Notes de la rédaction

Propos recueillis par Christine Fleury, Isabelle Mauger et Laurent Piquemal

Texte

Pour ce dossier d’Arabesques consacré à la formation des usagers, nous avons proposé nos colonnes aux personnes chargées d’organiser cette formation dans les bibliothèques du réseau Sudoc. Ce sont ainsi plusieurs établissements qui se sont exprimés autour des axes suivants :

  • problématiques générales dans le champ en pleine transformation de l’accès à l’information scientifique et technique,
  • recueil d’expériences, évaluation des pratiques.

Outre la richesse de l’investissement humain que nécessite toute démarche de formation à grande échelle, ces paroles croisées reflètent les problématiques et attentes des établissements documentaires : intégration des unités d’enseignement transversales documentaires dans les nouveaux cursus universitaires de type LMD, reconnaissance de la méthodologie documentaire comme outil d’apprentissage à part entière, mode de collaboration avec les enseignants, pertinence des méthodes pédagogiques. De plus, face au foisonnement de l’information scientifique et technique et à l’apparente facilité des moteurs de recherche généralistes, les bibliothèques universitaires ont à faire face à de nouveaux enjeux qui transforment les rôles et missions des professionnels autant que les besoins de leurs usagers. Autant d’éléments qualitatifs que nous remercions les auteurs de nous avoir transmis.

Dans le cadre des unités transversales du nouveau cursus LMD, tous les étudiants en L1 (1 250) participent à 4 h obligatoires de TD de documentation. Ces 2 séances de TD en début d’année universitaire sont l’occasion de familiariser les étudiants avec leur environnement documentaire, leur bibliothèque et ses particularités. En effet, la BU Lettres de Besançon étant située dans des bâtiments anciens, une petite partie seulement des collections est en libre accès, ce qui implique une recherche quasi obligatoire à partir du catalogue informatisé. Ce qui pourrait être un handicap majeur s’avère être une chance pour les étudiants car ils ont la possibilité, depuis un poste extérieur, de consulter le site web de la BU, d’interroger le catalogue et de demander à distance des documents qu’ils viennent chercher plus tard. Les cours sont construits autour de deux problématiques majeures. Comment accéder aux documents et utiliser au mieux les ressources de la bibliothèque, qu’elles soient en libre accès ou en accès indirect ? Comment mener une recherche documentaire à partir d’un sujet ? Cette étape permet aux intervenants de montrer qu’il existe autre chose que « Google » pour trouver rapidement des documents pertinents sur un sujet. En L2, un second module permet de compléter la formation en abordant les périodiques (papier ou électroniques), la recherche d’articles à partir de bases de données généralistes ou spécialisées. Fortement impliqué dans ces formations, le personnel de la bibliothèque constate au niveau du service public les retombées positives de cet enseignement sur la pratique des étudiants. L’évolution prochaine de notre site vers un portail permettra d’accéder à un environnement de travail de plus en plus personnalisé, ce qui devrait renforcer notre visibilité en matière de fourniture d’information : la formation à la recherche documentaire devra intégrer cette nouvelle donne.

Claudine Faivre
SCD de l’université de Besançon – Franche-Comté (section Lettres)

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L’université Lille-II est nettement bipolaire (droit et santé) avec des composantes sur des sites distincts à très forte identité (UFR de médecine, de pharmacie et de droit notamment). On retrouve cette même structure bipolaire dans le dispositif de formation aux usagers, avec d’une part, deux responsables de formation et d’autre part, des formations très différentes entre le droit et la santé. Par exemple, tous les étudiants de L1 en droit ont des formations obligatoires donnant droit à des crédits ECTS, alors qu’en santé, les formations démarrent en 2e année, sans crédit ECTS. Autre exemple : les contraintes des internes de médecine conduisent à une offre de formation individualisée, là où le secteur droit privilégie les formations en groupes.
Quels sont les avantages et limites de ce schéma qui se calque sur celui de l’université ?

Quelques avantages :

• une présence « sur le terrain » permet au responsable formation de rencontrer facilement étudiants et enseignants ;
• une connaissance fine de ce terrain facilite l’adaptation de l’offre de formation à la demande et une approche vraiment disciplinaire ;
• un travail au cœur de chaque section documentaire permet une meilleure prise en compte des souhaits, compétences et disponibilités des agents intervenant dans ces formations (ce qu’un fonctionnement plus centralisé ne permettrait pas nécessairement).

