Produits électroniques à la BIUM

L’essentiel est dans le point d’accès

DOI : 10.35562/arabesques.3380

p. 11-13

Plan

Texte

La bibliothèque interuniversitaire de médecine et d’odontologie – la BIUM – depuis 1999 a été et demeure confrontée à l’irruption, puis à la montée en puissance de la documentation électronique, qui partout bouscule les situations acquises et les perspectives anciennes, modifie singulièrement l’environnement de travail des étudiants et des chercheurs, et incite à de profondes remises en cause. CADIST pour la médecine et l’odontostomatologie, pôle associé de la BNF, bibliothèque à la fois patrimoniale et de recherche disposant, entre autres, d’une collection de périodiques imprimés parmi les plus conséquentes de France, la BIUM a vu ainsi plusieurs de ses fonctions s’amoindrir : le PEB a périclité, moins qu’ailleurs, mais de manière tangible ; son offre de journaux médicaux, sur la courte durée (les quatre ou cinq dernières années), n’est plus unique et est sans doute aujourd’hui dépassée par les milliers de titres offerts par tel ou tel SCD à l’origine plus modeste, mais aujourd’hui moins pénalisé par les modèles économiques aberrants mis en place par les « éditeurs » commerciaux.

L’Académie nationale de chirurgie, la BIUM et l’édition scientifique alternative

L’Académie nationale de chirurgie, la BIUM et l’édition scientifique alternative

Reconversion pour « un fonds »

Face à une telle situation, nous avons décidé d’explorer et d’investir d’autres champs, en somme de reconvertir le CADIST en lui donnant des orientations différentes, de l’adapter à la nouvelle donne qui, à nos yeux, ne fera jamais disparaître le besoin, pour la communauté académique comme pour un plus large public de professionnels, de disposer de bibliothèques de référence, offrant dans la continuité historique à la fois des collections de qualité, « un fonds » comme l’on dit d’une librairie, et des services.

Pour ce faire, le parti a été pris de jouer le jeu de l’électronique libre d’accès et gratuit, et d’offrir à l’internaute quel qu’il soit des produits originaux, soit créés par d’autres institutions mais sélectionnés, triés et mis en forme localement, soit élaborés sur place, au sein même de la bibliothèque. Gérer des produits créés par d’autres revenait à assumer une fonction bien classique des bibliothèques, sous des formes renouvelées ; élaborer de nouveaux produits supposait que l’on se confrontât à l’édition électronique et que la bibliothèque devînt elle aussi un producteur de contenus, rôle qui nous semble inhérent à toute bibliothèque de recherche et pourrait représenter l’avenir des institutions documentaires : quels intermédiaires, en effet, ne sont pas à terme condamnés dans une société où les relations producteur-consommateur sont directes et peuvent court-circuiter les réseaux traditionnels de distribution ?

Pour la médecine et l’odontologie modernes, le site web de la BIUM offre, comme tous les autres sites, les habituels catalogues de monographies, de périodiques imprimés ou en ligne, et de bases de données accessibles librement ou à titre réservé.

Deux produits plus spécifiques cependant méritent d’être mentionnés pour illustrer notre propos.

  1. Une base de signets (http://www.bium.univ-paris5.fr/medecine/debut.htm) pointe actuellement sur quelque 10 000 documents full-text regroupés en plusieurs catégories répondant aux besoins spécifiques des professionnels de la santé : cours de formation initiale ou continue, référentiels de bonne pratique, banques d’images, e-documents divers (thèses, rapports, monographies, brochures), sites web spécialisés.
    Produit de la veille menée par plusieurs bibliothécaires sur quelques centaines de sites le plus souvent institutionnels et retenus pour leur notoriété scientifique, cet instrument est constamment enrichi et mis à jour, avec un engagement qualité quant au fonctionnement des liens, qui sont vérifiés tous les mois ou tous les deux mois. Sorte de bibliothèque numérique, qui complète la bibliothèque imprimée (la même politique d’acquisition est mise en œuvre dans les deux cas), et permet à tout internaute de retrouver une information sélectionnée et classée (sur d’autres critères que ceux de Google), cette base de signets alimente aussi le service question-réponse Biuminfo et permet ainsi au client de lire, à toute heure et en tout lieu.
  2. Un journal électronique, les e-Mémoires de l’Académie nationale de chirurgie (http://www.bium.univ-paris5.fr/acad-chirurgie/emem_cad.htm), paraît au rythme de quatre livraisons par an et est élaboré en partenariat avec l’ANC : l’Académie, qui publie chez Elsevier les Annales de chirurgie, a souhaité relancer en 2002 un titre qu’elle possédait et était tombé en déshérence. Elle fournit les articles, qui représentent une sélection des meilleures communications présentées lors de ses séances hebdomadaires, et la bibliothèque assume le rôle de l’éditeur-diffuseur, mettant à disposition compétences informatiques, serveur, accès et visibilité. Dans le cas présent, il s’agit bien d’un projet éditorial, où l’on produit et diffuse une ressource alternative, parfaitement identique, pour la forme et le contenu, aux revues bien connues et chèrement acquises, avec en plus quelques dispositions techniques originales – certains articles sont illustrés de séquences vidéo.

