Murakami et les fractures de la corporéité. Vers une représentation aporétique de l’individuation

DOI : 10.35562/iris.2393

p. 133-146

Résumé

La plupart des romans et des nouvelles de Murakami traitent du rapport à l’existence et de la construction de l’individu. Le corps, en conséquence, est alors mis en question, en tant que moyen d’accès au monde et comme manifestions de l’individu. Ceci entre particulièrement en résonance avec la culture japonaise en raison de sa propension à considérer l’individu comme particule du groupe. Par ailleurs, une question en particulier est suggérée par Murakami : le lien entre corps et esprit. La corporéité défend alors son existence propre, sans contredire la volonté, mais pour parvenir à communiquer avec autrui et pour accéder à une forme d’universel. Dislocation entre imaginaire et réalité, conflits intimes tout autant que d’inspiration mythologique, sont les nœuds des romans étudiés : Kafka sur le rivage, La Fin des temps, L’Éléphant s’évapore. Les romans de Murakami imposent aux lecteurs d’envisager la corporéité comme un carrefour entre croyances mystique, désir et mémoire.

Plan

Texte

Comptant parmi les nouveaux maîtres de la littérature nipponne, considéré comme l’un des plus probables nobélisables, Haruki Murakami fait montre d’une écriture pour le moins fantasmatique, mêlée d’un souci d’une poésie du quotidien, qui lui valut au début de l’année 2009 le « Prix de Jérusalem pour la liberté de l’individu dans la société ». De ses différents romans et recueils de nouvelles, pour la plupart traduits en français, il est possible de tirer des lignes de forces qui s’articulent autour d’une problématique récurrente : la présence de l’individu au monde. La plupart des héros murakamiens ne font pas l’objet d’une élaboration poussée : ce qui peut sembler au premier abord une aporie pour la conception traditionnelle du personnage et une barrière à la lecture, ou encore une politique de non détermination du personnage dans une esthétique vingtiémiste, s’affirme au contraire comme le noyau même des intrigues de Murakami, puisque la quête du personnage s’affiche comme étant celle de sa propre identité et de sa propre présence au monde. La corporéité fait donc naturellement débat au sein de cette écriture de l’individu qui se veut aporétique.

Bien loin de négliger le corps, Murakami le dessine en creux d’une recherche à la fois psychique et identitaire : la plupart de ses héros n’ont qu’une conscience pauvre de leur propre corps et n’aperçoivent dans le contact avec le corps de l’autre qu’un rapprochement charnel fugace. La corporéité murakamienne n’est pas à chercher dans l’exacerbation de la chair ni dans la rencontre, mais plutôt dans l’hermétisme de l’individualité, dans la question posée des sensations et des perceptions, dans l’incommunicabilité et dans la frontière corporelle.

Les différents ouvrages de Murakami traitent d’une problématique générale : la communication entre le corps et l’esprit dans la construction de l’individu. C’est donc une approche largement philosophique que je propose d’entreprendre. Les différents personnages que nous allons étudier ont une connaissance aporétique du monde et témoignent d’une forme d’inadéquation à la réalité et au modèle social. Cette inadéquation se développe autour d’un principe récurrent, celui de la fracture : fracture de la conscience, fracture de la mémoire, fracture œdipienne, fracture de la perception, sont autant d’achoppements de l’individu à prendre possession du corps — de son corps : le corps d’autrui ne fait pas question, puisqu’il est limité à la contemplation, à l’indifférence ou à l’acte sexuel — qui devient alors l’objet d’une réconciliation attendue ou un fardeau dont il faudrait se délester. Loin de se contenter d’une conception vulgarisée du dualisme corps/esprit, Murakami pose le problème de l’individuation en des termes plus complexes : la conception cartésienne de l’individualité est dépassée pour aller vers l’élaboration d’un être existant sous deux aspects et non pas en deux entités : corps et âme ne sont que les manifestations d’une même individualité.

La problématique du rapport du corps à l’esprit dans la construction de l’individu est relancée par la nécessité de renoncer à une conception traditionnelle dualiste qui voudrait faire du corps une machine inerte commandée par la puissance de l’esprit. Murakami revendique la vie propre de la corporéité, non pas comme prise d’indépendance par rapport à la volonté humaine mais comme question posée à l’individu dans sa relation à la réalité extérieure. Il convient donc de s’interroger sur différentes exploitations de ce questionnement par le biais de lectures croisées de La Fin des temps1, de Kafka sur le rivage et du recueil de nouvelles L’Éléphant s’évapore.