Quelques limites :

• une moindre indépendance du responsable formation par rapport au contexte local, qu’il soit pédagogique (demandes des enseignants), administratif et logistique (scolarité et CRI) ou bibliothéconomique (contraintes internes de fonctionnement) ; il est cependant difficile d’imaginer des dispositifs de formation n’en tenant pas compte ;
• une certaine tendance à se limiter aux problématiques locales, ce qui peut entraîner – ou encourager – un relatif manque de communication entre sections, cette limite étant compensée à Lille-II par le fait que les formations ont d’abord été développées en section droit et que le dispositif santé a pu prendre appui naturellement sur son prédécesseur.

Florence Danel – Marie Didier
SCD de l’université Lille-II (secteur Droit/Gestion)
SCD de l’université Lille-II (secteur Santé)

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Le SCD de Limoges comprend 4 sections : lettres, sciences, santé, droit et sciences économiques. Nous intervenons à trois niveaux dans les cursus.

L1. L’intervention vise à faire connaître à tous les nouveaux arrivants les espaces des bibliothèques et les services offerts, en particulier informatiques – catalogues et ressources électroniques, espace numérique de travail, WiFi, etc. Elle prend la forme d’une visite des lieux et d’une projection vidéo (durée : de 30 minutes à une heure selon les sections). Afin de favoriser un relais efficace, nous impliquons les enseignants. Pour assurer ces visites, nous faisons appel à des tuteurs étudiants (niveau Master au minimum).

Master. Formation à la recherche documentaire et aide à la rédaction des bibliographies, sous la forme d’un TD de 3 h en petits groupes, durant lequel les étudiants sont rapidement amenés à pratiquer les outils de recherche documentaire électroniques, mais aussi papier. Ces interventions sont intégrées aux maquettes de formation en lettres et sciences, et nous nous efforçons, en coordination avec les enseignants, de les situer de manière à ce que les étudiants puissent travailler sur leurs véritables sujets de recherche plutôt que sur des exercices trop détachés de leurs préoccupations.

Doctorat. Reprise de la formation de Master pour les étudiants venus d’autres universités, et pour ceux qui souhaitent approfondir leurs connaissances. Nous proposons également une formation de 3 h (obligatoire) à l’utilisation d’une feuille de style pour la rédaction des thèses, en vue de leur mise en ligne – Limoges est site pilote dans ce domaine.

Frédéric Pirault
SCD de l’université de Limoges

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Le SCD de Lyon-I a consacré le numéro 2 (juin 2005) de sa revue BU.com à la formation des utilisateurs. http://butemp.univlyon1.fr:8080/uly1/statique/docs_lies/rechdoc/BU.com/bucom_no2.pdf

Pour actualiser ces articles, j’insisterai sur ce que cette intégration dans un cursus pédagogique de LMD apporte au SCD : assurer la responsabilité pédagogique d’un module permet de rentrer dans le monde des enseignants et de partager très concrètement les rythmes et préoccupations administratives, matérielles et pédagogiques de l’enseignement – calendrier universitaire, réservation de salles, inscrits en retard, absentéisme, objectifs pédagogiques, coordination avec les autres matières, évaluation, constitution des jurys, recrutement d’enseignants, coordination des équipes... Les contacts sur l’université en sont multipliés. Par le partage de cette expérience dans le SCD, ce bain, même à petite échelle, crée une passerelle entre deux mondes qui s’interpénètrent souvent fort peu, SCD et enseignement.

Arlette Mauries
SCD de l’université Lyon-I

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La bibliothèque universitaire Richter – droit, sciences économiques et gestion – s’adresse à un public d’environ 10 000 étudiants. Depuis quelques années, la formation à destination des étudiants et des enseignants et chercheurs a connu d’importants développements : un cursus obligatoire de 8 h de travaux pratiques d’initiation à la recherche documentaire a été intégré à la première année des étudiants de droit, supposant un effort considérable eu égard au nombre d’étudiants concernés (plus de 1 400). Présentant l’originalité de réunir comme enseignants des professionnels de la bibliothèque et des enseignants de l’UFR Droit, les enseignements offrent des aperçus sur les bases de la recherche documentaire en droit, les catalogues, les principales bases de données, etc. D’autres filières ont intégré des visites de la bibliothèque et des initiations à l’utilisation du catalogue dans leurs enseignements, même si beaucoup reste à faire, considérant le nombre important d’enseignements spécifiques dispensés. S’il fallait déterminer deux axes forts pour le développement, dans les prochaines années, de la formation des usagers, on pourrait retenir la formation des thésards à la gestion de l’archivage et de la diffusion électronique de leur thèse, et la formation, à distance ou en « présentiel », des usagers pour l’accès à distance à la documentation électronique, services en plein développement dans les universités de Montpellier.

