Étudier le Parlement d’un point de vue juridique

DOI : 10.35562/recp.321

Résumés

Ensemble de normes spécifiques, le droit parlementaire est une discipline qui ne s’est pleinement développée qu’à partir de la Ve République, tout en restant longtemps cantonnée au rang de spécialité mineure. En dépit de l’intérêt porté au droit parlementaire, son cadre d’analyse n’est que rarement détaillé dans les études juridiques qui lui sont consacrées. Le recours à la méthode normativiste pour envisager le droit parlementaire doit être rigoureusement étayé et son intérêt précisément exposé, tant un tel positionnement épistémologique est peu courant en ce domaine. Si l’importance accordée aux pratiques et le caractère peu contraignant des règlements inclinent à penser la matière dans une perspective politique, il apparaît au moins tout aussi pertinent d’analyser ces particularités d’un point de vue juridique.

Parliamentary law is a discipline that has only fully developed since the Fifth Republic, although it has long been considered a secondary discipline. Despite the interest shown in parliamentary law, its analytical framework is rarely detailed in the legal studies devoted to it. The use of the normativist method to consider parliamentary law must be rigorously justified, since such an epistemological position is uncommon. The importance attached to practices and the non-binding nature of rules of procedure lead us to understand parliamentary law from a political perspective. However, it is also relevant to analyse these particularities from a legal point of view.

Plan

Texte

Ce numéro inaugural de la Revue d’étude et de culture parlementaires, portée sur les fonts baptismaux par Damien Connil, Priscilla Jensel-Monge et Audrey de Montis, offre une excellente occasion de sonder les multiples manières d’analyser le Parlement, à travers les différentes disciplines qui s’y intéressent. Avant d’être envisagé par les juristes, le Parlement est sorti « du purgatoire universitaire en empruntant les chemins de la science politique1 », ainsi que le rappellent en 1988 les professeurs Pierre Avril et Jean Gicquel dans la préface à la première édition de leur manuel, véritable bible du droit parlementaire. Pendant longtemps, en effet, rares étaient les auteurs disposés à entreprendre « la tâche plus ingrate [sic] d’étudier la vie parlementaire du point de vue juridique2 ».

S’y atteler suppose au préalable de s’entendre sur des éléments de définition du droit parlementaire, expression polysémique. Lato sensu, le droit parlementaire correspond à « l’ensemble des règles relatives à l’organisation, à la composition, au fonctionnement et aux rapports interinstitutionnels des assemblées politiques délibérantes3 ». Stricto sensu, il désigne le droit produit par le Parlement lui-même, à savoir les « règles édictées et/ou suivies par les assemblées et leurs organes internes4 ». Pour résumer, il s’agit donc tout simplement du « droit qui intéresse les assemblées5 ». Le champ d’analyse du droit parlementaire est relativement étendu, puisqu’il couvre les règles concernant le mandat parlementaire, l’organisation des assemblées et de leurs organes internes, leurs modalités de fonctionnement, les actes qu’elles peuvent prendre, ainsi que les procédures liées à leurs missions de législation et de contrôle du gouvernement6.

Ensemble de normes spécifiques, le droit parlementaire est aussi une discipline qui ne s’est pleinement développée qu’à partir de la Ve République, tout en restant longtemps cantonnée au rang de spécialité mineure7. À partir de 1958, l’importance croissante du cadre normatif régissant le fonctionnement des assemblées et l’instauration du contrôle de constitutionnalité obligatoire des règlements intérieurs des assemblées a permis l’essor du contentieux de la procédure parlementaire8. Le développement important que connaît le droit parlementaire depuis quelques dizaines d’années en France est donc largement dû à sa forte imbrication dans le droit constitutionnel, discipline juridique dont il constitue une part non négligeable9. Longtemps considéré comme le « parent pauvre10 » du droit public, le droit parlementaire jouit d’un engouement particulièrement marqué depuis le début du second quinquennat d’Emmanuel Macron11. Le Parlement se retrouve en effet au premier plan de la scène politique, du fait de la situation de majorité relative à l’Assemblée nationale et de l’instabilité gouvernementale qui en résulte, quatre Premiers ministres s’étant succédé en moins de trois ans.

En dépit de l’intérêt porté au droit parlementaire, son cadre d’analyse n’est que rarement détaillé dans les études juridiques qui lui sont consacrées12. À cet égard, le choix de recourir à la méthode normativiste pour envisager le droit parlementaire doit être rigoureusement étayé et son intérêt clairement exposé, tant un tel positionnement épistémologique est peu courant en ce domaine. Dans de nombreux travaux de recherche doctorale, le droit parlementaire est en effet présenté comme relevant du droit politique13, sans toutefois que ce dernier soit très précisément défini :

Le projet du droit politique, dans sa dimension positive, n’est pas toujours très clair. De ce point de vue, il convient de souligner l’absence totale de définition du droit politique ou, plus exactement, du caractère ou de la nature « politique » du droit14.

Cette qualification de droit politique se fonde sur le fait que le droit parlementaire est empreint de contraintes tant juridiques que politiques et, par voie de conséquence, se trouve généralement abordé autant à travers l’étude de la vie parlementaire que de ses normes juridiques (I). Si l’importance accordée aux pratiques parlementaires et le caractère peu contraignant des règlements intérieurs inclinent à penser la matière dans une perspective politique, il apparaît au moins tout aussi pertinent d’analyser ces particularités d’un point de vue juridique (II).

I. Une analyse fréquente du droit parlementaire en tant que droit politique

Avant d’être reconnu comme une discipline à part entière, le droit parlementaire a été principalement abordé par les praticiens travaillant quotidiennement au sein des assemblées. Davantage confrontés aux pratiques parlementaires qu’aux quelques règles internes de fonctionnement qui pouvaient alors exister, ceux-ci ont été naturellement amenés, dans leurs études consacrées au Parlement, à mettre l’accent sur les questions politiques au détriment des questions juridiques (A). Or, si de manière indéniable, le droit parlementaire suppose de mettre en perspective la théorie et la pratique, l’assimilation du droit parlementaire à un droit politique pose question dès lors qu’une telle conception peut conduire à considérer sur le même plan des normes relevant du droit et des pratiques n’en relevant pas – voire à faire primer ces dernières sur les premières –, ce qui n’est pas sans présenter quelques difficultés (B).

