Le musée Curie dans Calames

DOI : 10.35562/arabesques.1998

p. 18-19

Plan

Texte

L’intérêt considérable des collections du musée Curie fait que celui-ci est un des sept organismes documentaires, en 2010, à faire son entrée dans Calames – Catalogue en ligne des archives et des manuscrits de l’enseignement supérieur.

L’Université de Paris et l’Institut Pasteur, en 1909, décident de créer ensemble l’Institut du Radium afin de concentrer en un même lieu les études chimiques, physiques, biologiques et médicales sur les rayonnements. Cet Institut du Radium est, dès 1914, composé de trois bâtiments. Le premier pavillon, nommé Curie en l’honneur de Pierre Curie, est consacré aux recherches physico-chimiques. Il est dirigé par Marie Curie, professeur de la faculté des sciences de Paris. Le deuxième pavillon, nommé Pasteur, est, quant à lui, consacré aux recherches biologiques, et dirigé par le Dr Claudius Regaud de l’Institut Pasteur. Enfin le « petit » pavillon situé à égale distance des deux autres est appelé pavillon des sources : c’est là qu’on y stockait les sources radioactives. Devant le pavillon des sources, entre la chimie-physique et la biologie, un petit jardin fleuri, voulu et aménagé par Marie Curie pour que les chercheurs se rencontrent et discutent. Jusqu’en 1959, le laboratoire Curie est un lieu de recherches scientifiques, dirigé successivement par Marie Curie (1914‑1934), André Debierne (1934‑1945), Irène Joliot-Curie (1945‑1956) et enfin Frédéric Joliot‑Curie (1956‑1958).

Un lieu de mémoire : le musée Curie

Après la mort de Frédéric Joliot, ce qui a été son laboratoire privé et son bureau sont conservés tel quel, comme lieu de mémoire de tous ceux qui l’ont occupé. En 1967, dans le cadre de la commémoration du centenaire de la naissance de Marie Curie, les lieux sont présentés à quelques visiteurs privilégiés. Cette même année, Monique Bordry (CNRS) est chargée d’inventorier les archives du laboratoire. En 1972, la famille Joliot‑Curie lui confie également ses archives privées. Mais au fil des ans, les quelques visiteurs deviennent de plus en plus nombreux. Il est décidé en 1981, avec le soutien de la Ligue française contre le cancer, de décontaminer le laboratoire de chimie et de le reconstituer tel qu’il était à l’époque de Marie Curie. En 1992, ce qui est devenu progressivement un musée est ouvert systématiquement tous les après-midi. Petit à petit une équipe est créée pour non seulement accueillir les visiteurs, mais aussi traiter les archives quel qu’en soit le support. Cette petite équipe devient en 1994 une unité mixte de service entre le CNRS (IN2P3) et l’Institut Curie. La toute nouvelle unité qui prend pour nom Musée et archives de l’Institut du Radium est créée sous l’influence de l’association Curie et Joliot‑Curie, qui s’est donné pour mission de perpétuer la mémoire des couples Curie et Joliot‑Curie ; de contribuer à la préservation et à la mise en valeur de leurs écrits, de leurs travaux et de tout document ou objet les concernant. Dès lors, les collections qui se sont accumulées depuis 1909 trouvent un cadre administratif pour être traitées, mises en valeur, diffusées. La première mission du musée Curie sera d’établir un inventaire systématique des instruments, papiers, photographies qui se trouvent dans les locaux. À cette somme d’archives, s’ajoutent celles qui lui sont confiées par la famille Joliot‑Curie via l’association. Mais le rôle de l’unité mixte ne s’arrête pas là. En 1996, le musée agrandit sa salle d’exposition, ouvre tous les jours de la semaine, et organise des visites guidées.

