Recomposition politique et (r)évolution du droit parlementaire : le cas de l’Assemblée nationale française (2017-2025)

DOI : 10.35562/recp.265

Résumés

Le Parlement français bénéficie aujourd’hui d’une attention toute particulière eu égard au contexte politique sans précédent. La « reparlementarisation » de la vie politique s’effectue alors au prix d’une évolution importante du droit parlementaire tant au regard de ses sources que du contenu des règles qui le composent, évolution discrète parfois cachée par le tumulte de l’activité parlementaire actuelle. L’analyse de cette évolution révèle cependant des éléments non négligeables pour l’étude du Parlement et celle du droit parlementaire, à l’égard desquelles la suite de la XVIIe législature promet d’être décisive.

The French Parliament is currently receiving special attention in an unprecedented political context. The “reparliamentarisation” of political life is therefore achieved at the cost of a major change in parliamentary law, both in terms of its sources and the content of the rules that make it up, a subtle progression that is occasionally obscured by the turbulence of present parliamentary activity. However, analysis of these developments indicates aspects that are of significance for the study of Parliament and parliamentary law. The remainder of the XVIIth legislature promises to be pivotal in this respect.

Plan

Texte

Les élections législatives des 11 et 18 juin 2017, qui avaient pourtant été à l’origine d’un large remaniement de la vie politique1, prennent aujourd’hui la forme d’un détail historique tant les échéances suivantes ont entraîné le Parlement dans un changement profond et multiforme. En effet, à la suite des scrutins des 12 et 19 juin 2022, le fait majoritaire, « divine surprise » de la VRépublique, disparaissait au profit d’une majorité présidentielle relative plaçant l’Assemblée nationale dans une situation inédite sous le régime actuel2. Point d’orgue de cette évolution du Parlement3, la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin 2024 accoucha enfin d’une XVIIe législature à la physionomie unique4 qui permit notamment l’adoption historique de la seconde motion de censure depuis 1958.

En sept ans, l’Assemblée nationale a donc connu un changement massif du personnel qui la compose, la disparition du fait majoritaire, une dissolution et une motion de censure adoptée. Loin de « la chambre d’enregistrement des volontés gouvernementales5 », rôle dans lequel elle a longtemps été confinée par le jeu du fait majoritaire combiné au renversement du parlementarisme en faveur de la fonction présidentielle6, l’Assemblée nationale voit aujourd’hui son rôle évoluer à la faveur d’une « reparlementarisation » du régime de la Ve République7. Ce nouveau poids politique renforce l’intérêt médiatique et scientifique qu’elle suscite puisque son activité n’a jamais été autant scrutée8. Sa composition inédite, cause, mais aussi conséquence du contexte politique actuel, semble lui avoir fait quitter l’état « léthargique9 » des premières décennies de la Ve République au profit d’une imprévisibilité et d’un état d’agitation perpétuelle. Dans une moindre mesure, le Sénat voit également son poids politique s’accentuer10 tandis que sa composition particulière garantit une présence importante des partis de gouvernement11 en son sein, favorisant la conservation de la « “façon sénatoriale” de faire de la politique12 ».

À l’inverse, la recomposition politique qui a affecté la chambre basse ainsi que sa composition actuelle, peu comparable avec l’alternance des deux grands partis de gouvernement connue jusqu’ici, ont imposé à partir de juin 2022 la recherche d’une « culture du compromis » qui a tout de même permis à la chambre basse d’adopter 13 lois transpartisanes entre juin 2022 et juin 2024, dont 8 à l’unanimité13. Dans le même temps, l’Assemblée nationale, ses services administratifs et ses membres ont vécu un bouleversement important de leur activité quotidienne face à des règles de procédures peu adaptées à la situation actuelle et qui ont donc subi de nombreuses évolutions.

C’est alors la physionomie même du droit parlementaire qui a été affectée. « Droit d’initiés14 » par excellence, sa structure complexe est en effet composée de sources écrites de nature juridique et de sources non écrites de nature sociale parmi lesquelles on compte notamment certaines conventions de la Constitution, les précédents et les usages, que la doctrine regroupe sous l’appellation générique de pratiques parlementaires15. La production et le maintien des règles non écrites sont alors très largement permis par certains consensus liant les gouvernements et les parlementaires des partis de gouvernement destinés à s’alterner au pouvoir, puisque l’institution parlementaire puise la raison principale de son existence dans la finalité de transposition et de pacification du conflit politique16. Les débats particulièrement houleux des derniers mois ainsi que la polarisation de l’Assemblée ont alors profondément questionné la viabilité du « consensus autour de règles partagées17 » qui permet le fonctionnement des « petites sociétés18 » que forment les chambres parlementaires.

Preuve de la « légalité particulière » du droit parlementaire19, les règles non écrites composant ce dernier ont évolué de façon significative pour tenir compte des changements importants qui ont affecté tant la composition que le fonctionnement de l’Assemblée nationale depuis 2017. Dans une période relativement courte, de nombreuses pratiques parlementaires ont ainsi vu leur portée modifiée (I) tandis que d’autres ont purement et simplement disparu, éventuellement au profit d’une codification de leur portée (II) inaugurant une évolution sans précédent du droit parlementaire en dehors des révisions constitutionnelles.

I. La recomposition politique à l’origine de l’évolution de la portée des pratiques parlementaires

La disparition d’une majorité absolue combinée à la fragmentation de l’opposition a considérablement fait évoluer les rapports de force au sein de la chambre basse au point de renverser les dynamiques constitutionnelles récentes. Si la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 avait en effet contribué au renforcement du rôle et de la protection de l’opposition parlementaire face à un fait majoritaire durablement installé20, les circonstances actuelles montrent un renversement de cette tendance. La portée des nouvelles pratiques parlementaires tendrait au contraire à protéger une majorité présidentielle affaiblie contre des oppositions considérées comme trop puissantes21. Dans cet objectif, certaines pratiques historiques connaissent des affaiblissements ponctuels (A) tandis que de nouvelles pratiques, plus rares, émergent (B).

A. Des pratiques neutralisées pour protéger une majorité affaiblie

La vie parlementaire jusqu’en 2017 était bel et bien construite sur l’opposition idéologique et politique entre deux partis principaux, destinés à détenir alternativement la majorité. L’octroi de certains avantages aux parlementaires d’opposition était alors accepté par les majorités successives sur le fondement du principe « hodie tibi, cras mihi22 » et donc la conscience que tous, tôt ou tard, pourraient profiter de ces avantages. L’effacement des partis de gouvernement comme la fragmentation de l’opposition et sa bipolarisation ont alors bouleversé singulièrement cette logique.

