Trois dispositifs nationaux pour une édition scientifique plus structurée, plus éthique et plus ouverte

DOI : 10.35562/arabesques.3132

p. 6-7

Plan

Texte

Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche déploie depuis plusieurs années une politique publique de l’édition scientifique agissant sur trois niveaux : scientifique, économique et politique.

Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) a compétence sur le périmètre de l’édition scientifique défini comme celui des publications de chercheurs évaluées par les pairs découlant de leur pratique de recherche. Le statut de la maison d’édition assurant l’édition scientifique peut être public, associatif, privé, à but lucratif ou non, exerçant une mission de service public ou non. Le type d’accès aux articles ou ouvrages peut être payant ou libre, ouvert immédiat, ouvert différé, ouvert et commercialisé, commercialisé et sous abonnement ou vendu à l’unité. Il est cependant important de distinguer le rôle des plateformes par rapport aux maisons d’édition scientifique. En effet ces dernières assument la responsabilité éditoriale et juridique des contenus qu’elles publient alors que les plateformes assurent des fonctions de diffusion. La diffusion étant un élément essentiel de l’écosystème éditorial, la politique publique d’édition scientifique déployée par le MESR vise également les acteurs de la diffusion.

L’édition scientifique est la principale modalité d’administration de la preuve en recherche, et le principal vecteur de la diffusion des connaissances. Les enjeux liés à l’édition scientifique sont par conséquent multiples dont la souveraineté de la France en matière de communication scientifique, la compétitivité des acteurs économiques susceptibles d’utiliser les résultats de recherche, la stratégie d’influence de la France par la diffusion de ses connaissances qu’elle soit en langue française ou dans d’autres langues selon les usages des communautés de recherche.

Comme toute activité socio-économique, l’édition scientifique est soumise à des facteurs de transformation parmi lesquels la montée en puissance du numérique, la relation entre science et société, le déluge de données, l’internationalisation de la science, l’émergence des pratiques de science ouverte, ou encore la facilitation à l’entrée de nouveaux acteurs économiques. C’est pourquoi le MESR déploie une politique publique de l’édition scientifique agissant à trois niveaux : scientifique, économique et politique.

L’observatoire de l’édition scientifique pour objectiver les données et faire dialoguer les acteurs

L’Observatoire de l’édition scientifique, conjointement créé par les ministères de la Culture et de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation le 21 décembre 2021 pour une durée de 5 ans succède au Comité de suivi de l’édition scientifique1. Il a pour mission de faire dialoguer les acteurs de l’édition scientifique sur la base d’arguments qu’il aura préalablement objectivés au moyen d’une veille et de travaux collectifs.

L’Observatoire s’est réuni 9 fois au cours de sa première année, dont 6 fois en réunions plénières et 3 pour des réunions thématiques comme, par exemple, la voie diamant de l’accès ouvert aux publications scientifiques.

La composition de l’Observatoire est la suivante : une présidente, un invité permanent, quatre collèges – « chercheurs », « édition privée », « édition publique », « professionnels de l’information scientifique » – ainsi que des représentants des deux ministères de tutelle.

L’Observatoire de l’édition scientifique est à ce jour engagé dans 3 groupes de travail :

  • « Référentiels » a pour objectifs de définir les termes utilisés, circonscrire le périmètre des objets sur lesquels l’observatoire porte, dégager des indicateurs autour de la production et des usages.
  • « Ouvrages » travaille sur les questions suivantes : quels sont les ouvrages à considérer ? quel est leur lectorat ? quels sont les coûts de production et de diffusion/distribution ? quelles sources de revenus ? quels sont les impacts des différentes modalités d’accès ouvert ou des plans de soutien ?
  • « Pratiques » étudie l’évolution des pratiques des chercheurs et nouveaux usages des scientifiques en matière de sources de données et de savoirs, de lecture, de rédaction, de publication et de diffusion : science ouverte, réseaux académiques et médias sociaux, archives, nouveaux outils, validation des contenus, interactions avec l’évaluation de la recherche, ou les politiques institutionnelles.

