Les FID allemands : vers une infrastructure nationale d’information

DOI : 10.35562/arabesques.2788

p. 20-21

Plan

Texte

Les FID, équivalents allemands du programme CollEx-Persée, ont entrepris une coopération avec NFID, l’infrastructure nationale des données de la recherche récemment créée.

La deuxième rencontre entre le dispositif CollEx-Persée et FID (Fachinformationsdienste), son équivalent en Allemagne, s’est tenue les 28 et 29 juin 2021. Ce fut l’occasion d’échanges intenses entre les représentants de ces infrastructures pour mieux connaître les développements et les expériences des uns et des autres. La question de la pérennisation s’est avérée un souci partagé en France comme en Allemagne1.

Vers la création d’une infrastructure d’information nationale

En Allemagne, les nouveaux FID ont été créés comme des projets à durée déterminée pouvant bénéficier d’une prolongation, sous réserve néanmoins. Très vite, non seulement les établissements porteurs de FID mais également de nombreux chercheurs en tant qu’utilisateurs de leurs services se sont opposés à ce statut : il ne semblait pas opportun de mettre en place, à grand renfort d’engagements, des services pour la science pour les abandonner quelques années plus tard.

La Deutsche Forschungsgemeinschaft (DFG)2, en réponse, a commencé par prolonger le programme de sorte que les FID puissent continuer à déposer des demandes de subvention. Puis elle a demandé aux bibliothèques de déterminer les services devant être fournis de manière permanente et ceux revêtant un caractère de projet avec un début et une fin définis, par exemple, la numérisation d’un corpus de textes. Elle a, en outre, invité l’ensemble des bibliothèques FID à s’organiser de manière à constituer une infrastructure nationale d’information qui puisse être valorisée en tant que telle auprès du public scientifique mais aussi politique. Cette auto-organisation a également pour but de créer des synergies par la coopération, par exemple au niveau technique. Par ailleurs, la DFG a commencé à étudier les possibilités de financements à long terme.

Les FID se sont donc organisés et ont rédigé un programme en 20203. Ils ont créé un comité de pilotage qui coordonne un groupe de travail au niveau opérationnel. Des sous-groupes de travail ont formulé des thèmes importants qui devront être traités dans les prochaines années.

L’arrivée d’un nouvel acteur pour les données de la recherche

Alors que les FID commencent à peine à fonctionner et à être perçus comme une infrastructure d’information nationale, un effort important a été effectué sur le plan politique pour créer un système national de gestion des données de la recherche. Ces dernières années ont vu la prise de conscience en Allemagne de la difficulté de créer des infrastructures d’information nationales ou coordonnées au niveau national dans un État fédéral, où la compétence en matière d’éducation et de science relève plutôt de chacun des Länder. En 2014, un Conseil pour les infrastructures d’information avait été instauré avec une mission consultative pour les Länder et l’État fédéral. Le Conseil identifia les données de recherche comme le premier grand domaine de travail urgent. Face à la numérisation croissante de la science et au mouvement de la science ouverte, des structures coordonnées sont nécessaires pour collecter, décrire, archiver et rendre accessibles les données de la recherche de manière standardisée, afin de garantir une bonne pratique scientifique et une utilisation ultérieure.

Afin de mettre en place une telle structure coordonnée, trois séries d’appels à projets ont été lancées en 2019, 2020 et 2021. Les représentants des disciplines scientifiques ont été invités à former des consortiums avec des établissements tels que des centres informatiques et des bibliothèques pour poser leur candidature. Les appels d’offres ont attiré l’attention, notamment parce que la durée prévue de cinq ans pour une première période de projet est assez longue et aussi parce qu’une pérennisation du financement a été promise. L’objectif est de créer un réseau d’environ 30 consortiums représentant les disciplines scientifiques majeures qui recevront chacun un financement annuel d’environ 2 millions d’euros. Sur sa page d’accueil, la nouvelle infrastructure formule son identité ainsi : « Dans l’infrastructure nationale des données de la recherche (NFDI), des données précieuses de la science et de la recherche sont systématiquement exploitées, mises en réseau et rendues utilisables durablement et qualitativement pour l’ensemble du système scientifique allemand. [...]. Les données pertinentes doivent être mises à disposition selon les principes FAIR (Findable, Accessible, Interoperable et Reusable) »4.

Livre de la maison de Tübingen. Livre de calendrier Iatromathématique ; l’art de l’astronomie et de la géomancie. Troisième quart du XVe siècle.

Livre de la maison de Tübingen. Livre
            de calendrier Iatromathématique ; l’art de l’astronomie et de la
            géomancie. Troisième quart du XVe siècle.

L’infrastructure nationale des données de la recherche et les fid, une coopération naissante

Les objectifs et les tâches de la NFDI mentionnés ci-dessus présentent cependant des liens et des recoupements avec les FID.

