Licence, maîtrise, DESS… Les stages se font plus longs, le maître de stage psychologue devient obligatoire, le transfert de l’étudiant n’a plus seulement pour objet le terrain mais aussi cette figure tutélaire. En DESS, période charnière entre l’université et la vie professionnelle, avec tout ce que cela convoque d’ambivalence, d’inquiétude, d’espoir aussi, la relation au maître de stage est particulièrement forte, chargée d’enjeux contradictoires qui évoluent certes au fil de l’année. Jamais ceci ne m’était apparu aussi fortement que lors d’un cours de début d’année avec des étudiants de DESS : passées les plaintes et les revendications quant à la difficulté de trouver un terrain et un maître de stage, émergèrent des fantasmes d’une grande violence.
« Il est bien difficile de faire son trou », entendis-je alors. Faire son trou comme stagiaire, à côté du maître de stage qui est « chez lui » ; « faire son trou » comme professionnel aussi, bientôt. La formule évoque aussi la mort ; elle vint d’ailleurs bientôt et c’était celle du maître de stage qu’il s’agissait de « pousser » dans le trou, dans la tombe, afin de prendre sa place. Même si le poids de la réalité du monde du travail et du non-travail se fait sentir dans les différentes années de formation, la proximité de la mise sur le marché, c’est-à-dire aussi la séparation, souhaitée et redoutée, d’avec l’université, lui donne une nouvelle acuité.
L’envie des étudiants-stagiaires, si crûment verbalisée, conduisit ceux-ci, dans une prise en compte de l’autre dans son altérité (résistant tant bien que mal à la projection), à se questionner sur le désir du maître de stage : « Pourquoi prendre un stagiaire ? Pourquoi moi ? » Émergea alors un fantasme de vampirisation du stagiaire par le psychologue en poste, celui-ci étant vécu comme envieux des acquisitions du stagiaire-étudiant à l’université, fantasme qui se renversa rapidement en un : « On est dans l’urgence, on est goulus, on ne se sent pas complets ».
Le stage réactive fortement la question des identifications dans la construction de l’identité, en écho à une adolescence qui n’est pas toujours si loin, ainsi que la question du rapport au savoir et à la castration. Il offre aussi, par rapport à l’université, une autre scène où jouer à et avec l’identité professionnelle, où jouer à et avec le psychologue… s’il n’a pas été dévoré ni n’a dévoré avant !