Le Mascurat de Naudé : pédanterie burlesque pour « détromper » du mauvais burlesque ?

DOI : 10.35562/pfl.427

Résumés

Notre article sur le Mascurat de Naudé a comme point de départ une apparente contradiction : l’examen du burlesque des mazarinades, qui semble globalement déprécié, est néanmoins accompagné par la pratique d’un burlesque au sein de ce même ouvrage. Afin d’essayer de comprendre cette apparente incohérence, notre article se penchera sur la manière dont le burlesque est compris et mis en œuvre par le personnage de Mascurat, érudit qui se sert de son savoir et sa réflexion critique pour analyser les mazarinades.

My article on Naudé’s Mascurat starts from an apparent contradiction: the study of the burlesque of the “mazarinades,” which seems globally depreciated, is however sometimes accompanied by the practice of a burlesque in the very writing of the Mascurat. In order to try to understand this apparent incoherence, my research will deal with the manner in which the burlesque is understood and practiced by the character of Mascurat, a scholar who uses his knowledge and his critical reflection in order to analyze the “mazarinades.”

Plan

Texte

En creusant les analyses développées par Christian Jouhaud dans son étude séminale La Fronde des mots, Mathilde Levesque soutient que les mazarinades remédient à l’absence d’information nouvelle par une « verve satirique » qui, entre autres, aboutit à la « consécration du burlesque »1. Pourtant, dans la mazarinade sur les mazarinades qui est connue sous le titre abrégé de Mascurat, le burlesque reçoit un jugement apparemment sans appel : « à dire vrai, le total de tout ce burlesque ne vaut rien2 ». Le jugement semble d’autant plus inquiétant qu’il est formulé par un écrivain avisé : auteur de la « première approche critique “sérieuse” du burlesque3 », Naudé s’applique à examiner le burlesque français et ses parents plus ou moins proches comme le burlesque italien, (néo-)latin et médiéval.

Conseiller politique et bibliothécaire de Mazarin, Naudé crée de 1642 à 1648 la première bibliothèque personnelle du cardinal Mazarin4. Ancêtre de l’actuelle Mazarine, cette bibliothèque qui, lors de sa mise en vente en 1652, accueillait une collection impressionnante de livres, a été aussi l’un des premiers endroits à conserver des mazarinades. En y recueillant ces libelles, Naudé n’a pas été animé seulement par son intérêt de bibliothécaire, mais aussi par sa volonté de les étudier, et de les combattre en faveur de Mazarin. Le Mascurat qui, du vivant de son auteur, aura deux éditions, en 1649 et en 1650, représente la concrétisation de son travail sur les mazarinades. En se penchant sur la manière burlesque dont elles traitent parfois Mazarin et son gouvernement, le Mascurat semble exprimer une déception : l’attente issue de l’idée que « l’homme [est] également défini par ces deux attributs de risible, et de raisonnable5 » est, au moins temporairement, condamnée à rester inassouvie à cause de la mauvaise qualité des mazarinades. En prenant pour objet l’examen critique du burlesque des mazarinades réalisé par le Mascurat, notre article tiendra compte du fait que cet ouvrage prend parfois une forme qui est elle-même burlesque.

Mascurat, adepte de l’érudition et de la réflexion critique

A priori, rien ne semble indiquer que le Mascurat puisse porter sur le burlesque. Mascurat, le personnage qui donne son nom à l’ouvrage, est un imprimeur savant qui édifie son interlocuteur, Saint-Ange, à propos des mazarinades. Obligé par les circonstances à pratiquer le colportage, ce dernier est un libraire « situé fort bas dans la chaîne marchande6 ». L’étendue du savoir possédé par Mascurat est telle qu’elle semble parfois éveiller les soupçons de Saint-Ange : « Je renie celui-là qui vendit Dieu, Mascurat, tel qui te voit ne sait pas de quel bois tu te chauffes, car à moins d’avoir étudié dans l’Ars Notoria, dans la Clavicule de Salomon, dans l’Agrippa, tu ne saurais savoir tant de choses, ni les débiter si heureusement comme tu fais7 ». La recherche de la plaisanterie n’amène pas seulement Saint-Ange à attribuer une origine occulte aux connaissances hors-du-commun de Mascurat, mais aussi à le qualifier à plusieurs reprises de « pédant ». Mascurat n’hésite pas à se reconnaître dans cette appellation apparemment dépréciative, voire à l’évoquer à propos de certains aspects de son parler, comme l’utilisation des citations : « Mais quand je t’avouerais que c’est mon métier et celui des autres pédants comme moi, de citer tous ces auteurs anciens et modernes aussi, […]8 ». Par ailleurs, comme le remarque Saint-Ange et comme il convient à un véritable pédant, l’Antiquité classique tient une grande part dans la forme et le contenu du savoir détenu par Mascurat : « Te voilà justement dans le caractère du pédantisme, tu sais fort bien tout ce qu’a dit l’Antiquité de beau et de bon […]9 ».