Une table ronde organisée en novembre 2021, rassemblant des représentants de la DFG, des FID et des consortiums de la NFDI, ainsi que le comité directeur des FID et la direction de la NFDI, a été pour les participants l’occasion de se présenter et d’identifier des perspectives de coopération.

Quelques FID participent déjà aux consortiums NFDI issus des disciplines pour lesquelles ils offrent leurs services, mais ce n’est pas encore généralisé. Lors de cette réunion, cinq FID ont présenté les différents modes de participation à des consortiums NFDI. Étant donné que de nombreux FID exploitent de vastes systèmes d’information, la NFDI ne devrait pas créer de nouveaux instruments de recherche isolés, mais plutôt intégrer, dans la mesure du possible, des métadonnées dans les bases de données des FID.

Les bibliothèques, en tant que responsables des FID, ont une longue expérience et des compétences variées dans l’élaboration des métadonnées et des fichiers d’autorité. Avec l’apparition des Linked Open Data, des ontologies ont été créées dans plusieurs FID. Les FID étant souvent très bien connectés à leurs communautés scientifiques, les consortiums de la NFDI ont la possibilité d’utiliser leurs réseaux pour sensibiliser les scientifiques à la question des données de la recherche.

Offrir un meilleur portefeuille de services aux chercheurs

À l’issue de la table ronde, les participants ont exprimé le souhait que les FID et les consortiums NFDI des disciplines concernées cherchent activement à établir des contacts entre eux. Ils devraient examiner les possibilités d’utiliser les services de chacune des infrastructures ou d’en tenir compte dans leurs propres développements. Comparés à cette grande initiative politique de mise en place d’une infrastructure nationale de données de recherche, les FID sont plutôt de petits acteurs. Pourtant, ils ont déjà accompli beaucoup au cours des dernières années et ont mis en place des services concrètement visibles et très utilisés. La structure nouvellement établie des FID, avec un comité de pilotage et des groupes de travail ciblés, facilite la communication avec une structure telle que NFDI.

Si une coopération solide est mise en place, la science bénéficiera de la valeur ajoutée des infrastructures d’information en réseau, des données de la recherche jusqu’aux publications qui en découlent. Pour les responsables des infrastructures, la répartition des tâches et la coopération offrent la possibilité de mettre en place un meilleur portefeuille de services pour leurs communautés, plus efficace et plus économique que si des structures doubles étaient créées. Pour que cette vision devienne réalité, l’attention, l’engagement et une réflexion transversale sont nécessaires de part et d’autre. Et il est essentiel que les deux infrastructures bénéficient d’une perspective sûre de financement à long terme, car c’est la seule façon de créer des services durables pour les générations futures de scientifiques en Allemagne.

Notes

1 Catherine DÉSOS-WARNIER, « Rencontres CollEx-Persée_FID : évaluer la transition, consolider les résultats, renforcer la coopération – 28 et 29 juin 2021 », Bulletin des bibliothèques de France (BBF), 30 septembre 2021 : https://bbf.enssib.fr/tour-d-horizon/rencontres-collex-persee-fid_70100 Retour au texte

2 La Deutsche Forschungsgemeinschaft (DFG) est l’organisation centrale d’autogestion de la science en Allemagne. Dotée d’un budget annuel d’environ 3,3 milliards d’euros, elle soutient des projets scientifiques de toutes sortes ainsi que des projets d’infrastructure de bibliothèques ou de centres informatiques. Retour au texte

3 Stärkung der Kooperation und Selbstorganisation im System der Fachinformationsdienste - ein Positionspapier der FID : https://wikis.sub.uni-hamburg.de/webis/index.php/Fachinformationsdienste_für_die_Wissenschaft Retour au texte

4 https://www.nfdi.de/verein/#kurzinfo (Toutes les informations sont disponibles en allemand et en anglais) Retour au texte

Illustrations

  • Livre de la maison de Tübingen. Livre             de calendrier Iatromathématique ; l’art de l’astronomie et de la             géomancie. Troisième quart du XVe siècle.

    Livre de la maison de Tübingen. Livre de calendrier Iatromathématique ; l’art de l’astronomie et de la géomancie. Troisième quart du XVe siècle.

Citer cet article

Référence papier

Marianne Dörr, « Les FID allemands : vers une infrastructure nationale d’information », Arabesques, 104 | 2022, 20-21.

Référence électronique

Marianne Dörr, « Les FID allemands : vers une infrastructure nationale d’information », Arabesques [En ligne], 104 | 2022, mis en ligne le 17 janvier 2022, consulté le 04 août 2025. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=2788

Auteur

Marianne Dörr

Universitätsbibliothek Tübingen

marianne.doerr@uni-tuebingen.de

Autres ressources du même auteur

  • IDREF
  • ORCID
  • ISNI
  • VIAF
  • BNF

Articles du même auteur

Droits d'auteur

CC BY-ND 2.0