Entre les années 1950 et les années 1980, l’histoire des assemblées et de la vie parlementaire a été un champ relativement délaissé par les chercheurs. Ce trou noir historiographique s’explique, nous semble-t-il, par trois causes principales. La première tient au déficit d’expertise de l’historien confronté aux caractères spécifiques de la vie parlementaire, qui nécessite une réflexion sur le droit et sur la pratique constitutionnelle, administrative et réglementaire, plus accessible aux juristes ou aux historiens du droit. Le deuxième facteur d’explication réside dans l’influence plus ou moins directe de l’école des Annales sur plusieurs générations d’historiens, qui ont eu tendance à dévaloriser une histoire apparaissant comme élitiste, conventionnelle, déconnectée des facteurs économiques et sociaux. Cela explique les réticences encore palpables de certains chercheurs, qui pensent trouver dans la microhistoire, dans l’histoire des sensibilités ou des mentalités collectives, dans l’histoire des représentations ou encore dans la socio-histoire des grilles de lecture plus stimulantes pour la compréhension de notre évolution politique contemporaine. Nous pensons que c’est une fausse querelle, et que la nouvelle histoire parlementaire se nourrit précisément de tous ces champs d’histoire en pleine expansion. Mais il faut se confronter à un troisième champ d’explication, peut-être le plus fondamental, qui nous renvoie à la méconnaissance, voire au discrédit de la vie parlementaire dans l’opinion publique. Depuis la fin du xixe siècle, l’antiparlementarisme, nourri à la fois par l’ignorance et par l’extrémisme, n’a cessé de gangrener le débat politique français. Le divorce croissant entre les élites et les citoyens s’est bien souvent polarisé sur des assemblées jugées élitistes, incompétentes et inefficaces. Et l’évolution des pratiques parlementaires de la Ve République, piégées par la présidentialisation et par l’hypermédiatisation, n’a certainement pas arrangé la perception commune de ce champ historique dévalué. Néanmoins, on peut penser que la reparlementarisation du débat public depuis quelques années, avec l’éclipse plus ou moins durable du fait majoritaire et la remise en question du parlementarisme rationalisé, a contribué à un renouveau d’intérêt pour l’institution parlementaire et son fonctionnement.
I. Une histoire en renouveau
La flamme de l’histoire parlementaire a été entretenue pendant ces trente années « obscures » par d’autres acteurs de la recherche que les historiens proprement dits. À commencer par les acteurs de cette vie parlementaire, tel le député des Bouches-du-Rhône Henry Bergasse1 ou Philippe Séguin, président de l’Assemblée nationale de 1993 à 1997 et qui a consacré une monographie à ses prédécesseurs2. Les fonctionnaires des assemblées n’ont pas été en reste dans cette sauvegarde du patrimoine historique3. Du côté des sciences humaines, les travaux des sociologues comme Mattei Dogan4, des juristes comme Jean-Pierre Marichy5 ou des politologues comme Roland Cayrol6 ont assuré une sorte de transition vers le renouveau épistémologique des trois dernières décennies.
Une relève générationnelle a eu lieu dans le champ des approches juridiques de la vie parlementaire7, dans celui de la science politique8 ou dans celui de la sociologie9, tandis que les travaux de Pierre Rosanvallon10 ou de Bernard Manin11, dans le registre de la philosophie politique, traitaient les concepts de représentation politique et de délibération. Puis sont venus se greffer de nouveaux champs d’approche, tels que les études littéraires12 ou l’ethnologie13, de sorte que l’histoire des assemblées ne pouvait plus ressembler à la caricature qui pouvait la dénigrer quelques décennies plus tôt. Tout récemment, le Dictionnaire encyclopédique du Parlement, publié sous la direction scientifique de Damien Connil, Priscilla Jensel-Monge et Audrey de Montis14, a achevé de donner ses lettres de noblesse aux études parlementaires.
