Archivage électronique et records management à la DAF

Dans le réseau public des archives

DOI : 10.35562/arabesques.2154

p. 8-9

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Le contexte

L’archivage numérique a été inscrit dans le plan stratégique de l’administration électronique par le comité interministériel de la réforme de l’État du 2 février 2004 (action ADELE 103) ; en effet, « l’administration électronique, pas plus que l’administration traditionnelle, ne peut être efficace si elle est amnésique. C’est pour tant le risque qu’elle court actuellement, tant en raison de l’absence de prise de conscience de la nécessité de l’archivage électronique que de la faiblesse des moyens et des procédures disponibles pour l’assurer ». On connaît en effet les enjeux et difficultés de l’archivage numérique : d’une conservation passive, l’archivage numérique rend indispensable une stratégie de conservation active de tous les instants.

L’administration électronique est actuellement portée par la direction générale de la modernisation de l’État (DGME), à vocation interministérielle, qui est rattachée au ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Ce développement de l’administration électronique s’est fait en s’appuyant sur les profonds changements législatifs et réglementaires intervenus depuis 2000, notamment avec la loi n° 2000-230 du 13 mars 20001. Cette loi a été qualifiée de « Révolution numérique » et, en effet, jusqu’alors c’était le principe de l’indissociabilité entre un support matériel durable et l’information qu’il porte, qui faisait la qualité d’une preuve et notamment de la preuve préconstituée d’un acte juridique. Désormais, l’écrit sur support électronique est admis en preuve au même titre que l’écrit sur support papier : « sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité2 ». De même, la signature électronique est introduite, qui repose en fait sur une technologie particulière, la cryptographie à clé publique, dont la particularité en effet est de pouvoir s’assurer raisonnablement qu’un acte n’a pas été modifié durant la durée de sa transmission entre un expéditeur et un destinataire et que son auteur ne peut pas prétendre ne pas en avoir été l’auteur. Le dispositif est consolidé par toute une série de textes.

Les référentiels

Dans ce cadre-là, la direction des Archives de France (DAF) et la DGME ont élaboré un certain nombre de référentiels, qui ont vocation à intégrer le référentiel général d’interopérabilité.

Il s’agit d’une part du standard d’échange de données pour l’archivage3 conçu pour faciliter les échanges d’archives électroniques ou papier. Il fournit un modèle (sous forme de schémas XML) pour les différentes transactions spécifiques qui interviennent entre un service d’archives et ses partenaires (transfert, communication, modification, élimination, restitution). Il permet notamment pour les transferts de fixer la structure et le contenu des bordereaux de versement qui accompagnent les documents archivés. Par ailleurs, dans un souci de normalisation et par conséquent d’une implémentation plus facile par les éditeurs du marché, le standard est actuellement proposé pour une normalisation au niveau européen et international – au niveau de l’UN-CEFACT (The United Nations Centre for Trade Facilitation and Electronic Business). C’est à partir de ce standard d’échange qu’ont pu ainsi être développés des modules d’export à partir des applications métier d’origine ou des plateformes de télétransmission pour un certain nombre de processus métier. Plus généralement, les services d’archives, dans une démarche forte de « records management » apportent de plus en plus leur appui aux services métiers et aux services informatiques dans les projets de numérisation – gestion électronique de documents (GED) – de manière à intégrer le cycle de vie des documents dans la GED, à permettre une bonne articulation entre stock actif, inactif, flux, support papier, support numérique, à préparer les éliminations réglementaires et les versements nécessaires dans un objectif de meilleure gestion et fluidité de l’information.

Il s’agit d’autre part d’un référentiel élaboré sous le pilotage de la direction centrale de la sécurité des systèmes d’information (DCSSI)4 visant à mettre en œuvre une politique d’archivage sécurisé dans le secteur public . Cette politique d’archivage type définit ainsi les exigences minimales, en termes juridiques, fonctionnels, opérationnels, techniques et de sécurité, qu’une autorité d’archivage doit respecter afin que l’archivage électronique mis en place puisse être regardé comme fiable.

Réalisation de la plate-forme pilote (PILAE) d’archivage électronique

Enfin la DAF, sur la base des résultats d’une étude menée sur les coûts d’une plateforme d’archivage électronique, a participé au développement d’un pilote permettant d’accueillir, traiter, conserver et communiquer les archives nativement numériques (données extraites de bases de données, documents bureautiques, documents issus de GED et décrits par une base de donnée, messageries électroniques, flux de données sécurisées…) produites par les services centraux de l’État et, par conséquent, de permettre une certaine automatisation des tâches et une meilleure sécurité de la conservation.