Ce sont d’abord deux pratiques parlementaires relatives à l’application de l’article 40 de la Constitution qui ont été touchées par des modifications substantielles. En juin 2022 comme en juillet 2023, la présidente de l’Assemblée nationale déclara irrecevables sur le fondement de l’article 40 des amendements d’origine parlementaire sans avoir au préalable consulté le président de la Commission des finances23. On pourrait voir ici une entorse à la pratique voulant que le président de la Commission dispose d’un véritable pouvoir de décision en la matière, pouvoir « délégué » de façon non écrite par le président de l’Assemblée nationale24. La seule violation de cette règle remontait d’ailleurs à 1975, avant le début de la XVIe législature25, ce que relata notamment le président Éric Coquerel dans son adresse publique à la présidente de l’Assemblée nationale afin de protester contre ce qu’il caractérisait alors de « violation des droits de l’opposition26 ». Pendant la même période, la pratique du retardement de l’invocation de l’irrecevabilité financière sur certaines propositions de loi émanant de l’opposition se vit également neutralisée27. En effet, le gouvernement comme la majorité parlementaire consentaient habituellement à retarder l’invocation de l’irrecevabilité financière des amendements et propositions de lois déposés pendant les « niches parlementaires ». Cette « tradition parlementaire bien établie28 » permettait alors le débat sur des textes issus de l’opposition affectant les finances publiques, ce que la jurisprudence constitutionnelle ne permet pourtant pas, en exigeant l’examen de la recevabilité financière avant l’impression et donc la discussion des initiatives parlementaires29. Dans les deux cas, c’est bien la minorité numérique de la majorité présidentielle et donc la puissance des oppositions qui expliquent la violation de pratiques bien établies face à des initiatives parlementaires qui, depuis 2022, courent véritablement le risque d’être adoptées. Ces pratiques garantissant certains droits à l’opposition mettaient donc en péril la « majorité présidentielle minoritaire », source d’une méfiance sans précédent entre cette dernière et certains groupes s’étant déclarés d’opposition.

Cette méfiance de la majorité envers l’opposition ou certaines de ses composantes est devenue manifeste lors de la composition des organes internes de l’Assemblée nationale en juillet 2024. La composition du Bureau de l’Assemblée nationale, qui s’est avérée particulièrement longue en raison de l’absence d’accords entre les présidents de groupe30, a ainsi conduit à en exclure les membres du groupe Rassemblement national au mépris des dispositions de l’article 10 alinéa 2 selon lesquelles la composition du Bureau doit notamment s’efforcer de « reproduire la configuration politique de l’Assemblée ». Au terme de la répartition des postes, la coalition Nouveau Front populaire comptant 193 députés est actuellement majoritaire au sein du Bureau quand le groupe Rassemblement national et les députés qui lui sont apparentés (soit 142 députés) n’y détiennent aucun représentant. Si cette composition s’est vue lourdement critiquée31, ce sont surtout les modalités de son élaboration qui interrogent puisqu’elle fut obtenue au prix d’alliances et de barrages politiques qui sont problématiques dès lors qu’ils ont conduit plusieurs parlementaires de la majorité à voter pour des membres de l’opposition, enfreignant ainsi la pratique ancienne interdisant à la majorité de choisir son opposition32.

Cette méfiance sélective envers une partie de l’opposition au sein de la chambre basse a aussi conduit à attribuer la fonction de président de la Commission des finances à un membre d’un groupe d’opposition qui s’avérait cependant ne pas être le principal groupe d’opposition. Pratique britannique transposée initialement sous une forme non écrite33, l’obligation d’attribuer la fonction de président de la Commission des finances à un député appartenant à un groupe d’opposition a ensuite été codifiée au troisième alinéa de l’article 39 RAN, tandis que se formait un « usage ininterrompu34 » attribuant cette fonction à un membre du principal groupe d’opposition, c’est-à-dire au groupe le plus nombreux parmi les groupes s’étant déclarés d’opposition. En juin 2022, sur le fondement d’alliances entre les différents partis de l’intergroupe NUPES, Éric Coquerel (La France insoumise) avait été élu après trois tours de scrutins pendant lesquels les députés de la majorité s’étaient abstenus, alors que le groupe LFI, composé de 74 membres, se trouvait être en réalité le deuxième groupe d’opposition derrière le groupe Rassemblement national. En juillet 2024, M. Coquerel fut ensuite reconduit à son poste au terme d’un scrutin mouvementé ayant vu cette fois les députés de la majorité prendre part au vote, enfreignant encore une fois la pratique susmentionnée. Cependant, et pour la première fois depuis 1958, le binôme président-rapporteur général de la Commission des finances est composé depuis lors de deux parlementaires d’opposition35, Charles de Courson ayant été élu rapporteur général au troisième tour de scrutin36. Dans le contexte différent de la session 2021-2022 écourtée en raison des élections présidentielles et législatives37, Éric Woerth, président de la Commission des finances depuis le mois de juin 2017, avait déjà refusé de céder son poste alors qu’il avait quitté le groupe Les Républicains (s’étant déclaré d’opposition) et s’était rallié à la majorité présidentielle après avoir publiquement affirmé son soutien à Emmanuel Macron pour les élections présidentielles à venir38. Il demeura donc président de ladite Commission durant les quatre derniers mois de la XVe législature, ce qui constituait pourtant une infraction claire aux dispositions du troisième alinéa de l’article 39 RAN. Son refus de démissionner, motivé par le nombre réduit de réunions restantes de la Commission et la publication à venir du rapport annuel, fut néanmoins très contesté par les parlementaires d’opposition39, qui relevaient alors une atteinte « aux droits de l’opposition40 ». Dès 2017, la recomposition politique complexifia donc l’application de certaines règles bien implantées, qu’elles soient écrites ou non écrites.

Enfin, et toujours dans l’objectif de protéger une majorité fragilisée, la pratique de l’abstention du président de l’Assemblée semble elle aussi avoir connu plusieurs dérogations historiques depuis 2022. Traditionnellement, en France, « il est de règle constante que le président d’une assemblée ne prenne part à aucun vote pendant toute la durée de ses fonctions », conformément à « la conception arbitrale de la fonction présidentielle41 ». Cet usage ancien, résumé sous la maxime « le président n’a pas de parti quand il préside », ne possède cependant aucun fondement écrit. C’est ainsi qu’à l’Assemblée nationale, les présidents successifs ne prirent part aux votes qu’à neuf reprises de 1920 jusqu’à 201442, tandis qu’entre 2014 et 2022, François de Rugy et Richard Ferrand ne participèrent à aucun scrutin. Depuis le début de la XVIe législature cependant, et devant l’absence d’une majorité absolue et continue en faveur du gouvernement, Yaël Braun-Pivet a participé à sept scrutins43, atteignant ainsi un nombre de votes jamais obtenu par ses prédécesseurs en une seule législature depuis 1920. Ses participations étaient alors prévues en amont des scrutins, en réponse à des projections de vote défavorables aux projets gouvernementaux44. Faut-il cependant y voir l’amorce d’une progressive disparition de la règle non écrite dans la chambre basse française ? Le début de la XVIIe législature permet de nuancer cette position puisque la présidente Braun-Pivet n’a plus pris part à un scrutin depuis le 18 juillet 2024. Il est vrai que, contrairement à la situation sous la XVIe législature, l’enjeu n’est plus aujourd’hui de conforter une majorité présidentielle fragile à l’aide de toutes les voix disponibles, puisqu’une telle majorité n’existe plus.