A. Une discipline conçue par des praticiens exacerbant sa dimension politique

À l’origine, le Parlement n’était étudié que par les praticiens15, bien davantage d’ailleurs par les administrateurs chargés d’en assurer le fonctionnement régulier que par les élus des assemblées. Les premiers ouvrages relatifs à la pratique parlementaire ont été rédigés à la fin du xviiie siècle au Royaume-Uni par le clerc de la Chambre des communes, homologue britannique du secrétaire général de l’Assemblée nationale16. Le Traité des lois, privilèges, procédures et usages du Parlement d’Erskine May, qui a réalisé l’ensemble de sa carrière au Parlement britannique, demeure l’ouvrage de référence en matière de procédures parlementaires depuis sa première parution en 1844, non seulement outre-Manche mais aussi dans plusieurs États du Commonwealth17. Aux États-Unis, l’auteur du premier ouvrage relatif aux procédures parlementaires n’est autre que Thomas Jefferson, qui a ainsi synthétisé les enseignements de son expérience pratique en tant que président du Sénat de 1797 à 1801, avant de devenir par la suite le troisième chef d’État de ce qui n’était encore qu’une jeune nation18. L’expression de « droit parlementaire » est d’ailleurs apparue pour la première fois en 1814 dans la traduction en français de cette publication19.

En France, les premières études parlementaires sont l’œuvre des secrétaires généraux successifs de la présidence de la Chambre des députés20, avant que des professeurs de droit tels que Joseph Barthélemy ou Marcel Prélot ne s’intéressent de près à la matière parlementaire21. À cet égard, le professeur autrichien Josef Redlich fait figure de précurseur, avec la publication en 1905 d’un ouvrage relatif à la procédure parlementaire britannique22. Si la recherche allemande portant sur le Parlement a été marquée pendant de nombreuses années par le normativisme23, l’ouvrage Parliament in the German Political System de Gerhard Loewenberg, paru en 196724, marque un certain retour à une analyse empirique du Bundestag. Au Royaume-Uni, les études relatives au Parlement ne sont pas l’œuvre de juristes mais l’apanage de politistes, au premier rang desquels Philip Norton, Professor of Government et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet25. Cette approche politiste de la matière parlementaire est principalement liée au fait que le parlementarisme s’est développé au départ de manière empirique, en se fondant sur le régime représentatif anglais26.

Le fait que l’étude des procédures parlementaires a été initialement l’affaire de praticiens a conduit ces derniers à accorder une place de premier choix à l’analyse des comportements, des stratégies, des jeux et enjeux politiques qui animent en pratique les assemblées parlementaires, terrain d’étude privilégié des politistes, qui leur ont emboîté le pas. Lorsque les publicistes institutionnalistes de tradition française s’y sont intéressés, ceux-ci ont été souvent conduits à faire primer « l’analyse de la pratique du pouvoir […] sur celle des normes qui l’encadrent27 », à l’inverse par exemple de certains de leurs collègues allemands28. Or une telle approche consistant à appréhender le droit parlementaire comme droit politique soulève certaines interrogations.

B. Une approche du droit parlementaire présentant des difficultés pratiques

Envisager le droit parlementaire comme droit politique relève d’une conception ancienne, notamment illustrée par le célèbre Traité de droit politique, électoral et parlementaire d’Eugène Pierre paru en 189329. Ce qui apparaît logique quand ces travaux sont issus de l’expérience de praticiens l’est toutefois beaucoup moins lorsqu’ils sont menés par des juristes qui, du fait de l’importance des pratiques, abordent avant tout le droit parlementaire à travers l’étude de phénomènes ou dynamiques d’ordre politique. Dans la grande majorité des études de droit parlementaire, la méthode d’analyse retenue n’est pas précisément déterminée et encore moins justifiée, ce qui peut s’expliquer par la difficulté pour les juristes de caractériser la diversité des sources juridiques de cette branche particulière du droit constitutionnel. Le droit parlementaire se compose en effet de règles issues de la Constitution, des lois organiques et des règlements intérieurs des assemblées mais aussi, selon la doctrine majoritaire, de coutumes, pratiques et autres usages, qui conféreraient ainsi à la matière un caractère particulièrement vivant.

Cette conception du droit parlementaire pose cependant question d’un point de vue juridique lorsqu’elle conduit à considérer sur le même plan le droit et le non-droit, comme, par exemple, une disposition de règlement intérieur et une pratique parlementaire contra legem. Ne pas souscrire à une approche de droit politique du droit parlementaire n’empêche pas néanmoins de reconnaître, à la suite de Julie Benetti, que « l’étude de la pratique et des rapports entre les acteurs est un passage obligé pour tout chercheur qui s’intéresse au Parlement30 ». Le choix de recourir à la méthode normativiste pour aborder le droit parlementaire, loin de rester cantonné à la seule analyse des normes écrites, implique d’appréhender le droit parlementaire dans l’ensemble de ses composantes31, en considérant les pratiques, précédents et autres usages d’un point de vue juridique. Tout autant que les méthodes relevant du droit politique, la méthode normativiste embrasse donc cette multiplicité d’éléments.

S’il est primordial de prendre pleinement en compte les pratiques parlementaires, les aborder sous un angle juridique présente l’avantage de discerner clairement chaque règle écrite de son application pratique, juridiquement valide ou non valide32. Les pratiques parlementaires doivent en définitive être analysées pour ce qu’elles sont, à savoir des données factuelles correspondant à l’être et distinctes du devoir être incarné par la norme juridique33. Dès lors que le droit parlementaire appelle à une confrontation entre les normes juridiques qui le constituent et la pratique, la méthode normativiste implique de juger la pratique à l’aune des règles qui la concernent, et non l’inverse.

Dans une logique opposée, les tenants du droit politique affirment que le droit constitutionnel – et, par extension, le droit parlementaire –,

loin d’opposer les phénomènes juridiques aux questions politiques, […] ne prend toute sa signification qu’en se plaçant à leur point de convergence, lorsqu’il est pleinement appréhendé comme droit politique ; lorsque la règle est comprise à la lumière de sa pratique, de son histoire, de son soubassement philosophique : à la lumière de cette culture, en un mot, qui seule lui donne son véritable sens34.

La prépondérance des pratiques au sein des assemblées a ainsi conduit la majorité de la doctrine juridique à concevoir l’étude de la matière parlementaire « au carrefour entre deux disciplines, la science politique et le droit »35. À cet égard, qualifier le droit parlementaire de droit politique est justifié par le fait qu’il est indissociable de la vie parlementaire et de ses pratiques politiques36 et que, plus largement, le processus d’élaboration du droit est politique37. Dans son cours de droit parlementaire français, Marcel Prélot affirme que si « le droit parlementaire est un droit », il constitue avant tout « une partie du “droit constitutionnel politique” »38. Or, assimiler le droit parlementaire à un droit politique conduit à y intégrer une série de phénomènes purement politiques, tels que le fait majoritaire39, voire certaines pratiques contraires au droit parlementaire écrit. Le glissement disciplinaire est encore plus marqué si l’on suit Pierre Avril qui, confronté à l’étendue des pratiques parlementaires, suggère aux juristes d’oublier « un instant le droit pour jeter le regard du sociologue sur les assemblées d’aujourd’hui40 ».