Le point de départ du renouveau historiographique proprement dit est venu de la vaste enquête collective lancée en 1984 par Jean-Marie Mayeur, Jean-Pierre Chaline et Alain Corbin sur les parlementaires de la IIIe République, qui a permis d’aboutir à la constitution d’un fichier rassemblant plus de deux tiers des parlementaires concernés, à la publication d’un ouvrage sur les sénateurs15 et à de nombreuses synthèses régionales16, dont un colloque organisé en 2001 a fait le bilan national. Cette enquête a permis non seulement de relancer l’histoire parlementaire, mais aussi de lui offrir des pistes multiples de renouvellement, explorées par quelques thèses pionnières, aux marges de l’histoire électorale ou de l’histoire sociale du politique17.
C’est pour stimuler cet effort de renouvellement méthodologique et scientifique que le Comité d’histoire parlementaire et politique a été créé en 2002, avec le soutien des deux assemblées et avec la mission essentielle d’animer de façon systématique les recherches consacrées au parlementarisme. De nombreux colloques et journées d’étude ont pris pour objet l’histoire parlementaire, de même qu’un séminaire mensuel et une revue trimestrielle, intitulée Parlement(s). Revue d’histoire politique. Ont été traités dans la revue des thèmes extrêmement variés : des moments parlementaires (no 9 : « Mai 68 en débats » ; no 10 : « La guerre des mots. 14-18 dans les parlements européens » ; hors-série [HS] 4 : « Second Empire » ; no 12 : « À l’heure du coup d’État » ; no 15 : « Parlements et parlementaires de France au xviiie siècle » ; no 31 : « Monarchies censitaires »), des familles parlementaires (HS 5 : « Gaullistes au Parlement sous la Ve République » ; no 6 : « Socialistes au Parlement » ; HS 13 : « Les Républicains et le Parlement en Italie 1861-1994 »), des thématiques de débats (no 30 : « L’invention politique des banlieues à la fin du xxe siècle » ; HS 15 : « Les lois mémorielles en Europe » ; HS 16 : La mort au Parlement » ; HS 17 : « Le Parlement des animaux »), des représentations (no 24 : « Le roman parlementaire » ; no 34 : « Revêtir des idées. Habits, parures et politique en France xvie-xxie siècles » ; HS 18 : « Objets politiques »), des enjeux parlementaires (no 17 : « La diplomatie parlementaire en France après 1945 ») ou encore des approches territoriales (HS 2 : « Politique en Aquitaine. Des Girondins à nos jours ») ou étrangères (no 21 : « Un parlementarisme allemand ? » ; HS 12 : « Vie politique et parlementaire en Espagne xix-xxe siècles »).
Par ailleurs, en tant que revue d’histoire politique, Parlement(s) est rapidement sortie du cadre de la vie parlementaire proprement dite pour s’intéresser à de multiples approches : des enjeux majeurs (no 1 : « L’Europe ! L’Europe ! » ; HS 3 : « Penser et construire l’Europe » ; no 18 : « Science et révolutions » ; no 22 : « Citoyenneté, république et démocratie en France de 1789 à 1989 » ; no 38 : « L’école saisie par le politique xixe-xxie siècles »), les élections (no 2 : « Les urnes de l’Oncle Sam » ; no 4 : « Quarante ans de présidentielles 1965-2005 » ; no 16 : « Élus et élections du 8 février 1871 »), la sociologie politique (no 5 : « Monde rural et politique en Europe » ; HS 7 : « Vie et pratiques politiques en terres méditerranéennes » ; no 8 : « Jeunes en politique » ; no 19 : « Femmes outsiders en politique » ; HS 10 : « Bretagne en politique », no 27 : Une France des sans voix ?), les cultures politiques (no 13 : « L’homme providentiel » ; HS 9 : « L’antiparlementarisme en France » ; no 40 : « Les gauches et l’international au xxe siècle) ou encore l’anthropologie politique (no 23 : « Transgresser en politique », HS 11 : « Amitiés en politique, d’Oreste et Pylade à nos jours » ; no 25 : « Oiseaux de malheur. Annoncer les mauvaises nouvelles » ; HS 14 : « Couples en politique des guerres de Religion à nos jours »).