Du reste, les préoccupations de Mascurat ne se limitent pas à l’érudition. En effet, pour défendre le cardinal-ministre contre les accusations formulées par les mazarinades, le personnage combine la connaissance savante de l’histoire avec celle de l’actualité. Plus précisément, il réunit les informations acquises en fréquentant l’entourage de Mazarin avec le savoir extrait des ouvrages historiques dont certains se trouvent dans toute « bonne bibliothèque10 » de Paris. La quantité de connaissances qu’il amasse et qui, comme en témoigne son interlocuteur, semble prodigieuse, ne prime pas sur la qualité. L’intérêt pour le savoir est accompagné d’une réflexion critique selon laquelle, par exemple, « en fait d’histoires, pour les bien écrire, ou il faut avoir vu ce qui se passe, ou en avoir eu des relations fidèles, et les ménager, examiner et employer avec jugement11 ». Fondant son érudition sur une démarche qui fait attention à la quantité et la qualité de l’information, Mascurat s’attaque sans aucun ménagement à certains auteurs comme, par exemple, celui de La Lettre du chevalier Georges, de Paris, à monseigneur le prince de Condé. Se laissant emporter par la violence de la polémique  ce que, par ailleurs, il ne cherche pas à nier , Mascurat s’appuie sur des preuves représentées par des « témoignages authentiques » pour traiter cet auteur de « faussaire », d’« imposteur » voire de « moine crotté », qu’il faudrait empêcher de « publier tous les jours de si remarquables [faussetés en matières d’histoires et de généalogies], tant en l’histoire ecclésiastique, que profane ou civile12 ».

Par conséquent, le « jugement » ou la capacité de distinguer entre le vrai et le faux13 n’est pas essentielle seulement à un auteur, mais aussi à un lecteur. S’ajoutant à l’érudition, le discernement sous-tend l’indépendance intellectuelle et permet d’éviter la voie erronée suivie par la plupart des individus car, à partir d’une référence à l’autorité de Sénèque, « où il s’agit de connaître la vérité des choses, ou d’en juger à propos, il ne s’en faut pas rapporter au peuple14 ». En l’occurrence, il faut mettre en œuvre les connaissances et la réflexion critique pour prendre ses distances avec l’hostilité largement répandue contre le cardinal qui, issue de la passion et de l’ignorance, pâtit d’une absence de bien-fondé inversement proportionnelle au nombre des adeptes :

Car à te dire vrai, Saint-Ange, l’une des plus grandes satisfactions que j’aie en ce monde, est de découvrir soit par ma lecture, ou par un peu de jugement que Dieu m’a donné, la fausseté et l’absurdité de toutes ces opinions populaires, qui entraînent de temps en temps les villes et les provinces entières, en des abîmes de folie et d’extravagances15.

Par ailleurs, quoiqu’il s’applique à démolir méthodiquement les accusations formulées contre le cardinal par les mazarinades, Mascurat déplace par endroits son argumentation sur le terrain de l’esthétique.

Définition et classification du burlesque

Savant possédant un vaste savoir qui s’applique à ruiner méthodiquement les attaques contre le cardinal-ministre, Mascurat ne rejette pas pour autant la pertinence d’un burlesque dont il reconnaît la complexité : « l’homme étant également défini par ces deux attributs de risible, et de raisonnable, il y a aussi pareille difficulté à le faire rire, comme à le faire raisonner par méthode, et j’ose dire qu’elle est encore plus grande au premier16 ». Ce faisant, il ne néglige pas le burlesque, bien que celui-ci soit plutôt l’attribut de son interlocuteur. Avec la vision pédagogique qui informe en partie ses échanges avec Saint-Ange, Mascurat intègre son analyse des mazarinades burlesques dans une discussion plus vaste, qui consiste aussi à définir et à répertorier le burlesque. Se fondant sur des réussites du genre comme Le Virgile travesti de Scarron, le personnage fait ressortir la discordance entre la forme et le fond, essentielle au burlesque

qui n’est rien que cette dernière façon [basse et populaire] de s’expliquer réduite à sa lie, et au plus bas étage où l’on puisse le [style burlesque] ravaler, non seulement par les paroles, mais aussi par les figures, proverbes et comparaisons ridicules, desquelles néanmoins on se sert pour expliquer quelque chose bien relevée17.

Basé sur la dissonance entre le sujet sérieux et le style bas, le burlesque a, selon Mascurat, une dimension fondamentalement esthétique. Par conséquent, la qualité du burlesque ne participe pas de l’approche factuelle des événements qui, de toute manière, est à peine accessible à cause des intérêts, des passions et loyautés partisanes18. Le burlesque a une dimension stylistique, résultant de l’« affectation, ou gentillesse d’esprit19 » qui lui est intrinsèque. La recherche stylistique qui informe l’écriture des auteurs burlesques est susceptible de contribuer à les distinguer des « bouffons » : soucieuse des bienséances, la « poésie burlesque est si retenue, et si modeste en son style, qu’elle se contente d’exciter un ris modéré20 » et qu’elle parvient à distraire même ceux qu’elle prend pour cible.

