Des innombrables et souvent passionnantes conférences du récent congrès de l’IFLA à Durban, j’en retiendrai deux qui rencontrent la thématique de cette livraison d’Arabesques consacrée à l’évolution des catalogues. D’abord celle de Caroline Brazier – British Library (BL) – qui, loin de se résigner au déclin du catalogue, a montré de nouvelles voies pour l’adapter aux nouveaux usages. Chacun sait que le catalogue n’est plus, depuis longtemps, le canal privilégié des étudiants pour l’accès à l’information : d’après OCLC, ils sont 84 % à commencer leurs recherches sur Google, qui est le premier site consulté au Royaume-Uni. La BL est loin derrière (avec une honorable 1 317e place) et Worldcat encore plus loin, au 6 409e rang. Comment faire face ? En imaginant des interactions avec les communautés d’usagers de sorte que leurs connaissances et expériences enrichissent les recherches et la navigation dans les collections de bibliothèques. C’est la bibliothèque 2.0 qui porte un mouvement à double sens :
- amener l’usager à la bibliothèque (virtuelle) en l’impliquant dans le développement de nos services d’information en réseau : tags, wikis, critiques, liens, etc. ; le catalogue est repensé, enrichi mais il demeure l’accès privilégié aux collections ;
- amener la bibliothèque à l’usager en l’intégrant aux réseaux sociaux et à son environnement de travail ; la BL illustre cette approche avec plusieurs exemples, dont l’un des plus probants est celui des outils proposés à la communauté des experts des manuscrits.
L’ABES est pareillement convaincue des limites du catalogue traditionnel, conçu comme un système autoréférentiel et fermé, correspondant au modèle de bibliothèque qui a fonctionné pendant des siècles. Comme la bibliothèque, le catalogue n’est plus isolé du monde. C’est cette voie sur laquelle l’ABES propose de s’engager, après avoir réalisé un prototype début 2006. Cette ouverture du catalogue constituera un des axes de son projet pour les années 2008-2011, issu de plusieurs mois de réflexions internes et qui sera soumis en octobre à la communauté universitaire via l’AURA.
La seconde conférence était celle du président d’OCLC sur les évolutions de la société de Dublin (Ohio) et ses projets de coopération globale. Des évolutions qui posent la question du positionnement stratégique de l’ABES et des BU françaises par rapport à OCLC, dont l’ambition affichée est de devenir un opérateur mondial en fournissant des services intégrés aux niveaux global, régional et local aux bibliothèques du monde entier. Ce contexte explique que le projet de l’ABES intègre une stratégie claire sur la place du Sudoc par rapport à Worldcat – sur lequel est chargé un nombre croissant de catalogues collectifs. Comment bénéficier des services d’une société, dont chacun s’accorde à reconnaître la qualité des services et l’innovation, tout en conservant la maîtrise du Sudoc ? L’enjeu pour l’ABES et les BU est de parvenir à concilier leur maîtrise du catalogue et les bénéfices de l’appartenance à un plus vaste réseau, là et quand cela est pertinent. D’où la nécessité de nouer aussi des alliances avec des réseaux régionaux (en Europe et au-delà) confrontés à des enjeux identiques et qui tiennent à conserver les spécificités culturelles, linguistiques et politiques qui ont motivé leur création, sans se diluer dans la globalisation.