La littérature japonaise, malgré son isolement, a produit des genres identiques aux genres de la littérature occidentale dont le roman. Il s’agit d’un genre à la maturation lente, issu de recueil d’historiettes, les uta-monogatari, apparus vers le ixe siècle. Ces récits ont le charme de l’anecdote, mais on ne peut pas à proprement parler utiliser le terme « roman » ; on les traduit donc par la formule « récits construits » : « Il suffisait, désormais, d’étoffer la partie narrative pour obtenir ce que les auteurs japonais appellent tsukuri-monogatari, terme que l’on a longtemps traduit par “roman” mais qui serait mieux rendu par “récit construit” (au sens de “composé de toutes pièces”). » (Sieffert, 1973, p. 49) Le monogatari désigne à la fois le recueil de contes et le texte fleuve, ce qui semble s’opposer à la traduction par le terme « roman ». Ce type de récit se transforme au xiiie siècle en récitation épique, et il faudra attendre le xviie siècle pour voir émerger le roman japonais. On assiste alors au passage à une littérature moins élitiste et plus populaire : le monogatari, « le dit », se transforme en sôshi (« écrit »). Voici l’aube du romanesque. Le sôshi désigne « les œuvres d’imagination et les récits historiques plus ou moins romancés » (Sieffert, 1973, p. 111), une formulation bien proche des aporétiques tentatives de définition du roman occidental. Mais la véritable étape de formation du genre romanesque se produit grâce à une évolution linguistique : c’est l’abandon de la langue classique qui marque le tournant du genre romanesque, aux alentours de 1620. Les kana-sôshi utilisent désormais les caractères phonétiques, imprécis. Ceci marque une rupture avec le modèle ancien et l’irruption d’une littérature concentrée sur le présent, rupture identique à celle opérée au niveau du récit et plus spécifiquement du conte en Occident. La littérature se fait de plus en plus proche du quotidien, affiche ses ambitions naturalistes, notamment après la révolution de Meiji en 1868 qui marque l’ouverture à l’Occident. Cela finit d’introduire une grande variété des techniques utilisées dans les romans.

Le xxe siècle littéraire japonais se traduit évidemment par une explosion dans la période d’après-guerre. Il s’agit d’une littérature en rapport direct avec la guerre, née d’une situation extrême. Elle se veut la plupart du temps pacifiste, et le plus souvent une littérature qui traite de l’universel. Ceci va se maintenir jusqu’aux années 1960, période d’un resserrement sur l’individu. On va donc passer d’une écriture aux accents existentialistes, faisant le récit à la fois d’un traumatisme particulier à l’archipel et à une nation et en même temps faisant montre d’un besoin d’universalité, à une littérature du « moi », dans une langue où le « je » s’emploie peu. Ce resserrement sur l’individu ne va pas sans proposer quelques problématiques, notamment en ce qui concerne la pression du groupe dans la société nippone. La littérature japonaise cherche alors à se frayer un chemin entre une tradition naturaliste et une place nouvelle accordée à l’écrivain, après le retour à l’état vierge d’un pays dévasté. La modernisation et l’expérience de la défaite amène de nouvelles tendances : après l’universalité, la quotidienneté et l’expérience personnelle se font la part belle du roman chez les écrivains dits de la troisième vague.

On voit dont que le champ romanesque japonais offre des pistes fertiles au questionnement de la corporéité : dans toute l’histoire du roman nippon on assiste à un resserrement progressif, tout d’abord sur le présent, puis sur la quotidienneté, enfin sur l’individu. Dans une société où le « moi » n’est que particule d’un ensemble, d’un groupe social ou familial, traiter de l’individu en littérature relève d’une véritable gageure.

Corps idéel et fracture de la conscience

En 1985, Murakami publie Sekai no owari to hâdo boirudo wandârando, en français La Fin des temps, qui lui vaudra le prestigieux prix Tanizaki Jun ichirô. L’objet même de La Fin des temps est la disparition d’un individu dans sa propre conscience ; l’accomplissement de cette absorption se fait donc nécessairement par l’abandon de son corps.

Ce roman croise deux récits, celui du « pays des merveilles sans merci », et celui de « la fin du monde ». À première vue, ces deux intrigues n’ont rien en commun, si ce n’est un narrateur indéterminé dans chacune, dont le lecteur perçoit l’unité. Ce n’est qu’après une « mise au point » d’ordre scientifique que le lecteur comprend et perçoit des correspondances et des coïncidences habiles ; « le pays des merveilles sans merci » est notre monde réel, actuel, dans lequel le narrateur, informaticien, se prête à un exercice d’encodage de données par une opération cérébrale qui consiste à faire travailler séparément les deux lobes du cerveau. Il se trouve, suite à cette opération, pris dans une guerre technico-commerciale dans laquelle il devra parcourir les souterrains de Tokyo peuplés de créatures carnivores, pour retrouver le scientifique qui l’avait employé pour l’opération d’encodage, afin que celui‑ci sauve le monde de la dévastation technologique.