Par conséquent, la volonté de proposer une approche distincte de la démarche empirique généralement adoptée doit conduire à reconsidérer le droit parlementaire en partant de l’analyse des règles relatives aux assemblées, principalement formalisées au sein de leur propre règlement intérieur, en complément des dispositions constitutionnelles. Opter pour la méthode normativiste doit permettre de distinguer clairement le droit des assemblées de sa pratique et, au-delà, investir pleinement la matière parlementaire, qui a longtemps échappé au juriste au profit de la science politique41. Le recours à cette méthode offre également l’occasion de cerner plus précisément les contours du droit parlementaire.

II. Une analyse normativiste du droit parlementaire pour en identifier ses particularités

De manière générale, la méthode normativiste consiste à envisager le droit comme un système de normes « globalement efficaces et incluant des règles de sanction au sens strict, c’est-à-dire des règles selon lesquelles la violation d’une autre règle du système entraîne, en dernier lieu, l’obligation d’exercer un acte de contrainte42 ». Or le droit parlementaire ne prévoit pas toujours de sanctions particulières et ne constitue pas, dès lors, un système de normes globalement efficaces. Par conséquent, aborder la matière parlementaire dans une perspective strictement juridique représente un défi tout à fait digne d’intérêt, au regard des difficultés théoriques qu’elle présente.

Adopter une telle approche normativiste conduit en effet à interroger sous un angle original certaines spécificités du droit parlementaire, en particulier le développement important de pratiques en marge du droit parlementaire écrit (A) et le caractère faiblement coercitif des règlements des assemblées (B).

A. Des pratiques largement développées en marge du droit parlementaire écrit

La coutume, considérée comme omniprésente au sein des assemblées parlementaires43, pourrait être définie comme une « règle de droit, en général non écrite, qui prête à une pratique constante et répétée un caractère juridique contraignant, reconnu par les intéressés eux-mêmes44 ». Elle se distinguerait ainsi des simples pratiques, dans la mesure où elle suppose la réitération d’une même pratique pendant une durée significative. Le développement important des coutumes parlementaires s’expliquerait par le fait qu’elles constitueraient un moyen de pallier les « lacunes » du droit parlementaire, dont les règles écrites laisseraient une place importante aux situations imprévues. Or, cette « incomplétude normative », à l’instar de l’idée de « lacune », apparaît inconcevable juridiquement si l’on adopte une position positiviste cohérente selon laquelle les systèmes normatifs, quels qu’ils soient, sont des ensembles complets45.

Surtout, la coutume est poïétiquement indéterminée en raison de l’impossibilité de déterminer le nombre d’occurrences à partir duquel une pratique parlementaire peut être considérée comme une norme valide46. Bien que généralement respectée la plupart du temps par les membres des assemblées, la coutume parlementaire ne présente aucune garantie de constance juridique. Une pratique parlementaire est susceptible d’évoluer soudainement et peut alors entrer en contradiction avec une coutume pourtant reconnue comme telle jusqu’alors. En outre, la répétition d’une pratique suivie constamment par les parlementaires et pendant une période significative ne suffit pas nécessairement à rendre valide une coutume parlementaire. En effet, la « signification subjective des actes qui fondent la coutume ne peut être interprétée comme une norme objectivement valable que si une norme supérieure institue la coutume comme fait créateur de normes47 ». À partir du moment où la coutume parlementaire n’est pas explicitement reconnue comme une forme normative à part entière au sein d’un système juridique, celle-ci ne correspond donc pas à une norme juridique mais à une simple pratique.

Parmi l’ensemble des pratiques parlementaires, il est néanmoins possible de distinguer plusieurs catégories, au premier rang desquelles les pratiques contra legem. Ces dernières neutralisent des dispositions formelles du règlement mais subsistent malgré tout, en l’absence de contrôle opéré sur leur conformité juridique. Tel a été le cas par exemple de la pratique de la délégation de vote. Pendant longtemps en France, il était courant pour de nombreux députés de déléguer leur vote à un seul membre de leur groupe, en complète violation de l’article 64 du Règlement de l’Assemblée nationale et de l’article 27 alinéa 3 de la Constitution, qui dispose que « nul ne peut recevoir délégation de plus d’un mandat ». Cette pratique contra legem, qui permettait le vote en masse des absents48, a perduré jusqu’à ce que le président Séguin décide d’y mettre un terme en 1993.

Tel est encore le cas en Espagne de la pratique de dépôt des amendements au-delà du délai prévu. Au Congrès des députés, lorsque des amendements sont examinés au cours de l’examen d’une commission parlementaire mais ne sont pas repris dans son texte final, les groupes parlementaires souhaitant les défendre en séance plénière sont tenus de les communiquer par écrit au président de l’assemblée dans les 48 heures après la conclusion des travaux de la commission, conformément à l’article 117 du règlement intérieur. En dépit de la clarté de cette règle écrite, il peut arriver qu’un groupe se fourvoie dans le calcul des délais et transmette de tels amendements après l’expiration de la date limite de dépôt. La Conférence des présidents accepte alors d’admettre ces amendements, sauf si un groupe s’y oppose, ce qui n’est généralement pas le cas. Bien que courant, cet usage est totalement contraire au règlement intérieur du Congrès des députés.

Ces deux exemples illustrent ainsi le paradoxe juridique du droit parlementaire, qui tient au fait que la violation d’une règle écrite n’est pas toujours sanctionnée, quand bien même celle-ci respecte à la fois les exigences des normes lui étant supérieures et les conditions particulières des normes de production de normes. Plus grave, l’existence de ces pratiques contra legem est même légitimée par certains auteurs, qui admettent des interprétations contraires au règlement intérieur « dans la mesure où l’organisation des travaux et des débats relève très largement de l’autodiscipline ou de l’autorégulation49 ». Un tel raisonnement n’est pourtant pas tenable juridiquement, dès lors que les pratiques contra legem enfreignent des dispositions du règlement intérieur de l’assemblée adoptées par ses membres et qu’ils sont normalement tenus de respecter.

