable de préserver la souveraineté de son territoire et de ses populations. Cela pourrait être comparé aux processus de construction de la nation (Nation branding) qui sont en cours dans d’autres pays de l’espace postsoviétique ou en Europe de l’Est. D’une certaine manière, le particularisme national tend à se répandre, avec la montée des populismes et des nationalismes, en Europe et dans le monde (les États-Unis de Trump, le Brésil de Bolsonaro). Dans ces pays où, vers la fin du xxe siècle, le potentiel d’émancipation du nationalisme semblait épuisé, laissant place à une politique conservatrice, défendue par une partie des élites politiques, de nouvelles mobilisations nationales commencent à trouver le soutien de certaines couches de la société. Cela traduit la réaction à des menaces intérieures et extérieures, réelles ou imaginées dans la conscience collective. Les dirigeants russes cherchent ainsi à surfer sur la tendance mondiale en la greffant sur l’état d’esprit de la société russe. Les tendances et exemples du monde extérieur permettent ainsi de légitimer la nécessité d’un modèle identitaire particulariste en Russie.

En dehors de l’objectif de la construction de la nation, les représentations discursives du modèle identitaire visent à asseoir le rôle et la place du pouvoir, qui peut ainsi renforcer le poids de sa propre légitimité. La légitimation de soi s’appuie ainsi sur la solidarisation au sein d’une identité collective, construite à partir de la mémoire du passé commun, des traditions, de la culture. De cette manière, les gouvernants sont placés au centre de l’identité, comme des détenteurs et des promoteurs légitimes de ses éléments constitutifs. Le pouvoir se présente ainsi comme la seule force capable de mener une politique de recentrage identitaire qui apporte des réponses aux questions de la population sur ses origines, sa raison d’être, et qui lui donne également un sentiment, si ce n’est de fierté, du moins d’égalité avec les autres nations. Cela constitue ainsi un gage de la pérennité de ce pouvoir et démontre l’absence d’une alternative politique viable et légitime.

Bibliographie

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Разговор с Владимиром Путиным, интервью российским телеканалам, 15.12.2011, http://2011.moskva-putinu.ru/.

В. Путин: Посещение телеканала Russia Today, 11.06.2013, http://www.kremlin.ru/news/18319

Путин В. « Россия: национальный вопрос », Независимая газета, 23.01.2012, https://www.ng.ru/politics/2012-01-23/1_national.html?insidedoc.

В. Путин: Заседание международного дискуссионного клуба «Валдай», 19.09.2013, http://kremlin.ru/events/president/news/19243

В. Путин: XV заседание Международного дискуссионного клуба «Валдай», 18.10.2018, http://kremlin.ru/events/president/news/58848

Прямая линия с Владимиром Путиным, 20.06.2019, http://kremlin.ru/events/president/news/60795

Notes

1 Ce forum de débat politique, créé en 2004 sur l’initiative du Kremlin, réunit des spécialistes mondiaux de la Russie, hommes politiques et journalistes. Il vise notamment à créer une image de la Russie ouverte au dialogue avec l’Europe et d’autres pays, ainsi qu’à montrer la possibilité de la coexistence de la diversité d’opinions et de perspectives politiques.

2 Tel est le sens de l’adverbe akkuratno, un des plus fréquents et polysémiques dans le discours poutinien.

Citer cet article

Référence électronique

Valéry Kossov, « Les représentations de l’identité nationale dans le discours du pouvoir russe contemporain », ELAD-SILDA [En ligne], 6 | 2022, mis en ligne le 30 mai 2022, consulté le 22 juillet 2025. URL : https://publications-prairial.fr/elad-silda/index.php?id=1127

Auteur

Valéry Kossov

Univ. Grenoble Alpes, ILCEA4, 3800 Grenoble, France

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