En parallèle, « la fin du monde » est un lieu d’apparence neutre, une ville polaire, entourée de murailles, peuplée d’individus ayant perdu leur cœur en perdant leur ombre, où les licornes meurent sous la neige, et sont brûlées, et leurs crânes classés dans la bibliothèque afin que le narrateur, assigné « liseur de rêves » puisse déchiffrer les rêves des habitants, prisonniers de ces crânes. L’intrigue de La Fin des temps fait montre d’une écriture architecturale où le lecteur se doit, pour percevoir l’immensité des correspondances effectuées entre les deux récits croisés, de garder en mémoire les pérégrinations du narrateur, tout comme les atteintes portées à son corps. En effet, le narrateur du récit de « la fin du monde » n’est autre que le héros du « pays des merveilles », évoluant dans une ville imaginaire qui n’existe que dans sa conscience. L’opération de brouillage de données informatiques était en réalité la mise en place d’un circuit secondaire au sein de sa conscience, l’amenant à disparaître du monde réel et à recréer, tel un film, un monde imaginaire qui lui est propre. Le roman est donc la construction dévorante de ce monde secondaire où le narrateur perd à regret ce qui le faisait exister au monde réel : son corps, symbolisé par la perte de son ombre dans le monde imaginaire.

À l’évidence, cette fracture du conscient et de l’inconscient ne va pas sans poser la question du corps. Elle pourrait s’apparenter abusivement à un dualisme entre vie psychique et corporéité ; pourtant, à l’instar du narrateur, la question de l’individu a tôt fait de s’imposer face à une compréhension hâtive de l’existence à la fois dans le monde sensible et dans le monde imaginaire. Ceci va de pair avec un élément déterminant du roman japonais, évoqué par Corinne Atlan, traductrice de Murakami, dans son article « Entre deux mondes2 » : une « absence fondamentale de croyance en la fiction absolue ». En d’autres termes, l’interaction fondamentale entre intérieur et extérieur dans une société empreinte de bouddhisme et de shintoïsme, telle qu’elle se présente au Japon, se révèle dans la littérature. Il n’y a pas dans le roman japonais de fiction absolue et le récit peut être considéré comme l’expression même de cette interaction, manifestation de l’intérieur, de l’inconscient.

Le héros de La Fin des temps a tout d’abord une réaction de colère face à la perspective de perdre son existence charnelle, et témoigne d’un premier antagonisme entre son corps physique et sa vie psychique :

Dans un sursaut de la pensée, je me sentis en proie à un étrange sentiment de désintégration, comme si ma conscience cherchait à s’élever, tandis que mon corps physique faisait obstacle à mon esprit. Je ne savais pas de quel côté je devais me laisser entraîner. (La Fin des temps, p. 219)

La dislocation de l’individu entre monde réel et monde imaginaire semble dans un premier temps se présenter comme un détachement entre vie psychique et physique. Le terme de « désintégration » indique véritablement la dimension destructrice, annihilante de cette séparation, comme si l’individu était amené à disparaître par la fuite de sa conscience dans un monde personnel où le rapport au sensible ne se ferait plus sur le mode de la perception du monde réel. Comment qualifier alors la corporéité présente dans le monde imaginaire ? Serait‑elle fantasmée, simulée, serait-ce une illusion ? Si l’on envisage au contraire le corps comme manifestation sensible de l’individu, reflet du psychisme, la compréhension de la présence de l’individu au monde imaginaire est envisageable sans la destruction de l’individu réel premier. L’individualité est perpétuée par ce qu’on pourrait nommer, bien maladroitement, « l’esprit » qui transporte dans le monde imaginaire l’idée du corps, la manifestation physique de l’individu. C’est d’ailleurs une position spinoziste qui s’exprime ici à travers une posture de l’individu, déterminé par une inversion du schéma classique du rapport âme/corps : l’esprit n’est pas enfermé dans une enveloppe mécanique inerte à mouvoir mais il est l’idée du corps. L’individu étant la synthèse de deux puissances, celle de son esprit et celle de son corps.

Dans l’atmosphère fabuleuse de La Fin des temps, la disparition du corps n’est plus aporétique pour le maintien de l’individu. Le narrateur en fait lui‑même l’expérience alors qu’il est plongé dans le noir absolu du sous-sol :

Mais ce n’était que des douleurs et des sensations. Rien d’autre qu’une sorte de concept général basé sur cette hypothèse de l’existence du corps. Il n’était donc pas impossible que le corps ait déjà disparu et que ces concepts continuent à fonctionner tout seuls. […] (Ibid., p. 311)

Murakami adopte ici une posture intéressante : en renonçant à l’existence du corps, il l’établit comme concept, postulat imaginaire. Ce qui était établi comme réel, concret, palpable, est plongé dans le domaine de l’idéel. Il résulte de cette inversion l’établissement de l’individu comme entité pensante, pourvue d’une forme produite par l’esprit et non donnée par la substance. Ce renoncement à la substance, on le lit dans cet extrait, annihile l’ensemble des concepts liés au corps : douleur, perception, sont retranchées dans l’idéel. Cette conception non substantielle du corps est tout à fait spinoziste, dans la mesure où le corps n’est pas défini par sa matière mais par son mouvement et par sa puissance.

