Entre évolutions conceptuelles et innovations techniques, quelques étapes clés jalonnent l’histoire – déjà longue – de l’évaluation des bibliothèques en France et à l’étranger : ISO 2789 Statistiques internationales des bibliothèques (1974) ; ESGBU (1976) ; ISO 11620 Indicateurs de performance des bibliothèques (1998) ; norme COUNTER (2002) ; LibQUAL + (2004) ; ROI – Return On Investment en bibliothèque1 (2009) ; référentiel Marianne‑Qualité de l’accueil (2009) ; ISO 16439 Méthodes pour évaluer l’impact des bibliothèques (2014)…
Avec un tel outillage, nous devrions être en mesure d’évaluer facilement et complètement l’activité, les coûts, les services, la qualité de l’accueil des bibliothèques ainsi que l’impact, les attentes et la satisfaction de leurs usagers. D’autant que la stratégie nationale en faveur de l’open data marque un progrès notable, même si l’obtention de données contextuelles, indispensables pour une évaluation étayée en fonction de l’environnement global des bibliothèques de l’enseignement supérieur (notamment le nombre d’étudiants et de chercheurs, les volumes de la production éditoriale, la consommation d’énergie et de fluides, les droits d’auteur payés, etc.) reste laborieuse. On peut regretter à ce sujet une certaine dépendance vis-à-vis des politiques – locales et nationales – de publication des statistiques encore fluctuantes, tout le monde ne disposant pas, comme c’est le cas en Suisse par exemple, des tableaux consolidés2 fournis depuis des années par l’Office fédéral de la statistique.
La culture du chiffre et de la donnée a cependant fait souche en France et nous devons saluer le rôle structurant des associations professionnelles (commission pilotage et évaluation de l’ADBU, consortium Couperin) qui œuvrent, en lien avec de nombreux acteurs, aux côtés du Département de l’Information scientifique et technique et du réseau documentaire (DISTRD) de notre ministère de tutelle, pour enrichir et utiliser à bon escient les informations collectées.
L’un des leviers à activer pour optimiser le système d’évaluation des bibliothèques et conforter le choix d’indicateurs stratégiques et partagés (au niveau local mais aussi national et international) concerne la qualité des données. Au cœur de cette démarche pragmatique qui permettra de relier des données issues de sources disparates – mais nécessairement ouvertes, fiables et identifiables, la rationalisation du système d’identification des établissements documentaires de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche constitue un chantier en soi. En effet, qu’il s’agisse des enquêtes ERE ou ESGBU, de l’annuaire des BU, du registre RCR du Sudoc ou du CCFr, des plateformes Licences nationales ou PANIST, aucun de ces environnements n’utilise, pour l’instant, les mêmes identifiants. Fort heureusement, la refonte de l’ESGBU3, couplée au projet Cartographie Collex‑Persée, vont donner aux acteurs institutionnels l’occasion de mener ce travail d’harmonisation et d’alignement, un chantier auquel l’Abes apportera pleinement sa contribution.
Puisse l’année 2020 voir ce projet avancer car, bien au-delà de froides statistiques, il s’agit d’être en capacité d’évaluer le rôle stratégique des bibliothèques de l’ESR, en termes d’impact sur la réussite des étudiants, la qualité de la recherche ou le rayonnement des établissements desservis.
Je vous souhaite une belle et fructueuse année 2020.