Dans une université à dominante sciences exactes et médecine, l’inclusion des étudiants en situation de handicap est une priorité pour le SCD Lyon 1 qui réfléchit à l’évolution de ses dispositifs d’inclusion afin de répondre à l’ensemble des besoins.
L’inclusion des étudiants en situation de handicap est naturellement une préoccupation du SCD Lyon 1 (dominante sciences exactes et médecine). La Mission Handicap de la BU est rattachée à la direction du SCD et travaille en lien avec la Mission Handicap de l’université. Des services financés par la Mission Handicap de l’université sont portés par la BU : prêt d’ordinateurs portable à l’année à des étudiants en situation de handicap et fourniture de crédits de photocopies/impression prépayés par la Mission Handicap sur les copieurs des BU. La BU a également identifié, parmi ses services existants, ceux qui peuvent répondre à des situations de handicap1. Les travaux récents2 et naturellement le rapport de l’IGÉSR3 ont apporté de nouvelles pistes de réflexion ou ont conforté des projets déjà engagés.
Dans la population étudiante, les troubles du langage et de la parole représenteraient 28 % des situations de handicap, les troubles moteurs 19 %, les troubles psychiques 17 %, les troubles viscéraux (maladies invalidantes) 14 %, l’association de plusieurs troubles 8 %, les troubles visuels 5 %, les troubles auditifs 4 %4.
Ces proportions sont identiques aux données statistiques fournies par la Mission Handicap de Lyon 1 et les étudiants présentant des troubles Dys sont les plus nombreux. Les services à mettre en œuvre prioritairement portent dès lors sur la lecture des documents, d’autant que les difficultés de lecture rencontrées par des étudiants dyslexiques peuvent trouver une solution dans les dispositifs adaptés aux déficients visuels (transcription orale, simplicité de la mise en page, police et taille de caractères).
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Un site internet à l’accessibilité régulièrement vérifiée
En préalable se pose la question de l’accessibilité du site de la bibliothèque qui va permettre de trouver les documents. Les normes d’accessibilité des sites Web (WCAG) sont connues et diffusées. Des recommandation sont faites dans la cadre de la loi Pour une république numérique5 ou sur le site bibliotheque-inclusives.fr6. Le site Web du SCD Lyon 1, intégré dans celui de l’université, répond à ces normes. Les webmestres de la BU disposent d’outils pour vérifier la lisibilité des rubriques, par exemple Wake pour vérifier les points d’accessibilité, notamment le nommage des images cliquables ou la hiérarchisation des informations qui permettront aux outils de « lecture » d’écran d’identifier les repères. Si les dispositifs techniques et notamment la transcription orale via des synthèses vocales permettent la lecture du site par les déficients visuels, des extensions de navigateurs peuvent également être utilisés par les Dys (Dysaide).
Des services dédiés aux étudiants déficients visuels du diplôme masseur-kiné
Mais entre l’accessibilité rendue possible par la technique et l’usage réel, il y a parfois un gap que les professionnels ont de la peine à reconnaître, faute d’expérimentation.
L’université Lyon 1 héberge dans les locaux de la faculté de médecine un Institut de formation masseur-kiné déficient visuel (IFMKDV). La formation est adaptée (modalités pédagogiques ou durée de la formation) pour des étudiants qui préparent le diplôme d’État de masseur-kinésithérapeute. Ils bénéficient de tous les services de l’université dont ceux de la BU, l’accès à la documentation et la formation à la recherche documentaire.
La formation à la recherche documentaire est assez poussée dans ce cursus : initiation à la recherche documentaire durant l’année préparatoire à la première année des études de kiné (cursus hors PAS/LAS), puis formation à PubMed et à Zotero au cours des années suivantes.
Les étudiants disposent tous de leur propre matériel et travaillent avec des applications qu’ils utilisent via leur PC, leur tablette ou juste leur téléphone. Ce sont essentiellement des outils de synthèse vocale, plus rarement des claviers braille.
Une page du site Web est adaptée pour ces étudiants7. Le contenu de la page est allégé, ce qui facilite et accélère la lecture en synthèse vocale et se veut le complément direct des cours dispensés. Le support de cours est également calibré selon des recommandations courantes : privilégier le format Word, éviter les caractères spéciaux parfois non reconnus par la synthèse vocale, éviter les tirets en début de phrase qui seront lus comme le signe « moins », etc.
Ce sont les seules adaptations » techniques » qui sont faites. Pour l’accès aux contenus documentaires, nous utilisons nos outils habituels (outil de découverte Ebsco et interface des bases de données). Les étudiants rencontrent peu de difficultés d’accès aux contenus, sauf sur certains PDF. Dans ces cas-là, une licence AdobePro peut permettre de déverrouiller le PDF règlementairement dans le cadre de l’exception handicap au droit d’auteur dont disposent l’Institut de formation et la BU.
Le développement d’une offre documentaire nativement numérique (revues électroniques et ebooks) a donc notoirement amélioré l’accès aux contenus à ces étudiants.
Un bilan mitigé du recours à l’exception handicap par les usagers
L’adaptation apportée est également humaine : deux formateurs de la BU sont mobilisés pour un groupe de moins de 10 étudiants, configuration indispensable pour aller au rythme de chaque étudiant, rythme imposé également par le matériel dont celui-ci dispose. Et c’est le formateur qui peut se trouver temporairement en situation de handicap, au sens où sa perception habituelle du site de la BU est perturbée : il ne « voit » pas ce que cherche l’étudiant qui navigue dans la page avec les flèches du clavier et sans curseur visible à l’écran, ou ne reconnaît plus l’interface habituelle du site face à une page tellement grossie qu’il ne peut identifier à la lecture de quelques caractères quelle rubrique l’étudiant consulte. L’apprentissage ne peut alors se construire que par des échanges et des adaptations mutuelles. Comme cela est recommandé dans le référentiel Service publics + Marianne, l’étudiant bénéfice alors d’un « accompagnement adapté à sa situation personnelle ».
Toute l’offre documentaire n’est cependant pas nativement numérique et là est l’intérêt de l’exception handicap au droit d’auteur8. L’université Lyon 1 a depuis novembre 2020 l’habilitation niveau 1 « inscription ». Ce niveau d’habilitation permet d’adapter des documents présents dans notre fonds et d’accéder aux documents disponibles sur la plateforme PLATON. Le bilan après 18 mois reste très mitigé : 4 demandes ont été faites et 2 seulement honorées. Les refus concernaient des revues auxquelles nous ne sommes pas abonnés (PLATON ne contient pas de revues) et un ouvrage impossible à numériser par nos soins et trop ancien pour que les fichiers numériques source soient disponibles.
Nous sommes convaincus que le faible nombre de demandes ne reflète en rien la réalité des besoins mais est dû à la méconnaissance et la confidentialité des dispositifs.
Malgré des avancées, l’université (en rien différente du reste de la société) reste encore peu inclusive au sens où peu d’adaptations sont intégrées dès la conception des services, mais proposées a posteriori, en fonction des demandes.
Si des solutions techniques existent pour l’adaptation de documents et les accès forcément facilités par la diversité des publications numériques, les résultats d’une enquête réalisée en avril 2022 parmi les étudiants de l’université Lyon 1 portant sur la « bibliothèque inclusive » et sollicitant les étudiants sur ce qui pourrait les empêcher d’utiliser les services de la BU déplacent très nettement les réponses à apporter. Les situations de handicap physique sont très peu signalées, en revanche des témoignages sur les troubles psychiques devront nous conduire à déployer d’autres dispositifs d’inclusion, en partenariat resserré avec la Mission Handicap et le Service de Santé universitaire.