Les XVIe et XVIIe législatures ont ainsi apporté des évolutions importantes pour certaines pratiques traditionnelles, évolutions qu’il faudra cependant confirmer. À côté de l’évolution des pratiques anciennes, les deux dernières législatures ont aussi donné lieu, quoique plus rarement, à l’apparition de nouvelles pratiques.

B. L’émergence de quelques nouvelles (et rares) pratiques

La composition inédite de l’Assemblée nationale à partir de la XVIe législature a favorisé la création de nouvelles pratiques parlementaires, ou en d’autres termes, de nouvelles règles de comportement non comprises in extenso dans les textes, répondant à des objectifs cependant différents.

C’est d’abord la composition inédite de la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale avec 11 membres seulement appartenant à la coalition présidentielle sur 29 au total qui a rendu nécessaires certaines modifications dans la configuration de l’ordre du jour de l’Assemblée. Si l’article 48 de la Constitution réserve depuis 2008 deux semaines à l’initiative de la chambre basse (dont une est par priorité consacrée au contrôle), sous les législatures précédentes, la coalition présidentielle, largement majoritaire dans la Conférence des présidents chargée de déterminer l’ordre du jour de ces semaines, assurait aux groupes de la majorité une priorité dans la définition de cet ordre du jour. Depuis le mois de juillet 2024, les trois groupes de la coalition présidentielle sont loin d’être majoritaires au sein de la Conférence des présidents, mais ne disposent pas non plus des avantages conférés aux groupes d’opposition et aux groupes minoritaires45. Devant le risque que ces groupes soient privés de tout espace d’expression, la Conférence des présidents a formé des accords pour garantir, au sein de la semaine réservée à l’Assemblée, des créneaux à destination des trois groupes composant la coalition présidentielle46. En l’espèce, la pratique précise les modalités d’application de l’article 48 de la Constitution de façon à ce que les groupes de la majorité présidentielle disposent bel et bien de temps de parole effectifs.

En l’absence de conséquences dommageables comparables, une seconde pratique avait auparavant revêtu une tournure plus expérimentale en transposant au sein de la chambre basse française les séances hebdomadaires de questions britanniques spécifiquement adressées au Premier ministre47. Sur le fondement d’une décision de la Conférence des présidents du 2 avril 2024, les séances de questions au gouvernement des mercredi 3 et 10 avril, 15, 22 et 29 mai 2024 ont donc été entièrement consacrées aux questions d’actualité adressées au Premier ministre, charge ensuite à la Conférence des présidents de décider d’une éventuelle reconduction de cette expérimentation48. Alors que la dissolution du 9 juin suivant semblait avoir mis fin à cette expérimentation qui ne fut pas reprise au début de la XVIIe législature, les questions au Premier ministre resurgirent ponctuellement le mardi 17 décembre 2024 et permirent à chacun des groupes politiques de poser une question au chef du gouvernement en l’absence d’un gouvernement constitué49. Depuis lors, les questions au gouvernement ont repris leur format bihebdomadaire habituel.

La fragilité de la coalition présidentielle ainsi que la fragmentation de l’opposition politique ont ainsi suscité des évolutions importantes au niveau des pratiques parlementaires, des évolutions qui dessinent même la perspective d’un abandon progressif pour certaines d’entre elles. Confirmant cet affaiblissement de la présence des règles non écrites au sein du droit parlementaire français, ces évolutions se sont accompagnées d’un élan de codification important d’autres pratiques parlementaires entre 2017 et 2022.

II. La recomposition politique à l’origine de la codification accrue du droit parlementaire

Au cours de l’année 2017, l’arrivée à l’Assemblée nationale de plus de 75 % de nouveaux députés alliée à la disparition progressive du bipartisme au sein de la chambre basse a précipité en quelques mois la codification de certaines pratiques parlementaires bien implantées (A), mais aussi la disparition pure et simple de l’une d’entre elles (B)

A. La codification nécessaire de pratiques parlementaires historiques

Peu de temps après les élections législatives des 11 et 18 juin 2017, le groupe La France insoumise, sur l’initiative particulière de son président Jean-Luc Mélenchon, montra son désaccord profond avec « les codes vestimentaires qui [leur étaient] imposés et qui [n’étaient contenus] dans aucun règlement intérieur50 ». Face à cette contestation, le Bureau reconnut l’absence de règle écrite en la matière tout en concédant qu’il n’y avait plus lieu de contraindre « les hommes au port d’une veste et d’une cravate dans l’hémicycle51 ». Cette communication mit donc fin à la pratique du port systématique de la veste et de la cravate au sein de l’hémicycle, instaurant une nouvelle règle non écrite laissant une relative liberté aux membres masculins quant à leur tenue en séance. À la suite de certains débordements, cependant52, une règle écrite fut ensuite introduite à l’article 9 de l’Instruction générale du Bureau par une décision du Bureau le 24 janvier 201853 précisant que « la tenue vestimentaire adoptée par les députés dans l’hémicycle [devait] rester neutre et s’apparenter à une tenue de ville ». En 2022 et devant le constat d’un certain « relâchement vestimentaire 54», le Bureau de l’Assemblée nationale précisa ensuite dans l’Instruction générale du Bureau que le port de la veste redevenait obligatoire, tandis que le port de la cravate se voyait à présent « recommandé ». La pratique très ancienne du port de la veste et de la cravate pour les membres masculins de l’Assemblée nationale, appliquée consciencieusement pendant plusieurs décennies55, se vit donc remplacée, après quelques péripéties, par une règle écrite de portée comparable donnant alors à observer une codification à règle constante, attestant, par la même occasion, le bien-fondé du contenu de la règle non écrite ainsi codifiée.