Le plan de soutien à l’édition scientifique pour construire un écosystème diversifié, ouvert et soutenable

Un premier volet (2017-2021) du plan de soutien à l’édition scientifique destiné aux trois principales plateformes françaises de diffusion de contenus éditoriaux scientifiques (Cairn, EDP science, et Openedition) avait eu pour effets l’extension du nombre d’établissements participant aux groupements de commandes, l’accroissement du nombre de revues en accès ouvert, le travail en commun et le dialogue des trois plateformes. Le deuxième volet (2022-2026) du plan de soutien à l’édition scientifique est doté d’environ 3 millions d’euros. Ses principaux objectifs sont :

  • Favoriser la publication et la diffusion en accès ouvert immédiat, en s’appuyant sur différents modèles économiques adaptés aux pratiques disciplinaires, au positionnement des éditeurs et des plateformes.
  • Accompagner les éditeurs de revues et les plateformes ou agrégateurs vers un modèle de publication ouvert tout en préservant leur viabilité économique.
  • Explorer de nouveaux modèles économiques pour l’édition scientifique numérique ouverte, et notamment le modèle du « Subscribe to open », qui a vocation à sécuriser les abonnements avec les bibliothèques en contrepartie d’un passage à l’accès ouvert.

Les principales avancées sont :

  • Disposer de statistiques d’usages fiables reposant sur le code de bonnes pratiques Counter.
  • Assurer la visibilité de la production éditoriale en favorisant la libre diffusion de l’ensemble des métadonnées, y compris citations et résumés, en utilisant les identifiants (DOI, ORCID, ROR, IdRef, etc.).
  • Faciliter et promouvoir la fouille de contenus.

Une structure collective pour les éditeurs scientifiques publics engagés dans la science ouverte

Annoncée dans le deuxième plan national de la science ouverte, la structure collective des éditeurs scientifiques publics engagés dans la science ouverte a fait l’objet d’une mission d’un an pour sa préfiguration. Cette mission a donné lieu à un rapport2.

Désormais dotée d’une coordinatrice en détachement à France Universités depuis le 1er novembre 2022 pour 2 ans, cette structure a quatre objectifs principaux : fédérer et valoriser, mutualiser et accompagner, représenter ses membres, et déployer la science ouverte à travers l’édition scientifique publique.

Chaque responsable scientifique d’une structure éditoriale publique, toute discipline de recherche confondue, est invité à y participer afin que la structure collective soit la plus représentative possible de l’écosystème, favorise un maximum la bibliodiversité, permette une mutualisation utile au collectif et respectueuse des singularités de chacun. Ainsi, la structure jouera pleinement son rôle fédérateur au niveau national et de rayonnement au niveau international.

En plus de ces trois piliers de la politique d’édition scientifique, le MESR, par l’intermédiaire du Comité pour la science ouverte, permet l’expérimentation pratique de l’édition scientifique ouverte financée par le Fonds national pour la science ouverte. 5 millions d’euros ont ainsi été mobilisés pour les 49 lauréats des deux premiers appels à projets parmi 172 candidatures. Un troisième appel à projets a été lancé en novembre 20223.

Enfin, les infrastructures de recherche en information scientifique – OpenEdition, HAL, Métopes – assurent une fonction fondamentale de publication et de diffusion des savoirs qui complète la politique de soutien à l’édition scientifique. Ainsi, en menant des actions de structuration et d’incitation grâce aux leviers politiques, économiques et scientifiques, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche favorise une édition scientifique diverse, ouverte, durable pour une recherche éthique, souveraine et influente tant en France, en Europe qu’à l’international.

1 Consulter les travaux du Comité de suivi de l’édition scientifique : https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr/

2 https://hal-lara.archives-ouvertes.fr/OUVRIR-LA-SCIENCE

3 https://www.ouvrirlascience.fr/

Notes

1 Consulter les travaux du Comité de suivi de l’édition scientifique : https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr/le-soutien-l-edition-scientifique-46559

2 https://hal-lara.archives-ouvertes.fr/OUVRIR-LA-SCIENCE

3 https://www.ouvrirlascience.fr/le-fonds-national-pour-la-science-ouverte-lance-son-appel-a-projets-sur-la-publication-et-ledition-scientifiques-ouvertes

Citer cet article

Référence papier

Anne-Solweig Gremillet, « Trois dispositifs nationaux pour une édition scientifique plus structurée, plus éthique et plus ouverte », Arabesques, 108 | 2023, 6-7.

Référence électronique

Anne-Solweig Gremillet, « Trois dispositifs nationaux pour une édition scientifique plus structurée, plus éthique et plus ouverte », Arabesques [En ligne], 108 | 2023, mis en ligne le 16 janvier 2023, consulté le 16 avril 2024. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=3132

Auteur

Anne-Solweig Gremillet

Chargée d’études Édition scientifique et services à la recherche, MESR

anne-solweig.gremillet@enseignementsup.gouv.fr

Autres ressources du même auteur

Articles du même auteur

Droits d'auteur

CC BY-ND 2.0