Les collections

Sur une période de plus de 100 ans, de 1909 à 2010, le fonds patrimonial s’est donc constitué progressivement : de nombreux dons et dépôts sont venus compléter au fil du temps les vieux papiers et instruments trouvés ici et là dans le pavillon Curie. L’histoire de l’Institut du Radium (aujourd’hui Institut Curie) dans son ensemble constitue le cœur de nos collections. Aujourd’hui ce fonds patrimonial se divise matériellement en trois : les archives papiers, les archives photographiques et les instruments scientifiques.

Un château de plomb

Les instruments scientifiques principaux sont exposés au musée. Un inventaire détaillé est en cours de réalisation. Il y a, bien entendu, les instruments utilisés par les directeurs successifs du laboratoire mais également de nombreux instruments qui proviennent de dons ou de collectes organisées par le musée. On y trouve évidemment la balance à quartz piézoélectrique, qui permet des mesures quantitatives de la radioactivité, mais aussi un appareil de radiologie des années 1920, ou encore un château de plomb qui permettait de stocker les aiguilles radioactives en attendant qu’elles soient appliquées sur les tumeurs cancéreuses. En tout, le musée possède plus de huit cents instruments scientifiques qui datent de la fin du xixe à la deuxième moitié du xxe siècle.

Une commande de dahlias et des formulaires

Dans les archives papiers, le lecteur trouvera tous les documents que les enfants Joliot-Curie ont déposés au musée, mais aussi le fonds dit privé des Joliot-Curie qu’ils ont donné à la Bibliothèque nationale de France, mais qui est conservé au musée. À ce fonds Joliot-Curie, s’ajoutent plus de 9 000 documents constituant l’histoire du laboratoire Curie de l’Institut du radium, depuis sa création jusqu’à la fin des années 50. On y trouve des détails sur le personnel du laboratoire, ses publications, ses relations avec les industriels, avec l’université et le monde académique, mais aussi une commande de dahlias émise par Marie Curie pour agrémenter le jardin de l’institut, ou encore ses demandes, sans cesse réitérées, pour obtenir une bourse pour tel ou tel étudiant.

« Avec Joliot-Curie, les intellectuels français déclarent : Si demain on nous demande de faire du travail de guerre, nous répondrons : NON ».

« Avec Joliot-Curie, les intellectuels français déclarent : Si demain on nous demande de faire du travail de guerre, nous répondrons : NON ».

Banderole du défilé du 1er mai 1949 à l’occasion du 1er Congrès mondial des partisans de la paix à Paris (Photo également parue dans le journal Regards)

Cependant, le laboratoire Curie n’est qu’une partie de l’Institut du Radium. Le pavillon Pasteur, dirigé par le Dr Claudius Regaud, est loin d’être inactif. En 2005, les archives Regaud rejoignent les collections du musée. On y découvre comment il plaide l’idée de la création de vivariums et d’aquariums près du petit pavillon pour les expériences sur le vivant. On y voit un Regaud, capable de créer du jour au lendemain un hôpital de guerre en 1914, à Bouleuse près de Reims. C’est avec la même énergie qu’il part chaque jour soigner les cancéreux dans les hôpitaux parisiens. Dans ses archives, on découvre la métamorphose d’un laboratoire de recherche en centre de lutte contre le cancer. Comment il arrive à créer deux dispensaires de jour ; comment il obtient un nouveau pavillon de recherche en 1932 et la création d’un hôpital en 1936. Enfin, il y a toute cette somme de documents qui suivent la mort de Marie Curie et qui viennent des laboratoires ou des dons faits par les scientifiques qui y ont travaillé. On peut y trouver les formulaires que devaient remplir les travailleurs des laboratoires durant la seconde guerre mondiale ; ils devaient y noter l’origine de leurs grands-parents, certifier leur non appartenance à une organisation politique ou autre qui pourrait être opposée à l’État de Vichy… Ce n’est pas seulement l’histoire des sciences, d’un laboratoire, d’une lutte contre la maladie mais également toute une histoire sociale et politique qui défile dans ces collections.