Si les pratiques contra legem ne sont pas admissibles par le droit parlementaire, tous les autres types de pratiques peuvent être en revanche pris en compte lorsqu’ils viennent compléter sans les contredire les normes écrites du droit parlementaire. Les pratiques praeter legem, supposées intervenir « dans le silence de la loi », ne sont que de simples convenances, des règles de conduite purement informelles qui ne constituent pas une partie intégrante du droit parlementaire strictement entendu. Il en est de même pour les pratiques secundum legem qui, en tant que « sources dérivées d’application du droit écrit50 », précisent la mise en œuvre de dispositions du règlement intérieur. Bien que non prévu par les normes de production de normes, le recours à ces pratiques et usages parlementaires est particulièrement courant au sein des assemblées. La grande importance des pratiques dans le quotidien d’un Parlement est notamment due au fait que leur absence de reconnaissance normative leur permet d’échapper à une censure éventuelle par le juge constitutionnel, qui ne peut intervenir qu’à partir du moment où ces pratiques se retrouvent intégrées au règlement intérieur.

Étudier le droit parlementaire à partir de ses normes écrites n’est pas sans poser de difficultés, en particulier au regard du système britannique qui, contrairement à de nombreux autres systèmes juridiques, ne prévoit pas de modalités particulières de production de normes. La Constitution, formée par la pratique depuis des siècles et qui manifeste ainsi l’exception britannique51, repose en effet essentiellement sur des accords peu formalisés et ambigus. Cette absence de formalisation constitutionnelle, qui s’explique par l’inexistence d’une procédure d’édiction spéciale distincte de celle régissant la procédure législative ordinaire, ne permet pas de déterminer clairement les différentes formes normatives possibles du système. À cet égard, même l’habilitation du Parlement britannique à œuvrer en matière législative n’est fondée que sur une « convention de la Constitution52 », qui n’est admise qu’en l’absence de règles formalisées précisant cette compétence. Cette convention ne correspond en réalité qu’à une simple règle sociale dont le non-respect n’est pas juridiquement sanctionné53 et dont la production n’est prévue par aucune norme juridique. Cette indéterminabilité est étrangère à l’acception selon laquelle une norme, dans un ensemble juridique donné, est valide ou non valide. En dépit de cela, les coutumes, conventions et pratiques, dépourvues de force légale mais largement acceptées par les acteurs politiques, régissent une part importante du fonctionnement du Parlement britannique, aux côtés des règlements intérieurs (Standing Orders) de chaque Chambre, qui peuvent être modifiés ou suspendus par un simple vote à la majorité des parlementaires54. À défaut d’une détermination plus précise des formes normatives prévues par l’ordre juridique, il est donc indispensable d’intégrer à toute analyse de droit parlementaire britannique les conventions de la Constitution et autres pratiques, qui constituent « la charpente même de la Constitution anglaise55 ».

Finalement, la place importante aménagée aux pratiques ne constitue pas la seule spécificité du droit parlementaire, dans la mesure où les règlements intérieurs des assemblées posent également question d’un point de vue juridique. Ils ne prévoient pas de dispositif suffisamment à même de sanctionner leur éventuelle violation, et ce, bien qu’ils se composent d’un ensemble de normes écrites adoptées selon une procédure déterminée.

B. Des règlements intérieurs des assemblées peu coercitifs

Au sein de chaque assemblée, le corpus de règles contenu dans le règlement intérieur est significatif. Ces règles propres au Parlement constituent l’expression juridique essentielle de son autonomie. À l’instar de la place importante des pratiques, les règlements des assemblées – dont le respect est loin d’être systématique – correspondent à une autre particularité du droit parlementaire qui mérite d’être analysée à partir de la méthode normativiste. L’autonomie parlementaire dont disposent les assemblées leur permet de « s’affranchir des règles de droit commun pour obéir à leurs règles propres56 », réunies en particulier dans leur règlement intérieur. Alors que ce droit d’organisation autonome du Parlement n’est mentionné que de manière indirecte dans la Constitution française57, il est par exemple clairement garanti par la loi fondamentale allemande, dont l’article 40 al. 1er indique que le Bundestag « établit lui-même son règlement intérieur ». Une telle autonomie réglementaire est particulièrement importante, en ce qu’elle permet aux assemblées de déterminer librement leurs procédures internes dans le respect des normes constitutionnelles.

Le règlement intérieur du Parlement a ceci de particulier qu’il est adopté à la fois par et pour ses propres membres. En d’autres termes, l’ensemble des dispositions qu’il contient sont des normes dont les organes de production en sont également les destinataires exclusifs. Les parlementaires adoptent ainsi des normes parlementaires autoréférentielles qui confèrent une forte autonomie normative à chaque assemblée58. Toutefois, l’importance de cette autonomie normative et institutionnelle est tempérée par le fait que le règlement intérieur n’a pas en lui-même valeur constitutionnelle, comme a pu le confirmer le Conseil constitutionnel en 197859. Suivant cette logique, il a pu être affirmé que le règlement intérieur de chaque assemblée s’intercale « entre la légalité constitutionnelle qu’il est naturellement censé respecter et les parlementaires auxquels il s’applique directement60 ».

Or, le rang hiérarchique des règlements intérieurs et, plus généralement, le rang d’une norme juridique ne peuvent nullement se situer entre une catégorie de normes et une catégorie d’individus. Les règlements intérieurs constituent en réalité une catégorie normative à part entière et se distinguent nettement d’autres règles relatives aux assemblées et qui sont de rang constitutionnel. En effet, s’ils demeurent les « sources les plus directes et les plus riches du droit parlementaire61 », les règlements intérieurs ne régissent pas seuls le fonctionnement interne des assemblées. En 1958, certaines dispositions qui figuraient auparavant dans le règlement des assemblées ont été transposées dans la Constitution française et des lois organiques, dont certaines dispositions sont désormais consacrées à des aspects essentiels de la procédure parlementaire. Cette incorporation de règles parlementaires dans la Constitution n’a pas été aussi importante à l’étranger, comme en Allemagne, où l’autonomie parlementaire demeure très forte62.

De manière générale, les règlements des assemblées s’avèrent assez peu coercitifs. Les parlementaires peuvent être amenés à prendre des libertés à leur égard, allant jusqu’à développer des pratiques contraires à certaines règles écrites, ce qui n’est nullement admissible d’un point de vue normatif et demeure fort heureusement assez rare63. Du reste, ces actes internes des chambres, « par leur nature même, ne sont pas susceptibles d’affecter les citoyens pour qui le respect plus ou moins strict du règlement est sans importance64 ». Au nom de l’autonomie parlementaire, le juge constitutionnel ne sanctionne en effet la violation des procédures parlementaires que lorsqu’elle touche à des règles constitutionnelles, tout en refusant en revanche de contrôler l’application du règlement intérieur par les chambres parlementaires65. Les Sages de la rue Montpensier laissent ainsi fréquemment non sanctionnée la violation de règles de procédure par des parlementaires qui les ont pourtant directement adoptées. Le Conseil constitutionnel ne contraint donc généralement pas les assemblées parlementaires de respecter leurs propres règles internes, estimant que « la seule méconnaissance des dispositions réglementaires ne saurait avoir pour effet de rendre la procédure législative contraire à la Constitution66 ».

