Mutualisations inter-établissements : le retour d’expérience de l’Université Paris-Saclay

DOI : 10.35562/arabesques.4183

p. 22-23

Outline

Text

L’Université Paris-Saclay a initié dès 2020, en tant qu’établissement public expérimental (EPE), une politique pionnière de mutualisations extensives des ressources électroniques, des acquisitions d’ebookset du signalement.

L’établissement public expérimental « Université Paris-Saclay », créé par décret du 5 novembre 2019, comprend, pour simplifier, 7 universités et grandes écoles :l’Université Paris-Saclay stricto sensu (ex-Université Paris-Sud ainsi que les missions et personnels de l’ex-Comue), AgroParisTech, CentraleSupélec, l’ENS Paris-Saclay, l’Institut d’Optique Graduate School (IOGS), l’Université Évry Val-d’Essonne (UEVE) et l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) et 7 organismes de recherche partenaires (ONR) : le CEA, le CNRS, Inrae, l’Inria, l’Inserm, l’Onera et l’Institut des hautes études scientifiques (IHES).

Des évolutions institutionnelles internes sont rendues possibles par le projet : création en septembre 2022 de la DiBISO (Direction des bibliothèques, de l’information et de la science ouverte) afin de mettre en commun les services documentaires de l’Université Paris-Saclay, de CentraleSupélec et de l’ENS Paris-Saclay au sein d’un service documentaire unique, et d’accompagner ainsi l’ouverture du Lumen1, l’emblématique learning center, à la confluence des trois établissements ; « intégration » des universités membres-associées d’Évry et de Versailles à l’horizon 2025, encore à préciser à ce jour ; enfin, sortie à terme du statut d’EPE pour celui de « grand établissement ».

La nécessité de mutualiser les ressources électroniques

La perspective de création, à relativement court terme, de la DiBISO, avec une direction, un budget, une équipe et une politique documentaire communs, a, dès l’origine, posé la question de la mutualisation des ressources électroniques. Historiquement, celle-ci avait été initiée au moins dès l’époque de la Comue Paris-Saclay. Ces premières mutualisations, bien que demeurées relativement limitées en nombre (moins d’une dizaine), ont néanmoins contribué à créer une dynamique positive, des espaces d’échanges, des habitudes de travail et des outils, qui ont posé les bases des mutualisations ultérieures.

Par ailleurs, la perspective, à l’époque, d’une fusion des trois universités (devenue depuis lors « intégration ») à l’échelle de quelques années imposait d’envisager les mutualisations sur une base plus large que le simple périmètre DiBISO, et de construire une politique à la fois volontariste et pluriannuelle. Pour ce faire, des obstacles ont dû être surmontés : la politique documentaire et le financement bien sûr, mais aussi, d’emblée, l’adaptation des offres négociées à l’échelle nationale par le consortium Couperin à cette catégorie administrative nouvelle mais non incluse qu’était l’EPE ; enfin, l’ajustement des procédures internes.

« Le grant Boèce, de Consolation » (Paris, 1494)

« Le grant Boèce, de Consolation » (Paris, 1494)

source BnF / Gallica

Une politique structurante et partagée

La quasi-totalité des 80 ressources souscrites par la DiBISO a pu être mutualisée en deux ou trois ans entre ses trois établissements. Aujourd’hui, la moitié d’entre elles sont également mutualisées à des périmètres divers avec les autres établissements Paris-Saclay, notamment avec l’UEVE et l’UVSQ. Ces dernières se sont inscrites pleinement dans cette dynamique en étant à l’initiative de la mutualisation de ressources additionnelles, dont elles portent la gestion.

La mutualisation des acquisitions d’ebooks

Une politique spécifique de mutualisation des acquisitions d’ebooks a été lancée dès l’époque de la Comue, en 2018. Elle avait pour prérequis : l’accessibilité à tous les usagers des ouvrages achetés ; la gestion et le paiement des commandes par établissement ; un processus d’acquisition transparent (notamment pour éviter les doublons).

Elle a résisté à la variation de périmètre de la Comue et aux incertitudes pesant sur la pérennité des collections acquises. Aujourd’hui développée en partenariat avec BiblioOnDemand (après Dawson) et comprenant plus de 6 000 ebooks, elle inclut 9 établissements Paris-Saclay, dont 2 ONR, et s’est récemment élargie au groupe des écoles centrales, dont fait partie CentraleSupélec.

Un effort important et complémentaire de mutualisation du signalement

Afin de préparer les mutualisations à venir au sein du futur EPE, et plus particulièrement l’ouverture du Lumen, tout en accompagnant et en améliorant les processus métier, les services de la documentation des 7 universités et grandes écoles ont lancé, dès 2019, un projet d’harmonisation de leurs différents systèmes de gestion, afin d’aboutir à l’adoption d’un outil commun (SGBm). En complément, le passage à un proxy documentaire mutualisé (EZproxy) porté par l’UEVE, initié en amont de la réinformatisation, s’est poursuivi jusqu’à intégrer ces 7 établissements, afin de faciliter la gestion technique des accès aux ressources en ligne. Cette double mutualisation a permis à des équipes documentaires aux ressources RH parfois limitées de bénéficier, à moindre coût, d’outils partagés, sans en assurer directement l’administration, qui est prise en charge par d’autres établissements Paris-Saclay pour l’ensemble de la communauté.

