Conventions par objectifs. Ou comment passer d’un dispositif quantitatif à un dispositif qualitatif

DOI : 10.35562/arabesques.1980

p. 5-6

Plan

Texte

Chaque année, depuis 2003, les établissements hébergeant un CR du Sudoc-PS reçoivent une subvention calculée selon un ensemble de critères qui doit permettre de rendre compte de leur activité. Depuis 2009, la rétribution de cette somme est assurée par l’ABES, qui a pris le relais du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Ce passage de relais entre l’administration centrale et l’ABES s’inscrit dans le contexte de la restructuration du ministère et du transfert de certaines missions de la MISTRD (Mission de l’information scientifique et technique et du réseau documentaire).

Parmi les missions transférées de l’administration centrale à l’ABES figure la rétribution annuelle de 150 000 euros à destination des universités qui hébergent un CR. En effet, à l’initiative conjointe des deux ministères en charge de la culture et de l’enseignement supérieur, ce sont sur elles que le réseau Sudoc-PS fait supporter la charge du fonctionnement courant des centres régionaux avec, pour seule reconnaissance, une subvention annuelle calculée sur leur volume d’activité. En 2009, l’ABES s’est fondée sur les mêmes critères de calcul que ceux du ministère : c’est ce mode de calcul qui est amené à évoluer.

Pourquoi l’ABES engage-t-elle une démarche visant à mettre en place un nouveau mode de calcul et par conséquent à revoir complètement les conventions actuelles ? En mai 2009, un groupe de travail1 remettait à la sous-direction des bibliothèques (ex-SDBIS) son rapport sur « l’avenir du Sudoc-PS » : c’est dans la droite ligne des conclusions de ce rapport que l’ABES a initié depuis le début de l’année 2010 une démarche visant à substituer au dispositif actuel d’attribution des moyens, un dispositif reposant sur des « conventions sur objectifs » qui permettront aux centres régionaux de s’inscrire dans des logiques de projets qui peuvent être nationales ou régionales.

Calcul complexe

Le dispositif actuel réunit une logique quantitative et un mode de calcul complexe.

Actuellement, 12 critères quantitatifs entrent en ligne de compte dans le calcul de la clé de répartition qui distribue ainsi les 150 000 euros annuels entre les établissements hébergeant un centre régional du Sudoc-PS :

  • un forfait de base de 8 % pour couvrir les frais généraux du CR ;
  • 10 % au titre de l’activité de prospection, d’animation, d’information et de formation au prorata du nombre total de bibliothèques faisant partie du périmètre du CR ;
  • 40 % au titre de l’activité de localisation au prorata du nombre total de premières localisations, de notices bibliographiques localisées, de notices d’exemplaires créées, de notices d’exemplaires modifiées ;
  • 42 % au titre de l’activité bibliographique au prorata du nombre total de notices bibliographiques créées, de notices bibliographiques modifiées, de notices d’autorité créées, de notices d’autorité modifiées, de bordereaux de création ISSN transmis, de bordereaux de correction ISSN transmis.

La multiplicité des critères à prendre en compte, leur complexité et le peu de transparence dans leur mode de calcul, sans oublier enfin la lourdeur administrative, consécutive à ce manque de lisibilité pour aboutir à la somme qui sera finalement rétribuée à chacun des 32 CR, plaide pour une réécriture profonde du dispositif. Comme le soulignait le rapport en question, on voit que ces critères relèvent bien d’une « logique purement quantitative, non liée à des objectifs de politique générale »2.

Cette volonté de passer d’une logique quantitative à une logique plus qualitative et de projets, donc aussi plus politique, ne sort pas de nulle part : n’oublions pas les fondements qui ont présidé à la création du groupe de travail qui devait remettre son rapport sur… « l’avenir du Sudoc-PS ».

Car l’objectif est bien là : inscrire les centres régionaux dans une dynamique de projets structurants tant du point de vue de leur activité que de l’environnement dans lequel cette activité est amenée à se développer.

Cela signifie donc qu’une réflexion doit être menée en amont afin de déterminer quels sont les besoins des institutions locales (l’établissement de rattachement du CR et l’organisme qui l’héberge, mais aussi les structures régionales pour le livre) et nationales (l’ABES, la BNF, la FILL), ces projets pouvant être d’ordre régional et/ou national. Cette réflexion sera l’objet de négociations directes (sur site) avec les directeurs des services documentaires et les responsables de CR.

Nouvelles conventions

En effet, l’élaboration des nouvelles conventions par objectifs doit permettre de définir deux niveaux de négociation et de contractualisation :

  • un premier niveau cadre précisant les modalités générales de coopération de l’ABES qui représente les CR, avec la FILL (Fédération interrégionale du livre et de la lecture) qui représente les SRL (Structures régionales pour le livre) ; c’est aussi à ce niveau que peut être envisagée une coopération entre l’ABES et la BNF pour les projets d’envergure nationale tel que le projet BIPFPIG3 ;
  • un second niveau régional (pour les 22 CR de province) ou thématique (pour les 10 CR d’Île-de-France) visant à définir le cahier des charges et les objectifs de signalement de chaque centre en fonction de son environnement respectif.