Quelques mois plus tard, une autre règle non écrite du droit parlementaire connut le même destin et intégra, elle aussi, in extenso, le Règlement de l’Assemblée nationale. Depuis 1959, le Bureau de l’Assemblée nationale était composé suivant une procédure entièrement fondée sur des pratiques. Chaque groupe se voyait accorder un nombre de points correspondant à son importance numérique, charge ensuite aux groupes de conclure des accords afin de se répartir les différentes fonctions du Bureau (chacune valant un nombre prédéfini de points56). Ce n’est qu’à défaut de tels accords que des votes en séance publique étaient organisés pour répartir les fonctions57. Cette clé de répartition était complétée d’une seconde pratique consistant à réserver un poste de questeur à un député appartenant au principal groupe s’étant déclaré d’opposition58. Or, le 28 juin 2017 et alors que les postes de questeurs avaient été répartis sur le fondement d’un accord tacite, un quatrième député déclara se porter candidat à la questure. Appartenant à un groupe s’étant déclaré d’opposition tout en indiquant souhaiter soutenir ponctuellement la majorité présidentielle59, il fut tout de même élu au poste après un scrutin auquel prirent part les députés de la majorité, violant ainsi la pratique qui interdit à la majorité de choisir son opposition, mais également la règle non écrite consistant à réserver le poste de troisième questeur au principal groupe d’opposition60. Face à la violation d’une pratique constamment appliquée depuis 197361, le président de l’Assemblée accompagné des présidents des groupes LREM, LR et MoDem soumit à la chambre, dès la rentrée parlementaire suivante, une proposition de résolution visant à inclure au sein de l’article 10 RAN aussi bien la procédure de répartition des postes au sein du Bureau que la règle selon laquelle le troisième questeur appartient à un groupe s’étant déclaré d’opposition, résolution qui fut adoptée peu après.

Dans les deux cas, il a donc suffi d’une unique violation pour que la nécessité de codifier la règle soit exprimée par les acteurs parlementaires, signant alors la disparition de la pratique en tant que telle, mais la survie de sa portée. Confirmation du bien-fondé de son contenu, la codification illustre tout de même la fragilité du consensus fondant certains aspects non écrits de la procédure parlementaire, fragilité exacerbée devant le renouvellement de la classe politique et sa recomposition. Pour autant, la transformation de certaines règles non écrites détient un caractère autrement plus remarquable quand le contenu même des règles est supprimé.

B. La « suppression » discutable de la réserve parlementaire par le législateur organique

Promise par le président Emmanuel Macron (alors candidat à l’élection présidentielle) dans un entretien accordé à la presse le 8 mars 201762, l’entreprise de suppression de la réserve parlementaire fut mise en œuvre dans les mois suivant son élection par l’adoption et la promulgation de la loi organique pour la confiance dans la vie publique63. La « réserve parlementaire » ou « dotation d’action parlementaire » créée sous le septennat du président Valéry Giscard d’Estaing permettait aux présidents des chambres de demander l’octroi d’une enveloppe de crédits au gouvernement qui consentait ensuite à inscrire cette enveloppe au sein de la « mission provisions » dans le projet de budget. Le montant de l’enveloppe de crédits était ensuite directement partagé entre les bénéficiaires listés par les parlementaires (collectivités locales ou associations64). Si aucune somme d’argent ne transitait donc entre les mains des parlementaires, la pratique revêtait tout de même un caractère largement confidentiel et opaque puisque les modalités de répartition et d’affection des crédits n’étaient réglementées par aucune règle, facilitant parfois le financement de projets plus ou moins dénués de liens avec l’intérêt général65. Le mécanisme de la réserve parlementaire ressortait donc initialement du domaine des pratiques parlementaires, ce que les contraintes de l’article 40 de la Constitution expliquaient largement66. Des obligations de publicité et d’égalité de répartition des crédits furent cependant instituées en 2012 par le président Claude Bartolone67, mesures intégrées ensuite à l’article 54 de la loi organique relative aux finances publiques68, ce qui ne l’empêcha pas de continuer à faire l’objet de critiques renouvelées et persistantes69. Ces critiques expliquent alors sa « suppression » au sein de la loi organique no 2017-1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique. Cette « suppression » est d’ailleurs regrettable à au moins deux regards.

D’une part, certains parlementaires évoquaient dès 2017 le caractère nécessaire de cette procédure pour nombre de petites collectivités locales et associations. Aujourd’hui, de nombreux parlementaires (parmi lesquels des anciens soutiens de sa « suppression ») appellent même à un rétablissement de la procédure70. D’autre part, la « suppression » d’une pratique parlementaire par une règle de nature juridique s’avère être une opération discutable, voire inutile. En effet, la pratique parlementaire et la règle écrite coexistent dans des ordres différents sans détenir d’effets l’une sur l’autre ce qui avait d’ailleurs été dénoncé à l’époque par le Conseil d’État71, certains parlementaires72 et une partie de la doctrine73. « L’interdiction » comme la « suppression » de la réserve parlementaire s’assimilent alors, selon le professeur Jean-Éric Gicquel, à un « communiqué de presse gouvernemental indiquant aux parlementaires et aux citoyens les contours de la nouvelle donne74 », puisqu’il s’agit bien d’annoncer publiquement l’intention de mettre fin à la réserve parlementaire, mais elle ne nécessitait ni texte juridique, ni médiatisation. Il aurait en effet suffi au gouvernement de refuser lors de l’examen du projet de budget l’inclusion des sommes demandées par les parlementaires pour mettre fin à cette pratique.

L’impératif de transparence invoqué par le président Emmanuel Macron pour justifier la « suppression » de la réserve parlementaire rejoint ici la confusion entre les règles sociales et les règles juridiques encadrant la procédure parlementaire. L’époque contemporaine et le renouvellement du personnel politique viennent alors à bout de certains consensus et « échanges de bons procédés75 » qui structuraient le fonctionnement de la chambre basse depuis plusieurs décennies, emportant des modifications du contenu des règles, mais aussi plus globalement de la physionomie singulière des sources du droit parlementaire.

Depuis sept ans, les observateurs de l’activité parlementaire se trouvent ainsi confrontés à un objet d’étude méconnaissable qui connaît une évolution rapide et perpétuelle. La physionomie du droit parlementaire est en effet fortement et historiquement modifiée et l’on peut se demander, au vu des débats récents, s’il parvient encore à « maintenir l’ordre au milieu du drame76 ». L’activité quotidienne de ce Parlement imprévisible est ensuite scrutée de manière inédite. Le nombre de journalistes côtoyant chaque jour la salle des quatre colonnes n’a jamais été aussi important depuis le début de la XVIe législature77, tandis qu’une « veille » parlementaire se développe sur différents médias78, caractérisant un élan d’intérêt assez inédit dans la société. Alors que le droit parlementaire est vulgarisé et composé d’un nombre croissant de règles écrites, sa connaissance s’étend alors au-delà du cercle restreint des « initiés », puisqu’elle est rendue nécessaire pour la compréhension profonde de la situation politique actuelle. Entre mutation et vulgarisation du droit parlementaire, les deux législatures précédentes et celle en cours caractérisent donc déjà un tournant inédit depuis 1958 pour l’étude du droit parlementaire en dehors des révisions constitutionnelles.

