La WebDewey : oui, mais…

DOI : 10.35562/arabesques.1083

p. 16-17

Plan

Texte

À l’initiative du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, plus particulièrement de la Sous-direction des technologies de l’information et de la communication pour l’éducation (SDTICE)1 de l’époque, et avec la collaboration de l’ABES, une expérimentation de la WebDewey s’est déroulée tout au long de l’année 2010 auprès d’établissements d’enseignement supérieur engagés dans un projet d’indexation des ressources pédagogiques numériques.

L’enjeu de cette expérimentation consistait non seulement à tester un outil d’indexation, mais aussi à inciter et favoriser la valorisation de ce type de ressources. À la fin des années 2000, quelques initiatives témoignent de la volonté de certains établissements de mettre en valeur les ressources produites par leurs enseignants au‑delà du périmètre local, mais celles-ci restent encore trop isolées, peut‑être en raison de la frilosité des enseignants eux-mêmes, mais aussi par un manque de coordination des acteurs impliqués : les cellules technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE), les directions des systèmes d’information (DSI), attendues pour l’installation et le paramétrage de plateformes de traitement et de diffusion, et enfin les SCD, pour leur expertise en matière de référencement.

En leur proposant un outil interopérable avec des systèmes informatiques locaux et permettant une indexation de qualité, la SDTICE voit l’occasion de fédérer ces acteurs autour d’un projet collaboratif. Un tel outil existe : la WebDewey, version électronique et en ligne du système de classement de ressources documentaires le plus répandu dans le monde, qui associe aux indices numériques les mots-matière du thésaurus de la Bibliothèque du Congrès. Une recherche sur un terme précis propose immédiatement l’indice de classement correspondant. La souplesse de son usage en ligne permet une prise en main par des non-bibliothécaires ; son caractère interactif (par le dépôt de commentaires de l’usager professionnel sur les indices retenus) facilite l’échange et la mutualisation du travail ; son interopérabilité avec les catalogues locaux des bibliothèques garantit une intégration dans les systèmes d’information déjà en place.

Pendant l’expérimentation, un tutoriel réalisé par le pôle Formation de l’ABES, composé de 9 leçons permettant de prendre en main la WebDewey, était mis à disposition des établissements-testeurs.

Pendant l’expérimentation, un tutoriel réalisé par le pôle Formation de l’ABES, composé de 9 leçons permettant de prendre en main la WebDewey, était mis à disposition des établissements-testeurs.

La phase de test

Fort de ces promesses, l’outil WebDewey est donc proposé pour une expérimentation nationale d’un an et, à l’automne 2009, tous les établissements engagés dans un projet de valorisation de leurs ressources pédagogiques numériques sont invités à se porter candidats. L’expérimentation est encadrée par une convention, définissant clairement le cadre et les modalités d’action : l’abonnement à la WebDewey est pris en charge par l’ABES, grâce à une subvention de la SDTICE. L’Agence assure la formation des testeurs (avec une plateforme d’autoformation en ligne créée pour l’occasion) et leur offre son assistance via son guichet en ligne. Une liste de diffusion est mise en place, pour faciliter la communication des informations. Les logins sont attribués par OCLC. Enfin, l’évaluation de l’expérimentation est confiée à un cabinet de conseil en relations publiques et communication, Libra Consulting.

La convention définit surtout les enjeux pour les établissements : indexer les ressources au format SupLOMFR et rendre accessible un maximum de ressources en dehors de l’établissement, si possible via les portails des universités numériques régionales (UNR).

14 établissements sont sélectionnés2, dont la moitié dans le cadre d’une université numérique thématique (UNT), d’une UNR ou d’un PRES. Les testeurs vont de 2 à 11 personnes par site, avec une plus forte représentation des SCD et des cellules TICE que des services informatiques ou des enseignants- chercheurs.

Pour réviser les principales classes de la Dewey (en anglais) tout en chantant, la vidéo du Dewey Decimal Rap, créée par Scooter Hayes, bibliothécaire à la bibliothèque publique de Wilmington (Caroline du Nord)

Pour réviser les principales classes de la Dewey (en anglais) tout en chantant, la vidéo du Dewey Decimal Rap, créée par Scooter Hayes, bibliothécaire à la bibliothèque publique de Wilmington (Caroline du Nord)

Postée sur YouTube, cette vidéo a été visionnée plus d’un million de fois. http://www.youtube.com/watch?&v=NHiUQb5xg7A#

Des retours nuancés

Sur l’outil WebDewey, les avis sont mitigés. On souligne la difficulté à appréhender un outil entièrement en anglais, qui impose à l’utilisateur l’élaboration de requêtes dans cette langue et la création systématique d’un libellé équivalent en français pour chaque indice retenu. L’avantage de l’électronique est quasiment anéanti par le recours obligé à l’édition française imprimée. Passé ce premier obstacle, si la multiplicité des index de recherche et la visibilité de l’arborescence sont appréciées, les testeurs s’aperçoivent hélas de la mauvaise adéquation de la Dewey pour un grand nombre de disciplines : la géographie (pour laquelle on doit chercher des indices dans les sciences sociales), l’architecture, les arts, la psychologie, la sociologie et les sciences de la vie (pour lesquels les conceptions véhiculées sont trop anciennes), le droit français et communautaire ou l’administration (pour lesquels les indices sont difficilement adaptables) et enfin la médecine (pour laquelle la Dewey est inadaptée).