Les colloques et journées d’étude organisés ou coorganisés par le Comité d’histoire parlementaire et politique ont reflété cette diversité d’approches, alimentée par la collaboration entre historiens, historiens du droit, juristes, politistes, sociologues ou littéraires, ainsi que par les témoignages des acteurs politiques mis à contribution. Ils ont porté aussi bien sur la méthodologie de la recherche (« L’Europe des Parlements. État des recherches en histoire parlementaire », novembre 2012), les institutions elles-mêmes (« La Cinquième République au Parlement », mai 2008, actes publiés par le Sénat ; « Comprendre la Cinquième République 1958-2008 », septembre 2008, actes parus aux Presses universitaires de France [PUF] en 2010), les élections (« Les élections locales sous la Cinquième République », janvier 2009 ; « Les élections législatives et sénatoriales outre-mer 1848-1981) », novembre 2006, actes parus aux Indes savantes en 2010 ; « Les campagnes électorales de 1848 à nos jours », mars 2007 ; « Le Sénat de la Ve République », juin 2009, actes publiés par le Sénat ; « Les secrétariats administratifs des groupes parlementaires », juin 2010, actes sur le site de l’Assemblée nationale ; « Les présidents de l’Assemblée nationale de 1789 à nos jours », novembre 2011), des moments politiques forts (« Front populaire, chocs et contre-chocs 1934-1940 », décembre 2006 ; « Le discours de Jacques Chaban-Delmas sur la Nouvelle Société », septembre 2009, actes publiés en 2010 chez Economica ; « Les Dix décisives 1869-1979 », actes publiés aux PUR en 2022), des familles politiques (« Les échecs du centrisme dans la France des xix et xxe siècles », mars 2004, actes publiés en 2005 par la MSH d’Aquitaine ; « Le Centre national des indépendants et paysans. Archives, mémoires et histoire, juin 2004 ; « Centre et centrisme en Europe aux xixe et xxe siècles, mai 2005, actes publiés chez Peter Lang en 2007 ; « Socialistes au Parlement », décembre 2005, publiés dans la revue Parlement(s) no 6 ; « Hériter en politique. Filiations, transmissions et générations politiques xixe-xxie siècles, juin 2009, actes publiés aux PUF en 2011 ; « Pierre Bérégovoy en politique », mai 2010 ; « Les parlementaires gaullistes du Nord-Ouest 1958-1981 », mai 2011 ; « Tribuns du peuple. Les Gauches au Parlement, de 1870 à nos jours », octobre 2013), des grands débats parlementaires (« La laïcité, des débats, une histoire, un avenir. 1789-1905-2005 », février 2005, actes publiés par le Sénat ; « Les questions sociales au Parlement », mars 2006, actes publiés par le Sénat) ou encore sur l’histoire des représentations (« Caricatures politiques et parlementaires », décembre 2015.)
En contrepoint de la revue et des journées d’étude, le Comité d’histoire parlementaire et politique organise depuis 2004 un séminaire mensuel en partenariat avec le Centre d’histoire de Sciences Po. Ses travaux concernent la vie des parlements, en France et dans le monde, mais aussi plus largement tout le champ politique. Le premier cycle du séminaire, de 2004 à 2007, a proposé une thématique très large (Pouvoirs, institutions et familles politiques en Europe xviiie-xxie siècles) permettant d’explorer les travaux novateurs des historiens, juristes, politistes et sociologues dans ce champ. Le deuxième cycle 2007-2010, intitulé « L’histoire politique en renouveau », a été construit sur des séances réunissant un chercheur présentant un bilan historiographique d’une question donnée, un autre plus novice proposant une étude de cas et un qui a alimenté la discussion à la lumière de sa propre expertise. Les cycles suivants se sont recentrés sur les études parlementaires proprement dites. Le cycle 2010-2011, intitulé « Le Parlement dans tous ses états », a réuni dans chaque séance un chercheur et un praticien de la vie parlementaire. Le cycle 2011-2012 s’est intéressé à l’histoire de l’antiparlementarisme, en étudiant ses temps forts et faibles, ses fondements idéologiques, ses thèmes majeurs, ses lieux, ses groupements et ses individus. Le cycle 2012-2013 s’est ouvert aux parlements du monde. Sans énumérer tous les cycles suivants, dont celui qui s’est intéressé à la question de la laïcité il y a quelques années, on rappellera seulement que le cycle actuel de deux ans 2023-2025 est consacré aux clubs de réflexion et aux think tanks du xixe siècle à nos jours. Il fait intervenir à la fois des chercheurs historiens, politistes ou sociologues mais aussi des responsables de ces think tanks qui témoignent de leur expérience. L’esprit du séminaire est en effet de confronter tant que faire se peut les chercheurs et les praticiens de la vie parlementaire.
