Une étude panoramique intitulée L’Évolution des métiers et des compétences au sein des bibliothèques d’ESR a vu le jour en 2023. Fruit d’un long travail collaboratif et d’une logique de co-construction avec les parties prenantes (directions d’établissements, ministère, inspection générale…), cette étude, subventionnée par le MESR et confiée aux cabinets Sia Partners et Six & Dix, s’est articulée en trois phases : elle a permis de dégager quelques grands facteurs d’évolution impactant les bibliothèques de l’ESR ; puis d’analyser cinq fonctions clés particulièrement concernées par ces transformations ; enfin de revenir sur les compétences à développer par fonction étudiée en ciblant des pistes et actions d’accompagnement1. Par son approche globale, l’étude a permis d’articuler les différents travaux et pistes de réflexion explorés par la commission durant ces six années, qui se sont schématiquement ordonnés autour de trois axes.

Référentiels et approche par compétences

Un groupe de travail interne à la commission (GT « Référentiels », d’abord copiloté par Nathalie Marcerou-Ramel et Lola Mirabail, puis par Corinne Maubernard et Odile Nguyen) a conduit une réflexion pluriannuelle qui a abouti à deux livrables :

• Un dictionnaire en ligne des compétences et connaissances en bibliothèques d’ESR : cet outil pratique, destiné à l’ensemble de la communauté professionnelle, construit en coopération avec plusieurs autres commissions thématiques de l’ADBU, privilégie une approche par compétences. Il se veut complémentaire des référentiels existants, parfois incomplets, parfois obsolètes. L’ambition est de le mettre à jour périodiquement en s’appuyant notamment sur les remontées de ses utilisateurs. [voir encadré]
• Une fiche-référentiel « directrice/directeur de bibliothèque d’ESR » : conçue selon le même modèle que celles existant pour d’autres fonctions d’encadrement supérieur dans l’ESR (DGS, DRH, DSIN, DF, etc.)2, son objectif est de renforcer le positionnement et l’intégration des services documentaires au sein de leurs établissements. Ce travail, finalisé au niveau de l’ADBU3, doit maintenant trouver sa déclinaison graphique et sa place au même titre que les autres référentiels de l’ESR – le dialogue avec le ministère se poursuit à ce sujet.

Fédération d’une communauté professionnelle autour de sujets qui font réseau(x)

Deux événements d’ampleur autour de l’UX Design (design de l’expérience utilisateur) se sont tenus respectivement en 2021 et en 2024. Initialement prévues en présentiel mais basculées en ligne en raison de la crise pandémique, les journées UX des 20 et 21 mai 2021, coorganisées avec le SCD de l’université de Lille, étaient intitulées « UX Design : quoi de neuf dans les BU depuis 2016 ? »4. C’est en effet suite au congrès ADBU de Nice en septembre 2016 que les démarches d’UX Design ont été popularisées dans les bibliothèques universitaires françaises. Placées sous le patronage d’Andy Priestner (UXLibs, consultant et formateur UX en bibliothèques) et de Julie Willems (formatrice UX en bibliothèques, responsable des services au public, Luxembourg Learning Centre), ces premières JUX ont permis, au travers d’échanges et de retours d’expériences, de mesurer le chemin parcouru depuis dans les BU : quelles initiatives, avancées, réussites, doutes, échecs ? Suite à ces journées, la liste de diffusion « bib-ux » consacrée à l’UX Design en bibliothèques a été ouverte5.

Sous la houlette d’un groupe de travail copiloté par Alizé Dinh-Duvauchelle et Gaylord Mochel-Sarselle, les journées UX des 18 et 19 novembre 2024, accueillies à Lilliad et à nouveau coorganisées avec les collègues lillois, étaient intitulées : « L’arrière-boutique de l’UX Design : quelles intégrations dans les organisations ? »6. Rythmées par des tables rondes, des présentations, des ateliers et des visites, ces deuxièmes JUX s’intéressaient moins aux méthodes UX en elles-mêmes, désormais mieux connues et mises en œuvre, qu’aux compétences nouvelles et aux impacts organisationnels et managériaux induits par la culture UX.