Si la mise en œuvre du nouveau dispositif vise à donner une nouvelle impulsion aux CR en mettant davantage l’accent sur des objectifs qui feront l’objet de négociations avec l’ABES, pour autant, comme le préconise encore le rapport déjà cité : « les CR ne pourront uniquement fonctionner sur un mode contractuel. Les activités non contractuelles seront organisées en fonction des priorités de l’établissement de rattachement du CR, le cas échéant appuyées sur le contrat quadriennal de ce dernier ». Mais quid des moyens, qu’ils soient humains ou financiers ? Comment les universités, à travers leur service documentaire, pourront-elles soutenir financièrement les actions de leur centre régional ou lui accorder une quotité horaire à la hauteur de cette ambition ?

Il est utile de préciser ici que le rapport n’ignore pas le contexte encore récent de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités et qu’il envisage ainsi, en fonction de l’envergure des projets et de la charge de travail du CR, « des cofinancements pour aider à leur réalisation, l’autonomie des universités ne permettant plus de laisser à leur charge une mission qui déborde du cadre fixé par la LRU et leurs contrats quadriennaux ».

Par ailleurs, il faut considérer que la mise en œuvre des nouvelles conventions par objectifs implique une nouvelle approche de la mission générale des CR du Sudoc-PS en matière de signalement des collections de ressources continues dans le Sudoc. En effet, ces conventions doivent mettre en valeur le positionnement stratégique des CR comme rôle pivot au sein du réseau du Sudoc-PS. C’est en cela qu’ils ont un rôle majeur à jouer en termes de projets régionaux. Pour les conforter dans ce rôle et les inciter à entamer des démarches auprès de leurs partenaires régionaux, l’ABES a signé avec la FILL une convention cadre où l’une et l’autre s’engagent à faciliter toute action partenariale entre les CR du Sudoc-PS et les structures régionales pour le livre : parmi ces actions figurent en premier lieu la mise en œuvre et le développement des plans de conservation partagée des périodiques (voir encadré page 7).

La mise en œuvre du nouveau dispositif de conventionnement sur objectifs piloté par l’ABES a débuté dès le début de l’année par un appel auprès de 8 établissements4 hébergeant un CR : tous ont répondu positivement. Après une analyse de leurs projets en cours et à venir, des échanges et négociations seront menés directement sur site qui permettront d’aboutir à de nouvelles conventions et à l’élaboration de nouveaux critères.

Dès janvier 2011, les 8 CR concernés verront leur activité évaluée selon ces nouveaux critères qui détermineront la nouvelle somme à attribuer à chacun d’entre eux. Les 24 autres CR constitueront la deuxième vague entrant dans le nouveau dispositif ; et continueront à être financés selon les anciennes clés de répartition, pour l’année 2011.

1 Composé de 2 représentants de l’ABES, 4 directeurs de bibliothèques universitaires, 4 responsables de centres régionaux, 1 représentant de la BNF

2 Le « Rapport du groupe de travail sur l’avenir du Sudoc-PS » est disponible en ligne sur le site de l’ABES à l’adresse suivante : http://www.abes.

3 Bibliographie de la presse française politique et d’information générale. Initié dans les années 1950, le projet BIPFPIG est depuis 1958 une

4 Les huit CR concernés pour la première vague de mise en œuvre des nouvelles conventions sur objectifs : CR 03 (Aquitaine), CR 06 (Auvergne), CR 26

Notes

1 Composé de 2 représentants de l’ABES, 4 directeurs de bibliothèques universitaires, 4 responsables de centres régionaux, 1 représentant de la BNF, 1 représentant des services déconcentrés du ministère de la culture et de la communication, 1 représentant de la FILL, ce groupe de travail s’est réuni à 3 reprises entre juin 2008 et mars 2009.

2 Le « Rapport du groupe de travail sur l’avenir du Sudoc-PS » est disponible en ligne sur le site de l’ABES à l’adresse suivante : http://www.abes.fr/abes/page,394,documents-en-ligne.html.

3 Bibliographie de la presse française politique et d’information générale. Initié dans les années 1950, le projet BIPFPIG est depuis 1958 une entreprise collective à laquelle sont appelés à participer toutes les bibliothèques et tous les services d’archives de France propriétaires de collections de presse locale (source : < http://www.bnf.fr >).

4 Les huit CR concernés pour la première vague de mise en œuvre des nouvelles conventions sur objectifs : CR 03 (Aquitaine), CR 06 (Auvergne), CR 26 LSH (Sorbonne), CR 27 Droit (Cujas), CR 32 (INHA), CR 40 (Limousin), CR 66 (PACA Marseille), CR 70 (Rhône-Alpes Lyon).

Citer cet article

Référence papier

Jean-Philippe Aynié, « Conventions par objectifs. Ou comment passer d’un dispositif quantitatif à un dispositif qualitatif », Arabesques, 59 | 2010, 5-6.

Référence électronique

Jean-Philippe Aynié, « Conventions par objectifs. Ou comment passer d’un dispositif quantitatif à un dispositif qualitatif », Arabesques [En ligne], 59 | 2010, mis en ligne le 28 juillet 2020, consulté le 28 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=1980

Auteur

Jean-Philippe Aynié

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