Les Journées Abes ont eu lieu fin mai 2023. Ce rendez-vous traditionnel, qui accueille depuis 2007 au Corum de Montpellier de 350 à 450 collègues, était la culmination d’une période d’un peu plus de six mois où nous avons, à l’Abes, consacré une partie importante de nos efforts à la réflexion sur les besoins des utilisateurs de nos produits et services. C’est une démarche à laquelle nous incitait la lettre de mission que m’a donnée le ministère à mon arrivée et dont je parlais ici même dans mon billet de janvier dernier.
Depuis lors, nous avons multiplié les Abes Tours, à la Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne, aux SCD des universités d’Avignon, d’Angers, de Lyon 1, de Toulouse 1 Capitole et au SICD de Toulouse, tandis que d’autres rencontres sont programmées aux SCD de Clermont-Ferrand, de Nantes et, virtuellement malheureusement, des Antilles et de la Guyane. Dans chacune de ces visites, nous essayons de répondre aux questions des établissements, mais nous essayons aussi de comprendre leur trajectoire, les sujets qui sont importants pour eux aujourd’hui ou le seront demain, et de voir dans quelle mesure l’Abes peut contribuer à la réussite de leurs objectifs.
Dans le même temps, nous avons travaillé avec un partenaire extérieur, le cabinet Ourouk : une quarantaine d’entretiens approfondis nous a donné un panorama des attentes qui s’expriment à l’égard de l’Abes. Nos interlocuteurs représentaient volontairement une grande variété d’intérêts : directeurs et directrices de services communs de la documentation, responsables de systèmes d’information documentaire, acteurs de l’information scientifique et technique, collègues de Couperin ou acquéreurs de ressources électroniques, collègues basés en France, mais aussi en Suisse et en Belgique, sans oublier bien sûr les collègues de l’Abes eux-mêmes, qui ont largement donné de leur temps pour alimenter ces discussions.
Les attentes exprimées s’organisent, in fine, en une quinzaine de thématiques, qui vont de la fourniture de documents aux thèses en passant par les groupements de commandes. Quatre de ces thèmes sont revenus plus souvent que les autres, et nous avons donc utilisé une après-midi des Journées Abes pour creuser ces sujets lors d’un atelier auquel ont participé une quarantaine de collègues. Concernant les référentiels, qui étaient le premier thème abordé, il a été unanimement souligné que la réussite d’IdRef est une base solide sur laquelle s’appuyer pour travailler à l’extension des usages d’Orcid d’une part et à la mise en place d’un référentiel des structures de l’ESR d’autre part. Ce second besoin est largement partagé par l’ensemble des acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche, et le ministère a annoncé en mai que l’Abes serait saisie de ce sujet dans les mois à venir. Les participants à l’atelier ont également noté que cette logique de constitution de référentiels utiles au-delà du secteur documentaire et construits avec des partenaires qui ne sont pas tous de ce secteur, peut représenter un changement de paradigme pour nous, mais correspond bien aux évolutions des établissements eux-mêmes, où la bibliothèque est de plus en plus intégréeà la formation, à la recherche, au pilotage de l’établissement. Sur le sujet des données associées aux achats de documentation électronique, une attente idéale s’exprime : pouvoir bénéficier d’un processus complet et fluide allant de l’acquisition des ressources électroniques à leur signalement dans un outil national, réservoir aussi exhaustif que possible de métadonnées de bonne qualité, offrant des flux de récupération sélective adaptés aux différentes réalités techniques locales. L’enrichissement et l’amélioration des métadonnées des éditeurs, et leur mise à disposition auprès des établissements constituent une plus-value reconnue de l’Abes, qui compense les limites des outils de découverte commerciaux. Dans cette logique qui met l’accent sur la volumétrie des données et les flux, la qualité des métadonnées était jugée par les participants moins importante que l’automatisation des flux jusque dans les outils locaux. Concernant les réseaux, il a été souhaité lors de l’atelier qu’un travail renouvelé soit entrepris pour fournir à tous un espace de dialogue politique et stratégique qui fait actuellement défaut entre l’Abes et les établissements, ainsi qu’une rationalisation des fonctions de correspondants Abes dans un contexte de plus grande autonomie des établissements que jadis, mais aussi de contraintes croissantes sur les ressources humaines.
Enfin, nous avons posé aux participants la question de l’urgence qu’il y aurait, pour eux, à ce que l’Abes se saisisse de la question du signalement de fonds muséaux, d’archives patrimoniales, d’archives de chercheurs... Cette problématique, nous ont-ils confirmé, émerge bien dans certains établissements, mais pas pour tous et elle n’apparait pas prioritaire aujourd’hui : il s’agit de dossiers complexes, nécessitant des compétences peu ou pas présentes dans les bibliothèques, et qui se heurtent à un manque de ressources humaines. Ce sujet est distant de celui de l’archivage pérenne de collections numérisées, pour lequel un besoin clair a été au contraire identifié : celui de pouvoir accéder à un coût raisonnable à une offre simple à mettre en œuvre. Le premier semestre 2023 était pour nous le temps des questions, et nous cernons mieux aujourd’hui les besoins de nos utilisateurs. Le second semestre devra être celui où on commence à imaginer des réponses et à faire des premiers choix.