Notes

1 A. Sénécat, « Après les législatives 2017, 75 % de l’Assemblée nationale est renouvelée, un record », Le Monde, 19 juin 2017. Retour au texte

2 Voir sur ce point D. Baranger, « Ni fait majoritaire, ni cohabitation : la Cinquième République dans le monde d’après… », JP Blog, 24 juin 2022, URL : https://blog.juspoliticum.com/2022/06/24/ni-fait-majoritaire-ni-cohabitation-la-cinquieme-republique-dans-le-monde-dapres-par-denis-baranger/ [consulté le 10 juillet 2025]. Retour au texte

3 À l’heure où sont écrites ces lignes. Retour au texte

4 L’Assemblée nationale est composée depuis le 18 juillet 2024 de 11 groupes parlementaires, dont 8 se sont déclarés d’opposition. Pour la première fois sous la Ve République, la majorité présidentielle (composée des trois groupes ne s’étant pas déclarés d’opposition) est largement inférieure numériquement aux deux principaux blocs d’opposition (le groupe RN comptant 124 députés et la coalition du Nouveau Front populaire regroupant 192 députés pour 163 députés pour la coalition présidentielle). Retour au texte

5 Selon l’expression bien connue de Jacques Chaban-Delmas présidant la première séance de la réunion de plein droit du Parlement en application de l’article 16 de la Constitution au début du mois de juillet 1961, JO AN, Débats, séance du 6 juillet 1961, p. 1480. Retour au texte

6 Sur le parlementarisme négatif, voir notamment A. Le Divellec, « La chauve-souris. Quelques aspects du parlementarisme sous la Ve République », La République. Mélanges Pierre Avril, Paris, Montchrestien, 2001, p. 349-362. Retour au texte

7 Sur ce sujet, voir notamment O. Beaud, « La fin du pouvoir discrétionnaire du Président en matière de nomination du Premier Ministre », JP Blog, 27 août 2024, URL : https://blog.juspoliticum.com/2024/08/27/la-fin-du-pouvoir-discretionnaire-du-president-en-matiere-de-nomination-du-premier-ministre-par-olivier-beaud/ [consulté le 10 juillet 2025] ; M. Torrente, « 2022-2024 : la revanche du Parlement ? », Les Cuisines de l’Assemblée [blog], 20 septembre 2024, URL : https://www.lemonde.fr/blog/cuisines-assemblee/2024/09/20/2022-2024-la-revanche-du-parlement/ [consulté le 5 juin 2025] ; p. Türk, « Premier bilan de la XVIe législature : nouveau parlement, nouveaux équilibres ? », Revue française de droit constitutionnel, vol. 138, no 2, 2024, p. 289-306. Retour au texte

8 Voir notamment « Étienne Ollion : “L’Assemblée nationale connaît un retour en grâce politique et médiatique” », L’Express, 6 août 2022, URL : https://www.lexpress.fr/politique/etienne-ollion-l-assemblee-nationale-connait-un-retour-en-grace-politique-et-mediatique_2178177.html [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

9 On reprend ici l’adjectif utilisé par le président Edgar Faure à propos des débats annuels sur les lois de finances, voir notamment D. Hochedez, « Vers une revivification du débat budgétaire à l’Assemblée nationale ? », Revue française de finances publiques, no 72, 2000, p. 203. Retour au texte

10 Voir notamment sur ce point : Ph. Blachèr, « Le Sénat en première ligne ! », Chaire d’études parlementaires, 3 novembre 2024, URL : https://www.etudesparlementaires.fr/actualite/le-senat-en-premiere-ligne/ [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

11 On qualifie de « partis de gouvernement » des partis qui ont déjà eu à exercer le pouvoir démocratique ou qui ont vocation à le faire. Sur l’évolution de cette notion au sein des régimes européens et la recomposition politique générale observée dans différents États, voir notamment P. Martin, « Le déclin des partis de gouvernement en Europe », Commentaire, vol. 3, no 143, 2013, p. 542-554, DOI : 10.3917/comm.143.0542 ; « Partis de gouvernement et transformation des systèmes de clivages », Pouvoirs, vol. 4, no 179, 2021, p. 59-70, DOI : 10.3917/pouv.179.0059. Retour au texte

12 Comme l’affirmait le président Gérard Larcher en octobre 2020, voir JO Sénat, Débats, séance du 1er octobre 2020, p. 7312. Retour au texte

13 Voir notamment R. Clément, « Assemblée nationale : Yaël Braun-Pivet, le compromis face aux nouveaux rapports de force », Les Échos, 7 octobre 2023, mais également Assemblée nationale, anatomie d’une crise, ’documentaire réalisé par Émilie Lançon pour France 2 et diffusé le 6 décembre 2024. Retour au texte

14 J.-L. Pezant, « Quel droit régit le Parlement ? », Pouvoirs, no 64, 1993, p. 63, URL : https://revue-pouvoirs.fr/quel-droit-regit-le-parlement/#:~:text=Le%20droit%20qui%20r%C3%A9git%20le,soumis%20au%20contr%C3%B4le%20de%20constitutionnalit%C3%A9 [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

15 Sur les sources du droit parlementaire, voir notamment D. Connil, P. Jensel-Monge et A. de Montis, « Droit parlementaire », dans D. Connil, P. Jensel-Monge et A. de Montis (dir.), Dictionnaire encyclopédique du Parlement, Bruxelles, Bruylant, 2023, p. 433-434. Retour au texte

16 Voir notamment sur ce point : P.-Y. Baudot et O. Rozenberg, « Désordres parlementaires », Genèses, vol. 2, no 83, 2011, p. 2-5, DOI : 10.3917/gen.083.0002 ; S. Lukes, « Political Ritual and Social Integration », Sociology, vol. 9, no 2, 1975, p. 289-308, DOI : 10.1177/003803857500900205. Retour au texte

17 L. Hamon, « Une discipline juridique ancienne et nouvelle : le droit parlementaire », Recueil Dalloz, vol. 41, 1989, p. 294. Retour au texte

18 J.-L. Pezant, op. cit., p. 63. Retour au texte

19 Le droit parlementaire est en effet élaboré par ceux-là mêmes qui l’appliquent, voir plus particulièrement sur ce point : P. Avril, J. Gicquel et J.-É. Gicquel, Droit parlementaire, Paris, LGDJ, 7e édition, 2023, p. 21 ; D. Connil, P. Jensel-Monge et A. de Montis, « Droit parlementaire », dans D. Connil, P. Jensel-Monge et A. de Montis (dir.), op. cit., p. 433-434. Retour au texte

20 Voir notamment A. Vidal-Naquet, « Le renouveau de l’opposition », Pouvoirs, vol. 3, no 146, 2013 p. 133-147, DOI : 10.3917/pouv.146.0133. Retour au texte

21 En juin 2022 comme en juillet 2024, 8 groupes se sont ainsi déclarés d’opposition. Retour au texte

22 Expression empruntée au professeur Foyer (« Les sources écrites du droit parlementaire », dans P. Avril et M. Verpeaux [dir.], Les règles et principes non écrits en droit public, Paris, Éditions Panthéon-Assas, 2005, p. 242) que l’on peut traduire comme suit : « À ton profit aujourd’hui, au mien le lendemain ». Retour au texte