À défaut de contrôle juridictionnel, le président de l’assemblée est la seule autorité qui semble à même de faire respecter le règlement intérieur. Cependant, son rôle d’arbitre des débats parlementaires n’est constaté que par la doctrine67 et non précisé par des règles juridiques. Chargé de diriger les débats de l’assemblée, le président doit non seulement faire preuve d’impartialité68 mais aussi veiller à la bonne application du règlement intérieur. Ce dernier peut d’ailleurs être régulièrement sollicité à cet égard par les parlementaires par l’intermédiaire d’une demande de rappel au règlement, qui consiste à revenir sur un point de la procédure en cours. Cet outil procédural, censé permettre aux parlementaires d’exiger le respect des règles procédurales, se retrouve cependant souvent détourné de son objectif. Ce moyen de s’assurer du respect du droit parlementaire en pratique est en effet régulièrement utilisé « par abus, pour engager une polémique ou donner à son auteur l’occasion d’une intervention hors tour ou sans rapport avec la discussion69 ».

En outre, l’interprétation par le président de l’assemblée des règles internes de la chambre s’avère parfois moins fondée juridiquement que politiquement70, sans compter que, dans quelques cas plutôt rares, celui-ci peut être amené à prendre une décision contraire au règlement qu’il est pourtant censé garantir71. Bien qu’adoptées par et pour les membres des assemblées, les règles parlementaires issues des règlements de l’Assemblée et du Sénat s’avèrent donc globalement peu contraignantes en pratique.

Ce contrôle minimal de la bonne application du règlement intérieur par les assemblées parlementaires a pour conséquence de relativiser fortement la sanction juridique en droit parlementaire72. Le caractère peu coercitif des règlements des assemblées contraste avec les ordres juridiques dans lesquels ils s’inscrivent et souligne cette particularité, qui réside justement dans le fait que le droit parlementaire ne dispose pas des moyens de garantir les motifs pour lesquels il est adopté. Par conséquent, il importe de bien distinguer la norme en tant que telle « du respect effectif qui lui est accordé par ses destinataires comme du sentiment d’être obligé qu’ils éprouvent éventuellement73 ». Les parlementaires ne se montrent en effet pas toujours respectueux de leurs propres règles internes qu’ils ont pourtant eux-mêmes édictées, là encore en se fondant sur l’autonomie dont ils bénéficient.

*

Étudier le droit parlementaire au moyen de la méthode normativiste conduit à envisager le Parlement dans une perspective bien distincte du droit politique. Ces deux approches conduisent en définitive à apporter des réponses contrastées à deux questions essentielles en droit parlementaire, formulées par Pierre Avril en ces termes : « Comment s’articulent les différentes normes applicables au Parlement ? Quelle est la valeur des pratiques qui ne se fondent pas sur un texte74 ? » À cet égard, la méthode normativiste permet d’évaluer clairement les pratiques à partir des règles parlementaires et de caractériser précisément certaines particularités propres à cette discipline qui, de prime abord, « ne paraît pas répondre aux canons de la rigueur juridique75 ». Tout préalable à l’étude du droit parlementaire suppose aussi, au-delà du choix de la méthode, de décider de s’en tenir à l’analyse du droit national ou au contraire, de recourir au droit comparé.

Aux yeux de certains auteurs, étudier le Parlement dans une dimension comparative apparaît comme une évidence. Dès 1839, le Traité de la confection des lois prévoit un « examen raisonné des règlements suivis par les assemblées législatives françaises, comparés aux formes parlementaires de l’Angleterre, des États-Unis, de la Belgique, de l’Espagne [et] de la Suisse76 », à une époque où le droit comparé n’était pas encore consacré en tant que discipline juridique77. En outre, les traités de droit comparé attestent que la méthode comparative est historiquement liée de manière étroite à l’activité législative, fonction principale de tout parlement78. En dépit de cela, force est de constater que le droit parlementaire fait encore majoritairement l’objet d’études de droit interne et plus rarement de droit comparé, tout du moins au regard du nombre de thèses de doctorat honorées par un prix de l’Assemblée nationale ou du Sénat français79.

Bien qu’il ne constitue nullement un passage obligé, le recours au droit comparé apparaît comme un prolongement logique du choix de l’approche normativiste, en ce que l’intégration de la dimension comparative dans une étude de droit parlementaire suppose un certain effort de conceptualisation. Le droit comparé doit en effet permettre de dégager des concepts communs aux différents systèmes juridiques pour offrir une compréhension plus fine du droit parlementaire. En ce sens, le droit comparé constitue non seulement « l’instrument le plus puissant pour décrire le droit national » de chaque système mais également « le plus important catalyseur de questions théoriques », au sens où il permet de fournir une « interprétation conceptuelle différenciée » des situations respectives des différents ordres juridiques étudiés80. Envisagée en tant que procédé de connaissance81, la méthode comparative s’inscrit donc en complémentarité de la méthode normative pour analyser le droit parlementaire et rendre compte le plus fidèlement possible du fonctionnement pratique des assemblées et des règles qui les encadrent, d’un point de vue résolument juridique.

Notes

1 P. Avril, J. Gicquel et J.-É. Gicquel, Droit parlementaire, Paris, LGDJ, 7e éd., 2023, p. 6. Les Parlements constituent un objet d’étude privilégié de la science politique, comme en témoigne le développement considérable des legislatives studies depuis un demi-siècle, notamment à travers les revues Parliamentary Affairs, Zeitschrift für Parlamentsfragen, Legislative Studies Quarterly ou encore The Journal of Legislative Studies. S. Martin, T. Saalfeld et K. Strøm, The Oxford Handbook of Legislative Studies, Oxford, Oxford University Press, 2014, p. 2. Dans l’Hexagone, après « un réel désinvestissement de la science politique française vis-à-vis de l’objet parlementaire » à partir des années 1980, un regain d’intérêt est constaté à partir de la fin des années 1990. O. Rozenberg et É. Kerrouche, « Retour au Parlement », Revue française de science politique, vol. 59, no 3, 2009, p. 397. Retour au texte

2 A. Lefas, « Les sources du droit parlementaire français », Revue des sciences politiques, no 58, 1935, p. 142. Retour au texte

3 D. Connil, P. Jensel-Monge et A. de Montis, « Droit parlementaire », dans Dictionnaire encyclopédique du Parlement, Bruxelles, Bruylant, 2023, p. 432. Retour au texte