Pour Mascurat, le burlesque français remonte à Marot et Scarron. Ses précurseurs n’ont pas été Guillaume Crétin ou François Villon mais – à travers une interprétation audacieuse – les mystères médiévaux ayant pour objet le Nouveau et l’Ancien Testament, la Passion de Jésus ou la vie d’autres saints, « car il est impossible de traiter des matières de telle importance, avec une expression plus basse, ni plus ridicule21 ». Se limitant à cultiver la dissonance entre le style et les idées, le burlesque français est plus pauvre que le burlesque néo-latin, qui a trois catégories, ou le burlesque italien, qui en a cinq22. Ainsi, les types de burlesque néo-latin coïncident avec « la plus vile, et la plus basse expression, soit pour la matière, ou pour les paroles », avec un amalgame entre le latin et un ou plusieurs parlers vulgaires, ou avec la poésie macaronique, « composée de différents langages, et de paroles extravagantes »23. Le burlesque italien, quant à lui, consiste, par exemple, dans un mélange entre l’italien et le latin, dans la réécriture en « langues vulgaires, corrompues ou plutôt rustiques, et populaires, de chaque ville et pays » des ouvrages à la réputation bien établie, ou dans des poèmes ressemblant « à nos coqs-à-l’âne, puisque chaque vers contient un sens séparé de tous les autres, sans aucune liaison »24.

Du reste, comme le remarque un Saint-Ange suivant parfois de manière distraite le propos de son interlocuteur, le discours minutieux de Mascurat sur le burlesque déborde le cadre de leur discussion, censée porter sur les écrits dirigés contre Mazarin. À croire Saint-Ange, non seulement ces écrits relèvent de « la plus facile et la plus commune [poésie burlesque] qui ait eu cours », ce qui risque de rendre superflu l’inventaire de Mascurat mais, de plus, « le total de ce burlesque ne vaut rien25 ». Tout en s’appliquant à mitiger la sévérité du jugement de Saint-Ange, Mascurat met en relief la disproportion entre la quantité et la qualité des ouvrages contre le cardinal. Ainsi, le nombre des mazarinades est inversement proportionnel à leur valeur, car parmi la myriade de celles qui ont été imprimées en quelques mois, il y en a selon l’érudit tout au plus cinq ou six dignes d’être retenues26. La plupart d’entre elles sont l’œuvre des auteurs médiocres, ignorants et de faible talent qui, sans beaucoup de prétentions, sont « accoutumés de travailler à peu de frais27 ».

Mascurat, érudit qui ne rejette pas le burlesque

Malgré son ton savant et didactique, Mascurat est fier de pouvoir se plier au jeu du parler burlesque entamé parfois par Saint-Ange : « Quoiqu’il en soit, tu ne m’en prêtes guère que je ne te les rende à bonne mesure, tout pédant que je sois […]28 ». Certes, Saint-Ange est celui qui, en raison de son statut plus modeste, peut s’adonner plus souvent au burlesque. Par exemple, il évoque une mazarinade sur le burlesque, L’Interprète des écrits du temps, d’une manière qui est, elle-même, burlesque : « Je lisais hier au soir en mangeant la queue d’un hareng, ces vers de l’Interprète […]29 » La dimension triviale de la « queue du hareng » est manifestement incongrue avec le sérieux associé d’habitude à un acte de lecture dont l’objet, dans ce cas précis, ironise sur les écrits prétendument burlesques :

Mais n’en déplaise à ces messieurs
Qui de tout sont si bons railleurs,
[…] Quand de leurs vers on sera sous
On les appellera des fous,
Ne voyant que de la folie
Dans leurs œuvres de raillerie30.

À un autre moment, probablement mû par la lassitude, il n’a pas scrupule à couper un développement savant de son interlocuteur à travers une saillie d’un burlesque qui, encore une fois, n’est pas des plus soignés :

S. Enfin, Mascurat, tu fais connaître à chaque moment, combien ta mort aurait été préjudiciable au public si elle fut arrivée ce Carême dernier.
M. Pourquoi, Saint-Ange.
S. Parce qu’il y aurait eu beaucoup de belles et de bonnes trippes perdues31.

La riposte de Mascurat ne tarde pas à venir et elle n’a sans doute rien à envier en matière de burlesque fruste à celle qui la précède : « M. Au moins n’auraient-elles pas été de veau comme les tiennes32 ». Initialement, Saint-Ange met à profit la polysémie du terme « tripes » qui ne convient pas aux bienséances, ni dans son sens propre (quand il se réfère au corps), ni dans son sens figuré (quand il se réfère de manière péjorative à l’érudition)33. Mascurat, quant à lui, surenchérit sur le propos de son partenaire et ne craint pas d’aller jusqu’à l’insulter, en faisant allusion à son peu d’esprit34. Manifestement, les deux personnages ne se vexent pas de l’insolence participant de la raillerie sous-entendue dans leur échange.