Outre la thématique UX largement parcourue, deux projets ont été instruits par la commission mais sont loin d’être aboutis au moment où ces lignes sont écrites. L’un (initié par Émilie Barthet) a exploré l’idée d’organiser un séminaire francophone fédérateur autour du leadership, inspiré par le programme « Emerging Leaders » de Liber7. L’autre (initié par Hélène Coste) a défriché la possibilité de coordonner, à l’échelle nationale, des échanges inter-BU pour tous les personnels et avec tous les établissements qui le souhaitent, afin de découvrir un autre environnement professionnel sur des thèmes donnés. De vastes chantiers, à la redoutable complexité, qui doivent encore mûrir.

Vendeurs ambulants de parfum, gouache attribuée à un artiste de Tanjore (Thanjavur) - Inde, ca. 1840

Crédit illustrations Wellcome collection

Les évolutions du travail : le cas du télétravail

L’un des phénomènes marquants des dernières années, très fortement accéléré par la crise sanitaire de 2020, a été la généralisation du télétravail. Avant la covid, cette tendance était le plus souvent expérimentale et très restreinte dans les établissements d’ESR – et, donc, dans les bibliothèques. Puis, passés les mois de télétravail exceptionnel dans un contexte de crise, la plupart des établissements se sont dotés d’une réglementation qui a permis, fin 2020 et début 2021, de régulariser et de routiniser le télétravail. La commission a alors souhaité savoir comment celui-ci se déployait dans les bibliothèques d’ESR, et si des adaptations et des spécificités existaient par rapport à la réglementation en vigueur dans les établissements dont elles dépendent. Une enquête a été adressée aux directions des bibliothèques en janvier 2022, dont les résultats ont été diffusés en juin suivant8. L’enquête a montré que le télétravail est bien implanté dans l’immense majorité des bibliothèques ayant répondu ; que les modalités et conditions d’exercice du télétravail (nombre de jours hebdomadaires télétravaillés, forfaits fixes et/ou flottants, etc.) sont souvent plus restrictives dans les services documentaires qu’au sein de l’établissement dont ils dépendent, les problématiques de service public pesant fortement ; que des différences notables existent dans l’accès au télétravail en bibliothèque, selon les catégories de personnels et/ou selon les missions et activités exercées.

Mais consciente de n’être, en 2022, qu’au début d’une tendance lourde (le télescopage avec la crise sanitaire ayant d’autant moins permis de prendre de recul), la commission a toujours eu pour objectif de réinterroger périodiquement cette réalité très évolutive et, surtout, de l’assortir d’éléments plus qualitatifs. L’année 2025 devrait ainsi permettre le déploiement d’une nouvelle enquête.

Engagez-vous, qu’ils disaient

Les commissions thématiques de l’ADBU n’ont de sens et ne tiennent que par l’engagement de leurs membres. Bien sûr, au dur labeur s’ajoutent de belles rencontres et d’excellents souvenirs, une respiration et une ouverture dans un quotidien professionnel souvent chargé et ne facilitant pas toujours la prise de distance. Il n’en reste pas moins que pour un(e) pilote de commission, l’investissement bénévole de tant de collègues, s’ajoutant à leur charge de travail habituelle, et toujours dans la bonne humeur, reste un motif de profonde gratitude.

Le dictionnaire des compétences

Le dictionnaire, incluant un moteur de recherche, est structuré en treize grandes thématiques appelées « domaines » (chacun décrit par un court texte permettant de vérifier les champs d’activité couverts). Les domaines sont eux-mêmes structurés en sous-domaines, auxquels les compétences opérationnelles et les connaissances sont rattachés.

Il s’agit bien d’un dictionnaire de compétences, et non pas d’activités. Par ailleurs, le choix a été fait de ne pas indiquer le niveau de maîtrise des compétences ou connaissances, les formulations se voulant suffisamment générales pour s’adapter à tous les contextes locaux.

Chaque compétence ou connaissance comporte une mention « source » qui permet d’identifier, le cas échéant, le référentiel dont elle est originaire (Bibliofil, Référens III, BNF…). Il est parfois précisé « reformulation », sinon il est indiqué « création ».

Le dictionnaire est accessible via le site de l’ADBU (rubrique « Référentiels ») ou directement à l’adresse : https://adbu.fr/referentiels/dictionnaire-competences-bibliotheques-esr