PILAE a été construit à partir d’un cœur de « coffre-fort électronique »5, s’interfaçant avec des matériels de stockage sécurisés avec réplication des données sur deux sites distants.

À partir de ce cœur, ont été développées les parties relatives à la prise en compte du standard d’échange de données pour l’archivage ; les écrans de contrôle pour les archivistes ; les messages échangés entre services versants et archivistes ; les fonctionnalités et écrans liés à la recherche et à la commande en ligne des fichiers de données .

À cela s’ajoute l’intégration d’outils de validation et de conversion de formats qui permettent à l’entrée dans le système, de contrôler et convertir, si les conventions le permettent, des fichiers dont les formats d’entrée ont été reconnus par ces outils vers des formats cibles d’archivage si les formats d’entrée ne sont pas des formats cibles d’archivage. Le pilote sera, dans le très court terme, utilisé au sein des Archives nationales (site de Fontainebleau) dans le cadre du service des archives électroniques durant la période transitoire 2008-2011, avant l’ouverture du nouveau site des Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine et de sa plateforme d’archivage électronique.

D’ores et déjà d’autres plateformes ont été développées par des collectivités ou des services de l’État.

Par ailleurs, des projets prometteurs en termes de mutualisation, entre services d’archives et services producteurs, voient le jour, comme par exemple celui de services d’archivage électronique pris en charge, au niveau régional, par le groupement d’intérêt public (GIP) e-Bourgogne ou encore l’initiative, très récente, prise par l’Adullact6 de créer un groupe de travail sur l’archivage électronique rassemblant une dizaine des collectivités (archivistes et services informatiques) ainsi que la DAF. Dans ce dernier cas, le développement de l’outil se fera sur la base de la plateforme développée par le conseil général des Yvelines, enrichi de certaines des fonctionnalités développées dans le cadre du projet PILAE.

Les actions menées, qui transforment la vision classique sur l’archivage en tendant à faire de l’information archivée une ressource immatérielle stratégique, ont été confortées en 2007 par l’audit transversal sur l’archivage dans les ministères, auquel la DAF a activement participé, que la DGME a lancé, durant la vague des audits de modernisation sur l’archivage dans les ministères7 Et tout dernièrement, le plan de développement de l’économie numérique inscrit, parmi les actions liées à l’administration électronique, l’archivage numérique (action n°124)8.

Certes, de nombreux défis demeurent : inégalités entre services d’archives, à résoudre en partie grâce aux projets de mutualisation, questions techniques délicates et encore en partie sans réponse satisfaisante concernant notamment les formats, question de la pérennisation de la signature électronique des documents archivés, bouleversements des métiers des archivistes appelés à travailler en étroite collaboration avec les services informatiques, dans une démarche résolue de gestionnaires de l’information. Cependant des progrès considérables ont été accomplis durant ces cinq dernières années par les institutions archivistiques, ainsi que par d’autres partenaires dans le monde culturel, notamment les bibliothèques, dans de nombreux pays, qui permettent d’envisager l’avenir et ses mutations avec confiance.

Notes

1 Portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l’information et relatives à la signature électronique. 2 Article 131661 du Code Civil.

2 Article 131661 du Code Civil.

3 www.vitamin2.adae.gouv.fr/ministeres/projets_adele/a103_archivage_elect/public/standard_d_echange_d/folder_contents.

4 www.ssi.gouv.fr/fr/confiance/archivage.html.

5 Qui assure les fonctions de sécurisation indispensables à une plate-forme d’archivage : vérification des empreintes liées aux données et documents transférés à l’entrée dans le système puis périodiquement, horodatage des opérations, tenue d’un journal des évènements lui-même scellé…

6 Association des Développeurs et des Utilisateurs de Logiciels Libres pour l'Administration et les Collectivités Territoriales :www.adullact.org/

7 Les recommandations de l’audit sont accessibles à l’adresse suivante www.audits.performancepublique.gouv.fr/bib_res/668.pdf

8 www.archivesdefrance.culture.gouv.fr/static/2018

References

Bibliographical reference

Françoise Banat-Berger, « Archivage électronique et records management à la DAF », Arabesques, 53 | 2009, 8-9.

Electronic reference

Françoise Banat-Berger, « Archivage électronique et records management à la DAF », Arabesques [Online], 53 | 2009, Online since 10 septembre 2020, connection on 15 août 2025. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=2154

Author

Françoise Banat-Berger

Département de l’innovation technologique et de la normalisation - 56 rue des Francs-Bourgeois - 75141 PARIS CEDEX 03 - 01 40 27 62 65

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