Par ailleurs, Mascurat n’utilise pas le burlesque uniquement pour relever son propos et rendre la pareille à Saint-Ange. À plusieurs reprises il choisit lui-même de rehausser ses paroles par des expressions burlesques, comme dans l’exemple suivant : « puisqu’un certain poète nommé Ganymède Pamphile a dit, qu’elle [la ville de Cesena] est si fertile et abondante en toutes sortes de biens, que l’on y pourrait même trouver du lait de poules […]35 ». Comme il l’explique par la suite, « autorisé de tout temps chez les bons auteurs grecs, latins et italiens » et synonyme de « chose impossible », le « lait de poule » « n’est [reçu] qu’entre les crocheteurs et porteurs d’eau de cette ville36 ». Ce faisant, Naudé est susceptible d’écrire dans un « style mêlé, miscellaneum », car il mêle l’écriture docte, méticuleusement informée et truffée de citations grecques, latines et néo-latines avec le jargon attribué aux catégories professionnelles du bas de l’échelle sociale37. Du point de vue des conventions esthétiques de l’époque, le burlesque qui en résulte n’est pas susceptible de pécher seulement par sa variété et son aspect recherché, mais aussi par les tournures défendues aux honnêtes hommes, parce que propres aux groupes sociaux marginaux.

Du reste, malgré ses prétentions, Mascurat ne relève pas toujours le défi lorsqu’il s’agit de parler de manière burlesque :

S. Si quelqu’un de l’Académie te demandait, combien tu emploies de lard ou de vieux oing à graisser ces matinées, que lui répondrais-tu ?
M. Que lui et tous ceux qui disent la grosse matinée, sont des ignorants, et que faute de lire les bons auteurs, ils ne savent pas qu’ils ont dit pallida mors, atrum venenum, arida febris […], non tant pour être véritablement telles, que pour produire les effets signifiés par ces Épithètes qu’on leur donne : car la mort rend les hommes pâles, le venin les noircit, la fièvre les sèche […], et le dormir tard du matin les engraisse38.

En mettant à profit l’interprétation littérale d’une expression utilisée par son interlocuteur, Saint-Ange se livre manifestement à une réflexion délibérément extravagante et ramène une discussion sur la fausse rumeur (« mais quoi il a beau se lever matin, qui a bruit de dormir la grasse matinée ») sur un terrain des plus prosaïques. À l’inverse, Mascurat ne persiste pas dans la verve burlesque de son partenaire, mais s’adonne à une réflexion docte, ornée de citations latines comme « pallida mors », et de termes techniques tels que les « épithètes » relatives à certains états comme la « mort », la « fièvre », la « vieillesse », la « canicule », ou le « dormir tard »39.

Toujours est-il qu’en dépit de l’épaisseur érudite de son discours et de son imperméabilité occasionnelle au propos burlesque de Saint-Ange, Mascurat insiste sur son attachement à une approche burlesque des questions graves. La défense même du contexte où se déroule leur conversation est une indication de son goût pour le burlesque :

[…] je n’ai jamais ouï dire, qu’il fut défendu de parler des choses sérieuses, sinon en des lieux destinés à ce faire, comme tu pourrais dire des collèges, des académies, des maisons de présidents, et évêques, des palais de grands seigneurs, et autres lieux semblables ; au contraire je vois dans Plutarque et Athénée, que les plus doctes de ce temps-là tenaient des propos aussi sérieux entre la poire et le fromage, et ayant le verre à la main, comme nous l’avons maintenant […]40.

À l’écart du cadre rigide des institutions censées détenir l’autorité en matière de savoir, de politique ou de théologie, leur conversation ne renonce pas à aborder des sujets de la plus grande conséquence, mais dans un cadre familier et détendu, dont le choix est entériné par la référence à l’autorité de l’Antiquité classique. Tout en suggérant la joie animant les convives à la fin d’un repas, l’expression « entre la poire et le fromage41 » relève, dans son sens propre, d’un lexique culinaire qui est un motif récurrent lorsqu’il s’agit de la qualité du burlesque. Par ailleurs, il faut sans doute préciser que le savant Mascurat ne se trouve à l’aise que progressivement dans le cadre prosaïque du cabaret où se déroule sa conversation avec Saint-Ange42. Une fois qu’il s’y est habitué, à l’instar de Saint-Ange, il est fier de pouvoir contribuer à l’enjouement propre à l’ambiance décontractée de la discussion par des « plaisanteries » et des « sornettes43 ». Selon Mascurat, les « facéties ne sont pas toujours hors de saison44 », ce qui signifie que les plaisanteries peuvent être appropriées pour parler de l’actualité ainsi que des sujets de la plus grande conséquence comme les affaires d’État ou la littérature politique.

Le Mascurat, logodiarrhée sur le burlesque

Toujours est-il que Mascurat n’hésite pas à se moquer de sa propre pratique de la raillerie à travers des propos participant d’un burlesque qui est loin d’être des plus raffinés : « Ceux qui parlent sans rien dire, ne sont jamais trop courts, ni ceux qui parlent à propos trop longs. […] examine-moi donc sur le pied de cette règle, et tu trouveras que je ne suis pas moins exempt de cette logodiarrhée […]45 ». À l’instar de la diarrhée dont elle dérive et qui est définie par Furetière comme un « flux de ventre », la logodiarrhée est envisagée par Saint-Ange comme un « flux de bouche » ou « flux de paroles » qui, de manière ironique, risque d’accabler l’interlocuteur par son abondance : « car si je te voulais toujours laisser dire, tu ne finirais jamais »46. Effleurant le registre bas, la logodiarrhée porte sur la diffusion d’une quantité de paroles dont la qualité laisse à désirer.