23 Voir notamment sur ce point J.-P. Camby, « La recevabilité financière des amendements parlementaires, une question institutionnelle majeure », La lettre juridique, no 917, 2022, URL : https://www.lexbase.fr/article-juridique/88283735-focus-la-recevabilite-financiere-des-amendements-parlementaires-une-question-institutionnelle-majeur [consulté le 5 juin 2025] ; A. Fourmont, « Éric Coquerel veut faire beaucoup, mais son pouvoir reste encadré », Le Club des juristes, 18 juillet 2022, URL : https://www.leclubdesjuristes.com/politique/eric-coquerel-veut-faire-beaucoup-mais-son-pouvoir-reste-encadre-808/ [consulté le 5 juin 2025] ; « La tentation de la justice retenue. À propos du contrôle de la condition de recevabilité financière des initiatives parlementaires de l’article 40 », JP Blog, 23 juin 2023, URL : https://blog.juspoliticum.com/2023/06/23/la-tentation-de-la-justice-retenue-a-propos-du-controle-de-la-condition-de-recevabilite-financiere-des-initiatives-parlementaires-de-larticle-40-par-alexis-fourmont/ [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

24 Voir notamment sur ce point : J.-F. Kerléo, « Chapitre III : recevabilité financière », dans J.-F. Kerléo (dir.), Règlement de l’Assemblée nationale commenté, Paris, LGDJ, 2022, p. 143. Retour au texte

25 Voir notamment P. Avril, J. Gicquel et J.-É. Gicquel, op. cit., p. 40. Les rapports successifs émis par la Commission des finances affirment notamment que les avis sont « systématiquement suivis » (voir É. Woerth, Rapport, Doc. AN no 5107, 23 février 2022, p. 31). Retour au texte

26 JO AN, Débats, séance du lundi 11 juillet 2022, p. 2319 ; JO AN, Débats, séance du jeudi 8 juin 2023, p. 5611-5612. Retour au texte

27 Pour des exemples, voir notamment B. Fargeaud, « Réforme des retraites, initiative parlementaire et article 40 de la Constitution : les riches heures du droit parlementaire et la pauvreté du parlementarisme », JP Blog, 5 juin 2023, URL : https://blog.juspoliticum.com/2023/06/05/reforme-des-retraites-initiative-parlementaire-et-article-40-de-la-constitution-les-riches-heures-du-droit-parlementaire-et-la-pauvrete-du-parlementarisme-par-benjamin-fargeaud/ [consulté le 5 juin 2025] et également JO AN, Débats, séance du 8 juin 2023, p. 5611 et s. Retour au texte

28 G. Carrez, Rapport, Doc. AN no 4546, 22 février 2017, p. 22. Une pratique comparable au Sénat, toujours d’actualité, bénéficie quant à elle plus largement à toutes les propositions de loi et à tous les amendements d’origine parlementaire en dehors des « espaces réservés » (équivalents des « niches parlementaires » de la chambre basse). Retour au texte

29 Cons. const., no 96-381 DC, 14 octobre 1996, Résolution modifiant le Règlement du Sénat, considérant 8 et 9 (voir notamment É. Oliva, « [Note sous la décision no 96-381 DC] », Revue française de droit constitutionnel, no 29, 1997, p. 94-107, note É. Oliva ; M. Verpeaux, « [Note sous la décision no 96-381 DC] », Petites affiches, 1997, p. 24-25) ; Cons. const. no 2006-544 DC, 14 décembre 2006, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, considérant 14 (voir J.-P. Camby, « Droit de priorité, irrecevabilité, cavaliers… réflexions sur la rationalisation de la procédure législative », Revue du droit public, no 2, 2007, p. 571-583 ; B. Mathieu, « Le Conseil constitutionnel renforce les exigences relatives à la qualité du travail législatif et à la sécurité juridique », La Semaine juridique. Édition générale, no 1-2, 2007, p. 3-5 ; J.-É. Schoettl, « La sanction constitutionnelle de l’abus du droit d’amendement dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 », Revue française de droit administratif, no 1, janvier-février 2007, p. 134-147). Retour au texte

30 Voir notamment sur ce point G. Toulemonde, « Nouvelle composition du Bureau de l’Assemblée nationale : bis repetita », Billet d’actualité, Chaire d’études parlementaires, 27 octobre 2024, URL : https://www.etudesparlementaires.fr/actualite/nouvelle-composition-du-bureau-de-lassemblee-nationale-bis-repetita/ [consulté le 5 juin 2025] et nos développements infra. Retour au texte

31 « Aucun poste-clé à l’Assemblée nationale : “la voix du RN sera entendue”, promet Yaël Braun-Pivet », Le Parisien, 20 juillet 2024, URL : https://www.leparisien.fr/politique/aucun-poste-cle-a-lassemblee-nationale-la-voix-du-rn-sera-entendue-promet-yael-braun-pivet-20-07-2024-5T6XVBYNTFGA3MLWQI257AY6H4.php [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

32 Voir notamment sur ce point L. Équy, « Tractations. Vice-présidences de l’Assemblée nationale : dilemmes à LREM, champagne au RN », Libération, 29 juin 2022, URL : https://www.liberation.fr/politique/vice-presidences-de-lassemblee-dilemmes-a-lrem-champagne-au-rn-20220629_DCBSEW6SHJADZLTQQU2EFG2HVQ/ [consulté le 5 juin 2025] ; le message posté par Guillaume Peltier sur la plate-forme Twitter (X) le 28 juin 2017, URL : https://x.com/G_Peltier/status/880174217177817088 [consulté le 5 juin 2025] ; l’affirmation de Christian Jacob le 28 juin 2017 (JO AN, Débats, séance du 28 juin 2017, p. 91194). Retour au texte

33 A. Staddon, « The Public Accounts Committee of the House of Commons », dans Z. Hoque (dir.), Making Governments Accountable. The Role of Public Accounts Committees and National Audit Offices, Londres, Taylor & Francis, 2015, p. 101-119 ; House of Commons, Holding Government to Account, 150 Years of the Committee of Public Accounts, 2007 ; Erskine May, https://erskinemay.parliament.uk/, §38.65. Sur la transposition de cette pratique en France, voir p. Gélard et J.-C. Peyronnet, Rapport, 25 octobre 2006, p. 52 ; J.-J. Urvoas et M. Alexandre, Manuel de survie à l’Assemblée nationale. L’art de la guérilla parlementaire, Paris, Odile Jacob, 2012, p. 125. Retour au texte