Des photos publiques, privées et politiques

Ce fonds, riche de plus de 4 000 photographies d’époque, est numérisé et mis à disposition des publics au fur et à mesure de son accroissement. Il peut, physiquement, se diviser selon sa provenance. En effet, une large majorité des photographies anciennes viennent également de la famille Joliot-Curie. Elles sont déposées au musée via l’association Curie et Joliot‑Curie avec l’autorisation de les reproduire et de les diffuser. On y trouve toutes les photographies les plus connues de Marie et Pierre Curie, Irène et Frédéric Joliot, mais également de nombreuses photographies plus personnelles, familiales. Ces personnages historiques retrouvent dans ces images leur vie privée, loin des projecteurs officiels. À travers ces photographies, c’est aussi toute l’histoire sociale et politique de la première moitié du xxe siècle qui défile devant nos yeux.

Du Front populaire à l’éviction de Frédéric Joliot du CEA

Du Front populaire à l’éviction de Frédéric Joliot du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) en 1950, en passant par les congrès du Parti communiste français ou du mouvement de la Paix, c’est l’histoire des grandes luttes sociales et politiques. Cependant, tout comme pour les archives papier, le fonds iconographique ne se réduit pas aux familles Curie et Joliot-Curie. De nombreuses photographies représentent la vie, la recherche à l’Institut du Radium, l’histoire des bâtiments, des familles qui y étaient logées, des ateliers de constructions d’instruments scientifiques, des salles et protocoles de soins…

Ainsi, les collections du musée Curie concernent non seulement l’histoire scientifique de la radioactivité et de la cancérologie mais aussi l’histoire sociale et politique de la première moitié du xxe siècle. Ce patrimoine unique regroupe des instruments, des archives, une bibliothèque, des photographies sur les Curie, les Joliot‑Curie et sur leurs collaborateurs, de ce qui fut l’Institut du Radium avant de devenir l’Institut Curie.

Calames, Catalogue en ligne des archives, est le catalogue proposé par l’ABES est dédié aux fonds d’archives et de manuscrits du supérieur.

Le « réseau Calames » comptait 20 membres au 31 décembre 2009. La bibliothèque Cujas a demandé le report de son intégration dans Calames à 2011. Le conseil d’administration de l’ABES du 23 avril 2009 avait autorisé l’intégration d’une 3e vague de 8 bibliothèques dans ce réseau ; le déploiement s’opérant l’année suivant la décision du CA, ce sont donc sept établissements qui y font leur entrée en 2010.

Les 7 Calames de 2010

• Conservatoire national des arts et métiers – bibliothèque du CNAM
• École militaire – centre de documentation (CDEM)
• Institut Curie – musée et archives
• Institut national d’histoire de l’art – bibliothèque de l’INHA
• Université d’Angers – service commun de la documentation
• Université Paris-I (Université Panthéon-Sorbonne) service commun de la documentation
• Université Paris-IV (Université Pierre et Marie-Curie) service commun de la documentation

Institut de France, Ms Godefroy 321 Réserve
Image

Illustrations

« Avec Joliot-Curie, les intellectuels français déclarent : Si demain on nous demande de faire du travail de guerre, nous répondrons : NON ».

« Avec Joliot-Curie, les intellectuels français déclarent : Si demain on nous demande de faire du travail de guerre, nous répondrons : NON ».

Banderole du défilé du 1er mai 1949 à l’occasion du 1er Congrès mondial des partisans de la paix à Paris (Photo également parue dans le journal Regards)

Citer cet article

Référence papier

Natalie Pigeard-Micault, « Le musée Curie dans Calames », Arabesques, 59 | 2010, 18-19.

Référence électronique

Natalie Pigeard-Micault, « Le musée Curie dans Calames », Arabesques [En ligne], 59 | 2010, mis en ligne le 28 juillet 2020, consulté le 29 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=1998

Auteur

Natalie Pigeard-Micault

Institut Curie & CNRS (UMS 6425) - Musée Curie - Fonds iconographique ancien 11 rue Pierre-et-Marie-Curie 75248 PARIS CEDEX 05 - www.curie.fr/musee

Natalie.Pigeard@curie.fr

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