4 Ibid. Retour au texte

5 Extrait du cours de droit parlementaire de Marcel Prélot, cité par L. Hamon, « Une discipline juridique ancienne et nouvelle : le droit parlementaire », Recueil Dalloz, vol. 41, no 7, 1989, p. 294. Retour au texte

6 É. Thiers, « Ontologie du droit parlementaire », dans O. Rozenberg et É. Thiers (dir.), Traité d’études parlementaires, Bruxelles, Bruylant, 2018, p. 171. Retour au texte

7 P. Avril et J. Gicquel, « Le triomphe de “l’entonnoir” », Petites affiches, no 33, 2006, p. 6. Retour au texte

8 Pour une analyse détaillée, voir S. Hutier, Le contrôle de la procédure parlementaire par le Conseil constitutionnel, Bayonne, Institut universitaire Varenne, 2016. Retour au texte

9 La situation a beaucoup évolué depuis les années 1980, où « le droit parlementaire [était] sans doute moins ignoré [que] sous la IIIe ou la IVe République, mais [demeurait] peu connu car sa bonne appréhension nécessit[ait] de pénétrer ce monde clos que constituent les assemblées parlementaires », comme le constataient alors très justement les administrateurs du Sénat Jean Laporte et Marie-José Tulard, dans Le droit parlementaire, Paris, PUF, 1986, p. 3. Retour au texte

10 H. Dreier, « Regelungsform und Regelungsinhalt des autonomen Parlamentsrechts », Juristenzeitung, no 7, 1990, p. 311. Retour au texte

11 Ce « regain parlementaire » est notable puisque, de l’aveu même d’un des deux professeurs « pionniers » du droit parlementaire sous la Ve République, « on n’a jamais tant discuté et popularisé la Constitution et les Règlements des assemblées », J. Gicquel, « Préface », dans D. Connil, P. Jensel-Monge et A. de Montis (dir.), Dictionnaire encyclopédique du Parlement, op. cit., p. 10. Retour au texte

12 Le cadre épistémologique de la recherche, en particulier le choix de son cadre d’analyse, n’est précisé en détail que dans quelques thèses de doctorat en droit parlementaire, notamment celle de Chloë Geynet-Dussauze, L’obstruction parlementaire sous la Ve République : étude de droit constitutionnel, Paris, Institut francophone pour la justice et la démocratie, 2020, p. 24-28. Qu’il soit permis de renvoyer également à l’introduction de la thèse de doctorat de l’auteur, dont le présent article est d’ailleurs inspiré : B. Ridard, L’encadrement du temps parlementaire dans la procédure législative. Étude comparée : Allemagne, Espagne, France, Royaume-Uni, Bayonne, Institut universitaire Varenne, 2018, p. 40-61. Retour au texte

13 J. Benetti, Droit parlementaire et fait majoritaire à l’Assemblée nationale sous la Ve République, thèse, université Paris 1, 2005, p. 28 ; A. Fourmont, L’opposition parlementaire en droit constitutionnel. Étude comparée : France-Allemagne, Paris, LGDJ, 2019, p. 518 ; C. Geynet-Dussauze, L’obstruction parlementaire sous la Ve République, op. cit., p. 24 ; A. de Montis, La rénovation de la séance publique du Parlement français. Étude sur l’efficacité politique de la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, Paris, Dalloz, 2016, p. 24 ; C. Vintzel, Les armes du gouvernement dans la procédure législative : Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni, Paris, Dalloz, 2011, p. 42. Retour au texte

14 X. Magnon et A. Vidal-Naquet, « Le droit constitutionnel est-il un droit politique ? », Les Cahiers Portalis, vol. 6, no 1, 2019, p. 113. Retour au texte

15 Une exception est relevée au xviiie siècle, puisque des cours relatifs aux règles parlementaires « devant être décemment suivies pour créer de bonne lois » ont alors été dispensés dans les universités prussiennes de Halle et Francfort-sur-l’Oder. H. Schneider, Gesetzgebung, Heidelberg, C. F. Müller, 3e éd., 2002, p. 1. Retour au texte

16 J. Hatsell, Precedents of Proceedings in the House of Commons, under Separate Titles: with Observations, 4 vol., Londres, Dodsley, 1781 ; E. May, Treatise on the Law, Privileges, Proceedings and Usage of Parliament, Londres, Charles Knight & Co., 1844. Retour au texte

17 D. Natzler et M. Hutton (dir.), Erskine May’s Treatise on the Law, Privileges, Proceedings and Usage of Parliament, Londres, Butterworths-LexisNexis, 25e éd., 2019. Retour au texte

18 T. Jefferson, A Manual of Parliamentary Practice for the Use of the Senate of the United States, Washington, Harrison Smith, 1801. Retour au texte

19 T. Jefferson, Manuel du droit parlementaire, ou Précis des règles suivies dans le Parlement d’Angleterre et dans le Congrès des États-Unis, L. A. Pichon (trad.), Paris, Nicolle, 1814. Retour au texte

20 Ph. Valette et B. Saint-Marsy, Traité de la confection des lois, Paris, Joubert, 1839 ; J. Poudra et E. Pierre, Traité pratique de droit parlementaire, Paris, Baudry, 1878 ; E. Pierre, Traité de droit politique, électoral et parlementaire, Paris, Librairies-Imprimeries réunies, 1893. Retour au texte

21 J. Barthélemy, Essai sur le travail parlementaire et le système des commissions, Paris, Delagrave, 1934 ; M. Prélot, Droit parlementaire français, Paris, Les cours de droit, 4 fasc., 1957-1958. Retour au texte

22 J. Redlich, Recht und Technik des englischen Parlamentarismus. Die Geschäftsordnung des House of Commons in ihrer geschichtlichen Entwicklung und gegenwärtigen Gestalt, Leipzig, Dunker & Humblot, 1905. Retour au texte

23 H. Schöne et J. von Blumenthal, « Parlamentarismus im politischen System der Bundesrepublik Deutschland. Rückblick und Ausblick nach 40 Jahren », dans H. Schöne et J. von Blumenthal (dir.), Parlamentarismusforschung in Deutschland, Baden-Baden, Nomos, 2009, p. 9-10. Retour au texte

24 G. Loewenberg, Parliament in the German Political System, Ithaca, Cornell University Press, 1967. Retour au texte

25 Ph. Norton, The Commons in Perspective, Oxford, Blackwell, 1985. Du même auteur, notamment : Parliament in the 1980s, Oxford, Blackwell, 1985, Parliament in British Politics, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2005, Reform of the House of Lords, Manchester, Manchester University Press, 2017. Retour au texte

26 Ph. Lauvaux, Le parlementarisme, Paris, PUF, 1997, p. 25. Retour au texte

27 O. Pfersmann, « Préface », dans B. Ridard, L’encadrement du temps parlementaire dans la procédure législative, op. cit., p. XIII. Retour au texte