Yves Desrichard
BIU de Montpellier – Droit, sciences économiques, gestion

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Une des principales problématiques de la formation des usagers à la recherche documentaire est l’intégration de ces formations dans le cursus des étudiants. C’est d’ailleurs l’un des objectifs du volet formation de notre contrat quadriennal. De plus, le temps accordé à la formation à la recherche documentaire n’étant pas suffisant pour nous permettre d’enseigner de manière approfondie, nous sommes obligés dans la plupart des cas de transmettre aux étudiants, par des exemples précis, une méthodologie simple de recherche documentaire. Nous essayons de solliciter leur curiosité afin qu’ils puissent utiliser l’offre documentaire proposée. Par ailleurs, nous tâchons d’élargir l’offre de formation vers les doctorants et les enseignants-chercheurs. Nous souhaitons toucher les enseignants-chercheurs en les formant à des outils spécifiques qui répondent à leurs besoins – SciFinder Scholar, Scopus… Au sein de notre établissement, nous voulons proposer aux usagers des formations adaptées à leurs besoins documentaires tout en étant liées à la prescription des enseignants.

Aurore Petit
SCD de l’Institut national polytechnique de Lorraine

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Google, qui promet d’offrir un accès simple à « la bibliothèque universelle des savoirs » appartient à ce rêve de l’élève qui voudrait savoir sans fournir l’effort d’apprendre : peu importe les mots avec lesquels on l’interroge, Google répond et offre une sélection de références web, d’articles, etc. De manière moins visible pour la masse étudiante, il se développe une offre considérable en documentation numérique scientifique, documentation contrôlée dont les sources sont certaines. Or, pour s’informer et nourrir la réflexion, il faut pouvoir reconnaître la valeur des documents utilisés. Dans ce contexte, la formation vise à donner aux étudiants une méthode pour effectuer une recherche documentaire tout en les familiarisant aux outils de recherche. À la BIUSJ, les enseignements sont organisés dans le cadre de l’unité d’enseignement (UE) de « Méthode de travail universitaire (MTU) » en L1 ainsi que dans les Masters. Les enseignants de licence responsables de ces UE travaillent directement avec la bibliothèque universitaire. Une équipe de formateurs assure les enseignements, tandis que l’organisation matérielle et logistique est centralisée. La formation des usagers constitue un véritable succès : en 2005-2006, sur 1 600 étudiants inscrits en module MTU en licence, 985 étudiants ont été formés. Mais cette centaine d’heures d’enseignement, assurée principalement entre octobre et fin novembre, représente un important surcroît de travail pour les bibliothécaires formateurs et pour le responsable des formations. Sans la présence du personnel de monitorat de l’université et l’octroi d’heures de vacation de la BIUS, il serait impossible d’assurer cette moyenne de dix séances hebdomadaires. Durant le reste de l’année civile, l’investissement en temps de travail est également important : préparation des cours et exercices, formation aux bases de données, formation de formateurs, etc. Ainsi, pour poursuivre, développer et renforcer ces actions de formation dans le respect des objectifs fixés dans le contrat quadriennal 2005-2008, il faudra prévoir la mise en place de moyens matériel, logistique et personnel qui permettront à la bibliothèque d’augmenter le nombre des heures de cours. Les bibliothèques universitaires ont un rôle capital à jouer dans l’accès à l’information et aux savoirs. L’écrivain américain Alvin Toffler, amateur de l’ère numérique, prévoit que « l'illettré du futur ne sera pas celui qui ne sait pas lire, ce sera celui qui ne sait pas comment apprendre. »