Ainsi, c’est davantage le contenu de la Dewey qui est mis en question, que la forme « électronique » de l’outil, dont on reconnaît la facilité de navigation, l’avantage des connexions simultanées pour une meilleure répartition du travail et le bénéfice des mises à jour en temps réel.

Plus globalement, l’expérimentation a permis l’indexation de près de 600 notices, mais peu de sites ont pu en profiter pour mettre en place une chaîne robuste de référencement et de diffusion des ressources pédagogiques. L’échange de ressources entre les établissements en est freiné, ce qui les incite peu à s’investir dans un chantier d’indexation collaboratif.

Des évolutions attendues

Seuls deux établissements décident finalement de continuer à utiliser la WebDewey après la période d’expérimentation : l’École nationale supérieure (ENS) de Lyon et l’université du Maine. Mais tous émettent des recommandations pour que la politique de gestion des ressources pédagogiques numériques soit consolidée : groupes de travail pour établir des plans de classement par disciplines, communautés d’échanges afin de mutualiser au niveau national des solutions développées à l’échelon local, utilisation du portail des UNT pour diffuser des consignes et recherche de solutions pour pallier l’absence de la langue française dans la WebDewey.

Ce dernier point a retenu l’attention d’OCLC, qui a décidé de mettre en place une plateforme multilingue de la CDD. Une collaboration a été initiée avec l’Association pour l’avancement des sciences et des techniques de la documentation (ASTED) au Canada, qui coordonnera la traduction française à partir de la 23e édition anglaise parue en 2011. Une fois validée par la Bibliothèque nationale de France, par Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BANQ) et Bibliothèque et Archives Canada (BAC), la traduction paraîtra sous forme imprimée et sera intégrée à la WebDewey en 2014.

1 À partir du 20 juillet 2010, la SDTICE disparaît pour être remplacée par la Sous-direction des programmes d’enseignement, de la formation des

2 Université Paris-Sud,Université de Lyon 1,Université de Lyon 2,Université de Lille 1,Université de Rennes 1,Université de Bordeaux 2,PRES de

Notes

1 À partir du 20 juillet 2010, la SDTICE disparaît pour être remplacée par la Sous-direction des programmes d’enseignement, de la formation des enseignants et du développement du numérique, rattachée à la Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO), et par la Mission numérique pour l’enseignement supérieur (MINES), rattachée à la Direction générale pour l’enseignement supérieur et l’insertion professionnelle (DGESIP).

2 Université Paris-Sud,
Université de Lyon 1,
Université de Lyon 2,
Université de Lille 1,
Université de Rennes 1,
Université de Bordeaux 2,
PRES de Toulouse,
Université de Picardie,
Université de la Méditerranée,
Université du Maine,
ENS de Lyon,
INSA de Lyon,
IEP de Grenoble,
CERIMES.

Illustrations

Pendant l’expérimentation, un tutoriel réalisé par le pôle Formation de l’ABES, composé de 9 leçons permettant de prendre en main la WebDewey, était mis à disposition des établissements-testeurs.

Pendant l’expérimentation, un tutoriel réalisé par le pôle Formation de l’ABES, composé de 9 leçons permettant de prendre en main la WebDewey, était mis à disposition des établissements-testeurs.

Pour réviser les principales classes de la Dewey (en anglais) tout en chantant, la vidéo du Dewey Decimal Rap, créée par Scooter Hayes, bibliothécaire à la bibliothèque publique de Wilmington (Caroline du Nord)

Pour réviser les principales classes de la Dewey (en anglais) tout en chantant, la vidéo du Dewey Decimal Rap, créée par Scooter Hayes, bibliothécaire à la bibliothèque publique de Wilmington (Caroline du Nord)

Postée sur YouTube, cette vidéo a été visionnée plus d’un million de fois. http://www.youtube.com/watch?&v=NHiUQb5xg7A#

Citer cet article

Référence papier

Laurent Piquemal, « La WebDewey : oui, mais… », Arabesques, 71 | 2013, 16-17.

Référence électronique

Laurent Piquemal, « La WebDewey : oui, mais… », Arabesques [En ligne], 71 | 2013, mis en ligne le 26 août 2019, consulté le 19 avril 2024. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=1083

Auteur

Laurent Piquemal

Coordinateur du pôle Formation-Documentation, ABES

piquemal@abes.fr

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Droits d'auteur

CC BY-ND 2.0