34 J.-P. Camby, « Présidence des commissions de l’Assemblée nationale : une bataille ouverte qui prendra fin jeudi 30 juin 2022 », Le Club des juristes, 28 juin 2022, URL : https://www.leclubdesjuristes.com/politique/presidence-des-commissions-de-lassemblee-nationale-une-bataille-ouverte-qui-prendra-fin-jeudi-30-juin-2022-803/ [consulté le 5 juin 2025] ; J. Yakin, « Assemblée nationale : la Constitution impose-t-elle que la présidence de la Commission des finances revienne au groupe d’opposition le plus important ? », France Info, 21 juin 2022, URL : https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-vrai-du-faux/assemblee-nationale-la-constitution-impose-t-elle-que-la-presidence-de-la-commission-des-finances-revienne-au-groupe-d-opposition-le-plus-important_5182120.html [consulté le 5 juin 2025] ; S. Barbarit, « Présidence de la Commission des finances : RN ou NUPES ? Gérard Larcher a tranché. La gauche crie au “front antirépublicain” », Public Sénat, 22 juin 2022, URL : https://www.publicsenat.fr/actualites/politique/presidence-de-la-commission-des-finances-rn-ou-nupes-gerard-larcher-a-tranche-la [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

35 J. Gicquel et J.-É. Gicquel, « Chronique constitutionnelle française », Pouvoirs, vol. 1, no 192, 2025, p. 140 DOI : 10.3917/pouv.192.0135. Retour au texte

36 Charles de Courson (LIOT) et Jean-René Cazeneuve (Renaissance) ayant recueilli chacun 27 votes au terme du troisième tour de scrutin, c’est M. de Courson qui fut élu au bénéfice de l’âge, sur le fondement du cinquième alinéa de l’article 39 RAN. Retour au texte

37 À l’approche des échéances électorales présidentielles et législatives, le Parlement français suspend ses travaux avant le début du mois de mars sur le fondement d’une règle non écrite afin de permettre à ses membres de prendre part aux campagnes politiques à venir : voir sur ce point : P. Avril, J. Gicquel et J.-É. Gicquel, opcit., p. 139 ; JO AN, Débats, séance du 22 février 2017, p. 1181. Retour au texte

38 « Éric Woerth refuse de démissionner de la présidence de la Commission des finances de l’Assemblée nationale, les oppositions protestent », Le Monde, 16 février 2022, URL : https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/02/16/eric-woerth-refuse-de-demissionner-de-la-presidence-de-la-commission-des-finances-de-l-assemblee-nationale-les-oppositions-protestent_6113980_823448.html [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

39 JO AN, Débats, séance du 16 février 2022, p. 1893 et s. Retour au texte

40 Voir l’intervention de Marc Le Fur lors de la même séance : ibid., p. 1894. Retour au texte

41 F. Lafaille, « Le Président du Sénat », Pouvoirs, vol. 4, no 159, 2016, p. 48, DOI : 10.3917/pouv.159.0041. Retour au texte

42 D’après le recensement effectué par les professeurs Avril et Gicquel, op. cit., p. 39. Retour au texte

43 Voir le recensement des activités parlementaires de Yaël Braun-Pivet sur le site Internet de l’Assemblée nationale. Retour au texte

44 V. Guilhamet, « Réforme des retraites : la présidente de l’Assemblée nationale a-t-elle le droit de prendre part au vote ? », La Dépêche, 16 mars 2023, URL : https://www.ladepeche.fr/2023/03/16/reforme-des-retraites-la-presidente-de-lassemblee-nationale-a-t-elle-le-droit-de-prendre-part-au-vote-11065949.php [consulté le 5 juin 2025] ; « Réforme des retraites 2023 : Élisabeth Borne déclenche le 49.3 », La Croix, 16 mars 2023, URL : https://www.la-croix.com/France/Reforme-retraites-2023-seance-decisive-souvre-lAssemblee-2023-03-16-1201259381 [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

45 Et notamment des niches parlementaires (art. 48 al. 8 RAN). Retour au texte

46 Certains extraits du documentaire Assemblée nationale, anatomie d’une crise, réalisé par Émilie Lançon pour France 2 et diffusé le 6 décembre 2024 l’illustrent assez bien. Le ratio initial réservant deux tiers du temps parlementaire de cette semaine aux partis de la majorité et un tiers du temps aux autres partis évolua ensuite sur une division réservant 60 % des séances aux partis de la coalition présidentielle et 40 % aux autres. Retour au texte

47 M. Darame et N. Segaunes, « French Parliament to Test Wesminster-Style Prime Minister’s Questions », Le Monde, 27 mars 2024, URL : https://www.lemonde.fr/en/politics/article/2024/03/27/french-parliament-to-test-westminster-style-prime-minister-s-questions_6658588_5.html [cosnulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

48 L. Fau et E. Mondin-Gava, « Questions au Gouvernement : la séance du mercredi réservée à des questions au Premier ministre pour une expérimentation de cinq semaines », LCP, 26 mars 2024, URL : https://lcp.fr/actualites/questions-au-gouvernement-la-seance-du-mercredi-reservee-a-des-questions-au-premier [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

49 JO AN, Débats, séance du 17 décembre 2024, p. 7559 et s. Retour au texte

50 G. Bergougnous, « Règles et bonnes pratiques à l’Assemblée nationale : de la nécessité de codifier certains usages », Constitutions, no 3, 2017, p. 397. Retour au texte

51 Ibid. Retour au texte

52 Voir JO AN, Débats, séance du 7 décembre 2017, p. 6190. Retour au texte

53 Voir Bureau de l’Assemblée nationale, réunion du mercredi 24 janvier 2018. Retour au texte

54 Pour reprendre les termes du député Éric Ciotti. Voir L. Fontaine, « Assemblée nationale : cravate, costume… quelles sont les règles vestimentaires ? », Le Parisien, 27 juillet 2022, URL : https://www.leparisien.fr/politique/assemblee-nationale-cravate-costume-quelles-sont-les-regles-vestimentaires-27-07-2022-RRCODQHTSJBNDAAAF4E6K7237M.php [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

55 Voir sur ce point C. Parent, « Le code vestimentaire des hémicycles sous la Ve République : mythes et réalités », Revue du droit public, no 6, 2013, p. 1433, URL : https://droit.cairn.info/revue-revue-du-droit-public-2013-6-page-1421?lang=fr [consulté le 5 juin 2025] ; J.-J. Urvoas et M. Alexandre, op. cit., p. 111. Retour au texte

56 La fonction de président « valant » 4 points, celle de vice-président 2 points, celle de questeur 2,5 points et celle de secrétaire 1 point. La somme des fonctions du Bureau valait donc 35,5 points, somme répartie proportionnellement entre les groupes politiques en fonction de leur importance numérique dans l’hémicycle. Retour au texte

57 Voir notamment G. Landais, « Représentativité des groupes parlementaires au Bureau de l’Assemblée nationale. À propos de la résolution no 26 du 11 octobre 2017 portant modification du Règlement de l’Assemblée nationale », Revue française de droit constitutionnel, vol. 2, no 114, 2018, p. 359, DOI : 10.3917/rfdc.114.0355. Retour au texte