Pourtant, Murakami s’éloigne de la philosophie de Spinoza par une forme de primauté accordée à l’esprit sur le corps, ce que réfute totalement le philosophe : celui‑ci considère que la puissance de l’esprit et la puissance du corps sont fondamentalement égales et de même intensité et forment à elles deux une corrélation qui est l’individu, perspective moniste qui, dans les philosophies modernes, prend le pas sur le dualisme antérieur. Murakami propose, quant à lui, un être dont le corps est hypothétique, et non nécessaire à l’existence.

On retrouve alors dans l’écriture murakamienne une séparation d’avec les courants dominants de la littérature du xxe siècle, ancrée surtout dans le naturalisme et le « roman‑je ». Selon C. Atlan, « ce devoir d’aller le plus loin possible dans l’exploration de l’esprit et de ses fantasmes reste une caractéristique des écrivains japonais ». L’écrivain devient alors celui qui peut exprimer cette communication fondamentale au Japon entre rêve et réalité, entre la réalité et son reflet. L’imaginaire littéraire n’est autre alors que la manifestation de cette relation à l’inconscient et à l’indéterminé. Murakami fait évoluer par ailleurs le « roman-je » en proposant un « je » voilé, lui‑même dédoublé par la structure des deux récits croisés, un narrateur qu’il est impossible d’identifier au‑delà de l’instance énonciative traduite par le « je » français.

Ceci propose de voir l’individu comme un être de pensée, dont le corps ne serait qu’une idée, une supposition nécessaire à sa présence à la réalité. En revanche, l’existence en soi de l’individu n’est pas remise en question par l’absence du corps, sans préjugé du monde dans lequel il évolue :

Même si votre corps physique meurt et se décompose entièrement, votre pensée arrêtée sur un point l’instant auparavant continue à fractionner éternellement ce point. […] L’être humain qui est entré dans sa pensée devient immortel. (Ibid., p. 440)

L’idée d’un dualisme particulier tend à s’imposer. La vie humaine est d’abord conditionnée par un développement et une persistance physique ; Spinoza considère, à ce propos, que l’existence de l’individu est à saisir dans son aspect actuel, dans les limites de l’existence physique, biologique, sensible de son corps. Or Murakami invite à imaginer une vie de la pensée au‑delà des limites de la corporéité. Cette vie de la conscience est relativement problématique car elle va à l’encontre du monisme évoqué jusqu’à présent : nous avions évoqué la corporéité et l’esprit comme les deux aspects d’un même individu, or dans ce cas précis, il est manifeste que la pensée se détache de l’enveloppe charnelle. Les choses ne sont pas si simples pour autant : « […] si l’âme n’était pas séparée du corps, alors quelle raison avait‑elle d’exister ? » (Ibid., p. 311)

Le narrateur pose de lui‑même une question primordiale : si l’esprit peut se passer de sa forme corporelle, pourquoi alors exister ? Il s’agit ici de ne pas confondre la vie et l’existence qui, à ce qu’il semble chez Murakami, ne sont pas à considérer comme synonymes. Ex(s)istere par son sens de « se tenir hors de » implique une notion d’exposition. Ce qui revient à dire que l’existence engendre la manifestation de l’individu, manifestation de la corporéité et de la conscience, et elle ne semble pas une condition sine qua non à la conservation de l’individu chez Murakami. C’est autour de cette idée d’existence qu’il nous faut chercher la « raison » de la présence de ces deux aspects de l’individuation : c’est dans la nécessité d’une manifestation, d’une présence au monde et à autrui que prend forme l’esprit par le corps.

Le corps « incarne », au sens étymologique, la conscience dans le monde sensible, elle lui donne une forme, comme pourrait l’exprimer le verbe anglo-saxon to embody, au sens de prendre corps, de représenter par la forme l’entité abstraite. Le corps du héros de La Fin des temps est l’incarnation de son individualité dans le monde sensible : sa conscience annihilée, son corps est rendu caduc, la mort biologique est inévitable.

La question de l’incarnation de l’individu par le corps se trouve également posée par le personnage de Kafka, jeune homme qui doute de sa propre individualité et effrayé du pouvoir de son propre corps.

Le corps archétypal et la fracture de l’Œdipe

Le héros de La Fin des temps souffre de ne pas avoir pleine maîtrise de sa conscience et de son individualité, dans la mesure où le remplacement de sa conscience première est l’œuvre d’un scientifique ; ce qui l’oblige à renoncer au monde sensible. Il opère néanmoins un choix dans l’ultime chapitre de « la fin du monde », en décidant d’habiter l’univers dont il est lui-même le créateur. Dans Umibe no Kafuka traduit en Kafka sur le rivage, Murakami réitère ce motif d’un héros prisonnier de l’intervention d’autrui, par laquelle son corps se trouve condamné, non plus à la mort, mais ici à l’accomplissement d’une malédiction paternelle de type œdipien.