28 M. Morlok, U. Schliesky et D. Wiefelspütz (dir.), Parlamentsrecht, Baden-Baden, Nomos, 2015. Retour au texte

29 E. Pierre, Traité de droit politique, électoral et parlementaire, op. cit. Retour au texte

30 J. Benetti, « Les rapports entre gouvernement, groupes de la majorité et groupes d’opposition », Jus Politicum, no 6, 2011, p. 83. Retour au texte

31 P. Türk, Les commissions parlementaires permanentes et le renouveau du Parlement sous la Ve République, Paris, Dalloz, 2005, p. 15. Retour au texte

32 Pour une position contraire, affirmant que le « dogmatisme positiviste laisse le constitutionnaliste insatisfait, dès lors qu’il ne peut rendre compte théoriquement d’une réalité qui s’éloigne […] de ce que le texte laisserait prévoir », voir P. Avril, « Les conventions de la Constitution. Une “jurisprudence organique” », dans En hommage à Francis Delpérée : itinéraires d’un constitutionnaliste, Bruxelles, Bruylant, 2007, p. 129-130. Retour au texte

33 X. Magnon, « Orientation théorique et choix méthodologique de l’école aixoise de droit constitutionnel : réflexions et tentatives de reconstruction », dans Renouveau du droit constitutionnel. Mélanges en l’honneur de Louis Favoreu, Paris, Dalloz, 2007, p. 240-241. Retour au texte

34 Extrait de la présentation de la revue Jus Politicum, dont les directeurs sont les professeurs Denis Baranger et Olivier Beaud, URL : https://www.juspoliticum.com/about [consulté le 10 juillet 2025]. Retour au texte

35 J. Benetti, Droit parlementaire et fait majoritaire à l’Assemblée nationale sous la Ve République, op. cit., p. 30. Retour au texte

36 A. Delcamp, « Droit parlementaire et droit constitutionnel », dans J.-Y. Chérot et al. (dir.), Le droit entre autonomie et ouverture. Mélanges en l’honneur de Jean-Louis Bergel, Bruxelles, Bruylant, 2013, p. 128. Retour au texte

37 C. Gusy, « Considérations sur le droit politique », Jus Politicum, no 1, 2009, p. 33. Retour au texte

38 M. Prélot, Droit parlementaire français, op. cit., fasc. 1, p. 5 et 10. Retour au texte

39 « Dans la mesure où il est un fait, le fait majoritaire ne peut être assimilé à une règle, ni même à une loi naturelle de la vie politique », J. Benetti, « L’impact du fait majoritaire sur la nature du régime », Petites affiches, no 138, 2008, p. 20. Retour au texte

40 P. Avril, « Les conditions d’une revalorisation du rôle du Parlement », Cahiers français, no 332, 2006, p. 52. Retour au texte

41 O. Pfersmann, « Préface », dans V. Barbé, Le rôle du Parlement dans la protection des droits fondamentaux. Étude comparative : Allemagne, France, Royaume-Uni, Paris, LGDJ, 2009, p. V. Retour au texte

42 O. Pfersmann, « Droit et justice », Revue de métaphysique et de morale, vol. 33, no 1, 2002, p. 28. Retour au texte

43 « Aucune institution politique n’est plus fortement marquée par la coutume et les conventions que le Parlement », G. Loewenberg, Parlamentarismus im politischen System der Bundesrepublik Deutschland, Tübingen, Wunderlich, 1971, p. 15. Retour au texte

44 J. Poumarède, « Coutume », dans A.-J. Arnaud (dir.), Dictionnaire encyclopédique de théorie et de sociologie du droit, Paris, LGDJ, 2e éd., 1993, p. 118. Retour au texte

45 O. Pfersmann, « Lacunes et complétude », dans D. Alland et S. Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF, 2003, p. 911. Retour au texte

46 « Une catégorie normative est poïétiquement déterminée dans la mesure où la validité d’une norme qui en relève résulte d’un nombre déterminé d’actes de production », O. Pfersmann, « De l’impossibilité de changement de sens de la Constitution », dans Mélanges en l’honneur de Pierre Pactet. L’esprit des institutions, l’équilibre des pouvoirs, Paris, Dalloz, 2003, p. 366. Retour au texte

47 H. Kelsen, Théorie pure du droit, rééd., Paris, LGDJ, 1999, p. 20. Retour au texte

48 Parmi les cas les plus extrêmes, 480 votes ont pu ainsi être formellement enregistrés à l’Assemblée nationale, en dépit de la présence physique de seulement une vingtaine de députés dans l’hémicycle. Le dispositif du vote électronique, instauré en 1959, a largement facilité cette pratique contra legem, puisqu’il suffisait que les quelques parlementaires présents utilisent les clefs personnelles laissées à leur disposition par les membres absents de leur groupe politique. M. Bradshaw, « Les modes de votation », Informations constitutionnelles et parlementaires, no 132, 1982, p. 227. Retour au texte

49 A. Delcamp, « Les règlements des assemblées parlementaires », dans M. Troper et D. Chagnollaud (dir.), Traité international de droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2012, vol. 1, p. 362. Retour au texte

50 M. Laflandre, Les sources du droit parlementaire sous la Ve République, Paris, LGDJ, 1996, p. 49. Retour au texte

51 T. Pasquiet-Briand, La réception de la Constitution anglaise au XIXe siècle. Une étude du droit politique français, Bayonne, Institut universitaire Varenne, 2017. Retour au texte

52 Les « conventions de la Constitution » sont définies comme des règles non écrites organisant « la façon dont les pouvoirs discrétionnaires de la Couronne (ou des ministres en tant que serviteurs de la Couronne) doivent être exercés », A. V. Dicey, Introduction to the Study of the Law of the Constitution, Londres, Macmillan, 10e éd., 1959, p. 361. Je traduis. Retour au texte

53 J. Jaconelli, « Do Constitutional Conventions Bind? », The Cambridge Law Journal, vol. 64, no 1, 2005, p. 164. Retour au texte

54 L’expression désigne à la fois le texte lui-même et chacune de ses dispositions : actuellement constitué de plus de 160 Standing Orders, le règlement de la Chambre des Communes n’était composé que de sept Standing Orders en 1810. Voir M. Rush, Parliament Today, Manchester, Manchester University Press, 2005, p. 164. Retour au texte

55 O. Beaud, « Les conventions de la Constitution. À propos de deux thèses récentes », Droits, no 3, 1986, p. 125. Retour au texte

56 B. Camguilhem, « L’illusoire personnalité juridique des assemblées parlementaires », Revue du droit public, no 4, 2013, p. 870. Retour au texte