II. Les axes du renouvellement
Quels sont les axes majeurs de ce renouveau historiographique auquel le Comité d’histoire parlementaire et politique a essayé de contribuer pendant deux décennies ? Ce sont d’abord des champs considérés comme traditionnels, mais profondément rajeunis par l’interpénétration des sciences sociales. On pense à des approches biographiques18, prosopographiques19, générationnelles20, chronologiques (portant par exemple sur la IIIe République21, sur la Ve22 ou sur les assemblées étrangères23) ou diachroniques24. D’autres champs ont été et sont de plus en plus explorés, notamment grâce à l’émergence des approches fonctionnalistes25 ou grâce à l’apport des autres sciences sociales, telles que l’anthropologie, la lexicographie26, les sciences du langage ou de la communication27.
Si l’on prend l’exemple particulièrement probant de la thèse consacrée par Christophe Bellon à Aristide Briand dans la première phase de sa vie parlementaire, on constate que la perspective classiquement biographique cède le pas à une ambition tout à fait novatrice qui emprunte à la fois à l’histoire des cultures politiques et à celle des institutions au sens le plus noble du terme, nourrie par les apports de la science politique, de la lexicologie et du droit parlementaire. D’où une problématique clairement dessinée dans l’introduction et qui vise à confronter le rôle de la délibération, essentiel dans le processus institutionnel de la IIIe République, au fait majoritaire issu de la pratique politique du début xxe siècle et indissociable de l’émergence des partis. Il nous montre comment Aristide Briand construit une gouvernance à partir de la dynamique de la délibération, proposant une forme d’adaptation à la fois subtile et efficace du régime d’assemblée. Elle s’articule autour de la notion de « contrat majoritaire », mise à l’épreuve par les difficultés d’application de la loi sur la Séparation, tant sur le terrain des légitimités normatives que sur celui des péripéties politiques (la querelle des Inventaires, crise parlementaire de l’été 1906). L’approche fonctionnaliste de la vie parlementaire est à la fois valorisée et dépassée par d’autres enjeux qui apparaissent avec force, tels que le débat idéologique et philosophique sur la laïcité, le tropisme ou la conjonction des centres, la possibilité d’une gauche réformiste confrontée au socialisme unifié. Ce sont des éléments récurrents de la vie politique française pour lesquels cette thèse savante, sur la base d’une approche biographique apparemment traditionnelle, apporte un éclairage tout à fait neuf.
Selon une tout autre approche, au croisement de l’histoire sociale, de l’histoire culturelle et de l’histoire politique, la thèse consacrée par Bibia Pavard aux enjeux de la contraception et de l’avortement dans la société française des années 1960 et 1970 se présente, de façon presque étonnante, comme une magistrale leçon sur la mécanique parlementaire sous la V République. Elle s’intéresse à la phase prospective, c’est-à-dire aux stratégies de publicisation, de personnification, de conviction, d’intermédiation ou de rassemblement qui sont décisives pour la préparation du processus législatif proprement dit. Puis apparaît la véritable mécanique parlementaire : la fabrication de la loi, l’expertise des fonctionnaires d’assemblée, des cabinets ministériels ou des auditions en commissions spécialisées, le rôle déterminant du rapporteur, la surpolitisation des débats parlementaires qui génère le télescopage entre des logiques opportunistes, partisanes, idéologiques, voire genrées, les modalités de publicisation et d’incarnation de ces débats, l’émergence de figures d’experts parlementaires favorables ou hostiles à la libération féminine, les débuts du procédé du mur d’amendements, appelé à un grand succès par la suite, enfin la mise en évidence des rapports de force entre les pouvoirs de l’Assemblée, du Sénat et du Conseil constitutionnel, qui rend l’étude de la vie parlementaire beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît. À côté du fil conducteur de la thèse, qui montre à la fois l’appropriation d’une dynamique de réforme sociétale par les idées et les groupes porteurs des valeurs féministes, cette thèse constitue une contribution majeure à l’historiographie du processus légiférant.
