L’Observatoire numérique de l’enseignement supérieur a mené deux études successives sur les perceptions et usages des ressources pédagogiques numériques dans le premier cycle de l’enseignement supérieur. Méthodes et zoom sur ce qui peut encore freiner leur utilisation…
L’Observatoire numérique de l’enseignement supérieur a été créé en 2010 dans le cadre de la plateforme de collaboration entre le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et le Syndicat national de l’édition. Ses missions, dont le pilotage a été confié à l’Enssib, sont de comprendre les usages, besoins et attentes du monde de l’enseignement supérieur en matière de ressources pédagogiques numériques pour permettre l’évolution des offres éditoriales correspondantes selon des modèles satisfaisants pour tous les acteurs. Après une phase préparatoire, l’Observatoire a ainsi piloté en 2012 deux études complémentaires et successives réalisées par l’institut CSA.
La première étude a pris la forme d’une enquête centrée sur les modes d’accès, les usages et la perception des ressources pédagogiques numériques par les étudiants de premier cycle des universités et leurs enseignants.
La seconde étude a complété, précisé et approfondi ces résultats en explorant les perceptions, usages et attentes liés à ces mêmes ressources de la part des professionnels assurant des fonctions-clés dans la démarche pédagogique en premier cycle. 32 entretiens individuels ont ainsi été menés par des psycho-sociologues de l’institut CSA auprès de 10 enseignants en premier cycle, 9 professionnels de la documentation en charge de la formation des utilisateurs ou des ressources numériques dans les SCD et 13 professionnels en charge des technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE). Ces entretiens ont été réalisés de manière équilibrée au sein des universités d’Angers, Caen Basse- Normandie, Lyon 1, Paris 1 Panthéon- Sorbonne, Strasbourg et Tours.
Au cours de chaque entrevue, la perception des ressources pédagogiques a été abordée en premier, avec la description du rôle et du fonctionnement de l’espace numérique de travail (ENT) dans l’établissement, les représentations dont dispose l’interviewé des ressources pédagogiques, les répercussions du format numérique sur ces ressources pédagogiques et les freins que l’interrogé perçoit à l’utilisation de ces ressources.
Le deuxième temps de chaque entretien a été consacré aux pratiques d’apprentissage des étudiants perçues par l’interviewé, ses propres pratiques (pédagogiques, documentaires et/ou techniques selon le profil de l’interrogé) vis‑à-vis des étudiants et ses relations avec les autres profils-métiers (enseignants, professionnels de la documentation et/ou des TICE selon le cas).
Enfin, chaque entrevue s’est conclue par un exercice de prospective permettant d’explorer des pistes d’optimisation du système actuel et de tracer quelques perspectives pour l’avenir.
Concernant spécifiquement les freins perçus par les prescripteurs à l’utilisation des ressources pédagogiques au format numérique, deux niveaux se distinguent : les freins évoqués par tous les interrogés et ceux qui affectent plus particulièrement les enseignants chercheurs.
Ainsi, tous les interviewés ont relevé qu’un déficit d’équipements adaptés dans l’établissement (accès au Wi‑Fi restreint ou difficile, réseau sous‑dimensionné, manque de postes informatiques ou de prises électriques), un manque d’interopérabilité entre les différentes données de l’ENT et, d’une manière générale, des outils peu intuitifs, affectés par des modalités d’utilisation complexes, constituaient des « freins techniques » à l’utilisation des ressources pédagogiques numériques. Ils ont aussi noté certaines difficultés liées à des contenus non adaptés au premier cycle (souvent trop spécialisés, en langue anglaise), qui viennent s’ajouter aux écueils précédents.
Les enseignants-chercheurs font en particulier état d’une peur de perte de sens de leur métier, dans lequel le rôle en présentiel est déterminant pour faciliter la transmission des connaissances. Ils soulignent de plus l’absence de valorisation de leur activité pédagogique, au profit de leur activité de recherche, alors que la conception de contenus pédagogiques au format numérique représente un fort investissement. Les enseignants chercheurs des filières littéraires expriment également la crainte de se voir dépossédés de leur production pédagogique s’ils la mettent à disposition au format numérique, processus qui ne leur apparaît pas naturel du fait de leur fort attachement au texte. Enfin, les enseignants‑chercheurs (toutes disciplines confondues) ne se sentent pas suffisamment informés des possibilités et fonctionnalités offertes par le format numérique en termes d’innovation pédagogique.
Pour en savoir plus
Site de l’Enssib :
www.enssib.fr/recherche/ observatoire-numerique
Site de l’Observatoire numérique :
http://www.observatoiredunumerique.fr