En se livrant à la logodiarrhée, Mascurat est susceptible de rejoindre les jugements qu’il porte sur la valeur des mazarinades. À croire le personnage de Naudé, les écrits dirigés contre Mazarin sont incapables de procurer des bénéfices à aucun des partis impliqués : « à cause de leur trop grande faiblesse, et de leur peu de raisonnement », ils ne peuvent « profiter de rien à ceux qui les lisent, ni faire honneur à ceux qui les composent, ni porter préjudice à ceux qu’ils prennent à tâche d’offenser47 ». Étonnamment, les meilleurs ouvrages contre le cardinal ont été écrits par les Espagnols, soit les plus grands ennemis de la France de l’époque. Loin de la production et la consommation rapides et faciles, leurs ouvrages se sont inscrits dans une durée qui leur a permis d’aboutir à une écriture et une lecture caractérisées par la recherche de la qualité. Cette volonté d’excellence restreignait le cercle de leurs auteurs ainsi que de leur public : « étudiés et composés à loisir », « on les vendait bien chèrement48 ».

À l’inverse des ouvrages soigneusement rédigés contre le cardinal par des adversaires étrangers, les mazarinades « coûtent si peu à faire » « que tant de monde s’en mêle49 ». Leur foisonnement, surtout en 1649, résulte de la facilité à les imprimer et à les acheter. Mais plus elles sont accessibles à un grand nombre d’auteurs et de lecteurs, moins leur qualité serait assurée. Ainsi, selon Mascurat, leurs auteurs sont des individus issus du bas de l’échelle sociale et professionnelle, dont l’incompétence rime avec l’indigence : « des sots, des frères ignorants, des avocats sine controversa diserti, des secrétaires de saint Innocent, des pauvres malotrus […]50 ». Pour fuir la responsabilité intrinsèque du statut d’auteur, la plupart des auteurs des mazarinades les publient de façon anonyme. Par conséquent, le fait de ne pas assumer la paternité des mazarinades leur permet de mettre à la disposition du public des libelles qui pèchent « soit pour être trop mal faits, ou pour ne débiter que des mensonges, ou pour être farcis de trop d’injures51 ». À l’abri de l’anonymat, les auteurs des mazarinades ne craignent pas d’inonder le marché du livre de leurs extravagances, composant « toutes les nuits des deux et trois douzaines52 ». Le public des mazarinades est, lui aussi, représenté au sein du Mascurat par des individus de statut social humble : « un paysan », « un artisan », « des valets » ou des « gens de semblable étoffe53 ». À croire Mascurat, les libelles qui sont sortis de la plume de tels auteurs et qui s’adressent à un tel public sont lamentables non seulement par le contenu, mais aussi par leur forme stylistique et matérielle : « injures, imprécations, faussetés, malédictions, rimes burlesques, estropiées, languissantes, proses mal faites, récits crotesques, feuilles volantes54 ». Imprimés sans aucun souci de leur aspect extérieur ou de leur conservation, ils pèchent à la fois par leur absence de pertinence et par leur transgression des bienséances et des normes de bon goût. Aussi ramènent-ils le cardinal à une caricature inapte à susciter l’adhésion. De plus, ils ne sont pas défaillants seulement à cause de leur incapacité à répondre aux exigences de la versification ou de la prose, mais aussi en raison de leur rusticité, qui cherche à anéantir le ministre par la violence verbale, voire par l’appel prétendument magique à des entités transcendantes.

La métaphore culinaire, aux vertus comiques, permet souvent de mettre en relief la médiocre qualité qui relie les mazarinades à leurs lecteurs et leurs auteurs. Dans une démarche visant à déprécier ces derniers, Mascurat formule une condamnation qui combine misogynie et jugement social :

Il n’est pas même jusqu’aux femmes qui ne s’en mêlent, […] et je te puis fournir bon garant, que les admirables sentiments d’une villageoise à Monsieur le Prince, sont la quatre ou cinquième des pièces, qu’une simple servante de librairie, après avoir bien écuré ses pots, et lavé ses écuelles, nous a données en cette occasion55.

La lourdeur intellectuelle et esthétique rapproche la plupart des créateurs des mazarinades de leur public : « ces raisonnements [propres aux choses relevées et sublimes] excèdent la portée de leurs esprits, lesquels aussi bien que leur estomac ne digèrent pas si facilement les viandes délicates, bien cuites et assaisonnées, que les grossières, et préparées comme l’on dit à la fourche56 ». Par conséquent, pour pouvoir vraiment rassasier un public inapte à surmonter l’indigence matérielle et spirituelle inhérente à sa condition sociale, les mazarinades doivent être défectueuses. Mais les défauts qui les altèrent les rendent arides, parce qu’elles ne « sont bon[nes] ni à rôtir, ni à bouillir57 » et ne produisent aucun effet.