Une coordination du signalement des ressources électroniques s’est mise en place. La nécessité d’approfondir cette coordination s’est rapidement imposée comme une priorité, en raison de la multiplication des collections électroniques dans le SGBm suite à la migration initiale des données issues des résolveurs de liens de chaque établissement, du nombre croissant de ressources mutualisées à signaler et de la duplication du travail à effectuer entre les établissements. Les différents niveaux de mutualisation possibles et leur impact sur l’organisation ont été analysés, l’objectif étant de simplifier voire de mutualiser les tâches, tout en améliorant constamment la qualité du signalement.

Après une phase d’appropriation du SGBm par tous les établissements Paris-Saclay concernés, le passage à un signalement complètement mutualisé a été acté. Celui-ci repose sur deux principes : l’activation d’une seule collection, et une gestion différenciée des accès via les codes campus, permettant ainsi de gérer, dans l’outil de découverte, la visibilité des ressources sur la vue propre à chaque établissement et les accès sur la vue partagée. Ces principes ont été appliqués en priorité aux nouvelles ressources mutualisées, puis un travail rétrospectif a été entrepris. Ils ont également rendu plus facile et efficient le travail sur la qualité du signalement (exhaustivité des activations et des mises à jour de titres dans les bouquets, et qualité des notices exposées, notamment via le circuit de synchronisation des ebooks avec le Sudoc).

Cet effort de mutualisation s’est avéré fructueux. Il a permis de rationaliser le travail dans le SGBm par une meilleure organisation et répartition. Par ailleurs, il a instauré une dynamique de groupe positive où chacun et chacune a pu monter en compétences à la fois sur la gestion des ressources électroniques et sur le diagnostic et la résolution des problèmes de signalement et d’accès. Pour le prolonger sur le long terme, la rédaction d’une charte de signalement est actuellement en projet.

Ces résultats positifs ont été pour l’essentiel atteints dans le contexte mouvant d’évolutions institutionnelles complexes, de la création d’un service documentaire mis en commun, et bien entendu d’une pandémie mondiale ayant fortement perturbé le fonctionnement normal des services et précipité l’évolution de certaines pratiques, comme la généralisation du télétravail.

Ils ont été rendus possibles par la conjonction de plusieurs facteurs, parmi lesquels : en interne, des politiques structurantes, initiant autant qu’anticipant les évolutions, et dotées d’impulsions fortes et d’un suivi continu ; une systématisation et une intensification des cadres et outils posés dès l’époque de la Comue ; l’appui externe de certains opérateurs (consortium Couperin, ainsi que l’Abes et les autres établissements porteurs de groupements de commandes, pour la mutualisation des ressources électroniques, par exemple). Enfin, last but not least, une coopération en réseau, fondée sur un travail d’équipe et un effort de décloisonnement, ainsi que sur des relations de confiance, une concertation continue, et une implication de tous au service d’un objectif partagé.

Notes

1 Voir dans ce numéro « Plein Feux sur Le Lumen », p.24-25

Illustrations

References

Bibliographical reference

Luc Bellier, Jérémy Del Bel, Lucie Gay and Dorothée Pain, « Mutualisations inter-établissements : le retour d’expérience de l’Université Paris-Saclay », Arabesques, 114 | 2024, 22-23.

Electronic reference

Luc Bellier, Jérémy Del Bel, Lucie Gay and Dorothée Pain, « Mutualisations inter-établissements : le retour d’expérience de l’Université Paris-Saclay », Arabesques [Online], 114 | 2024, Online since 18 juillet 2024, connection on 18 juillet 2025. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=4183

Authors

Luc Bellier

Directeur adjoint de la DiBISO de l’Université Paris-Saclay

luc.bellier@universite-paris-saclay.fr

Author resources in other databases

  • IDREF
  • ORCID
  • HAL
  • VIAF

By this author

Jérémy Del Bel

Responsable de la cellule Ressources électroniques à la DiBISO de l’Université Paris-Saclay

jeremy.del-bel@universite-paris-saclay.fr

Author resources in other databases

  • IDREF
  • VIAF

Lucie Gay

Responsable de la cellule Informatique documentaire à la DiBISO de l’Université Paris-Saclay

lucie.gay@universite-paris-saclay.fr

Author resources in other databases

  • IDREF
  • VIAF
  • BNF

Dorothée Pain

Chargée d'une mission ebooks à la DiBISO de l’Université Paris-Saclay

dorothee.pain@universite-paris-saclay.fr

Author resources in other databases

  • IDREF
  • VIAF

By this author

Copyright

CC BY-ND 2.0