Dans ce récent ouvrage, Murakami croise une fois encore deux récits qui ne se rejoignent qu’à l’issue du roman. Kafka a quinze ans lorsqu’il décide de fuguer du foyer paternel. Il part au hasard pour fuir une malédiction formulée par son père : « Un jour, tu tueras ton père de tes mains, et tu coucheras avec ta mère. » Il est accueilli dans une bibliothèque commémorative et identifie en la personne de la directrice sa mère disparue, et sous les traits d’une jeune fille qui l’héberge, sa sœur aînée que sa mère aurait emmenée avec elle. Au même moment, un vieillard amnésique se trouve aux prises avec le père de Kafka dans une sombre affaire de chats disparus et finit par l’assassiner et par prendre la fuite lui aussi, dans la même direction. Au‑delà de cette coïncidence, il s’agit pour chacun de ces personnages de résoudre la malédiction de départ : pour Kafka de retrouver sa mère et sa sœur et de conjurer la prédiction, pour le vieillard, de répondre à un appel surnaturel qui l’enjoint à ouvrir puis refermer une « porte » donnant sur un autre monde que nous identifierons comme l’univers de la mémoire.

Kafka loge dans la chambre qui hébergeait autrefois l’amant adolescent de Mlle Saeki, la directrice. Celle‑ci revient la nuit sous la forme du fantôme de celle qu’elle était à quinze ans, soupirer sous le portrait de son bien‑aimé décédé. Le héros tombe amoureux d’elle et finit par avoir divers rapports sexuels avec elle, adulte : d’abord lors d’une crise de somnambulisme de celle qu’il pense être sa mère, puis de manière consciente. Parallèlement, il rêve d’une scène de « viol » avec la jeune fille qu’il pense être sa sœur. La malédiction se réalise dans une certaine mesure.

Le vieillard finit quant à lui par découvrir la « porte de l’entrée » : une énorme pierre qu’il faut retourner. Une fois cette porte ouverte, Kafka, qui ignore tout de ce pan magique de la situation, se perd dans la forêt et atteint un village oublié où il retrouve Mlle Saeki adolescente, ainsi que des soldats disparus. Son choix de quitter cet endroit se solde par la mort de la vraie Mlle Saeki et par la fermeture de la « porte ». C’est en somme tout un univers onirique, fantasmatique et mémoriel qui se ferme, comme à la suite d’un conflit d’ordre psycho-physiologique tel que peut l’être le complexe d’Œdipe.

Murakami plonge cette fois‑ci son héros dans une problématique plus large que celle de la conscience et s’attèle à percevoir le corps dans sa dimension archétypale et fantasmatique. Aussi la corporéité s’affiche-t‑elle alors comme question posée à l’individuation, dans la mesure où Murakami fait se rejoindre le questionnement universel de l’Œdipe et le questionnement individuel adolescent.

Manifestement, la quête d’identité du jeune narrateur est empreinte d’un corps stigmatisé par ses origines et par la prédiction paternelle.

J’aurais beau faire tout ce que je peux pour effacer toute expression de mon visage, toute lumière de mon regard, et me bâtir des muscles d’acier, jamais je ne pourrai changer mes traits. Quel que soit le désir que j’en aie, il m’est impossible d’arracher de mon visage les longs sourcils épais que je tiens de mon père et la ride qui se creuse entre eux. Si je le souhaitais vraiment, je pourrais tuer mon père, (ce ne serait pas très difficile avec la force que j’ai acquise maintenant) et je serais capable aussi d’effacer complètement de ma mémoire le souvenir de ma mère. Mais je ne peux pas me débarrasser de leurs gènes. Pour cela, il faudrait que je me débarrasse de moi‑même. (Murakami, 2003, p. 17)

Le corps fait ici figure d’aliénation. Ce thème n’est pas nouveau chez Murakami : il est d’abord l’attachement de l’individu à la réalité. S’en libérer serait renoncer à elle, ainsi qu’il l’est décrit dans La Fin des temps. De même dans cet ouvrage, renoncer aux marques de son ascendance, ce serait renoncer à sa propre existence. On voit alors que le corps apparaît dans la construction de l’individu en tant qu’il se place dans une élaboration du corps et dans un rejet ou une acceptation de ce dernier. Ici l’élaboration du corps tient de marques d’une parenté problématique, condamnant l’individu à transgresser un interdit, et ce par le biais de la corporéité même. Autrement dit, le corps dans Kakfa est doublement problématique : il l’est par le rejet que fait le héros de sa propre constitution, et il l’est par le pouvoir transgressif — voire l’obligation à la transgression — qu’il impose au héros.

Le conflit qui prend place alors au sein du roman est un conflit d’ordre psycho-physiologique, qui tient d’une problématique mythique de l’individuation et la corporéité, où l’enjeu est la réconciliation d’un individu avec sa propre corporéité.