Parmi ces champs novateurs, celui de la délibération parlementaire a été l’un des mieux défrichés depuis une décennie. La place et les fonctions politiques de l’éloquence28, le discours comme matériau historique et littéraire29, le débat comme moment politique et procédural30 ont fait l’objet de travaux importants, même si beaucoup reste à faire. De même pour l’approche ethno-historique, qui laisse entrevoir des pistes prometteuses31, ou pour l’histoire de la représentation et de la médiatisation de la vie parlementaire, qui n’en est qu’à ses balbutiements32. Un champ de recherches s’ouvre, au confluent de l’histoire politique et de l’histoire culturelle, pour découvrir les corpus littéraires, journalistiques, iconographiques ou audiovisuels associés à la vie parlementaire.
On peut d’ailleurs y ajouter un thème complémentaire, qui est celui de l’antiparlementarisme, sans doute aussi vieux que le parlementarisme, même si le Trésor de la langue française en attribue la paternité à Maurice Barrès (1912). On a beaucoup écrit sur ce thème, et de nombreux travaux ont eu pour sujet des moments ou des familles antiparlementaires. Il manque néanmoins une historicité, une généalogie qui permette de saisir l’écart possible de la perception même du mot depuis deux siècles33, en soulignant ses fondements idéologiques, ses filiations, ses variations, ses degrés, ses milieux privilégiés (élitiste ou populiste), ses temps forts et ses temps faibles, ses thèmes récurrents (le coût de la représentation parlementaire, la médiocrité et l’absentéisme des élus, la corruption et le parasitisme, la confiscation du pouvoir par les élites, la critique de la gérontocratie, de la reproduction et de la transmission du pouvoir, et, plus près de nous, les critiques sur la non-représentativité des élus en matière de genre ou de diversité) ou encore ses formes d’expression, ce qui nous ramène à l’omniprésence de l’image dans le champ d’exploration. En outre se profile l’idée d’une approche comparatiste, qui étendra les pistes de recherche au domaine européen, voire mondial. C’est l’un des enjeux majeurs de l’historiographie parlementaire en devenir.
Comme d’autres champs ou sous-champs historiographiques, l’histoire parlementaire est en effet en train de s’intégrer au « transnational turn ». Depuis quelques années, des travaux d’historiens se tournent vers la pratique parlementaire dans les pays de faible tradition démocratique34. Les travaux qui prennent en compte la dimension comparatiste de cette histoire transnationale sont encore peu nombreux et émanent pour la plupart de juristes ou de politistes35. Mais un projet européen a pris forme au sein du réseau EuParl.Net, qui tend dans un premier temps à réaliser une histoire conceptuelle du parlementarisme européen. Le point de départ consiste dans la construction d’une sorte d’idéal-type à quatre dimensions : la représentation, la délibération, la souveraineté et la responsabilité. Chacune de ces dimensions constitutives sera interrogée dans sa dimension à fois chronologique et comparative, afin de réfléchir à la généalogie d’un socle commun du parlementarisme européen. À cette réflexion conceptuelle s’agrègent des éléments de recherches transnationales sur des aspects particuliers de la vie parlementaire, qu’ils relèvent par exemple de la culture quotidienne des députés36 ou de la gouvernance des assemblées37. Dans cette perspective, l’étude de la vie parlementaire sous les régimes autoritaires de l’Europe contemporaine ou dans les périodes de transitions démocratiques apparaît comme un champ à défricher de façon prioritaire afin de combler les « trous noirs » de cette histoire européenne en devenir.
Que ce soit dans une perspective fonctionnaliste, culturaliste ou comparatiste, l’histoire de la vie parlementaire a donc incontestablement de beaux jours devant elle et il est souhaitable qu’elle trouve des lieux d’accueil universitaire pour donner libre cours à la curiosité et à la créativité des chercheurs.