Adrienne Cazenobe
BIUS Jussieu

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L’offre de formation de la bibliothèque au niveau de la licence (L1, L2, L3) s’inscrit dans un dispositif d’intégration et de prise en compte dans les cursus et privilégie les associations avec les enseignements disciplinaires existants. La plupart des formations sont donc assurées en enseignement intégré (cours et TD) pour des groupes compris entre 10 et 20 étudiants en moyenne. La durée est un facteur déterminant d’efficacité qui favorise la prise en compte dans les cursus : entre 6 et 10 heures pour le 1er niveau (L1), entre 9 h et 20 h pour le 2e niveau (L2, L3) et (à terme) entre 6 et 9 heures pour le 3e niveau (M1, M2). L’un des principes déterminants consiste à limiter le nombre de cours magistraux. En effet, il est indispensable que les étudiants puissent manipuler les différents outils. Dans ce sens, nous leur proposons un certain nombre de travaux pratiques à réaliser pendant et en dehors des séances de formation, avec parfois un travail personnel de recherche d’information contextualisée dans une discipline scientifique (rapport de recherche documentaire à rendre aux bibliothécaire et rapport scientifique à rendre aux enseignants). Alors que les formations du niveau de la licence sont désormais ancrées dans les cursus, le temps manque pour construire des offres susceptibles d’intéresser les enseignants et étudiants en Master. On peut dire qu’une majorité de la communauté universitaire n’a pas conscience que les techniques de recherche d’information constituent un savoir permettant d’améliorer significativement l’efficacité des étudiants.

Yves Goubatian
SCD de l’université Paris-XI – section Sciences

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La formation des usagers : une approche par les outils. La formation des usagers à la recherche documentaire suit l’évolution des modes d’accès à l’information scientifique et technique au SCD de l’Université Louis-Pasteur. La mise en place depuis février 2005 de la « Bibliothèque virtuelle de l’ULP » (http://doculp.u-strasbg.fr/), son portail documentaire avec recherche fédérée, fournit un nouvel outil de recherche à valeur ajoutée, sur lequel s’appuient désormais toutes les formations d’utilisateurs (depuis l’année 1 de licence, au sein du module de Méthodologie du travail universitaire, aux Masters). La récente acquisition d’un outil de gestion électronique de documents (GED) permettra aussi d’ajouter la maîtrise de ces ressources pédagogiques à la formation.

David Vivarès
SCD de l’université Strasbourg-I

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Le SCD de l’Université François-Rabelais s’est engagé, depuis 2004, avec le soutien de la SDBIS, dans un projet innovant dans le domaine de la formation des usagers. Deux principes ont guidé notre action, d’une part une formation pointue de tuteurs documentaires et d’autre part une grande proximité dans la préparation avec les enseignants dans le but d’aider à la réussite des nouveaux étudiants. La formation des tuteurs se fait dans le cadre d’une unité d’enseignement (UE) libre « recherche documentaire » proposée par le SCD aux étudiants de M1. Une double finalité anime ce module : acquérir la méthodologie de la recherche documentaire dans sa discipline et permettre de devenir tuteur documentaire à la rentrée universitaire suivante. La formation de 18 h est dispensée par les personnels des bibliothèques, s’y ajoute un support de cours en ligne avec des exercices. Un examen de 2 h permet de valider l’UE et d’opérer une première sélection des futurs tuteurs. Dans un second temps, les tuteurs suivent en septembre une formation-action de deux jours sur la gestion de groupe, les contenus théoriques et pratiques à transmettre, les matériels à utiliser. Le principal atout de notre proposition est de ne jamais se placer en concurrence avec les enseignements disciplinaires mais de proposer notre expertise et de rester sur la recherche documentaire. L’avantage est de se placer ainsi totalement dans le cursus avec un fonctionnement en demi groupe avec les enseignants (une partie en TD avec l’enseignant, une autre à la BU). Au premier semestre 2006, nous avons ainsi atteint l’intégralité des départements d’histoire, histoire de l’art, sociologie, espagnol et lettres modernes. Près de 900 étudiants ont reçu, suivant les disciplines, des formations de 2 h à 6 h en BU et salle informatique. Une meilleure autonomie des lecteurs et une satisfaction des enseignants sur la qualité des recherches documentaires sont les premiers signes d’un essai transformé pour le SCD de Tours.

Jérôme Poumeyrol
SCD de l’université de Tours – section Lettres et sciences humaines

Citer cet article

Référence papier

Christine Fleury, Isabelle Mauger et Laurent Piquemal, « Paroles de formateurs », Arabesques, 45 | 2007, 10-12.

Référence électronique

Christine Fleury, Isabelle Mauger et Laurent Piquemal, « Paroles de formateurs », Arabesques [En ligne], 45 | 2007, mis en ligne le 01 juillet 2022, consulté le 02 septembre 2025. URL : https://publications-prairial.fr/arabesques/index.php?id=3025

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Christine Fleury

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