Le corps apparaît comme l’instrument de la malédiction œdipienne. La fracture entre la personne et son corps est alors manifeste : « Cette prophétie est comme un mécanisme de retardement enfoui dans mes gênes, et, quoi que je fasse, elle se réalisera à coup sûr. » (Kafka sur le rivage, p. 275)

La corporéité évoquée ici témoigne d’un processus latent au sein de tout individu, d’un archétype. Il s’agirait alors de voir Kafka sur le rivage comme une réécriture du mythe, mais à la différence de ce dernier, le corps du héros est mis en question : il ne s’agit plus d’un mécanisme divin, mais d’une programmation corporelle, d’une inscription dans la corporéité de la malédiction. Aussi est‑ce véritablement de cela qu’il s’agit dans la psyché humaine : le motif de la malédiction n’est que la formulation orale d’une étape de développement psychique et corporelle, manière de l’amener à la connaissance de la personne et d’individualiser un questionnement latent universel. Le questionnement du corps chez le héros ne peut avoir lieu que parce qu’il a connaissance de cette malédiction : ceci l’amène à se représenter à sa propre corporéité, à l’interroger et surtout à vouloir la maîtriser : « J’observe cet étrange organe que je suis incapable de contrôler la plupart du temps, alors qu’il fait partie de moi. On dirait qu’il est animé de sa propre volonté, indépendamment de la mienne. » (Ibid., p. 186) Dans ce passage, le jeune Kafka s’interroge sur son propre rapport à la sexualité et sur ce qui semble être la volonté propre de son pénis. « Tout à coup, je sens une paire d’yeux à l’intérieur de moi, qui me regarde agir. Je peux observer toute la scène. » (Ibid., p. 504)

Murakami parvient à représenter dans les termes du merveilleux le principe de la pulsion ou du désir charnel, sous la forme d’une puissance corporelle indépendante de la puissance de l’esprit. L’objet du roman prend alors tout son sens : celui d’une conciliation de ces deux puissances dans la construction d’un individu adulte affranchi du complexe d’Œdipe. Cette réconciliation passe dans Kafka par l’exercice et par la sensation :

Les grosses gouttes me frappent comme des cailloux. Ces pointes de douleur semblent faire partie d’un rituel d’initiation. Elles frappent mes joues, mes paupières, ma poitrine, mon ventre, mon pénis, mes testicules, mon dos, mes jambes, mes fesses. Je ne peux même pas garder les yeux ouverts. De cette douleur se dégage un sentiment d’intimité avec le monde, comme si enfin il me traitait justement. Je me sens extatique, soudain libéré. (Ibid., p. 186)

On remarque la valeur rituelle de cet instant : il se produit une forme de communion avec le monde par le biais du corps. On peut avancer qu’il s’agit là d’une réappropriation de la corporéité par l’individu, sous la forme d’un baptême, d’une purification. Cette réappropriation fait aussi du corps l’objet d’un travail, d’une forme de modification, d’une recherche de maîtrise, afin de l’habiter sans subir le poids de la malédiction :

Je fais quelques étirements pour me dérouiller les muscles. Je sens que je commence à me détendre. Je suis à l’aise dans cette enveloppe qui s’appelle mon corps. Je m’enferme à double tour dans ses contours bien délimités. Tout va bien. Je reconnais l’endroit. (Ibid., p. 73)

La corporéité est à questionner à la lecture de ce dernier extrait : d’une part, le corps est la trace de l’ascendance conflictuelle du héros, la marque de la malédiction, d’autre part, il est le refuge du narrateur, l’enveloppe qui constitue son intégrité et son intimité. Le héros s’y abrite sans pour autant le considérer comme une enveloppe inerte et servile à sa volonté.

Ce constat est valable pour l’héroïne de « Nemuri » (« Sommeil »), nouvelle du recueil Zô no shômetsu (L’Éléphant s’évapore, 1998). L’héroïne est sujette à une insomnie particulière, qui l’empêche de dormir pendant plusieurs semaines, mais elle ne ressent pas pour autant de fatigue, comme si la notion de sommeil était devenue étrangère à sa constitution. Ce changement est accompagné d’une incompréhension nouvelle entre son esprit et son corps, dont elle constate la séparation :

Je sentais ma conscience complètement éveillée me surveiller de la pièce voisine, à peine séparée de moi par une mince paroi. Mon corps physique flottait vaguement dans la clarté de l’aube, et juste à côté je sentais le regard insistant et la respiration de ma conscience. Mon corps voulait dormir, ma conscience voulait rester éveillée. (« Sommeil », p. 86)

Manifestement, les deux instances qui forment l’individu ne sont plus en association ; le propos de Murakami appelle tout de même une relecture : l’héroïne sent le regard et la respiration de sa conscience. C’est déjà et encore attribuer une forme de corporéité à cette conscience prétendument isolée. Les deux instances sont en conflit quant à l’attitude de l’individu.

Nous rejoignons une fois encore la conception spinoziste de la corporéité et de l’individu. Selon Spinoza, le corps présente une puissance propre qui s’allie à celle de l’esprit afin de former un individu à la combinaison unique. Il est alors à comprendre dans ce qu’il a de temporel et d’animé. Le corps possède sa propre force d’animation qui n’est pas asservi à l’esprit, mais qui trouve son accomplissement dans une réunion des deux puissances qui forment l’individu. La maturation de Kafka doit donc s’effectuer sur le plan d’un réinvestissement de la corporéité afin de voir émerger un individu complet et non plus tiraillé par deux puissances antagoniques.