58 Voir G. Bergougnous, op. cit., p. 398 ; J.-J. Urvoas, « Chapitre III : Bureau de l’Assemblée : composition, mode d’élection », dans J.-F. Kerléo (dir.), op. cit., p. 21. Retour au texte

59 Sur la position ambiguë du groupe Les Constructifs, voir M. Goar, « Assemblée nationale : la droite consacre son divorce », Le Monde, 21 juin 2017, URL : https://www.lemonde.fr/politique/article/2017/06/21/la-droite-consacre-son-divorce_5148628_823448.html [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

60 Voir B. Fargeaud, « Élection du bureau de l’Assemblée nationale : une polémique et des précédents », JP Blog, 22 juillet 2022, https://blog.juspoliticum.com/2022/07/22/election-du-bureau-de-lassemblee-nationale-une-polemique-et-des-precedents-par-benjamin-fargeaud/ [consulté le 5 juin 2025] ; L. Hausalter, « Assemblée nationale : l’implosion du système Solère », Marianne, 28 novembre 2017, URL : https://www.marianne.net/politique/assemblee-nationale-l-implosion-du-systeme-solere [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

61 G. Bergougnous, op. cit., p. 398. Retour au texte

62 Voir G. Biseau, « Appel-Candidats, êtes-vous prêts pour la transparence ? Les 6 propositions de “Libération” », Libération, 8 mars 2017, URL : https://www.liberation.fr/politiques/2017/03/08/candidats-etes-vous-prets-pour-la-transparence-les-6-propositions-de-liberation_1554357/ [consulté le 5 juin 2025]. Retour au texte

63 Voir art. 14 de la loi organique no 2017-1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique (1). Retour au texte

64 Sur la réserve parlementaire, voir J.-L. Aubert, « La réserve parlementaire », Revue française de finances publiques, no  80, 2002, p. 229 ; E. Lemaire, « La réserve parlementaire sous l’angle du droit constitutionnel », Jus Politicum, no 17, 2017, p. 632, URL : https://www.juspoliticum.com/articles/La-reserve-parlementaire-sous-l-angle-du-droit-constitutionnel [consulté le 5 juin 2025] et « Naissance, consécration et disparition (?) d’une convention de la Constitution. L’exemple de la “réserve parlementaire” », Jus Politicum, no 24, 2020, p. 119-134, URL : https://www.juspoliticum.com/articles/Naissance-consecration-et-disparition-d-une-convention-de-la-Constitution-L-exemple-de-la-reserve-parlementaire [consulté le 5 juin 2025] ; p. Türk, « Requiem pour la “réserve parlementaire” », Revue française de finances publiques, no 141, 2018, p. 217. Retour au texte

65 Voir, sur ce point, E. Lemaire, « La réserve parlementaire sous l’angle du droit constitutionnel », op. cit. Retour au texte

66 L’article 40 sanctionne en effet d’irrecevabilité les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique. Retour au texte

67 Voir C. Bartolone, « Parlement du changement, Assemblée nationale en mouvement », La Semaine juridique. Administrations et collectivités territoriales, no 43, 2012, cité par E. Lemaire, « La réserve parlementaire… », op. cit. p. 640. Retour au texte

68 Loi organique no 2013-906 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, voir plus particulièrement son article 11. Retour au texte

69 Ces critiques furent notamment formulées par la Cour des comptes (voir Référé no 71261 portant sur les subventions pour travaux divers d’intérêt local, publié le 27 novembre 2014), comme le GRECO (voir Rapport d’évaluation élaboré dans le cadre du quatrième cycle d’évaluation relatif à la prévention de la corruption des parlementaires, des juges et des procureurs, publié le 6 décembre 2013, p. 13-14), ainsi que la Direction générale du Trésor (voir sur ce point les propos rapportés par J.-L. Aubert, « La réserve parlementaire », op. cit., p. 234). Retour au texte

70 Un « Collectif pour la réserve parlementaire » transpartisan a ainsi été créé en 2023 et a lancé une pétition demandant son rétablissement suivie d’une proposition de loi déposée et adoptée au Sénat le 13 octobre 2023, puis transmise à l’Assemblée, avant que la dissolution de l’Assemblée nationale n’entraîne sa disparition le 9 juin 2024. Retour au texte

71 CE, Assemblée générale, section de l’intérieur, séance du lundi 12 juin 2017, Avis no 393324 sur un projet de loi organique pour la confiance dans l’action publique, p. 5-6. Retour au texte

72 Y. Braun-Pivet et Ph. Bas, Rapport, Doc. AN no 121 et Doc Sénat no 701, 1er août 2017, p. 4 et 5. Retour au texte

73 Ph. Bachschmidt, « À chaque pouvoir sa conception de la séparation des pouvoirs… », Constitutions, vol. 11, no 3, 2017, p. 399-401 ; Ch. Cutajar, « Les lois du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie publique : le choix de la transparence et de la prophylaxie », Recueil Dalloz, vol. 11, 2018, p. 569-576, URL : https://www.dalloz.fr/lien?famille=revues&dochype=RECUEIL%2FCHRON%2F2018%2F1030 [consulté le 5 juin 2025] ; J.-É. Gicquel, « La suppression de la réserve parlementaire ou la disparition d’une convention de la Constitution », Note sous Cons. const., décision du 8 septembre 2017, no2017-753 DC, La Semaine juridique. Édition générale, no 39, 2017, p. 1710. Retour au texte

74 J.-É. Gicquel, op. cit., p. 1710. Retour au texte

75 Pour reprendre l’expression du professeur Pauline Türk à propos de la réserve parlementaire (« Requiem pour la “réserve parlementaire” », op. cit., p. 217). Retour au texte

76 J.-L. Pezant, op. cit., p. 64. Retour au texte

77 M. Torrente, op. cit. Retour au texte

78 Le streameur Jean Massiet diffuse ainsi sur la plate-forme Twitch depuis 2015 et de manière hebdomadaire certaines séances du Parlement (et plus particulièrement les séances de « Questions au gouvernement ») en les commentant tandis que les threads d’actualité parlementaire se développent sur la plate-forme X et connaissent un succès de plus en plus important. Voir le compte de Pierre Januel (https://x.com/PJanuel [consulté le 5 juin 2025]) ou celui du journaliste militant à la France insoumise, François Malaussena (https://x.com/malopedia?lang=fr [consulté le 5 juin 2025]). Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Marie-Elisabeth Boggio-Motheron, « Recomposition politique et (r)évolution du droit parlementaire : le cas de l’Assemblée nationale française (2017-2025) », Revue d'étude et de culture parlementaires [En ligne], 1 | 2025, mis en ligne le 05 septembre 2025, consulté le 19 septembre 2025. URL : http://publications-prairial.fr/recp/index.php?id=265

Auteur

Marie-Elisabeth Boggio-Motheron

Docteure en droit public, Centre juridique de recherche Pothier (UR1212), université d’Orléans