L’un des plus riches du monde…

Si, pour la partie moderne, il n’est pas aisé pour la bibliothèque de trouver un positionnement au milieu de toutes les institutions opérant dans le monde de la santé (agences gouvernementales, sociétés professionnelles qui offrent toutes de l’information en ligne, CISMEF et autres sites spécialisés), en revanche dans le domaine patrimonial la tâche est assurément plus aisée : la BIUM possède en effet l’un des fonds anciens les plus riches du monde, avec la NLM des USA et le Wellcome Institute de Londres, qui ne mènent à ce jour aucun véritable projet de numérisation.

Le projet de numérisation de la BIUM s’articule autour d’objectifs simples :

  • offrir en ligne, en priorité à des communautés de chercheurs et de spécialistes, sans négliger le cas échéant des publics plus larges, les documents nécessaires à leur travail quotidien ;
  • constituer un portail francophone dédié à l’histoire de la santé ;

et repose sur un projet éditorial tout aussi simple :

  • sélectionner en partenariat avec les chercheurs les documents et les meilleures éditions (celles qui sont scientifiquement utiles, rares, inaccessibles), en visant à constituer des corpus significatifs,
  • présenter les documents avec une introduction mettant en perspective le sujet et les choix opérés, fournir un apparat critique, comme dans l’édition scientifique traditionnelle.

Les projets posés, notre portail offre, depuis 2001, une gamme de produits divers et complémentaires.

Une collection de documents libres de droits, numérisés en mode image, avec une navigation page à page et par chapitres (le sommaire des documents est intégralement reconstitué pour faciliter la consultation ; pour les dictionnaires, tous les articles font l’objet d’une entrée spécifique et peuvent être recherchés) : la collection Medic@ (http://www.bium.univ-paris5.fr/histmed/medica.htm) compte aujourd’hui quelque 600 000 pages en ligne.

Une série d’expositions virtuelles (http://www.bium.univ-paris5.fr/histmed/expos.htm) sont elles aussi des documents, élaborés en collaboration avec des spécialistes et dont certains constituent à eux seuls des corpus iconographiques – « Les monstres de la Renaissance à l’Âge classique » propose toutes les représentations majeures du thème, soient plus de 500 illustrations.

Des thèses d’histoire de la médecine (http://www.bium.univ-paris5.fr/histmed/asclepiades.htm) et des monographies originales, dont les auteurs nous ont confié les textes (citons The Hippocratic tradition, par Wesley D. Smith, dont la première édition avait paru aux presses de Cornell University et dont nous publions en ligne la seconde, révisée en 2002), sont proposées sur le portail.

Enfin, une douzaine de sites web de sociétés savantes (http://www.bium.univ-paris5.fr/histmed/) sont développés, maintenus et hébergés par la bibliothèque, à charge pour les sociétés de les alimenter en contenus originaux (articles, actes de leurs congrès, images, etc.).

Au total, la documentation numérique est aujourd’hui omniprésente à la BIUM et constitue une part significative de son activité. Documentation originale, produite et formatée sur place, dans le cadre d’un projet qui se veut un projet d’édition scientifique et s’inscrit dans un continuum permanent avec la documentation imprimée. Documentation accessible uniquement sur le site de la bibliothèque, qui devient ainsi le réservoir où l’on va, et non pas seulement celui que l’on traverse pour aller chercher l’information des autres.

Et le portail du Sudoc en cette affaire ?

À nos yeux, il convient aujourd’hui de multiplier les points d’accès, et tous les points d’accès sont utiles. La fréquentation de notre site web (lectorat virtuel : 70 000 internautes par mois, dont 30 % sont étrangers) ne saurait suffire pour assurer la promotion et la visibilité de l’offre proposée. Le public est mondial, souvent anglo-saxon ; c’est pourquoi, nous faisons porter nos efforts dans cette direction : figurer sur les portails spécialisés étrangers – catalogues du Wellcome Institute, de l’Université du Michigan, de la National Library of Medicine, dans la Bibliotheca Classica Selecta de l’Université catholique de Louvain comme dans Google, par exemple.

Le professeur de clinique chirurgicale Eugène-Louis Doyen dans son laboratoire (circa 1900)

Le professeur de clinique chirurgicale Eugène-Louis Doyen dans son laboratoire (circa 1900)

Banque d’images de la BIUM

Depuis plus de deux ans maintenant, la BIUM catalogue tous ses produits électroniques dans le Sudoc (Système universitaire de documentation). Par ailleurs, le signalement de Medic@ sera prochainement amélioré par la mise en place d’un réservoir OAI-PMH, qui permettra aux institutions intéressées, et notamment au portail du Sudoc, d’importer régulièrement les métadonnées des documents de façon automatisée. Aussi, le portail développé par l’Agence bibliographique de l’enseignement supérieur nous apparaît-il comme une opportunité et un partenaire privilégié, complémentaire des autres. En France, il a pignon sur rue, fédère toutes les bibliothèques universitaires, possède la masse critique, et nous permettra, sans aucun doute, de valoriser encore plus largement des produits destinés à tous, chercheurs, étudiants, professionnels, citoyens et curieux.

Dans la documentation numérique comme en matière de catalogage, l’essentiel est dans le point d’accès.

Illustrations

Citer cet article

Référence papier

Guy Cobolet, « Produits électroniques à la BIUM », Arabesques, 39 | 2005, 11-13.

Référence électronique

Guy Cobolet, « Produits électroniques à la BIUM », Arabesques [En ligne], 39 | 2005, mis en ligne le 27 mars 2023, consulté le 02 septembre 2025. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=3380

Auteur

Guy Cobolet

Directeur de la BIUM

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