Comme je l’ai évoqué plus haut, la question d’une interaction entre intériorité et extériorité parcourt la littérature japonaise. Des auteurs comme Hiroshi Noma ont préféré voir dans le corps la marque d’un changement sociétal ou individuel, comme si les organes internes suivaient les évolutions de ce qui est extérieur à l’individu. Avec Murakami, il s’agit de faire le pari d’une interaction quasi mystique ou magique entre les éléments, l’univers, la mémoire et l’homme.

Dysphorie de l’individualité séparée

La complétude de l’individu est une aporie qui parcourt une bonne partie de l’ouvrage murakamien. On retrouve le motif de l’être dysphorique dans plusieurs textes : les personnages secondaires de Kafka, voire l’héroïne de « Sommeil ».

Les personnages en prise à un dualisme entre corporéité et esprit sont légion dans les textes de Murakami ; on peut évoquer le personnage d’Oshima, protecteur de Kafka : « Toutefois, si mon corps est féminin, mon esprit est complètement masculin. Je vis avec une conscience d’homme. » (Kafka sur le rivage, p. 244)

Il est facile ici de souligner l’antagonisme de ces deux instances : l’individuation se fait par la conciliation de la nature du corps et de la nature de l’esprit, seul moyen d’assurer la survivance de l’individu. En parallèle, Mlle Saeki offre un dualisme d’une autre nature, plus proche du merveilleux murakamien, tel que nous l’avons connu dans La Fin des temps : elle apparaît dans le roman sous sa forme réelle, concrète, avec son corps réel et actuel — c’est-à-dire en tant qu’individu si l’on suit la conception spinoziste —, mais aussi en tant que fantôme, une reproduction de son esprit sous les traits de celle qu’elle était à quinze ans.

Cette nuit j’ai vu un fantôme. En tout cas ce n’était pas un être vivant, mais une créature sans substance qui n’appartient pas au monde réel. (Ibid., p. 296)

[…] la vraie Mlle Saeki est bien vivante. […] Personne n’a le don d’ubiquité. Pourtant, dans certains cas, cela se produit. De son vivant, un être humain peut devenir un fantôme. […] non par Mlle Saeki mais par le fantôme de celle qu’elle était à quinze ans. (Ibid., p. 304)

La question de la substance est ici primordiale, puisqu’elle est le seul élément probant de cette dysphorie entre l’actuelle et l’ancienne Mlle Saeki. Les deux sont présentes au monde, perçues par Kafka. Seulement, l’une a une corporéité réelle et actuelle qui fonde son individualité dans une réalité concrète et palpable, immédiate, tandis que l’autre n’est que le reflet d’un état antérieur. Ceci pose la question de l’actualité donnée par le corps dans l’individuation. Peut‑on considérer que l’individu se construit dans la durée ou au contraire que le corps introduit dans la notion d’individuation un critère temporel ? Murakami semble vouloir percevoir l’individu dans l’ensemble de sa progression et accumulant les formes prises par son corps ou par son esprit :

— les métaphores permettent de réduire la distance qui nous sépare, vous et moi. […]
— tu veux dire te rapprocher réellement d’une vérité métaphorique ou te rapprocher métaphoriquement d’une vérité réelle ? Ou peut-être les deux sont complémentaires ? (Ibid., p. 400)

Ce dialogue fait l’hypothèse de l’existence de l’individu dans une autre dimension que sur celle du corps, dans un système de métaphore. Ceci suppose au‑delà de l’esprit une conscience de sa propre individualité en tant que forme et en tant qu’organisme présent au sein du monde. Dans ce système de représentation, la temporalité du corps est dépassée au profit d’une conception de l’individu en tant que compilation du vécu. Le corps n’est plus alors que l’ensemble des mutations opérées par la forme de l’individu. Dans « Sommeil », ce n’est pas l’axe temporel qui est exploité, mais la notion de concept : « Il m’est extrêmement désagréable d’être une individualité séparée. […] Je veux être une existence individuelle et en même temps un principe général. » (« Sommeil », p. 76)

L’idée de principe général amène à considérer le corps comme une limite aux ambitions du héros : il ne peut être principe général tant qu’il est encerclé par les limites spatiales, temporelles, particulières de la corporéité. « Mais ce quelque chose flottait doucement à l’intérieur de mon corps, comme une sorte de possibilité. » (« Sommeil », p. 108)

Ici apparaît clairement la valeur limitative de la corporéité : le corps, chez Murakami, est réalisation de l’esprit, manifestation de l’esprit sous un nombre limité de formes. Dans la conception spinoziste de la corporéité, l’individu est animé par une puissance de pensée, l’esprit, et par une puissance d’agir, le corps. Or chez Murakami, le corps n’exprime pas toute la puissance de la pensée et ne forme un individu, variable, qu’en fonction de sa puissance d’agir.