57 L’article 61 C énonce simplement que « les règlements des assemblées parlementaires, avant leur mise en application, doivent être soumis au Conseil constitutionnel qui se prononce sur leur conformité à la Constitution », sans indiquer précisément que les assemblées établissent leur propre règlement intérieur. Retour au texte

58 X. Barella, « L’autonomie des assemblées parlementaires », Revue du droit public, no 4, 2013, p. 845. Retour au texte

59 Cons. const., no 78-97 DC, 27 juillet 1978, loi portant réforme de la procédure pénale sur la police judiciaire et le jury d’assises, cons. 3. Retour au texte

60 P. Avril, « Droit parlementaire et droit constitutionnel sous la Ve République », Revue du droit public, no 3, 1984, p. 574-575. Retour au texte

61 M. Prélot, Droit parlementaire français, op. cit., fasc. 1, p. 21. Retour au texte

62 H. J. Mengel, « Die verfahrensmäßigen Pflichten des Gesetzgebers und ihre verfassungsgerichtliche Kontrolle », Zeitschrift für Gesetzgebung, 1990, p. 118 et s. Retour au texte

63 Voir supra les pratiques contra legem en matière de délégation législative en France et de dépôt d’amendement en Espagne. Retour au texte

64 F. Santaolalla López, Derecho parlamentario español, Madrid, Dykinson, 2013, p. 84. Retour au texte

65 O. Beaud, « Ordre constitutionnel et ordre parlementaire. Une relecture à partir de Santi Romano », Droits, vol. 33, no 1, 2001, p. 78. Retour au texte

66 Cons. const., no 84-181 DC, 10-11 octobre 1984, Entreprises de presse. Retour au texte

67 La présidence de l’Assemblée est « responsable du respect de la procédure législative », M. Ameller et G. Bergougnous, L’Assemblée nationale, Paris, PUF, 2e éd., 2000, p. 69. Retour au texte

68 L’article 13 RAN indique simplement que le président « préside les réunions » de l’assemblée. L’article 32 du règlement du Congrès des députés espagnol énonce qu’il « dirige les débats », tandis que l’article 7 du règlement intérieur du Bundestag précise que la direction des débats doit être « équitable et impartiale ». Retour au texte

69 É. Blamont, Le Parlement dans la Constitution de 1958, Paris, Librairies techniques, 1960, p. 21. Retour au texte

70 Un exemple topique en est fourni par le refus du président de l’Assemblée nationale, le 14 septembre 2010, d’accorder la parole à 166 députés de l’opposition pour une explication de vote, justifiant son refus par le fait que les interventions des 23 premiers députés inscrits s’étaient avérées analogues. Or cette restriction de l’exercice du droit de parole n’est prévue par aucun texte. Le Conseil constitutionnel n’a toutefois rien trouvé à y redire, refusant de juger cette interprétation contraire aux exigences de clarté et de sincérité du débat, Cons. const., no 2010-617 DC, 9 novembre 2010, Loi portant réforme des retraites. Retour au texte

71 Le 27 avril 1976, après neuf rappels au règlement de protestation concernant le non-respect du délai de cinq minutes avant le scrutin public, le président Edgar Faure a fait recommencer un vote, ce qui est interdit, A. Martin, Le président des assemblées parlementaires sous la Ve République, Paris, LGDJ, 1996, p.  199. Retour au texte

72 Le règlement intérieur d’une assemblée constitue « le meilleur exemple de la relativité de la sanction juridique en droit parlementaire », selon le grand spécialiste du droit parlementaire espagnol, le professeur Santaolalla López (Derecho parlamentario español, op. cit., p. 44). Retour au texte

73 O. Pfersmann, « Norme », dans D. Alland et S. Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, op. cit., p. 1081. Retour au texte

74 P. Avril, « Droit parlementaire et droit constitutionnel sous la Ve République », op. cit., p. 573. Retour au texte

75 É. Thiers, « Ontologie du droit parlementaire », op. cit., p. 166. Retour au texte

76 Sous-titre de l’ouvrage de Ph. Valette et B. Saint-Marsy, Traité de la confection des lois, op. cit. Retour au texte

77 Après la création de la Société de législation comparée en 1869, l’organisation du premier congrès de droit comparé à Paris en 1900 a été l’occasion d’asseoir les fondements de la discipline. Voir C. Jamin, « Le vieux rêve de Saleilles et Lambert revisité. À propos du centenaire du Congrès international de droit comparé de Paris », Revue internationale de droit comparé, vol. 52, no 4, 2000, p. 733-751. Retour au texte

78 Voir notamment E. Genzmer, « Über historische Rechtsvergleichung », dans M. Rotondi (dir.), Inchieste di diritto comparato, Padoue, Cedam, 1973, p. 233-254 ; C. Donahue, « Comparative Law before the Code Napoleon », dans M. Reimann et R. Zimmermann (dir.), The Oxford Handbook of Comparative Law, Oxford, Oxford University Press, 2006, p. 3-32 ; K. Zweigert et H. Kotz, An Introduction to Comparative Law, Oxford, Oxford University Press, 1998, 3e éd., cités par F. Rueda, « Les “études de législation comparée” des assemblées parlementaires françaises : une utilisation pédagogique du droit comparé dans le travail législatif ? », dans Ph. Raimbault (dir.), La pédagogie au service du droit, Paris/Toulouse, LGDJ/Presses de l’université Toulouse Capitole, 2011, p. 391. Retour au texte

79 À titre d’exemple, sur vingt-neuf prix de thèse de l’Assemblée nationale décernés entre 2003 et 2016, seuls cinq le furent à des thèses de droit parlementaire comparé stricto sensu, C. Vintzel, « Droit et politique parlementaires comparés », dans O. Rozenberg et É. Thiers (dir.), Traité d’études parlementaires, op. cit., p. 195. Retour au texte

80 O. Pfersmann, « Le droit comparé comme interprétation et comme théorie du droit », Revue internationale de droit comparé, vol. 53, no 2, 2001, p. 287. Retour au texte

81 M.-C. Ponthoreau, Droit(s) constitutionnel(s) comparé(s), Paris, Economica, 2e éd., 2021. Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Basile Ridard, « Étudier le Parlement d’un point de vue juridique », Revue d'étude et de culture parlementaires [En ligne], 1 | 2025, mis en ligne le 05 septembre 2025, consulté le 19 septembre 2025. URL : http://publications-prairial.fr/recp/index.php?id=321

Auteur

Basile Ridard

Maître de conférences en droit public, Équipe de recherche en droit public du centre de recherche droits et perspectives du droit (ERDP-CRDP), Université de Lille