Néanmoins Mascurat suggère que, malgré leur aspect décevant et parfois grossier, les écrits contre le cardinal peuvent être utiles par leur discours sur l’actualité. Certes, leur intérêt ne réside pas, selon le personnage, dans le point de vue politique qu’elles défendent. Exacerbée par d’autres passions, l’envie qui les nourrit exagère tellement les défauts du ministre « que ce n’est pas de merveille si elle fait d’une mouche un éléphant58 ». Par conséquent, les mazarinades noircissent le cardinal au point d’en faire un portrait qui ne peut pas être vraisemblable. À l’instar de tout jugement de valeur, la condamnation du Mazarin pèche par son excès, qui n’accepte aucune nuance : « D’ailleurs celui qui blâme toutes les actions d’un homme, comme on fait celles de Monsieur le Cardinal, ne mérite non plus d’être cru que s’il les approuvait toutes, parce qu’il n’y a rien de si bon en ce monde qui n’ait quelque exception, et rien de si mauvais qui ne mérite quelque louange59 ».

Amorcée par l’arrêt du parlement, l’anathémisation du ministre a été amplifiée par des éléments irrationnels comme la xénophobie. Aussi Mazarin devient-il le bouc émissaire pour tous les maux qui affectent la France depuis le début du siècle :

Et pourquoi ne dirons-nous pas le même aujourd’hui du cardinal Mazarin, puisqu’au dire de ces messieurs, encore qu’il n’y ait que cinq ou six ans qu’il est dans le ministère, c’est néanmoins lui qui est cause de tous les désordres qui sont en France, voire même de ceux qui l’affligent depuis la mort de Henri IV […]60

Même si elle ne s’est jamais traduite par autant de libelles, la colère prodigieuse qui prend pour cible le cardinal ne se manifeste pas pour la première fois dans la sphère de la politique. Par le passé, d’autres figures de premier plan comme le cardinal de Richelieu, voire les rois Henri III, Henri IV ou la reine Catherine de Médicis ont dû faire face à des vagues de mécontentement61. D’ailleurs, certains des écrits qui s’attaquent à Mazarin sont recyclés à partir d’ouvrages rédigés contre d’autres figures politiques : « l’imposture des factieux, ou l’avarice des imprimeurs a été si grande, [qu’il a fallu] faire revivre et approprier au temps présent, beaucoup de pièces qui avaient été faites pour le passé […]62 ». Derrière la violence avec laquelle éclate l’aversion contre le cardinal, la forme réajustée sous laquelle elle se présente démontre le flou de ses liens avec le présent et son manque de bien-fondé. Mascurat estime que les avis formulés contre Mazarin ne sont pas pertinents lorsqu’ils portent sur les actions du cardinal, car « tous les plus honnêtes gens du monde, n’ont pas été mieux traités que lui, lorsqu’on a soumis leurs actions au syndicat d’un juge si extravagant et si passionné comme est la populace63 ». Du reste, l’opinion partagée par le plus grand nombre n’est pas pernicieuse seulement en matière de politique, où elle a nui aux plus grandes figures des dernières décennies, mais aussi en matière de science, où elle a été néfaste aux plus grands savants, comme il résulte d’un autre ouvrage de Naudé, l’Apologie pour tous les grands personnages qui ont été faussement soupçonnés de magie (1625).

Accablantes par leur nombre et leur logodiarrhée, les mazarinades ne sont pas pour autant fondées sur des accusations contre le cardinal qui soient crédibles. Tenant de l’histoire culturelle, leur intérêt dérive de leur capacité à renseigner sur l’expression et les prétendus arguments des dérèglements provoqués par la multitude. À l’instar d’autres écrits dont le contenu est, en lui-même, douteux, les libelles contre le cardinal sont susceptibles de nourrir une curiosité d’ordre encyclopédique : « […] un homme curieux ne doit rien négliger, soit vrai ou faux, de ce dont en le réfutant ou en l’approuvant il peut faire montre en sa polymathie […]64 ». Par conséquent, à croire Mascurat, c’est justement à cause de leurs faiblesses politiques et stylistiques que les mazarinades peuvent être accueillies dans une bibliothèque apte à recevoir les écrits les plus divers voire, parfois, les plus scandaleux, comme le Coran. D’ailleurs, à travers un dédoublement susceptible de contribuer à fictionnaliser l’identité de Mascurat, on lit : « Naudé, qui n’est pas sorti de Paris pendant les troubles, afin, comme je [Mascurat] crois, de conserver ladite bibliothèque, a été fort soigneux de les [mazarinades] recueillir65 ». En outre, cette bibliothèque est destinée à un public avisé, une élite restreinte, dont les membres ressemblent à Mascurat, un personnage qui est fier de sa capacité à mettre en œuvre le savoir et la réflexion critique pour éviter de tomber dans le piège des idées communes66.

Afin de « détromper » son interlocuteur des « fausses opinions » qu’il avait conçues contre le cardinal67, Mascurat ne se contente pas d’une démonstration savante mais, par endroits, comme nous l’avons vu, s’adonne aussi à une écriture burlesque. Aussi déplace-t-il parfois l’analyse des mazarinades de la politique vers l’esthétique, sans cloisonner ces réflexions68. Cette manière d’aborder les libelles contre le ministre ne reste pas sans effets puisque par exemple, Guy Patin, adversaire de Mazarin, écrit à propos du Mascurat : « […] combien que le sujet me déplaise, la lecture du livre ne laisse pas de m’être fort agréable 69 ». Du reste, l’ouvrage de Naudé ressemble parfois à un exercice de style burlesque auquel le personnage principal s’applique par amusement et en vertu même de son érudition éclectique, qui lui donne accès à un savoir et des pratiques littéraires qui ne rejettent pas le style bas et plaisant. La logodiarrhée qu’il admet pratiquer se plaît à ruiner les opinions anti-mazarinistes, mais ne reste pas indifférente à un burlesque auquel « chacun s’escrime70 ».

