Le 1er octobre 2010, le bâtiment emblématique de la Bibliothèque nationale et universitaire (BNU), place de la République, fermait ses portes au public pour être complètement évacué de tout ce qui y avait été rassemblé depuis son ouverture en 1895. Depuis la mi-août, les collections – 47 kilomètres linéaires sur les 67 que possède la bibliothèque – avaient commencé leur transhumance vers quatre différents points de stockage. Le 8 octobre 2010, soit une semaine après la fermeture du bâtiment principal, deux petites salles de lecture étaient ouvertes dans les bâtiments Joffre et Fischart permettant la consultation des ouvrages patrimoniaux des magasins. S’y ajoutaient naturellement des banques d’accueil et de prêt pour les inscriptions, le conseil et le prêt à domicile.
Dès lors, la BNU a continué de remplir ses missions principales, avec un service certes dégradé1, mais surtout la reconnaissance appuyée de ses usagers – étudiants, enseignants-chercheurs, grand public – qui, de la sorte, n’auront pas été privés pendant les trois années du chantier de documents indispensables à leurs études et recherches.
Un emplacement privilégié
Doté d’un financement de 61 millions d’euros2 le projet BNU Nouvelle avait pour objectif initial la mise en sécurité du bâtiment situé place de la République. Très rapidement, de nouveaux objectifs3 se sont ajoutés à ce chantier d’ampleur. Le choix a été fait de conserver l’emplacement privilégié de la BNU au centre-ville, à la croisée de l’université et de la cité, vraie passerelle entre science et culture, entre État et 22 collectivités. Assurée par l’Agence Nicolas Michelin et associés (ANMA), la maîtrise d’œuvre du projet est complétée par l’intervention de l’architecte en chef des monuments historiques, Christophe Bottineau (Agence 2BDM Architectes). La maîtrise d’ouvrage est, elle, assurée par le rectorat de l’Académie de Strasbourg, qui effectue un travail remarquable sur l’opération.
Premier défi : le déménagement des collections
Le déménagement des collections et l’accès maintenu à celles-ci durant les années du chantier ne furent pas les moindres défis que l’établissement a surmontés. Car c’est bien là le maître-mot de cette opération ambitieuse qui se décline en de multiples challenges que le personnel a su, jusqu’à présent, relever avec talent. Pour lui-même et dans l’attente de la réouverture en 2014, le personnel s’est serré les coudes, au propre et au figuré.
En effet, le maintien de l’accès aux collections n’allait initialement pas de soi : les coûts élevés d’un déménagement assorti d’une installation des collections sur des étagères provisoires4 supposaient tout d’abord de convaincre de la nécessité, pour le site universitaire strasbourgeois, d’assurer cet accès ; la logistique, ensuite, mettant en mouvement environ 47 km linéaires de collections, ne laissait pas de faire douter de la réussite d’une pareille entreprise. La réussite fut au rendez-vous et, grâce à la mise en place d’une navette, tout livre reste disponible dans un délai jugé raisonnable compte tenu de l’ampleur de l’opération.
Défis techniques et architecturaux ensuite
Les défis se sont ensuite succédé. Défis techniques et architecturaux en premier lieu : la BNU dispose actuellement de la plus grande grue de Strasbourg ce qui assure de la visibilité au chantier même si le gros de l’opération est interne ; en effet, derrière les façades classées, la quasi-totalité des planchers doit être abattue ; il faut donc évacuer plus de 8 500 m3 de gravats par un « trou de souris »5, en fait une porte de garage, véritable tour de force accompli par le tandem d’entreprises de gros œuvre Urban et Demathieu & Bard. Défi encore, l’installation d’une poutre de couronnement en béton, une légère surélévation provisoire du dôme de 460 tonnes et le coulage de nouveaux piliers de soutènement qui allégeront in fine la structure, permettant une meilleure diffusion de la lumière naturelle dans les espaces de lecture. Défi toujours, la sauvegarde de deux étages de magasins anciens, témoins des différents états de la bibliothèque, grâce à un système ingénieux de suspension des planchers : pendant un temps, les poteaux de fonte des magasins ont donné l’impression de fl dans le vide, spectacle saisissant ! Relevant le gant, les entreprises de gros œuvre ont accompli leur mission avec efficacité, à tel point que quelques semaines ont été gagnées sur le calendrier : pourvu que ça dure !
Paysage institutionnel et enjeux documentaires
Sur les versants institutionnel, scientifique et bibliothéconomique, les chantiers sont multiples et complexes. Le décret du 10 septembre 2010 a donné un nouveau visage au conseil d’administration de l’établissement et prévoit, en particulier, le rattachement de la BNU par convention à l’université de Strasbourg, tout en maintenant son autonomie d’établissement public national à caractère administratif.
À cela s’ajoute la prochaine création, courant 2012, d’un conseil scientifique qui aura pour mission, par exemple, d’émettre un avis et des recommandations sur le développement de la recherche à partir des richesses – en collections et en hommes – de la BNU, sur les corpus à numériser, l’action culturelle, etc. L’accès aux services et aux collections fait partie, aussi, des axes de travail : préparation de 200 000 ouvrages pour le libre accès, mise en place de la RFID, constitution de la bibliothèque numérique, achèvement de la rétroconversion afin de disposer d’un catalogue informatique exhaustif...
On voit bien à l’énoncé de ces objectifs que les ambitions de l’établissement sont élevées. Et que, de fait, les attentes de l’extérieur – tutelle, universités, usagers, grand public, etc. – sont légitimement conséquentes.
Ajoutons pour conclure que l’intérêt que suscite la BNU au plus haut niveau a été attesté par la visite, le 8 novembre dernier, du Président de la République accompagné notamment de Laurent Wauquiez, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, et de Philippe Richert, ministre en charge des collectivités territoriales et président de la Région Alsace, naturellement en présence d’Alain Beretz, président de l’université de Strasbourg, de Roland Ries, sénateur-maire de Strasbourg, et de Guy-Dominique Kennel, président du Conseil général du Bas-Rhin. Cette conjonction du national, du territorial et de l’universitaire a consacré, une fois de plus, l’originalité de l’établissement dans ses différents ancrages et dans la richesse de ses missions.
Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg
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Administrateur : Albert Poirot
albert.poirot@bnu.fr
Chargé de mission BNU Nouvelle : Pierre Louis
pierre.louis@bnu.fr
Délégué à l’action culturelle, aux relations internationales et à la communication externe : David-Georges Picard
david-georges.picard@bnu.fr