Enfin, Murakami pousse la dysphorie de l’individualité jusqu’à exploiter le thème du doppelgänger dans Les Amants du Spoutnik : alors qu’elle est coincée au sommet d’une grande roue, Myu, qui peut apercevoir les fenêtres de son appartement non loin de là, assiste à une scène particulièrement choquante dans sa chambre : elle voit son propre corps, se voit elle‑même, céder aux avances de Ferdinand, un homme qu’elle repousse depuis plusieurs semaines déjà. Cette vision semble lui arracher jusqu’à la fin de l’histoire une partie de son individualité. Cette copie d’elle‑même réalise ce que Myu refusait d’accomplir. S’agit‑il d’une vision fantasmatique ? Quoi qu’il en soit, le corps témoigne une fois encore de son existence métaphorique et de sa valeur de représentation de l’esprit.

Conclusion : le corps murakamien comme tension entre le contingent et l’absolu

La séparation de l’individualité évoquée par Murakami peut être considérée comme une tension entre l’esprit et le corps, dans la mesure où le corps actualise l’esprit, l’individualise dans une temporalité et dans un monde particulier, c’est-à-dire dans une contingence.

À l’évidence, l’ensemble des personnages de Murakami se trouve monopolisé par cette tension : La Fin des temps résout cette tension en supprimant l’actualisation de l’esprit par le corps par la disparition du monde sensible, donc de l’espace et du temps. Dans Kafka sur le rivage, deux formes de conciliation s’opèrent entre l’absolu revendiqué par le corps et la contingence de sa substance : Kafka se débarrasse de la malédiction — ou l’accomplit — sans que l’on sache vraiment si Mlle Saeki était sa mère ; la dualité intrinsèque de Mlle Saeki, entre un corps actuel et un corps mémoriel, est également résolue par la fermeture de la « porte » et le décès du personnage : la contingence dans laquelle évolue son corps en tant que substance est annihilée et elle retrouve un corps mémoriel datant de l’époque où son esprit est resté figé. Enfin, Murakami solde la nouvelle « Sommeil » de manière étrange : alors que l’héroïne se trouve dans sa voiture en pleine nuit, une ombre, telle que celle qui la priva de sommeil, la prive de la vie. Le corps chez Murakami est en perpétuelle tension entre la contingence de sa réalité — substance, temporalité, espace — et sa valeur transcendantale, à savoir sa capacité à insérer l’individu dans un monde sensible comme le défendent les philosophies du Dasein, et être le support métaphorique de conflits internes à l’humain. C’est peut‑être là tout l’enjeu du texte murakamien : trouver dans le corps le pendant exact de conflits psychiques ancestraux.

Quelle place accorder alors à l’écriture de cette tension ? Dans le champ romanesque japonais, Murakami représente une des formes les plus abouties du questionnement sur l’individu. J’ai souligné plus haut le resserrement opéré par la littérature japonaise : resserrement sur le quotidien, sur l’individu, sur le « je ». Murakami parachève ce recentrement, cette intimité avec l’individu, jusqu’à soupçonner l’intégrité de son corps. Peut‑être ce resserrement est‑il un nouveau rebond vers l’universalité du questionnement sur l’individu et sur le corps ? À l’échelle du texte, c’est bien souvent le dédoublement de l’instance narrative qui permet au lecteur de percevoir l’aporie corporéité/individualité. Murakami revendique une inspiration qui fait fi des thèmes japonais, mais on retrouve au sein de l’écriture même, dans la conception même du narrateur, la difficulté de saisir totalement l’individu, et de raconter son histoire.

Bibliographie

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Sieffert René, La Littérature japonaise, Paris, Publications orientalistes de France, 1973.

Notes

1 Pour une plus ample présentation de l’intrigue complexe de La Fin des Temps, on peut se référer au mémoire d’Aurélie Fantin-Grévost, Le Merveilleux : permanences et renouvellement d’un mode dynamique, Grenoble, Université Stendhal-Grenoble 3, 2008. Retour au texte

2 Ce texte est basé sur les notes rédigées pour des conférences données en français ou en japonais, en 2003 et 2004, à l’Institut franco-japonais de Tokyo, l’Institut franco-japonais de Kyoto, les Alliances françaises de Sapporo et de Nagoya, l’université Sophia de Tokyo et l’université Ryûkoku de Kyôto (<http://www.inventaire-invention.com/jet-stream/textes/atlan_frame.html> [consulté le 27 juillet 2009]). Retour au texte

Citer cet article

Référence papier

Aurélie Fantin Grévost, « Murakami et les fractures de la corporéité. Vers une représentation aporétique de l’individuation », IRIS, 31 | 2010, 133-146.

Référence électronique

Aurélie Fantin Grévost, « Murakami et les fractures de la corporéité. Vers une représentation aporétique de l’individuation », IRIS [En ligne], 31 | 2010, mis en ligne le 05 octobre 2021, consulté le 18 juillet 2025. URL : https://publications-prairial.fr/iris/index.php?id=2393

Auteur

Aurélie Fantin Grévost

Université Stendhal – Grenoble 3

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