Notes

1 Voir Mathilde Levesque, « Une constance renouvelée. La scénographie des Mazarinades entre répétition et stratégies de révélation (1648-1652) », Littératures classiques, 2012 / 2, no 78, p. 227-242.

2 Gabriel Naudé, Jugement sur tout ce qui a été imprimé contre le cardinal Mazarin, depuis le sixième janvier, jusqu’à la déclaration du premier avril mil six cents quarante-neuf, s. l., s. n., [1650], p. 286, qui sera évoqué sous le titre de Mascurat (édition disponible sur Gallica). Nous gardons la ponctuation d’origine, mais nous en modernisons l’orthographe.

3 Claudine Nédelec, Les États et empires du burlesque, Paris, Champion, 2004, p. 155-156.

4 Yann Sordet, « Mazarine et mazarinades : la plus grande bibliothèque d’Europe dans la tourmente de la Fronde », Dix‑septième siècle, 2019 / 3, no 284, p. 459-482.

5 Mascurat, op. cit., p. 211.

6 Claudine Nédelec, Les États et empires du burlesque, op. cit., p. 166.

7 Mascurat, op. cit., p. 467.

8 Ibid., p. 502.

9 Ibid., p. 578.

10 Ibid., p. 118.

11 Ibid., p. 37.

12 Ibid., p. 47-48, 45.

13 Furetière, Dictionnaire universel [1690], t. II, La Haye, Rotterdam, A. et Reinier Leers, 1701, première entrée « jugement » : « Faculté, puissance de l’âme pour connaître, et discerner le bon d’avec le mauvais, le vrai d’avec le faux ; fonction de la droite raison ».

14 Mascurat, op. cit., p. 576.

15 Ibid., p. 93.

16 Ibid., p. 211.

17 Ibid., p. 220. Voir aussi, à propos de la manière dont Naudé entend le burlesque dans le Mascurat, Claudine Nédelec, « Réécritures burlesques », Littératures classiques, 2011 / 1, no 74, p. 130-131 et Les États et empires du burlesque, op. cit., p. 155, 167.

18 Mascurat, op. cit., p. 207-208 : « Car de vouloir prononcer qui a droit, ou qui ne l’a pas, c’est quasi une chose impossible és grandes affaires, où la passion et la faction exercent bien davantage leur tyrannie, qu’elles ne font és petites, esquelles même on a bien de la peine à ne se point embarquer mal à propos ». Voir aussi ibid., p. 208-209. Cette idée est exprimée par C. Nédelec, Les États et empires du burlesque, op. cit., p. 166.

19 Mascurat, op. cit., p. 213. Voir, à propos de l’ « affectation », la deuxième entrée qui lui est dédiée dans Furetière, Dictionnaire universel, t. I, op. cit. : « se dit aussi de certaine manière de parler ou d’agir qui n’a rien de naturel, qui est particulière à quelqu’un, et d’ordinaire vicieuse » ; et à propos de la « gentillesse », la deuxième entrée qui lui est dédiée dans ce même dictionnaire (t. II) : « se dit aussi de plusieurs petits ouvrages travaillés mignonement ».

20 Mascurat, op. cit., p. 112. Cette idée est partiellement exprimée par C. Nédelec, Les États et empires du burlesque, op. cit., p. 167.

21 Mascurat, op. cit., p. 213, 215.

22 Voir, à propos de la classification du burlesque italien et néo-latin, C. Nédelec, Les États et empires du burlesque, op. cit., p. 167-169 et Bruno Roche, « Le Mascurat de Gabriel Naudé ou le détournement libertin du rire transalpin », URL : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01181863, p. 4-7.

23 Mascurat, op. cit., p. 223, 228, 231-232.

24 Ibid., p. 217.

25 Ibid., p. 282, 286.

26 Ibid., p. 283.

27 Ibid.

28 Ibid., p. 580. Voir aussi C. Nédelec, Les États et empires du burlesque, op. cit., p. 155 : « La première approche critique “sérieuse” du burlesque (mais un peu burlesque tout de même) est celle que Naudé lui consacre dans son Jugement de tout ce qui a été imprimé contre le cardinal Mazarin depuis le sixiesme janvier jusques la déclaration du premier avril 1649. »

29 Mascurat, op. cit, p. 283-284.

30 Ibid., p. 284.

31 Ibid., p. 307-308.

32 Ibid.

33 Voir Furetière, Dictionnaire universel, op. cit., t. II, deuxième entrée « tripe » : « signifie aussi le ventre d’un homme » ; et troisième entrée « tripes » : « se dit aussi figurément et par mépris, des passages et lambeaux qu’on tire des auteurs grecs et latins, pour en faire des citations inutiles, ou affectées, ou pédantesques, pour faire paraître quelque érudition à contretemps ».

34 Voir la deuxième entrée de « veau », Furetière, Dictionnaire universel, op. cit., t. II : « On appelle figurément un grand sot, un homme fainéant, ou incapable d’affaires, un veau ».

35 Mascurat, op. cit., p. 162-163.

36 Ibid., p. 163-164.

37 À propos du miscellaneum, nous suivons les analyses développées par Claudine Nédelec dans « Réécritures burlesques », art. cit., p. 130-132 et « Le Burlesque au Grand Siècle : une esthétique marginale ? », Littératures classiques, 2004 / 3, no 224, p. 432-433.

38 Mascurat, op. cit, p. 580-581.

39 Ibid.

40 Ibid., p. 709.

41 Furetière, Dictionnaire universel, op. cit., t. III, entrée « poire » : « Entre la poire et le fromage, en parlant de la gaieté qu’on a à la fin d’un repas ».

42 Mascurat, op. cit., p. 222 : « S. Tu devrais dire entre deux tréteaux, ou plutôt entre la poire et le fromage, pour parler suivant le style du lieu où nous sommes.

M. Je t’assure que je n’y serais pas, si tu ne m’y avais traîné quasi par force, car je trouve les bons repas que l’on fait aux festins de Plutarque, d’Athénée, et de Philelphe, beaucoup plus à mon goût que ceux du cabaret ».

43 Ibid., p. 713-714.

44 Ibid.

45 Ibid., p. 601.Nous tenons à remercier les relecteurs pour leurs commentaires ainsi que leurs suggestions bibliographiques sur cette partie de notre article.

46 Furetière, Dictionnaire universel, op. cit., t. I, entrée « diarrhée ». Mascurat, op. cit., p. 601.

47 Mascurat, op. cit., p. 646.

48 Ibid., p. 674.

49 Ibid., p. 648.

50 Ibid., p. 647.

51 Ibid., p. 616.

52 Ibid., p. 617.

53 Ibid., p. 675.

54 Ibid., p. 647.

55 Ibid., p. 8-9.

56 Ibid., p. 675.

57 Ibid., p. 646.

58 Ibid., p. 614.

59 Ibid., p. 615.

60 Ibid., p. 358.

61 Ibid., p. 652.

62 Ibid., p. 12.

63 Ibid., p. 618.

64 Ibid., p. 226.

65 Ibid., p. 105.

66 Voir, à propos d’une lecture selon laquelle le public auquel cette bibliothèque pourrait être profitable, inspiré du « fondement inégalitaire de l’anthropologie libertine », est basé sur une hiérarchie « qui ne passe pas tant, […], entre l’ignorant et le savant, qu’entre le crédule et le méfiant » : Isabelle Moreau, « Guérir du sot », Les stratégies d’écriture des libertins à l’âge classique, Paris, Champion, 2007, p. 1093-1100. Voir aussi, à propos de la nécessité d’identifier, pour chaque contexte, l’« émetteur » et le « destinataire » des mazarinades, Christian Jouhaud, « Propagande et action au temps de la Fronde », Culture et idéologie dans la genèse de l’État moderne. Actes de la table ronde de Rome (15-17 octobre 1984), Rome, École française de Rome, 82, 1985, p. 337-352 (Persée, consulté le 1er septembre 2022).

67 Mascurat, op. cit., p. 715.

68 Pour une lecture qui envisage le Mascurat, à l’instar d’autres textes écrits par Naudé ou d’autres libertins, comme une manière de s’attaquer entre les lignes au discours qui prétend rendre compte rationnellement de l’action politique, Sophie Gouverneur, « Le Mascurat : un exemple d’écriture libertine », Libertinage et philosophie au xviie siècle, no 2, 1997, p. 131-143 ; et Prudence et subversions libertines : la critique de la raison d’État chez François de la Mothe Le Vayer, Gabriel Naudé et Samuel Sorbière, Paris, Champion, 2005. Voir également, Jean-Pierre Cavaillé, Dissimulations, Paris, Champion, 2002, p. 199-265 et « Mensonge et politique au début de l’âge moderne », Les Dossiers du Grihl, Les dossiers de Jean-Pierre Cavaillé, Secret et mensonge. Essais et comptes rendus, mis en ligne le 25 avril 2013 (URL : http://journals.openedition.org/dossiersgrihl/5936, consulté le 1er septembre 2022) ; Hartmut Stenzel, « Apories de l’humanisme et raison d’État dans le Mascurat de Gabriel Naudé », Cahiers du Centre de recherches historiques, 1998, no 20 (URL : http://journals.openedition.org/ccrh/2540, consulté le 1er septembre 2022).

69 Guy Patin, Correspondance complète et autres écrits, Lettre du 3 septembre 1649. À Charles Spon (site consulté le 1er septembre 2022).

70 Mascurat, op. cit., p. 601, 284.

Citer cet article

Référence électronique

Ioana Manea, « Le Mascurat de Naudé : pédanterie burlesque pour « détromper » du mauvais burlesque ? », Pratiques et formes littéraires [En ligne], 19 | 2022, mis en ligne le 12 janvier 2023, consulté le 20 avril 2024. URL : https://publications-prairial.fr/pratiques-et-formes-litteraires/index.php?id=427

Auteur

Ioana Manea

Université « Ovidius » Constanța (Roumanie)

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